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18/07/2024 | FRANCE | N°22/03836

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 18 juillet 2024, 22/03836


18/07/2024



ARRÊT N° 250/24



N° RG 22/03836 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PCGU

NA/MP







Décision déférée du 10 Octobre 2016 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LOT ET GARONNE - 2015/0402

X. GADRAT

















[L] [I]





C/





[7]

CPAM LOT-ET-GARONNE






































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AVANT DIRE DROIT











REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème chambre sociale - section 3

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANT



Monsieur [L] [I]

LIEU-DIT L'HOMME MORT

[Adresse 1]

[Localité 5]



représenté par :

- M...

18/07/2024

ARRÊT N° 250/24

N° RG 22/03836 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PCGU

NA/MP

Décision déférée du 10 Octobre 2016 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LOT ET GARONNE - 2015/0402

X. GADRAT

[L] [I]

C/

[7]

CPAM LOT-ET-GARONNE

AVANT DIRE DROIT

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème chambre sociale - section 3

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

Monsieur [L] [I]

LIEU-DIT L'HOMME MORT

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par :

- Me Valérie LACOMBE, avocate au barreau d'AGEN (plaidante)

- Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE substitué à l'audience par Me Julia BONNAUD-CHABIRAND, avocate au barreau de Toulouse,

INTIMEES

[7]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée à l'audience par Me Benjamin GEVAERT du cabinet substituant Me Franck DREMAUX de la SELARL SELARL PRK & Associes, avocat au barreau de PARIS

CPAM LOT-ET-GARONNE

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Anthony PEILLET, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 juin 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. SEVILLA, conseillère

M. DARIES, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière de chambre

EXPOSE DU LITIGE

M. [L] [I] a été salarié de la société [7], en qualité d'ouvrier de chantiers publics, du 1er juin 2006 au 1er septembre 2014, date de son licenciement pour inaptitude.

Il a déclaré le 21 juin 2010 une maladie professionnelle relative à 1'apparition d'un carcinome basocellulaire (cancer de la peau) et adressé un certificat médical initial du 6 juillet 2010.

Par décision du 12 octobre 2010, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Lot-et-Garonne a pris en charge l'affection de M. [I] au titre du tableau n°16 bis des maladies professionnelles, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article L. 461-1 du code de la sécurite sociale.

L'état de santé de M. [I] a été déclaré consolidé au 7 juin 2012 avec fixation d'un taux d'incapacité permanente partielle de 5 %.

Par requête du 8 juin 2012, M. [I] a saisi le tribunal des affaires de sécurite sociale du Lot-et-Garonne d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la société [7], à l'origine de sa maladie professionnelle du 6 juillet 2010.

Parallèlement, par décision du 12 août 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale, saisi par l'employeur, a déclaré inopposable à la SAS [7] la décision de la CPAM de Lot-et-Garonne en date du 12 octobre 2010 de prise en charge de la maladie de M. [I] au titre du tableau n° 16 bis des maladies professionnelles.

M. [I], qui n'a jamais repris son travail, a été licencié pour inaptitude le 1er septembre 2014.

Par jugement du 10 octobre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lot-et-Garonne a :

- déclaré l'action de M.[I] recevable ;

- dit que les conséquences financières de l'éventuelle faute inexcusable de l'employeur ne peuvent être mises à la charge de la SAS [7] et que la CPAM est privée de son action recursoire à léegard de l'employeur en cas de reconnaissance d'une telle faute ;

- dit que M. [I] doit établir dans les relations salarié/employeur l'origine de l'affection du 6 juillet 2010 désignée dans le tableau n° 16 bis des maladies professionnelles ;

- dit que n'est pas établi le caractère professionnel de l'affection déclarée le 6 juillet 2010 par M. [I] ;

- débouté M. [I] de sa demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la SAS [7] et de ses autres demandes ;

- dit n'y avoir lieu ni à application de l'article 700 du code de procedure civile ni à dépens.

M.[I] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 4 novembre 2016.

Par arrêt en date du 5 juin 2018, la cour d'appel d'Agen, a:

- infirmé le jugement rendu le 10 octobre 2016;

- dit que la maladie professionnelle déclarée le 21 juin 2010 par M. [I] est due à la faute inexcusable de son employeur, la société [7];

- avant dire droit sur l'indemnisation des préjudices résultant de la faute inexcusable, ordonné une expertise médicale aux frais avancés de la caisse primaire d'assurance maladie;

- sursis à statuer sur le surplus.

Par arrêt en date du 10 octobre 2019, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel d'Agen du 5 juin 2018, remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt, et les a renvoyées devant la cour d'appel de Toulouse.

La Cour de cassation relève que pour faire droit à la demande de M.[I] tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la cour d'appel d'Agen, après avoir relevé que les conditions tenant à la durée d'exposition au risque prévues par le tableau n° 16 des maladies professionnelles n'étaient pas réunies, retient que M. [I] rapporte la preuve du caractère professionnel de 1'affection déclarée et de la faute inexcusable de la société. Elle juge qu'en statuant ainsi, sans recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la cour d'appe1 a violé les articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Par déclaration du 17 décembre 2019, M. [L] [I] a saisi la cour d'appel de Toulouse en sa qualité de cour de renvoi. Cette affaire a été enrôlée sous le numéro RG 19/5416.

Parallèlement la cour d'appel d'Agen s'est dessaisie de son dossier par suite du décret du 4 septembre 2018 désignant la cour d'appel de Toulouse pour connaître des appels des décisions des juridictions compétentes en matière de contentieux général et technique de la sécurité sociale et de l'admission à l'aide sociale. Suite à cet arrêt de dessaisissement en date du 20 décembre 2018, le dossier a été enrôlé à la cour d'appel de Toulouse sous le numéro RG 19/162.

L'expertise médicale ordonnée par l'arrêt de la cour d'appel d'Agen a été déposée le 5 septembre 2019 par le Dr [U].

Par arrêt du 21 mai 2021, la cour d'appel de Toulouse a ordonné la jonction des affaires enrôlées sous les numéros RG 19/5416 et 19/162 sous ce dernier niméro, et la radiation de l'affaire en raison des conclusions tardives de l'appelant.

L'affaire a été réinscrite au rôle à la demande de M.[I], le 18 octobre 2022, sous le numéro RG 22/3836.

M.[I] demande à la cour d'appel d'ordonner avant dire droit la consultation du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles compétent, pour dire si sa maladie professionnelle, définitivement acquise, est causée par son travail habituel au sens des dispositions de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale. Il fait valoir que même si les conditions du tableau 16 bis ne sont pas réunies, notamment quant à la durée de l'exposition au risque, il peut se prévaloir des dispositions de l'article L 461-1 alinéa 3, comme la cour de cassation l'a retenu. Il produit des certificats médicaux et des attestations de collègues en vue d'établir une exposition aux goudrons et aux rayonnements solaires.

La société [7] demande à titre principal la confirmation du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Lot-et-Garonne du 10 octobre 2016. A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'appel de juger que la preuve d'une exposition au risque visé par le tableau n° 16 bis n'est pas rapportée en l'espèce, de juger, en toute hypothèse, que les conditions du tableau ne sont pas établies, de constater que M.[I] ne rapporte pas la preuve des conditions de la faute inexcusable de l'employeur, et en conséquence, de rejeter les demandes de M.[I]. A titre subsidiaire et avant dire droit, elle demande à la cour de renvoyer pour avis préalable à un premier CRRMP au motif que la liste limitative des travaux et la durée d'exposition prévue par le tableau n°16 bis ne sont pas respectés. A titre très subsidiaire et en toute hypothèse, elle demande à la cour de dire inopposable à l'employeur la maladie professionnelle de M.[I] ainsi que l'ensemble des conséquences financières en ce inclus une éventuelle reconnaissance de la faute inexcusable. Elle soutient que les travaux exécutés par M.[I] mettent en oeuvre des produits à base de bitume, provenant de la distillation du pétrole, et non des produits à base de houille.

La CPAM de Lot-et-Garonne s'en rapporte à justice sur la saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et sur la faute inexcusable de l'employeur, et dans l'hypothèse où une faute inexcusable serait retenue, demande la limitation des indemnités aux chefs de préjudice prévus par l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale ainsi qu'aux chefs de préjudice non déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

MOTIFS

La société [7] conteste tant l'origine professionnelle de la maladie de M.[I] que l'existence d'une faute inexcusable.

La CPAM de Lot-et-Garonne a reconnu le caractère professionnel de la maladie de M.[I], par décision du 12 octobre 2010, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article L. 461-1 du code de la sécurite sociale, en considérant que les conditions du tableau n°16 bis des maladies professionnelles étaient réunies.

Il n'est pas contesté que M.[I] souffre d'une affection désignée au tableau 16 bis, soit un épithélioma primitif de la peau.

En revanche la société [7] conteste que M.[I] ait été exposé au risque prévu par ce tableau, dans les conditions prévues par le tableau.

Il est acquis en toute hypothèse que la condition tenant à une durée d'exposition au risque de dix ans n'est pas remplie, puisqu'à la date du certificat médical initial du 6 juillet 2010 constatant la maladie professionnelle, M.[I], mis à disposition de la société [7] en qualité de salarié intérimaire en 2004 avant d'être embauché par cette société en 2006, ne travaillait au sein de la société [7] que depuis six ans.

M.[I] ne peut donc pas bénéficier de la présomption d'imputabilité de la maladie à son activité professionnelle, en application de l'article L 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.

Mais conformément à l'article L 461-1 alinéa 3, 'Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime'.

Dès lors que M.[I] est atteint d'une maladie désignée au tableau 16 bis, cette maladie peut ainsi être reconnue d'origine professionnelle s'il est établi qu'elle est directement causée par son travail habituel, après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, conformément à l'article 461-1 al 3 du code de la sécurité sociale.

L'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles doit donc être recueilli avant dire droit sur l'ensemble des demandes.

Les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Avant dire droit,

Désigne le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Pays de la Loire, pour donner son avis sur l'existence d'un lien direct entre la pathologie déclarée par M.[I] le 21 juin 2010, soit un épithélioma primitif de la peau, et le travail habituel de la victime;

Dit que la CPAM de Lot-et-Garonne doit communiquer à ce comité régional le dossier complet de ses investigations;

Dit que les parties doivent communiquer leur entier dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles;

Renvoie l'affaire à l'audience du 15 mai 2025 à 14 heures et dit que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à cette audience;

Réserve les dépens.

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/03836
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.03836 ?
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