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18/07/2024 | FRANCE | N°22/00387

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 18 juillet 2024, 22/00387


18/07/2024



ARRÊT N° 248/24



N° RG 22/00387 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OSS2

MS/MP







Décision déférée du 05 Octobre 2015 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGOULÊME - 2013100

E. [I]

















URSSAF POITOU-CHARENTES





C/





[7]venant aux droits de [8]





























































RENVOI APRES CASSATION



CONFIRMATION







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème chambre sociale - section 3

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



URSSAF POITOU-CHARENTES

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 2]

[Locali...

18/07/2024

ARRÊT N° 248/24

N° RG 22/00387 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OSS2

MS/MP

Décision déférée du 05 Octobre 2015 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGOULÊME - 2013100

E. [I]

URSSAF POITOU-CHARENTES

C/

[7]venant aux droits de [8]

RENVOI APRES CASSATION

CONFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème chambre sociale - section 3

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

URSSAF POITOU-CHARENTES

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Margaux DELORD de la SCP BLANCHET-DELORD-RODRIGUEZ, avocate au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

[7]venant aux droits de [8]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Benjamin GEVAERT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 juin 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. SEVILLA, conseillère

M. DARIES, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière de chambre

Le groupe [6] est composé de différentes entreprises de travaux publics intervenant sur le plan national et international.

Le 21 février 2012, l'URSSAF POITOU-CHARENTE a procédé à un contrôle comptable de l'assiette des cotisations au siège de la société [9] aux droits de laquelle vient la société [6], pour la période du 1er octobre 2010 au 31 décembre 2011.

Le 8 octobre 2012, l'URSSAF a notifié à la société [9], une lettre d'observations puis une mise en demeure du 17 décembre 2012 de lui régler 34.490 euros au titre des cotisations et 4.047 euros au titre des majorations de retard.

Le 8 avril 2013 la société [6] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de la Charente d'une contestations de la mise en demeure.

Par jugement du 5 octobre 2015 le TASS de Charente a annulé la procédure de contrôle et annulé les chefs de redressement.

L'URSSAF a relevé appel de la décision.

Par arrêt du 12 mars 2020, la cour d'appel de Bordeaux a infirmé le jugement et statuant à nouveau, validé le contrôle de l'établissement d'Angoulème, condamné la société [6] à payer à l'URSSAF POITOU-CHARENTE la somme de 38.474 euros, confirmé les observations pour l'avenir sauf celle concernant la participation patronale sur les titres restaurant, condamné la société [6] à payer à l'URSSAF 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société [6] a formé un pourvoi contre cet arrêt invoquant 4 moyens de cassation.

Par arrêt du 25 novembre 2021, la Cour de Cassation a cassé et annulé, sauf en ce qu'il valide le contrôle de l'établissement d'Angoulême et confirme les observations pour l'avenir sauf celle concernant la participation patronale sur les titres restaurant, l'arrêt rendu le 12 mars 2020.

Dans ses dernières écritures reprises oralement, l'URSSAF POITOU-CHARENTE demande à la cour :

-qu'elle prenne acte de la décision de la Cour de Cassation en ce qu'elle a validé l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Bordeaux le 12/03/2020 ayant lui-même :

-validé la procédure de contrôle,

- validé les observations pour l'avenir sauf la participation patronale aux titres restaurant,

-qu'elle infirme le jugement du TASS de la Charente du 05 octobre 2015,

-Statuant de nouveau qu'elle :

-Confirme les redressements suivants:

-Primes de salissure,

-Avantage en nature véhicule,

-Avantage en nature logement,

-Frais de repas,

-CSG CRDS sur paniers repas,

-TEPA, réduction salariale et déduction forfaitaire patronale,

-Confirme la mise en demeure pour son entier montant soit 38 987 €,

-Condamne la société [6] au paiement de la somme de 38 987 €,

- Condamne la société [6] aux dépens de cette nouvelle instance.

Dans ses dernières écritures la société [6] demande à la cour de:

-Confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente du 5 octobre 2015,

Et statuant de nouveau de :

-Dire et juger que les différents chefs de redressement et/ou items retenus ne sont fondés en droit ni en fait,

-Annuler le contrôle, la mise en demeure litigieuse et tous les chefs de redressement, à savoir ceux relatifs à la prime de salissure, l'avantage en nature véhicule, l'avantage en nature logement, frais de repas, CSG CRDS sur frais de repas, TEPA, réduction salariale et déduction forfaitaire patronale.

Dans tous les cas de:

-Débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

-Débouter l'URSSAF de sa demande de confirmation de la mise en demeure pour son entier montant soit 38 987€ ,

- La condamner à verser à la société [7] venant aux droits de la société [8] une somme de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'audience s'est déroulée le 13 juin 2024. La décision a été mise en délibéré au 18 juillet 2024.

Motifs de la décision:

Sur les contestations concernant les primes de salissure et la déduction TEPA:

La cour n'est pas saisie de moyens tendant à voir prononcer la nullité de la procédure.

L' article 624 du code de procédure civile prévoit que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

En l'espèce, la société [6] n'a pas formulé de grief devant la cour de cassation concernant l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux qui a validé les deux chefs de redressement au titre de la prime de salissure et de la déduction TEPA.

La Cour de cassation a précisé dans son arrêt que 'les moyens ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant les décisions de valider le contrôle de l'établissement d'Angoulême et confirmant les observations pour l'avenir sauf celle concernant la participation patronale sur les titres restaurant, la cassation ne peut s'étendre à ces dispositions de l'arrêt qui ne sont pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de l'arrêt critiqué par les moyens.'

Le dispositif de l'arrêt indique que la cour casse et annule ' sauf en ce qu'il valide le contrôle de l'établissement d'Angoulême et confirme les observations pour l'avenir sauf celle concernant la participation patronale sur les titres restaurant, l'arrêt rendu le 12 mars 2020".

Aucun lien d'indivisibilité ou de dépendance n'existe entre ces deux chefs de redressement et ceux qui ont fait l'objet d'une cassation.

La cour de renvoi n'est donc pas saisie des chefs de redressement concernant la prime de salissure et la déduction TEPA.

Sur le chef de redressement n°4 : avantage en nature véhicule

Il résulte de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale que revêtent le caractère d'avantage en natures devant être réintégrés dans l'assiette des cotisations sociales, les avantages constitués par l'économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition d'un véhicule dont l'entreprise assume entièrement la charge.

Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule , l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

Il résulte des constatations opérées lors du contrôle et de la lettre d'observations que les salariés de la société [6] bénéficient de la mise à disposition, par l' [5] ([5]), d'un véhicule pour un usage privé ou professionnel et à titre permanent. En contrepartie, les salariés versent à l' association une redevance annuelle comprise entre 810 et 1 656 euros.

La société [6] règle chaque mois à l' association des factures intitulées 'note de débit pour remboursement de kilomètres professionnels', mentionnant l'identité du salarié concerné, son numéro d'adhérent, la marque et type de véhicule et son numéro d'immatriculation, le nombre de kilomètres professionnels retenus et leur valeur unitaire, ces factures devant correspondre à la prise en charge par l'employeur de l'utilisation professionnelle des véhicules.

La Cour de cassation a retenu concernant ce chef de redressement validé par l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux:' que pour valider le chef de redressement n° 4 relatif à l'avantage en nature véhicule, l'arrêt énonce que la société [8] produit aux débats un document intitulé analyse et reporting des frais kilométriques établi par l'association concernant deux salariés, que néanmoins, alors que la société [6] affirme qu'il existe une parfaite concordance entre ces reportings, les factures et les déclarations mensuelles des salariés, elle ne la justifie pas puisqu'elle ne produit pas l'intégralité des pièces permettant d'effectuer le contrôle adéquat et qu'ainsi le reporting de M. [B] pour le mois de décembre 2010 n'est pas communiqué alors qu'elle l'utilise à titre d'exemple.

En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la société prenait en exemple le cas de M. [B] , salarié de l'établissement d'Angoulème et sociétaire [5] pour l'année 2011, en se reportant à l'avant-dernier encadré de la page du reporting année 2011 le concernant, qu'elle produisait, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé'.

L'URSSAF soutient qu'aucun élément ne démontre de façon certaine que le montant de la redevance acquitté à l'AUV par les salariés suffit à couvrir intégralement leurs déplacements personnels, et qu' aucun justificatif ne permet de vérifier que les montants versés à l'AUV par l'employeur couvrent exclusivement les frais professionnels.

Elle précise que le système étant déclaratif, il appartient aux cotisants de justifier du bien fondé de leurs déclarations en cas de contrôle.

La société [6] fait valoir qu'il n'y a pas d'avantage en nature puisqu'elle ne met aucun véhicule à disposition de ses salariés et ne paie à l' association que des indemnités forfaitaires kilométriques qui n'excèdent pas les barèmes fixés par l'administration fiscale pour les kilomètres parcourus à titre professionnel par les salariés.

Elle fait également valoir qu'il ne saurait être recouru à une taxation forfaitaire dès lors que l' URSSAF disposait au travers des éléments contrôlés du détail des véhicules concernés, leur affectation, valeur, montant de participation et des kilomètres parcourus à un titre personnel ou professionnel.

Afin de déterminer si la mise à disposition de véhicules par l'association [5] constitue un avantage en nature, il convient de déterminer si l'employeur prend à sa charge par l'intermédiaire de la facturation de l'association le coût de l'usage privé du véhicule par son salarié.

Or les seuls montants versés par l'employeur au titre de l'usage d'un véhicule sont les montants versés à l' association au titre des factures qu'elle émet concernant les kilomètres professionnels parcourus par les salariés.

Dès lors, il appartient à l' URSSAF, qui prétend que l'employeur prend en charge des frais d'usage privé de véhicule de ses salariés, de démontrer que les factures ne correspondent pas exclusivement à des frais professionnels.

Cependant, l' URSSAF ne démontre pas que le nombre de kilomètres professionnels facturés serait surévalué au regard de la fonction des salariés concernés.

Elle ne prétend pas plus que le prix au kilomètre serait supérieur au barème fiscal, de telle sorte que le prix facturé est présumé correspondre à son objet.

Enfin, même s'il existe un lien direct et essentiel entre la mise à disposition des véhicules et la relation de travail et même si l'intervention d'un tiers dans la mise à disposition d'un véhicule au profit d'un salarié n'exclut pas, par elle-même, l'existence d'un avantage en nature conféré par l'employeur à son salarié, l' URSSAF ne démontre pas que l' association [5] aurait pour seule ressource les redevances facturées à l'employeur et que ce dernier prendrait ainsi indirectement mais nécessairement en charge des frais privés des salariés.

En conséquence, ce chef de redressement sera annulé.

Sur l'avantage en nature logement(chef de redressement n°5):

L''article 8 de l'arrêté du 20 décembre 2002 dispose que les frais engagés par le salarié dans le cadre d'une mobilité professionnelle sont considérés comme des charges à caractère spécial inhérentes à l'emploi, et que l'employeur est autorisé à déduire de l'assiette des cotisations sociales les indemnités suivantes :

1 - les indemnités destinées à compenser les dépenses d'hébergement provisoire et les frais supplémentaires de nourriture dans l'attente d'un logement définitif, réputées utilisées conformément à l'objet dans la limite de 60 euros par jour pendant neuf mois ;

2 - les indemnités destinées à compenser les dépenses inhérentes à l'installation dans le nouveau logement , réputées utilisées conformément à l'objet pour la partie n'excédant pas 1 200 euros, majorés de 100 euros par enfant à charge dans la limite de 1 500 euros.

En l'espèce, le société [6] prend en charge le loyer mensuel de ses salariés pendant les 3 mois premiers mois pour les mutations en métropole et les six premiers mois pour les cadres en Ile de France.

L'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux a retenu que la prise en charge de la totalité des loyers des logements définitifs de salariés ne peut être assimilée à une participation aux frais d'installation dans le nouveau logement relevant ainsi des frais engagés dans le cadre d'une mobilité professionnelle, ni qu'elle constitue une alternative à l'ancienne prime de "rideau" qui donnait lieu à une exonération forfaitaire en application du 2° de l'article 8 de l'arrêté du 20 décembre 2002, et que cette prise en charge constitue, non une indemnité compensant des charges inhérente à la mobilité professionnelle, mais un avantage en nature, réintégrable dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La cour de cassation a cassé l'arrêt considérant qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme le soutenait la société, cette prise en charge temporaire du loyer du nouveau logement ne visait pas à compenser forfaitairement les dépenses inhérentes à la nécessité, pour ces salariés, de s'installer dans ce nouveau logement en raison de leur mutation professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Il appartient par conséquent à la cour de renvoi de vérifier si la prise en charge temporaire du loyer du logement définitif par la société ne vise pas à compenser forfaitairement les dépenses inhérentes à la nécessité, pour ces salariés, de s'installer dans ce nouveau logement en raison de leur mutation professionnelle.

L'URSSAF soutient que la prise en charge par l'employeur du loyer du nouveau logement d'un salarié muté ne constitue pas quelle qu'en soit la cause l'une des indemnités limitativement énumérées visées à l'article 8 de l'arrêté du 20 décembre 2002 qui vise uniquement les dépenses d'hébergement provisoire.

Toutefois, la société [6] fait valoir à juste titre qu'il est indifférent que le logement permettant la déduction corresponde à un logement provisoire et non au logement définitif. En outre la société [6] justifie de la situation de mobilité professionnelle de chacun des salariés pour lesquels les sommes ont été versées et du versement d'une indemnisation de 3 mois pour ceux mutés en métropole et de six mois pour les cadres en Ile de France.

Or cette prise en charge temporaire de loyer doit être considérée comme destinée à compenser forfaitairement les dépenses inhérentes à l'installation des salariés dans leur nouveau logement et ne constitue pas un avantage en nature.

Ce chef de redressement doit par conséquent être annulé.

Sur le chef de redressement n°6: Frais de restauration hors locaux dépassement des limites d'exonération:

L'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002 dispose que :

Les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas les montants suivants :

1° Indemnité de repas :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 15 euros par repas ;

2° Indemnité de restauration sur le lieu de travail :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint de prendre une restauration sur son lieu effectif de travail, en raison de conditions particulières d'organisation ou d'horaires de travail, telles que travail en équipe, travail posté, travail continu, travail en horaire décalé ou travail de nuit, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de restauration est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 5 euros ;

3° Indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise:

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 7,5 euros.

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est placé simultanément au cours d'une même période de travail dans des conditions particulières de travail énoncées aux 1°, 2° et 3°, une seule indemnité peut ouvrir droit à déduction'.

Ces montants sont revalorisés au 1er janvier de chaque année. Ils étaient ainsi de 16,80 euros en 2010 et 17,10 euros en 2011 pour l'indemnité prévue au 1° ; pour l'indemnité prévue au 3°, de 8,20 euros en 2010 et 8,30 euros en 2011.

Pour valider la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales de la fraction des indemnités de repas versées par la société [8] à des salariés travaillant sur des chantiers itinérants de construction routière, pour lesquels l'usage est de prendre le repas au restaurant, d'un montant de 13,40 euros en 2010 et de 13,50 euros en 2011, la cour d'appel de Bordeaux a énoncé que même si l'existence d'un usage peut être retenue, la société ne démontre aucunement l'engagement de frais de restaurant pour les salariés concernés, ne produisant aucun justificatif de la prise effective de repas au restaurant

La Cour de cassation a considéré qu'en exigeant de la société exposante la preuve de l'utilisation conforme à son objet des indemnités de repas tout en constatant que l'existence d'un usage pour les salariés bénéficiaires de ces indemnités de prendre leur repas au restaurant pouvait être retenue, la cour d'appel a violé les articles 2, 3 et 10 de l'arrêté du 20 décembre 2002, ensemble l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

L'URSSAF considère que les limites d'exonération pour la période de contrôle sont de 16,80 et 17,10 euros lorsque le salarié est contraint de prendre son repas au restaurant et de 8,20 et 8,30 euros lorsqu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant. L'organisme affirme qu'en l'absence de production de notes de restaurant, la société [6] ne prouve pas l'usage conforme des indemnités versées.

La société fait valoir que lorsque le salarié est en déplacement et que les circonstances ou les usages de la profession le contraignent à prendre son repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires liées au repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction n'excédant pas 16,80 euros en 2010 et 17,10 euros en 2011, sans que l'employeur n'ait à produire de justificatifs des frais engagés.

Elle ajoute qu'il est d'usage que les salariés relevant du secteur d'activité de la société, ne prennent pas leur repas sur les chantiers, mais bien au restaurant.

Il résulte de la lecture combinée des alinéas de l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002 sus-rappelé que l'indemnité forfaitaire allouée au travailleur salarié en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, lorsque ses conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas, prévue par le 3° de ce texte, est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas le montant fixé au 1° de ce même texte, s'il est démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant. (2e Civ., 24 janvier 2019, pourvoi n° 17-27.069)

En l'espèce, il n'est pas discuté que les personnels concernés par les primes panier objet du redressement sont des salariés de la construction routière, intervenant sur des chantiers mobiles itinérants et de courte durée. La société justifie d'ailleurs de cet état de fait en versant une liste des chantiers de courte durée et des fiches de pointage des salariés. Elle produit en outre 5 attestations de salariés mentionnant qu'ils prenaient leur repas au restaurant quasiment tous les jours.

Il a été jugé(Soc., 24 avril 1980, n° 78-13.384), que les indemnités de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas le montant de quatre fois la valeur du minimum garanti par repas, pour les salariés non cadres occupés hors des locaux de l'entreprise, lorsqu'ils sont en déplacement et contraints de prendre leurs repas au restaurant, en raison de leurs conditions particulières de travail. Si ces circonstances de fait et ces exigences professionnelles sont établies et si l'indemnité ne dépasse pas le plafond fixé, l'employeur n'a pas à justifier que l'allocation a été utilisée conformément à son objet.

Le même arrêt a dit que les circonstances de fait et les usages de la profession contraignent les salariés de la construction routière, pendant la durée des chantiers itinérants, à prendre leur repas au restaurant.

Cet usage concernant le personnel travaillant sur des chantiers itinérants n'a jamais été remis en cause depuis lors et a été validé par la Cour de cassation récemment dans plusieurs espèces similaires (2e Civ., 24 janvier 2019, pourvoi n°17-27.069 déjà cité supra ; 2e Civ., 25 novembre 2021, pourvoi n°20-15.602).

En l'espèce, la situation de mobilité des salariés de la société [6] n'est pas contestée. En outre, les attestations des salariés produites aux débats permettent d'établir la réalité et la persistance de l'usage au sein de l'entreprise.

En conséquence, les sommes versées se trouvent réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas le montant fixé au 1° de l'article 3 susvisé, sans qu'il soit exigé de l'employeur qu'il produise des justificatifs des dépenses des salariés.

Puisque l'indemnité allouée par la société [6] aux salariés en cause ne dépasse pas la limite fixée par l'article 3, 1° de l'arrêté du 20 décembre 2002, elle est réputée avoir été utilisée conformément à son objet, sans que celle-ci n'ait à justifier des dépenses engagées.

Il s'ensuit que le redressement effectué par l'URSSAF sur les primes panier versées aux salariés travaillant sur des chantiers itinérants et de courte durée ne peut qu'être annulé.

Sur le chef de redressement n°7: CSG CRDS sur primes de panier supérieure à la limite d'exonération:

Pour la calcul de la CSG et de la CRDS la société [6] a exclu en totalités les indemnités paniers de l'assiette des contributions, alors que les textes prévoient leur exclusion dans les limites de l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002.

L'annulation du chef de redressement relatif au montant des primes de paniers supérieure à la limite d'exonération entraîne nécessairement l'annulation du redressement consistant à réintégrer ces sommes dans l'assiette de calcul de la CSG et de la CRDS.

Le redressement opéré à ce titre sera par conséquent également annulé.

Sur les autres demandes:

L'URSSAF sera condamné aux entiers dépens et au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs:

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant sur renvoi après cassation dans les limites de la saisine de la cour,

Rappelle que les chefs de redressement au titre des primes salissures et de la déduction TEPA n'entrent pas dans le champ de la décision de cassation et que la cour n'est pas saisie de ces chefs de redressement définitivement validés par l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux,

Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente du 5 octobre 2015 en ses dispositions soumises à la cour, en ce qu'il a annulé les chefs de redressement n°4, 5, 6 et 7 ( avantages en nature véhicule, logement, panier repas et assiette CSG CRDS),

Y ajoutant condamne l'URSSAF POITOU-CHARENTE à payer à la société [6] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel,

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/00387
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.00387 ?
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