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15/12/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006947324

France | France, Tribunal de grande instance de narbonne, Ct0040, 15 décembre 2005, JURITEXT000006947324


TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

MINUTE N JUGEMENT DU 15 Décembre 2005 AFFAIRE N 03/00305 AFFAIRE :

Paul X... C/ SA CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS, SA MEDICALE DE FRANCE, Norbert Y..., LE SOU MEDICAL, CPAM DE L'AUDE, MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE

APPEL



du Le Copie exécutoire délivrée à Copie à 2 copies service expertises copie dossier

JUGEMENT

JUGEMENT prononcé en audience publique L'AN DEUX MIL CINQ ET LE QUINZE DECEMBRE,

LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de NARBONNE (Aude), dans l'

affaire pendante : ENTRE : Monsieur Paul X... né le 16 Octobre 1931 à HOMPS (11200) demeurant 16 rue Fr...

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

MINUTE N JUGEMENT DU 15 Décembre 2005 AFFAIRE N 03/00305 AFFAIRE :

Paul X... C/ SA CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS, SA MEDICALE DE FRANCE, Norbert Y..., LE SOU MEDICAL, CPAM DE L'AUDE, MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE

APPEL

du Le Copie exécutoire délivrée à Copie à 2 copies service expertises copie dossier

JUGEMENT

JUGEMENT prononcé en audience publique L'AN DEUX MIL CINQ ET LE QUINZE DECEMBRE,

LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de NARBONNE (Aude), dans l'affaire pendante : ENTRE : Monsieur Paul X... né le 16 Octobre 1931 à HOMPS (11200) demeurant 16 rue Fresquel - 11100 NARBONNE représenté par SCP MOULY-PASZEK, avocats au barreau de NARBONNE, avocats postulant, Me Patrick DE LA GRANGE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ET : SA CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS dont le siège social est sis 44, Quai Vallière - 11100 NARBONNE

Paul X... conteste également l'évaluation du préjudice corporel faite par les experts. Il relève, à cet égard, que l'ITT ne peut être limitée aux 13 jours d'hospitalisation, ayant été soumis à un suivi médical très strict, ayant du s'adapter à la perte de vision de l'oeil gauche et ayant du avoir recours à l'aide de son épouse en qualité de tierce personne.

Il souligne l'insuffisance d'évaluation du pretium doloris au regard du traitement suivi et des souffrances endurées.

A titre subsidiaire, Paul X... demande que son préjudice corporel soit indemnisé comme suit : - préjudice soumis à recours :

* IPP : 25% 50.000,00 ç

* ITT : du 09 février 2000 à la date de consolidation au 20 novembre 2001, soit 22 mois 22.000,00 ç au titre de la gêne dans les actes de la vie quotidienne

- tierce personne : il rappelle que la Cour de Cassation a posé deux principes : l'absence de réduction de l'indemnité en cas d'assistance par un membre de la famille,

- tierce personne : il rappelle que la Cour de Cassation a posé deux principes : l'absence de réduction de l'indemnité en cas d'assistance par un membre de la famille, l'absence d'exigence de justification des frais, l'indemnité étant appréciée en fonction du besoin réel de la victime

* pendant la période d'ITT de 22 mois : 10 ç x 2 heures x 30 jours x

22 mois 13.200,00 ç

représentée par SCP BONARELLI-BERGON, avocats au barreau de NARBONNE, avocats postulant, Me Philippe GRILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant SA MEDICALE DE FRANCE dont le siège social est sis 27, Avenue Claude Vellefaux - 75010 PARIS représentée par SCP BONARELLI-BERGON, avocats au barreau de NARBONNE, avocats postulant, Me Philippe GRILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant Monsieur Norbert Y..., Docteur demeurant Place Emile Dijon - 11100 NARBONNE représenté par Me Paola BELLOTTI, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant, Me Katia FISCHER, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant LE SOU MEDICAL dont le siège social est sis 130, Rue du Faubourg - 75013 PARIS représenté par Me Paola BELLOTTI, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant, Me Katia FISCHER, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant CPAM DE L'AUDE dont l'antenne est Avenue de Lattre de Tassigny à Narbonne dont le siège social est sis Sis 2 Allée de Bezons - 11000 CARCASSONNE représentée par SCP PECH DE LACLAUSE-GONI, avocats au barreau de NARBONNE, avocats plaidant

MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE dont le siège social est sis 10, Rue Alfred de Musset - 11000 CARCASSONNE non comparante, ni représentée

Après que la cause eut été débattue en audience publique du 20 octobre 2005, devant Madame Catherine LELONG, Président du Tribunal de Grande Instance de Narbonne, assistée de Madame Monique Z..., de Madame Evelyne MARTIN, juges, et assistées de Madame Evelyne A..., greffier.

Le Tribunal, composé des Magistrats susnommées, a délibéré et le jugement, rédigé par Madame Monique Z..., Vice-Président, a été rendu à l'audience publique de ce jour par Madame Catherine LELONG, Président, assistée de Madame Chantal B..., greffier.

[* du 20 novembre 2001 à ce jour : 10 ç x 2 heures x 30 jours x 25 mois 15.000,00 ç

*] pour l'avenir : 10 ç x 2 heures x 400 jours (compte tenu des congés payés) x 91.572 ç (selon le barème TD 88-90) 73.257,60 ç TOTAL 101.457,60 ç

- préjudice personnel :

[* préjudice d'agrément 25.000,00 ç

*] pretium doloris 8.000,00 ç

[* préjudice moral 10.000,00 ç

*] remboursement des frais engagés (expertise) 1.305,44 ç

En toute hypothèse, Paul X... sollicite la somme de 5.000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans des conclusions récapitulatives no2, la CLINIQUE LES GENETS et la S.A. MEDICALE DE FRANCE soulèvent, à titre principal, l'application de la loi KOUCHNER du 04 mars 2002 et la saisine obligatoire par le demandeur de la Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation du LANGUEDOC ROUSSILLON.

Les défendeurs exposent que la loi du 04 mars 2002 a posé des problèmes d'application dans le temps au regard de la contradiction entre l'article 101 prévoyant l'application aux infections

consécutives à des actes médicaux réalisés au plus tôt 6 mois avant sa publication, soit à partir du 05 septembre 2001, et l'article 98 prévoyant une application aux procédures en cours. Ils rappellent que la Cour de Cassation, dans son avis du 22 novembre 2002, s'est prononcée pour une application aux actes médicaux réalisés depuis le 05 septembre 2001 ainsi qu'aux actes médicaux réalisés avant cette date à condition que la procédure au fond ait été engagée avant la publication de la loi. Ils soulèvent que l'article 3 de la loi ABOUT du 30 décembre 2002 aux termes duquel la loi KOUCHNER s'applique aux FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS DES PARTIES

Le 09 février 2000, à la CLINIQUE LES GENETS à NARBONNE, Paul X... a été opéré en ambulatoire d'une cataracte à l'oeil gauche par le Docteur Y..., ophtalmologue qui le suit depuis plusieurs années pour un glaucome.

La consultation faite auprès du Docteur Y... le lendemain n'a rien révélé de particulier.

Le 14 février 2000, Paul X... a ressenti d'importantes brûlures au niveau de l'oeil gauche et, les jours suivants, l'oeil a gonflé.

Lors de la consultation du 17 février 2000, le Docteur Y... l'a fait admettre en urgence au service d'ophtalmologie de l'HOPITAL DE RANGUEIL à TOULOUSE où il a été hospitalisé jusqu'au 25 février 2000. Les prélèvements intra-oculaires ont révélé la présence d'un staphylocoque doré qui a nécessité une injection intra-vitréenne quotidienne d'antibiotique durant cinq jours puis un suivi très rigoureux.

Paul X... a perdu la vision de l'oeil gauche.

Par ordonnance de référé en date du 31 juillet 2001, une expertise médicale a été ordonnée et confiée à un collège d'experts composé des Docteurs ARNAUD, MAINGUY et PHILIPPOT.

Les experts qui ont déposé leur rapport le 11 décembre 2001 retiennent que le cas de Paul X... est tout à fait isolé et que cet accident ne peut être imputé aux

conditions d'hospitalisation ou aux conditions d'opération de l'intéressé. Ils concluent à un aléa thérapeutique puisque, pour la période du 1er janvier au 31 mars 2000, sur 480 interventions de cataracte, on ne retient qu'une seule infection, celle de Paul X... Ils écartent toute faute du Docteur Y... ou de la clinique "LES GENETS", les actes médicaux, les examens prescrits, les conseils prodigués et les opérations effectuées infections consécutives à des interventions réalisées à compter du 05 septembre 2001, même si elles font l'objet d'une instance en cours, à moins qu'une décision de justice irrecevable n'ait été prononcée, ne modifie pas les solutions précédemment retenues.

A titre subsidiaire, les défendeurs sollicitent qu'il soit demandé un avis à la Cour de Cassation en application des articles L.151-1 et R.151-1 du Code de l'Organisation Judiciaire.

A titre infiniment subsidiaire au fond, la CLINIQUE LES GENETS et la S.A. MEDICALE DE FRANCE concluent au débouté en l'absence d'infection nosocomiale, les experts ayant retenu l'aléa thérapeutique.

Elles sollicitent la somme de 760 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans leurs conclusions récapitulatives, le Docteur Norbert Y... et le SOU MEDICAL concluent, à titre principal, au débouté.

S'agissant de l'obligation d'information, ils rappellent les dispositions de l'article L.1111-2 du Code de la Santé Publique, issu de la loi du 04 mars 2002, et qui imposent au médecin de donner au patient une information complète, claire et appropriée sur les risques encourus. Ils exposent que Paul X... est suivi par le Docteur Y... depuis plusieurs années pour un glaucome chronique et une surveillance de diabète. Ils indiquent que l'intéressé a développé une cataracte nucléaire plus importante du côté gauche occasionnant une gêne dans la conduite automobile et que c'est à juste titre que l'intervention chirurgicale a été préconisée. Ils soutiennent que le traitement préopératoire pratiqué chez les diabétiques a été réalisé et que le Docteur

Y... a satisfait à son obligation légale d'information. Ils se prévalent des conclusions du rapport d'expertise qui exclut toute faute médicale.

S'agissant de l'infection nosocomiale, les défendeurs font valoir que les experts ont retenu l'existence d'un aléa thérapeutique, le cas de l'ayant été selon les règles de l'art, les données acquises de la science et la pratique de la médecine.

Les experts évaluent comme suit le préjudice corporel de Paul X... : - date de consolidation : 20 novembre 2001 - ITT de 13 jours correspondant aux hospitalisations du 17 au 25 février 2000 et du 04 au 08 mai 200 - IPP : 25% - pretium doloris : 2/7 - préjudice esthétique : 0/7 - préjudice d'agrément :

laisse à l'appréciation du tribunal

Par actes d'huissier en date des 10 et 13 décembre 2002 et 03 février 2003, Paul X... a fait assigner la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DYALISE LES GENETS et sa compagnie d'assurances, la S.A. MEDICALE DE FRANCE, le Docteur Norbert Y... et sa compagnie d'assurances, le SOU

MEDICAL, la CPAM de l'AUDE et la MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE pour que, au visa de l'article 1147 du Code Civil et avec exécution provisoire : - il soit jugé qu'il a contracté une infection nosocomiale lors de l'intervention chirurgicale pratiquée le 09 février 2000, - le Docteur Y... et la CLINIQUE LES GENETS soient déclarés solidairement responsables de cette infection tenant leur obligation de sécurité de résultat, - les défendeurs soient condamnés solidairement à lui payer les sommes suivants avec application de l'article 1154 du Code Civil :

* ITT 350 ç

* IPP 50.000 ç

* pretium doloris 4.500 ç

* préjudice esthétique 2.000 ç

* préjudice d'agrément 7.500 ç

Il sollicite, en outre, la somme de 1.500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Paul X... étant isolé.

A titre subsidiaire, sur le préjudice corporel, le Docteur Y... et le SOU MEDICAL offrent l'indemnisation suivante : - IPP 38.125 ç - pretium doloris de 1.525 à 1.830 ç

Ils concluent à la réduction des demandes au titre de l'ITT, de la tierce personne, du préjudice moral et au débouté de la demande au titre du préjudice d'agrément.

Le Docteur Y... et le SOU MEDICAL sollicitent, en outre la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La CPAM de l'AUDE indique que l'état définitif des prestations servies s'élève à 3.481,98 ç. Elle poursuit à l'encontre du responsable du dommage le paiement de cette somme, outre la somme de 760 ç en application de l'article L.454-1 du Code de la Sécurité Sociale.

Elle sollicite également la somme de 500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE n'a pas constitué avocat. L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er mars 2005. MOTIFS DE LA

DECISION

SUR L'APPLICATION DE LA LOI DU 04 MARS 2002

Attendu que, suite à la publication de la loi du 04 mars 2002, une difficulté est apparue quant à son application dans le temps et qu'au vu des articles 101 et 98, la Cour de Cassation, dans un avis du 22 novembre 2002, a retenu que la loi devait s'appliquer aux actes médicaux réalisés depuis le 05 septembre 2001 et à ceux réalisés avant cette date à condition que la procédure au fond ait été engagée avant la promulgation de la loi ;

Attendu que l'article 3 de la loi du 30 décembre 2002 a Dans des conclusions récapitulatives no2, Paul X..., à titre liminaire, écarte l'application à l'espèce de la loi du 04 mars 2002. Il fait valoir que l'article 3 de la loi du 30 décembre 2002 a définitivement réglé le problème de l'application dans le temps de la dite loi et qu'il est désormais acquis que la loi du 04 mars 2002 qui met à la seule charge des établissements de soins une obligation de sécurité de résultat, ne s'applique pas aux infections nosocomiales dont le fait

générateur est antérieur au 05 septembre 2001. Il fait valoir que cette disposition condamne l'avis émis par la Cour de Cassation le 22 novembre 2002 et relève qu'en l'occurrence, l'intervention chirurgicale litigieuse date du 09 février 2000. Il soutient, en conséquence, qu'il convient d'appliquer la jurisprudence antérieure mettant à la charge des médecins et des établissements de soins une obligation solidaire de sécurité en matière d'infection nosocomiale. Il se prévaut des décisions judiciaires rendues en ce sens par application des articles 101 de la loi du 04 mars 2002 et 3 de la loi du 30 décembre 2002. Il ajoute qu'en toute hypothèse, la saisine de la Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation, en application de l'article L.1142-19 du Code de la Santé Publique, demeure facultative, même pour une infection nosocomiale contractée postérieurement au 05 septembre 2001.

A titre principal, Paul X... conclut à une mesure de contre expertise portant tant sur l'origine de l'infection que sur la détermination du préjudice corporel, confiée à un collège d'experts, délocalisé et constitué d'un spécialiste en

ophtalmologie et d'un spécialiste en infection, inscrits sur la liste des experts définitivement réglé cette difficulté ; qu'il prévoit que "les dispositions du titre IV du livre 1er de la première partie du Code de la Santé Publique issues de l'article 98 de la présente loi... s'appliquent aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisés à compter du 05 septembre 2001, même si ces accidents médicaux, affection iatrogènes et infections nosocomiales font l'objet d'une instance en cours, à moins qu'une décision de justice irrévocable n'ait été prononcée" ;

Attendu que ce texte est parfaitement clair et qu'une demande d'avis auprès de la Cour de Cassation ne se justifie pas ; qu'il en ressort, sans aucune ambigu'té, que la loi du 04 mars 2002 est applicable aux infections nosocomiales dues à des actes médicaux réalisés à compter du 05 septembre 2001 ; qu'en revanche, elle ne s'applique pas aux infections nosocomiales dont le fait générateur est antérieur au 05 septembre 2001 ;

Attendu qu'en l'espèce, l'intervention chirurgicale litigieuse est en date du 09 février 2000 et que la loi du 04 mars 2002 n'est donc pas applicable à la cause ; qu'en toute hypothèse, cette loi ne pouvait trouver application même au regard de l'avis de la Cour de Cassation, l'instance au fond ayant été engagée postérieurement au 05 septembre 2001 ;

Attendu, en conséquence, que la jurisprudence antérieure qui met à la charge des médecins et des établissements de soins une obligation de sécurité de résultat en matière d'infection nosocomiale doit trouver application.

SUR LA DEMANDE D'EXPERTISE

Attendu que la rapport d'expertise établi par le collège d'experts

judiciaires de la Cour d'Appel de PARIS.

Paul X... conteste les conclusions des experts judiciaires qui retiennent l'existence d'un aléa thérapeutique et écarte l'infection nosocomiale. Il s'étonne qu'ils concluent à l'existence d'un lien direct et certain entre l'infection survenue suite à l'intervention chirurgicale du 09 février 2000 et ses préjudices actuels tout en refusant de qualifier l'infection de nosocomiale au prétexte que son cas est isolé. Il fait valoir que ces conclusions sont en totale contradiction avec la définition de l'infection nosocomiale retenue par le Comité Technique des Infections Nosocomiales et avec la circulaire du 13 octobre 1988. Il soutient que la définition de l'infection nosocomiale ne prend pas en compte l'existence ou non d'une épidémie. Il rappelle qu'il a présenté une infection due à un staphylocoque doré dans les 8 jours suivant l'intervention du 09 février 2000 et que ceci correspond exactement à la définition de l'infection nosocomiale retenue par le Comité Technique National des Infections Nosocomiales. Il se prévaut de conclusions d'expertises judiciaires rendues dans des espèces identiques.

Paul X... ajoute que les experts ne se sont pas prononcés sur les examens complémentaires préalables à l'intervention que le Docteur Y... et la CLINIQUE LES GENETS auraient du pratiquer.

Il rappelle qu'il était suivi par le Docteur

Y... depuis plusieurs années pour un glaucome chronique à l'oeil gauche, l'acuité visuelle de l'oeil droit revêtant dès lors un caractère précieux. Il soutient que le Docteur Y... qui n'a pas prescrit de bilan bactériologique préopératoire a manqué à son devoir de prodiguer des soins consciencieux et attentifs au patient. Il ajoute qu'il a également manqué à son devoir d'information sur les complications infectieuses éventuelles liées à l'intervention.

composé d'ophtalmologues permet à la juridiction de céans d'avoir connaissance des éléments médicaux relatifs à l'état de santé de Paul X..., à l'intervention du 09 février 2000 et à ses suites ; que le tribunal n'est pas lié par les conclusions des experts et peut statuer en l'état sans qu'il soit nécessaire, comme le demande à titre principal Paul X..., d'ordonner une contre expertise.

SUR L'INFECTION NOSOCOMIALE

Attendu que, le 09 février 2000, à la CLINIQUE LES GENETS, Paul X... a été opéré, en ambulatoire, d'une

cataracte à l'oeil gauche par le Docteur Y..., ophtalmologue ;

Que le lendemain de l'intervention, le Docteur Y... a examiné Paul X... et que l'état local de son oeil gauche était sans particularité et ne présentait aucun signe inquiétant ; qu'un rendez vous a été donné pour le 17 février 2000 ;

Attendu qu'à partir du 14 février au soir, Paul X... a commencé à ressentir des brûlures au niveau de l'oeil gauche ; que la douleur n'a cessé de croître et que l'oeil s'est mis à enfler ; que, lors de la consultation du 17 février 2000, le Docteur Y... a fait hospitaliser son patient en urgence à l'hôpital de RANGUEIL à TOULOUSE ;

Attendu que les prélèvements intra-oculaires pratiqués le jour même ont révélé la présence d'un staphylocoque doré ;

Attendu que Paul X... a perdu toute

acuité visuelle de l'oeil gauche ;

Attendu que le collège d'experts, tout en retenant que cet état ophtalmologique fait suite à l'intervention chirurgicale du 09 février 2000, écarte l'hypothèse d'une infection nosocomiale dans la mesure où le cas de Paul X... est isolé, seule son infection pouvant être relevée sur les 480 interventions ophtalmologiques pratiquées à la CLINIQUE LES GENETS de janvier à avril 2000 ; qu'il conclut à un aléa thérapeutique ;

Attendu, cependant, qu'aucune des définitions admises de l'infection nosocomiale ne pose comme critère celui de l'épidémie ou, à tout le moins, de la répétition dans un même service ;

Que le Comité Technique de l'Infection Nosocomiale la définit comme suit : "une infection est dite nosocomiale si elle apparaît au cours ou à la suite d'une hospitalisation et si elle était absente à l'admission à l'hôpital ; que, lorsque la situation précise à l'admission n'est pas connue, un délai d'au moins 48 heures après l'admission est communément accepté pour distinguer une infection

d'acquisition nosocomiale d'une infection communautaire ; toutefois, il est recommandé d'apprécier, dans chaque cas douteux, la plausibilité du lien causal entre hospitalisation et infection ; pour les infections du site opératoire, on considère comme nosocomiales les infections survenues dans les 30 jours suivant l'intervention, ou s'il y a mise en place d'une prothèse ou d'un implant, dans l'année qui suit l'intervention" ;

Attendu, également, que la circulaire du 13 octobre 1988 appliquant les dispositions du décret du 06 mai 1988 relatif à l'institution des Comités de lutte contre les infections nosocomiales, retient comme nosocomiale "toute maladie provoquée par les micro organismes, contractée dans un établissement de soins par tout patient après son admission, soit pour hospitalisation, soit pour recevoir des soins ambulatoires, que les symptômes apparaissent lors du séjour à l'hôpital ou après ; que l'infection soit reconnaissable aux plans clinique ou microbiologique, données sérologiques comprises ou encore les deux à la fois ;

Attendu qu'en l'espèce, l'infection dont a souffert Paul

X... est apparue sur le site opératoire dans les 6 jours qui ont suivi l'intervention et avant 30 jours ; qu'elle est due à un germe, à savoir un staphylocoque doré ;

Attendu qu'il s'agit donc bien d'une infection nosocomiale apparue suite à l'acte chirurgical, la circonstance que Paul X... ait été la seule victime sur la période considérée étant sans incidence ;

Attendu que, conformément à la jurisprudence antérieure de la Cour de Cassation applicable en l'espèce, les médecins et les établissements de soins sont tenus, en matière d'infection nosocomiale, à une obligation solidaire de sécurité de résultat ;

Attendu qu'il y a donc lieu de condamner solidairement la CLINIQUE LES GENETS et le Docteur Y..., in solidum avec leurs compagnies d'assurances respectives, la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, à réparer le préjudice subi par Paul X... suite à l'intervention chirurgicale du 09 février 2000 ;

Attendu que la responsabilité du Docteur Y... étant engagée au titre de l'infection nosocomiale, il n'est nul besoin de rechercher une éventuelle responsabilité au titre du défaut d'information.

SUR LE PREJUDICE DE PAUL X...

Attendu que le collège d'experts a retenu une ITT de 13 jours correspondant aux deux hospitalisations de Paul X... ; qu'aucun élément ne permet de retenir que cette période d'ITT a duré du jour de l'intervention litigieuse au 20 novembre 2001, date de la consolidation ;

Attendu que Paul X..., âgé de 69 ans au moment de l'intervention, est à la retraite et n'a subi aucune perte de revenus durant la période d'ITT qui doit être indemnisée au titre de la gêne dans les actes de la vie quotidienne ; qu'il y a lieu d'allouer la somme de

300 ç ;

Attendu que l'IPP est évaluée à 25% compte tenu du déficit visuel antérieur ; que, compte tenu de l'âge de l'intéressé, il y a lieu de fixer le point à 1.600 ç et d'allouer, en conséquence, la somme de 40.000 ç ;

Attendu que, même si les experts n'ont pas été saisis de ce point, il est manifeste que Paul X..., qui a perdu toute acuité visuelle à l'oeil gauche et dont l'oeil droit est largement déficitaire, ne peut plus assumer seul certaines taches de la vie quotidienne ; qu'en particulier, il ne peut plus se déplacer seul ; qu'il a besoin de l'assistance d'une tierce personne, en l'occurrence son épouse ; que l'évaluation de ce préjudice faite par l'intéressé apparaît adaptée, à savoir une assistance de 2 heures par jour pour un coût horaire de 10 ç ; qu'il y a donc lieu de faire entièrement droit à la demande à ce titre et d'allouer la somme de 101.457,60 ç après capitalisation du coût à venir ;

Attendu que le pretium doloris a été évalué à 2/7 compte tenu en particulier des douleurs endurées lors des injections intra-vitréennes d'antibiotiques ; qu'il y a lieu d'allouer, de ce chef, la somme de 2.500 ç ;

Attendu que Paul X... ne verse aucune

pièce justifiant d'un préjudice d'agrément particulier ; que, cependant, il ne peut plus conduire son véhicule automobile alors que précisément son opération de la cataracte était destinée à lui restituer une acuité visuelle suffisante pour la conduite automobile ; qu'il y a donc lieu de lui allouer à ce titre la somme de 1.500 ç ;

Attendu que, compte tenu de ces éléments, il y a lieu de condamner solidairement la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS et le Docteur Norbert Y..., in solidum avec la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, aux sommes suivantes au titre du préjudice corporel : préjudice personnel : - pretium doloris 2.500,00 ç - préjudice d'agrément 1.500,00 ç TOTAL 4.000,00 ç

Attendu que le préjudice moral n'est pas

Attendu que le préjudice moral n'est pas justifié et que la demande à ce titre doit être rejetée ;

Attendu que la demande au titre des frais d'expertise sera intégrée dans les dépens. SUR LA DEMANDE DE LA CPAM DE L'AUDE

Attendu que l'état définitif des prestations servies par la CPAM de l'AUDE s'élèvent à 3.481,98 ç au titre des frais d'hospitalisation et des frais médicaux et pharmaceutiques ;

Attendu qu'il y a lieu de condamner solidairement la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS et le Docteur Norbert Y..., in solidum avec la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, au paiement de cette somme, outre celle de 760 ç en application de l'article L.454-1 du Code de la Sécurité Sociale.

SUR LES DEMANDES ANNEXES

Attendu qu'il y a lieu de déclarer la présente décision opposable à la MUTUELLE GENERALE DE LA POLICE NATIONALE ;

Attendu que, compte tenu de l'ancienneté des faits, il y a lieu d'ordonner l'exécution provisoire à concurrence de 50% des sommes allouées ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du demandeur

les frais non compris dans les dépens et qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que l'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au bénéfice de la CPAM DE L'AUDE ;

Attendu que les défendeurs qui succombent supporteront les dépens qui comprendront le coût de l'expertise. PAR CES MOTIFS

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DECLARE la loi du 04 mars 2002 inapplicable à l'espèce.

DIT n'y avoir lieu à contre expertise.

DIT que Paul X..., suite à l'intervention chirurgicale du 09 février 2000, a été victime d'une infection nosocomiale.

CONDAMNE solidairement la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS et le Docteur Norbert Y..., in solidum avec la S.A. MEDICALE DE

FRANCE et le SOU MEDICAL, chacune de ces parties, personnes morales, étant prises en la personne de son représentant légal, à payer à Paul X... les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour : - CENT QUARANTE ET UN MILLE SEPT CENT CINQUANTE SEPT EUROS ET SOIXANTE CENTS (141.757,60 ç) au titre du préjudice corporel soumis à recours, - QUATRE MILLE EUROS (4.000 ç) au titre du préjudice personnel.

CONDAMNE solidairement la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS et le Docteur Norbert Y..., in solidum avec la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, chacune de ces parties, personnes morales, étant prises en la personne de son représentant légal, à payer à la CPAM DE L'AUDE les sommes de : - TROIS MILLE QUATRE CENT QUATRE VINGT UN EUROS ET QUATRE VINGT DIX HUIT CENTS (3.481,98 ç) au titre des prestations servies à Paul X..., - SEPT CENT SOIXANTE EUROS (760 ç) au titre de l'article L.454-1 du Code de Sécurité Sociale.

DECLARE la présente décision opposable à la MUTUELLE GENERALE DE LA

POLICE NATIONALE.

REJETTE le surplus des demandes.

ORDONNE l'exécution provisoire à concurrence de 50% des sommes allouées.

CONDAMNE solidairement la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS et le Docteur Norbert Y..., in solidum avec la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, chacune de ces parties, personnes morales, étant prises en la personne de son représentant légal, à payer à Paul X... la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 ç) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au bénéfice de la CPAM DE L'AUDE.

CONDAMNE la S.A. CLINIQUE MEDICO CHIRURGICALE ET DE DIALYSE LES GENETS, le Docteur Norbert Y..., la S.A. MEDICALE DE FRANCE et le SOU MEDICAL, chacune de ces parties, personnes morales, étant prises en la personne de son représentant légal, aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise et ce, avec

distraction au profit de la SCP MOULY-PASZEK. Le greffier,

Le président, C. B...

C. LELONG


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de narbonne
Formation : Ct0040
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947324
Date de la décision : 15/12/2005

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES

Aucune des définitions admises de l'infection nosocomiale ne posant comme critère celui de l'épidémie ou, à tout le moins, de la répétition dans un même service, la responsabilité du médecin est engagée au titre de l'infection nosocomiale, dès lors que l'infection est apparue à la suite de l'opération, indépendamment du fait qu'un collège d'expert ait conclu à un aléa thérapeutique en indiquant qu'il ne s'agissait que d'un cas isolé aux vues du grand nombre de patients opérés.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.narbonne;arret;2005-12-15;juritext000006947324 ?
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