29/07/2024
ARRÊT N°24/522
N° RG 21/02844 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OH5P
SC - CD
Décision déférée du 08 Juin 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de FOIX - 19/00581
P. [A]
[Z] [B]
C/
[L] [B]
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 2
***
ARRÊT DU VINGT NEUF JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANT
Monsieur [Z] [B]
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représenté par Me Martine ALARY de la SELARL ALARY & ASSOCIÉS, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE
Madame [L] [B]
[Adresse 9]
[Localité 15]
Représentée par Me Catherine PUIG, avocat au barreau D'ARIEGE
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :
C. DUCHAC, présidente
C. PRIGENT-MAGERE, conseiller
V. MICK, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M. TACHON
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par C. DUCHAC, présidente, et par M. TACHON, greffier de chambre.
EXPOSÉ DU LITIGE :
[K] [B] est décédé le [Date décès 7] 1987 à [Localité 11], en laissant pour lui succéder son épouse commune en biens, [W] [N], elle-même décédée le [Date décès 2] 2016 à [Localité 11]. De cette union, est né un enfant, [Z] [B].
Mme [W] [N] a bénéficié d'une donation entre époux le 22 mars 1977.
Dans le cadre de la succession de [K] [B], elle a opté, en sa qualité de conjoint survivant, pour la plus large quotité disponible entre époux, soit un quart en pleine propriété et trois-quarts en usufruit.
[W] [N] était par ailleurs bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie souscrit par [K] [B].
M. [Z] [B] a deux filles :
- Mme [L] [B], née le [Date naissance 10] 1977 de son premier mariage avec Mme [H],
- Mme [E] [B], née le [Date naissance 6] 2003 de son second mariage avec Mme [M], non concernée par le présent litige.
Mme [W] [N] a rédigé un testament olographe en date du 2 avril 2003, signé de sa main et ainsi libellé :
«Je soussigne, Madame [W] [V] [N], veuve non remariée de Monsieur [K] [B], née à [Localité 11] le [Date naissance 1] 1930, lègue par avantage, tous les droits que je possède sur une maison d'habitation avec dépendances et Jardin attenant, l'ensemble sis à [Adresse 12], en faveur de ma petite-fille, Mademoiselle [L] [B], née à [Localité 18] le [Date naissance 10] 1977,
Fait à [Localité 14] le 2 avril 2003 [signature de la testatrice ».
Mme [W] [N] a ensuite rédigé un codicille en date du 24 décembre 2011 en respectant les mêmes conditions de forme :
«Je soussigné Madame [W] [N] (...) lègue par avantage tous les droits que je possède sur la maison d'habitation (.) au [Adresse 4], tout le premier étage en faveur de ma petite fille Mademoiselle [L] [B], Fait à [Localité 11] le 24 décembre 2011[signature de la testatrice] ».
Par actes d'huissier délivrés les 25 et 26 mars 2014, M. [Z] [B] a fait assigner sa mère, sa fille [L] et plusieurs organismes de crédit et d'assurance, devant la présidente du tribunal de grande instance de Foix statuant en référé pour obtenir une mesure d'expertise, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, afin de déterminer les forces de la succession.
Par ordonnance du 3 juin 2014, la présidente du tribunal de grande instance de Foix a ordonné la mesure d'expertise.
Le rapport a été déposé 'en l'état', faute pour l'expert d'avoir obtenu les éléments demandés.
Par acte d'huissier délivré le 13 juin 2019, M. [Z] [B] a fait assigner, devant le tribunal de Grande Instance de Foix, Mme [L] [B], afin d'obtenir le partage judiciaire des successions de ses père et mère et un sursis à statuer sur la notion de recel successoral et d'atteinte à la réserve dans l'attente du rapport d'expertise.
Par jugement contradictoire en date du 8 juin 2021, le tribunal judiciaire de Foix a :
- vu les articles 815 et suivants, l'article 843 et l'article 970 du code civil,
- vu les articles L.132-12 et suivants du code des assurances,
- vu les articles 1360 et suivants du code de procédure civile,
- vu le testament du 2 avril 2003 et le codicille du 24 décembre 2011,
- rejeté la demande au titre du partage de la succession de M. [K] [B],
- ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et de partage des indivisions résultant de la succession de [W] [N], décédée le [Date décès 2] 2016 à [Localité 11],
- désigné pour y procéder, en qualité de notaire commis :
Maître [O], notaire à [Localité 15], [Adresse 5].
avec mission habituelle en la matière et notamment :
réunir les parties et recueillir leurs dires,
visiter et décrire sommairement les immeubles dépendant des indivisions successorales des consorts,
se faire remettre tout document utile à l'accomplissement de sa mission en quelques mains qu'elles se trouvent et en dresser un bordereau numéroté, en veillant à ce que les pièces qui lui sont remises soient également communiquées à chacune des parties, le notaire commis étant notamment autorisé à consulter le fichier FICOBA et à se faire remettre directement par les établissement bancaires, financiers et fiscaux tout document relatif aux comptes et placements dont les défunts étaient titulaires,
si un bien est occupé par un indivisaire à titre privatif, évaluer l'indemnité d'occupation correspondante,
fournir les éléments permettant d'apprécier les fruits générés par les biens indivis,
dresser un état liquidatif.
- dit que les opérations devront être menées en fonction des points tranchés suivants :
- rejeté la demande de M. [Z] [B] au titre de la nullité du testament olographe du 2 avril 2003 et du codicille du 24 décembre 2011,
- dit que les primes d'assurances-vie ne sont pas manifestement excessives au regard de l'état de fortune de [W] [N] et doivent donc rester hors succession,
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] de rapport à la succession du montant des assurances-vie et de rapport des capitaux reçus dans le règlement de la succession,
- dit n'y avoir lieu à rapport ou réduction concernant l'occupation du bien immobilier sis [Adresse 16],
- rejeté les demandes de [Z] [B] à ce titre,
- rejeté les demandes de [Z] [B] au titre du recel successoral,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [Z] [B],
- dit que dans l'attente du partage M. [Z] [B] devra fournir tout document utile au notaire commis afin de pouvoir calculer les loyers générés par les biens indivis qui doivent être rapportés à la succession,
- Constaté la proposition de Mme [L] [B] quant à la proposition d'attribution des biens immobiliers,
- dit que le notaire financera son travail sur les fonds indivis, avec l'accord des parties, et qu'à défaut elles lui verseront les provisions et les émoluments dus pour son travail, sauf si la partie est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle,
- dit qu'en cas d'empêchement du notaire, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,
- désigné la Présidente du tribunal judiciaire de Foix, ou à défaut tout autre magistrat désigné en remplacement, afin de surveiller les opérations de liquidation-partage,
- rappelé que le notaire devra dresser le projet d'état liquidatif dans un délai d'un an suivant l'acceptation de sa mission, et le transmettre au juge commis,
- rappelé que les copartageants peuvent, à tout moment, abandonner les voies judiciaires et poursuivre à l'amiable la répartition des lots,
- condamné M. [B] à payer à Mme [B] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes des parties,
- dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de partage.
Par déclaration électronique en date du 28 juin 2021, M. [Z] [B] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :
- rejeté la demande de M. [Z] [B] au titre de la nullité du testament olographe du 02 avril 2003 et du codicille du 24 décembre 2011,
- dit que les primes des assurances-vie ne sont pas manifestement excessives au regard de l'état de fortune de [W] [N] et doivent rester hors succession,
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] de rapport à la succession du montant des assurances vie et de rapport des capitaux reçus dans le règlement de la succession,
- dit n'y avoir lieu à rapport ou à réduction concernant l'occupation du bien immobilier sis [Adresse 16],
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] à ce titre,
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] au titre du recel successoral,
- rejeté la demande de dommages-intérêts de M. [Z] [B],
- dit que dans l'attente du partage, M. [Z] [B] devra fournir tout document utile au notaire commis afin de pouvoir calculer les loyers générés par les biens indivis qui doivent être rapportés à la succession,
- constaté la proposition de Mme [L] [B] quant à l'attribution des biens immobiliers,
- condamné M. [Z] [B] à payer à Mme [L] [B] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
- rejeté les autres demandes,
- dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de partage.
Suivant ses dernières conclusions d'appelant en date du 12 juillet 2022, M. [Z] [B] demande à la cour :
- vu les articles 815, 840, 84 et 778 du Code civil,
- vu l'article 892, 920 et 922 du Code civil,
- vu l'article 1360 à 1364 du Code de procédure civile,
- vu l'absence de délivrance du legs,
- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par [Z] [B] à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Foix le 08 juin 2021,
Y faisant droit réformant ledit jugement en ce qu'il a :
- rejeté la demande au titre de partage de la succession de M. [B],
- rejeté la demande de M. [B] au titre de la nullité du testament olographe du 02 avril 2003 et du codicille du 24 décembre 2011,
- dit que les primes des assurances-vie ne sont pas manifestement excessives au regard de l'état de fortune de [W] [N] et doivent rester hors succession,
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] de rapport à la succession du montant des assurances vie et de rapport des capitaux reçus dans le règlement de la succession,
- dit n'y avoir lieu à rapport ou à réduction concernant l'occupation du bien immobilier sis [Adresse 16],
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] à ce titre,
- rejeté les demandes de M. [Z] [B] au titre du recel successoral,
- rejeté la demande de dommages-intérêts de M. [Z] [B],
- dit que dans l'attente du partage, M. [Z] [B] devra fournir tout document utile au notaire commis afin de pouvoir calculer les loyers générés par les biens indivis qui doivent être rapportés à la succession,
- constaté la proposition de Mme [L] [B] quant à l'attribution des biens immobiliers,
- condamné M. [Z] [B] à payer à Mme [L] [B] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes,
- dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de partage.
Statuant à nouveau,
- d'ordonner l'ouverture de la succession et subsidiairement, dire y avoir lieu à partage complémentaire, de :
[K] [B] décédé le [Date décès 7] 1987 à [Localité 11].
- de dire que [W] [B] a dissimulé au décès de son mari des placements et assurances-vie, et à ce titre s'est rendue coupable de recel successoral,
- de dire y avoir lieu à rapporter à la succession de [K] [B] le montant intégral des assurances-vie souscrites par [W] [B], à compter du décès de son mari jusqu'à son propre décès.
- de dire que [W] [B] ne pourra prétendre au partage sur ses sommes en aucune part.
- de dire qu'il y a atteinte à la réserve de [Z] [B] sur la succession de [W] [B].
En conséquence,
- de dire y avoir lieu à reconstitution fictive du patrimoine pour le calcul de la réserve de [Z] [B], en application de l'article 922 du Code civil,
- de dire que [L] [B] sera tenue à une indemnité de réduction qui sera à déterminer dans l'acte liquidatif dont le notaire désigné à la charge,
- de prononcer la nullité du testament olographe du 02 avril 2003 et du codicille du 24 décembre2011,
- de dire que [L] [B] est irrecevable à demander les loyers perçus par M. [B] après le décès de sa mère.
- en conséquence, l'en débouter,
- de condamner Mme [L] [B] à verser à [Z] [B] la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Y ajoutant,
- de condamner Mme [L] [B] à verser à [Z] [B] la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner Mme [L] [B] aux dépens d'appels.
Dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 28 novembre 2023, Mme [L] [B] demande à la cour de bien vouloir :
Rejetant toutes conclusions contraires,
- vu les articles 815 et suivants du Code civil,
- vu les articles L132-12 et suivants du Code des Assurances,
- de confirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Foix du 8 juin 2021,
Y ajouter,
- de condamner M. [Z] [B] au paiement de la somme de 5 000 € au profit de Mme [L] [B] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, pour l'instance devant la Cour d'appel,
- de condamner M. [Z] [B] aux dépens d'appel.
La clôture de la mise en état a été ordonnée le 18 décembre 2023 et l'audience de plaidoiries fixée le 16 janvier 2024 à 14h00.
La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS :
Sur la portée de l'appel
Dans ses conclusions d'appelant, M. [Z] [B] demande notamment à la cour ' d'ordonner l'ouverture de la succession et subsidiairement, dire y avoir lieu à partage complémentaire, de [K] [B] décédé le [Date décès 7] 1987 à [Localité 11].'
Cependant, la disposition du jugement qui avait rejeté cette demande n'est pas visée à la déclaration d'appel de M. [Z] [B]. Faute d'avoir ainsi été soumise à l'effet dévolutif attaché à la déclaration d'appel, la cour n'en n'est pas saisie.
[Z] [B] ne peut donc plus, dans le cadre de ses écritures, critiquer une disposition dont la cour n'est pas saisie faute de lui avoir été dévolue par l'acte d'appel.
La cour précise cependant à toutes fins utiles que l'indivision à partager procède des successions de [K] [B] et [W] [N].
Aux termes de la déclaration d'appel formée par M. [Z] [B] et du dispositif de ses dernières conclusions, en l'absence d'appel incident, le litige devant la cour porte sur :
- la validité des testaments,
- le recel, au regard notamment des assurances-vie,
- la donation indirecte consentie à Mme [L] [B] selon l'appelant,
- le dépassement de la quotité disponible,
- les loyers perçus par M. [Z] [B] depuis le décès de [W] [N].
Sur la validité du testament olographe du 2 avril 2003 et du codicille du 24 décembre 2011
M. [Z] [B] ne conteste plus devant la cour l'écriture de [W] [N].
Il expose qu'en réalité [W] [N] avait établi et déposé ou fait déposer chez un notaire quatre testaments dont seulement deux, favorables à Mme [L] [B], ont été retrouvés, lesquels ne révoquent pas les dispositions antérieures. Il ajoute que le codicille du 24 décembre 2011 se rapporte à un testament du 7 octobre 1997, qui a disparu, et que le codicille ne saurait être valable en l'absence du testament auquel il se rapporte. Il considère que c'est pour contourner les règles du partage et son droit à réserve que ces dispositions ont été prises.
Le testament du 2 avril 2003 lègue à Mme [L] [B] tous les droits qu'elle possède sur une maison d'habitation avec dépendances et jardin attenant, l'ensemble sis à [Adresse 12].
Le document nommé codicille du 24 décembre 2011, lègue à Mme [L] [B], précisant que c'est ce qu'elle ajoute à son testament du 7 octobre 1997, tous les droits qu'elle possède sur la maison d'habitation [Adresse 4], tout le premier étage en faveur de ma petite fille Mademoiselle [L] [B].
Bien que faisant référence à un testament établi en 1997, non retrouvé, ses dispositions se suffisent à elles-mêmes en tant que dispositions testamentaires.
La perte de deux testaments a fait l'objet d'une action contre la SELARL de notaires [D]-[X] devant le tribunal judiciaire de Toulouse, à l'initiative de [Z] [B]. Un jugement a été rendu le 3 juin 2020 dont les parties n'indiquent pas qu'il ait été frappé d'appel.
Le tribunal relève que l'existence du testament du 7 octobre 1997 qui résulte de la seule mention contenue dans celui du 24 décembre 2011 n'est pas établie, que celle d'un testament du 2 [Date décès 17] 2003 n'est pas établie non plus. Il considère que la volonté de [W] [N] d'avantager sa petite-fille [L] est constante.
Par conséquent, en présence de deux testaments dont l'authenticité n'est pas discutée devant la cour, qui ne sont pas contradictoires entre eux, et manifestent clairement la volonté de [W] [N] d'avantager sa petite-fille Mme [L] [B], aucune cause d'annulation n'est constituée. Dans l'hypothèse où ces dispositions causent une atteinte à la réserve héréditaire de M. [Z] [B], elle sera réparée par la réduction qu'il sollicite.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Z] [B] de sa demande d'annulation des testaments.
Sur le recel et les demandes au titre des assurances-vie
En ce qui concerne les demandes de M. [Z] [B] présentées devant la cour au titre des assurances-vie, elles ne visent plus à réintégrer les primes versées par [W] [N] à sa succession sur le fondement de l'article L132-13 du code des assurances (caractère manifestement excessif des primes) mais sont fondées sur le recel que l'appelant reproche à sa mère, [W] [N], lui faisant grief d'avoir dissimulé au décès de son mari des placements et assurances-vie.
Suivant les dispositions de l'article 778 du code civil, ' Sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.
Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.
L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession.'
Suite au décès de [K] [B] , son épouse, [W] [N], a opté pour le quart en pleine propriété et les 3/4 en usufruit. Elle s'est donc trouvée en possession de la totalité du patrimoine du défunt.
Le fait qu'elle ait pu , comme le laissent entendre les parties, être bénéficiaire de l'assurance vie souscrite par son mari, ce qui est cohérent avec l'important capital en assurance-vie qu'elle a laissé (1.034.030,93 €), l'exonérait de l'obligation de déclarer le capital reçu à la succession, en application de l'article L132-16 du code des assurances, ledit capital devenant alors un bien propre au conjoint bénéficiaire.
Le tribunal a de plus justement retenu que M. [Z] [B] n'est pas fondé à soutenir que sa mère aurait réalisé un recel en utilisant des comptes ouverts conjointement avec lui, puisqu'il avait alors nécessairement connaissance des opérations ainsi réalisées.
Par ailleurs, [W] [N] avait la libre disposition de son patrimoine, sur lequel tout grief de recel est inopérant. Il ne peut lui être reproché d'avoir souhaité favoriser sa petite-fille.
En outre, la cour relève que [W] [N] a laissé une assurance-vie dont le capital de 1.034.030,93 € a bénéficié à M. [Z] [B] à hauteur de 28,9 %, soit 298.834 € environ, ce qui contredit l'allégation suivant laquelle sa mère a voulu l'exclure.
Enfin , le recel sur les biens de [W] [N] ne peut pas être recherché contre Mme [L] [B], puisque cette dernière, petite-fille de la défunte, n'a pas la qualité d'héritier.
Par conséquent, M. [Z] [B] sera débouté de ses demandes au titre du recel, confirmant le jugement dont appel.
Sur la donation indirecte alléguée par M. [Z] [B]
Dans sa déclaration d'appel, M. [Z] [B] vise la disposition du jugement qui a rejeté ses demandes tendant au rapport ou à la réduction concernant l'occupation du bien situé [Adresse 16].
M. [Z] [B] expose que du vivant de [W] [N], Mme [L] [B] a occupé gratuitement le bien ci-dessus, du [Date décès 3] 2002 au [Date décès 2] 2016 date du décès, ce qui constitue selon lui un avantage indirect à rapporter et sujet à réduction.
Mme [L] [B] n'étant pas héritière de [W] [N], les règles du rapport ne lui sont pas applicables. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Z] [B] de sa demande au titre du rapport.
Reste donc à déterminer s'il y a eu une donation indirecte qui serait alors prise en considération pour le calcul de la réserve et du droit à réduction.
M. [Z] [B] produit une déclaration formée par [W] [N] à l'administration fiscale le 5 [Date décès 17] 2003, suivant laquelle le bien situé [Adresse 16] est occupé à titre gratuit par Mme [L] [B] depuis le [Date décès 3] 2002.
Cette seule déclaration ne permet pas de considérer que l'occupation a perduré jusqu'au décès de [W] [N] survenu en [Date décès 17] 2016.
De plus, s'agissant de l'intention libérale, M. [Z] [B] ne démontre pas l'absence de contrepartie, notamment en termes de soins et d'assistance. Quoiqu'il en soit, M. [Z] [B] ne démontre pas non plus l'appauvrissement de [W] [N] et l'enrichissement corrélatif de Mme [L] [B] qui caractériserait l'avantage indirect, la mise à disposition du bien pouvant également être qualifiée de prêt à usage.
Par ailleurs, les travaux réalisés par [W] [N] sur cet immeuble lui appartenant ne constituent pas un appauvrissement mais au contraire un acte de nature à valoriser son patrimoine immobilier.
Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Z] [B] de sa demande au titre de la donation indirecte qui devrait être prise en compte dans le calcul de la réserve.
Sur l'atteinte à la réserve
A ce stade de la procédure, en l'absence de valorisation précise des biens légués à Mme [L] [B], la cour renvoie devant le notaire sur la demande au titre de l'action en réduction, afin qu'il détermine avec les parties s'il y a eu dépassement de la quotité disponible, et au besoin procède à la réduction, à charge de saisir le juge commis en cas de désaccord. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur les loyers perçus depuis le décès de [W] [N]
L'article 1014 du code civil énonce : 'tout legs pur et simple donnera au légataire, du jour du décès du testateur, un droit à la chose léguée, droit transmissible à ses héritiers ou ayants cause.
Néanmoins le légataire particulier ne pourra se mettre en possession de la chose léguée, ni en prétendre les fruits ou intérêts, qu'à compter du jour de sa demande en délivrance, formée suivant l'ordre établi par l'article 1011, ou du jour auquel cette délivrance lui aurait été volontairement consentie '.
Il résulte de cette disposition que si le légataire particulier devient, dès l'ouverture de la succession, propriétaire de la chose léguée, il est néanmoins tenu, pour faire reconnaître son droit, de demander la délivrance du legs.
La délivrance du leg constitue la reconnaissance par l'héritier du droit du légataire. Elle ne suppose pas de forme particulière.
M. [Z] [B] soutient que la délivrance n'est pas intervenue ni n'a été demandée, tandis que Mme [L] [B] ne se prononce pas sur le moment de la délivrance ni sur celui de sa demande en ce sens.
Quoiqu'il en soit, la présente action devant le tribunal puis la cour, par laquelle M. [Z] [B] a remis en cause la validité des testaments, porte sur la reconnaissance des droits de Mme [L] [B] au titre des legs particuliers. A défaut d'annulation des testaments, la demande de réduction formée par M. [Z] [B] contient nécessairement reconnaissance des droits de sa fille sur les biens légués.
Les parties devront donc s'accorder devant le notaire sur la date de la demande en délivrance du legs, qui pourrait être, à defaut d'autre demande antérieure dont la cour n'a pas connaissance, celle des premières conclusions de Mme [L] [B] devant le tribunal.
Faute d'accord le juge commis sera saisi, qui en fera rapport au tribunal.
Dans l'attente, M. [Z] [B] devra justifier devant le notaire des loyers des biens dépendant de la succession depuis le décès de [W] [N] . Le jugement sera confirmé de ce chef. La cour précise que ces loyers ne seront pas 'rapportés' à la succession mais acquis à Mme [L] [B] pour les biens lui revenant au titre des legs à compter de sa demande de délivrance, et acquis à M. [Z] [B] pour les autres biens, réformant par là jugement.
Sur les dépens et les frais
M. [Z] [B] qui succombe sur l'essentiel de ses demandes supportera les dépens d'appel.
Au regard de l'équité, il sera condamné à payer à Mme [L] [B] la somme de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Dans la limite de sa saisine,
Constate que la déclaration d'appel n'a pas dévolu à la cour la disposition du jugement qui a rejeté la demande d'ouverture du partage de la succession de [K] [B], et constate que la cour n'est pas saisie de la demande de M. [Z] [B] de ce chef telle que formée dans ses conclusions,
Rappelle cependant que l'indivision à partager procède des successions de [K] [B] et [W] [N],
Confirme le jugement déféré dans ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a débouté M. [Z] [B] de sa demande au titre de l'action en réduction, et en ce qu'il a dit que les loyers générés par les biens indivis doivent être rapportés à la succession,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Renvoie devant le notaire désigné par le tribunal, sur la demande au titre de l'action en réduction, afin qu'il détermine avec les parties s'il y a eu dépassement de la quotité disponible et au besoin procède à la réduction, à charge de saisir le juge commis en cas de désaccord,
Dit que les loyers perçus depuis le décès de Mme [W] [N] dont M. [Z] [B] devra justifier, seront acquis à Mme [L] [B] pour les biens lui revenant au titre des legs, à compter de sa demande de délivrance, et acquis à M. [Z] [B] pour les autres biens,
Y ajoutant,
Condamne M.[Z] [B] à payer à Mme [L] [B] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Z] [B] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,
M. TACHON C. DUCHAC