T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S
3ème chambre 3ème section
No RG :
06/09299
No MINUTE :
Assignation du :
15 Juin 2006
JUGEMENT
rendu le 04 Juillet 2007
DEMANDERESSE
S.A.S. MISS EUROPE ORGANISATION, anciennement dénommée MONDIAL EVENTS ORGANISATION, représentée par son Président, M. Xavier X...,
...
75017 PARIS
représentée par Me Jean-Philippe DESTREMAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P542
DÉFENDEURS
Monsieur Michel Y..., pris tant en son nom personnel qu'ès-qualités de président de l'association Miss Francophonie
domicilié : chez Madame Geneviève Y...
...
75018 PARIS
S.A.R.L. ABYX
16 rue Rodier
75009 PARIS
représentées par Me Rémy BIJAOUI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C.253
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision
Agnès THAUNAT, Vice-Président
Michèle PICARD, Vice-Président,
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, lors des débats et Mme BELLON lors du prononcé signataire de la décision
DEBATS
A l'audience du 15 Mai 2007
tenue en audience publique
JUGEMENT
Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort
FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES:
La société MISS EUROPE ORGANISATION, anciennement dénommée Mondial Events Organisation est titulaire de deux marques françaises MISS EUROPE.
La société Miss Europe Organisation organise régulièrement depuis 2003 des concours de beauté auxquels se présentent des candidates pour chaque pays européen. La lauréate qui doit être âgée de 18 à 25 ans non révolu, devient Miss Europe suivi du Millésime de l'année de l'élection.
La société MISS EUROPE ORGANISATION a eu connaissance de ce que se déroulerait le dimanche 18 juin 2006 dans un restaurant parisien un concours de beauté dont la lauréate recevrait le titre de Miss Europe Junior et serait conduite à participer à l'élection d'une Miss Europe Junior selon une manifestation qui devait se dérouler à Prague et regrouper les candidates des pays participants, lesquelles devaient avoir entre 15 et 20 ans.
La manifestation parisienne était présentée sur le site internet "www.missfrancophonie.org "avec comme responsable M. Michel Y... .
Par acte du 15 juin 2006, la société MISS EUROPE ORGANISATION assignait M. Michel Y... et la société ABYX en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
Par des écritures du 26 octobre 2006, la société MISS EUROPE ORGANISATION se désistait de ses demandes à l'encontre de la société ABYX, cette dernière n'ayant pris aucune écriture avant ce désistement.
Par ordonnance du 29 novembre 2006, le juge de la mise en état constatait ce désistement et l'extinction de l'instance à l'encontre de la société ABYX.
Aux termes de ses dernières conclusions du 18 avril 2007, la société MISS EUROPE ORGANISATION demande au tribunal , au visa des articles L 713-3 et suivants du Code de Propriété Intellectuelle et 1382 du code civil de:
-dire que M. D... a commis des actes de contrefaçon de la marque "MISS EUROPE" pour désigner un concours de beauté sous la dénomination "Miss Europe Junior" ainsi que des actes de concurrence déloyale et parasitaire en se plaçant dans son sillage,
-condamner M. Y... à lui payer une somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts du chef de la contrefaçon et celle de 50.000 euros du chef de la concurrence déloyale ainsi qu'une somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ,
et ce, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et l'autorisation de publication de la décision à intervenir.
M. Y... dans ses dernières écritures du 2 mars 2007 demande le débouté des demandes aux motifs qu'il n'est que le délégué pour la France de la société PORTALMEDIAS , société tchèque , titulaire via ses animateurs de la marque "MISS EUROPE JUNIOR" déposée le 10 octobre 2003 et qu'il doit à ce titre sélectionner les candidates françaises devant concourir à l'élection à Prague d'un Miss Europe Junior; que cette manifestation se déroule depuis 2003 sans que la demanderesse n'ait poursuivi en contrefaçon les titulaires de la marque "MISS EUROPE JUNIOR". A titre subsidiaire, le défendeur soutient qu'aucun préjudice n'est démontré et qu'une réparation d'un montant symbolique s'impose. En tout état de cause, M. Y... sollicite l'allocation d'une somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La clôture est intervenue le 7 mai 2007.
SUR CE,
*sur le rejet de certaines pièces:
Il ressort du bordereau figurant en annexe des dernières écritures de M. Y... que celui-ci avait produit à cette date deux pièces.
Huit nouvelles pièces ayant été communiquées par le défendeur postérieurement à la clôture, il y a lieu de les écarter des débats en application de l'article 783 du Nouveau Code de Procédure Civile .
*sur les droits de la société MISS EUROPE ORGANISATION:
La demanderesse justifie par la production des certificats d'identité correspondant être titulaire :
-d'une marque française semi-figurative MISS EUROPE déposée le 27 juin 1986 et enregistrée sous le no 1360812 pour désigner notamment l'organisation de concours. Cette marque régulièrement renouvelée est constituée de l'élément dénominatif MISS EUROPE surmonté d'une petite couronne stylisée;
-d'une marque française verbale MISS EUROPE déposée le 26 septembre 1984 et enregistrée sous le no 1284997 pour désigner notamment les services d' "Education et divertissement".
*sur la contrefaçon:
M. Y... ne conteste pas qu'il était en charge d'organiser la sélection des candidates françaises pour le concours MISS EUROPE-JUNIOR 2006 organisé à Prague et que pour ce faire, il a organisé une "finale" le dimanche 18 juin 2006 à Paris en faisant l'usage de la dénomination "MISS EUROPE-JUNIOR".
Le tribunal relève qu'il importe peu que M. Y... ait été autorisée par une société tierce à exploiter la dénomination "MISS EUROPE-JUNIOR" dès lors qu'il ne justifie pas que cette dénomination a été déposée à titre de marque française ou internationale visant la France à une date antérieure à celles du dépôt des deux marques qui lui sont opposées et qu'il l'exploite en vertu d'une licence régulièrement publiée.
Le signe argué de contrefaçon étant différent des signes déposés au titre des deux marque rappelées ci-avant, c'est au regard de l'article L 713-3 du Code de Propriété Intellectuelle qui dispose que sont interdits , sauf autorisation du propriétaire s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public ...b)l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée , pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement que doit s'apprécier le grief de contrefaçon.
Il est constant par ailleurs que le risque de confusion doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents de l'espèce. Cette appréciation globale doit en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause être fondée sur l'impression d'ensemble produites par les marques en tenant compte notamment des éléments distinctifs et dominants de celles-ci .
Relevant :
-sur les produits: qu'ils sont soit similaires soit identiques ( divertissement; organisation de concours/ organisation d'un concours de beauté);
-sur les signes: que le signe incriminé reproduit la marque française no 1284997 et l'élément dénominatif dominant et distinctif de la marque no 1360812 ,
le tribunal considère que le risque de confusion pour le public concerné à savoir le grand public , amateur de concours de beauté est certain, le signe second MISS EUROPE-JUNIOR apparaissant comme une déclinaison pour les jeunes adolescents et adultes du concours MISS EUROPE, organisé depuis 2003 par la société demanderesse.
Dans ces conditions , la contrefaçon de marque est constituée.
*sur la concurrence déloyale et parasitaire:
La société demanderesse fait grief à ce titre d'avoir imité sa dénomination sociale afin de se glisser dans son sillage et de profiter de la notoriété attachée aux élections de Miss Europe ainsi que d'avoir utilisé le terme "officiellement" dans ses courriers électroniques induisant en erreur les tiers sur la reconnaissance supposée de la manifestation.
La société demanderesse justifiant avoir adopté la dénomination sociale "Miss Europe Organisation" depuis le 16 juin 2003 et exploité cette dénomination dans le cadre de l'organisation de concours de beauté "Miss Europe" depuis lors, le tribunal considère que l'exploitation pour désigner un concours de beauté , de la dénomination "Miss Europe-Junior" imitant cette dénomination sociale constitue de la part de M. Y... des actes de concurrence déloyale , la confusion avec les activités de la demanderesse étant certaine.
S'agissant de l'utilisation du terme "officiel", le tribunal considère qu'il n'est pas fautif, s'agissant d'un adjectif couramment utilisée pour désigner un candidat national à une compétition internationale.
*sur les mesures réparatrices:
Eu égard à la notoriété des marques contrefaites , le tribunal considère qu'une indemnité de 15.000 euros réparera le préjudice subi de ce chef par la société demanderesse.
L'exploitation de la dénomination contrefaisante ayant également entraîné un désordre de nature commerciale au sein de la société MISS EUROPE ORGANISATION, une indemnité de 10.000 euros lui sera allouée de ce chef.
Ces condamnations réparant l'intégralité du dommage cause, la publication de la présente décision n'est pas nécessaire.
En revanche, l'équité commande d'allouer à la société demanderesse une indemnité de 6000 euros au titre des frais irrépétibles supportées par elle.
Eu égard à la nature de l'affaire, il y a lieu d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire.
PAR CES MOTIFS LE TRIBUNAL ,
statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort ,
sous le bénéfice de l'exécution provisoire,
Ecarte des débats les pièces numérotées de 3 à 10 et produites par M. Y... postérieurement à l'ordonnance de clôture,
Dit que M. Y... en présentant un concours de beauté sous la dénomination "MISS EUROPE-JUNIOR" sans l'autorisation de la société MISS EUROPE ORGANISATION a commis des actes de contrefaçon par imitation des marques françaises no 1360812 et 1284997 et des actes de concurrence déloyale au détriment de cette dernière ,
Condamne M. Y... à payer à la société MISS EUROPE ORGANISATION une indemnité de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts du chef de la contrefaçon de marque et celle de 10.000 euros du chef des actes de concurrence déloyale ainsi que la somme de 6000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ,
Déboute M. Y... du surplus de ses demandes,
Condamne la société MISS EUROPE ORGANISATION aux dépens,
Fait application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la SELARL DESTREMAU ASSOCIES , société d' avocats, pour la part des dépens dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu préalablement provision,
Fait et jugé à Paris le 04 Juillet 2007
Le Greffier Le Président