12/07/2024
ARRÊT N°2024/209
N° RG 22/01383 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OXD2
MD/CD
Décision déférée du 17 Mars 2022 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE ( F 19/01192)
C.LERMIGNY
Section Activités Diverses
[F] [W]
C/
SAS QUALICONSULT EXPLOITATION
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 12/7/24
à Me GILLET-ASTIER,
Me SOREL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1
***
ARRÊT DU DOUZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANTE
Madame [F] [W]
[Adresse 3]
[Localité 2] / FRANCE
Représentée par Me David GILLET-ASTIER, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIM''E
SAS QUALICONSULT EXPLOITATION
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Sarah USUNIER de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS
Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DARIES, conseillère, faisant fonction de présidente, chargée du rapport et F. CROISILLE-CABROL. Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. DARIES, conseillère faisant fonction de présidente
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
E. BILLOT, vice présidente placée
Greffière, lors des débats : C. DELVER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par M. DARIES, faisant fonction de présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [F] [W] a été embauchée du 7 mars au 30 septembre 2016 par la Sas Qualiconsult Exploitation en qualité d'attachée commerciale suivant contrat de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité suivant la convention collective nationale des bureaux d'études techniques (syntec).
La relation s'est poursuivie à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2016.
Par courrier du 13 décembre 2018, la Sas Qualiconsult Exploitation a convoqué Mme [W] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 2 janvier 2019.
Mme [W] a été licenciée pour faute simple par courrier du 15 janvier 2019, licenciement qu'elle a contesté par courrier du 30 janvier 2019.
Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse le 26 juillet 2019 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.
Le conseil de prud'hommes de Toulouse, section activités diverses, par jugement de départage du 17 mars 2022, a :
- débouté Mme [W] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Mme [W] à verser à la Sas Qualiconsult Exploitation la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire,
- condamné Mme [W] aux entiers dépens.
Par déclaration du 8 avril 2022, Mme [F] [W] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 24 mars 2022, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 15 avril 2024, Mme [F] [W] demande à la cour de :
- réformer le jugement en ce qu'il :
* l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,
* l'a condamnée à verser à la société Qualiconsult Exploitation la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
* l'a condamnée aux entiers dépens.
Statuant de nouveau :
- juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- juger que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat.
En conséquence,
- condamner la Sas Qualiconsult Exploitation à lui verser les sommes suivantes :
A titre principal, la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
9 530,29 euros, à titre subsidiaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse selon des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail.
10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au motif que l'employeur a violé son obligation de sécurité,
2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés.
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 19 septembre 2022, la Sas Qualiconsult Exploitation demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* débouté Mme [W] de l'ensemble de ses demandes,
* condamné Mme [W] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
* débouté Mme [W] de sa demande au titre de l'exécution provisoire,
- condamner Mme [W] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner Mme [W] aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance en date du 3 mai 2024.
Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
- Sur le bien fondé du licenciement
En application des articles L 1232 1, L 1232 6 et L 1235 1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse caractérisée par des griefs objectivement vérifiables que l'employeur est tenu d'énoncer dans la lettre de notification, laquelle fixe les limites du litige, sous réserve de la possibilité pour l'employeur de la préciser ultérieurement, soit à son initiative soit à la demande du salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235 2 du code du travail.
Le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
Aux termes de l'article L 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Un fait antérieur à 2 mois peut être pris en compte si le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai.
Le point de départ du délai de prescription est le jour où l'employeur a eu une connaissance exacte de la faute du salarié, c'est à dire de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits fautifs reprochés au salarié.
La lettre de licenciement est ainsi libellée:
"Lors de notre entretien, les explications que vous nous avez données ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.
Ainsi, au terme du délai de réflexion imposé par la loi, nous avons décidé de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute simple pour les motifs que nous vous avons indiqués lors de cet entretien et que nous reprenons ci-après.
Vous avez été recrutée au sein de notre entreprise à compter du 7 mars 2016, par contrat à durée déterminée, puis, à compter du 1er octobre 2016, par contrat à durée indéterminée.
Vous occupez au sein de notre entreprise la fonction d'assistante commerciale et administrative, sous la responsabilité du directeur régional, Monsieur [E] [P].
En cette qualité, vous étiez chargée des missions suivantes :
- Effectuer de la prospection téléphonique et de la prise de rendez-vous ;
- Réaliser des offres commerciales ;
- Assurer la gestion administrative et commerciale (tableaux d'activité, plans d'actions commerciales);
- Assurer les travaux de secrétariat courants : frappe, courrier, classement ;
- Assurer les travaux de gestion, contrat, facturation, recouvrement ;
- Assurer avec les clients un contact téléphonique conformément aux consignes de la Société.
Les informations portées à notre connaissance empêchent la poursuite de votre contrat de travail, en ce qu'elles témoignent d'une volonté de vous opposer à votre supérieur hiérarchique et aux missions qui vous sont confiées.
Ainsi, nous sommes contraints de constater une attitude de dénigrement et d'opposition systématique à vos supérieurs hiérarchiques et vos collègues.
A titre d'exemple, le 29 octobre 2017 vous vous permettiez, de concert avec Madame [R] [I], de remettre en cause le travail de votre collègue, [U] [N],
par courriel, en copie de votre supérieure hiérarchique Madame [B] [J].
Cette dernière avait d'ailleurs jugé nécessaire d'interrompre la conversation.
Surtout, le 7 décembre 2018, vous avez cru bon de pouvoir adresser a Monsieur [P], supérieur hiérarchique de Madame [B] [J], des critiques et dénigrements sur le comportement de cette dernière, sans avoir pris la peine de vous adresser personnellement à celle-ci.
Dans ce courriel vous allez jusqu'à remettre en cause les "fonctions et la moralité" de votre supérieure.
Cette attitude est d'autant plus inacceptable que vos reproches adressés à M.[P] étaient également adressés, en copie, à deux de vos collègues, Madame [U] [N] et Madame [R] [I].
La principale intéressée n'était d'ailleurs même pas destinataire du courriel de dénigrement, mais simplement placée en "copie".
Dans le prolongement de ce manque de respect évidant envers votre hiérarchie, vous avez refusé tout dialogue avec Madame [B] [J].
Pourtant, afin d'apaiser la situation, Madame [B] [J] a tenté à de nombreuses reprises de vous joindre par téléphone, pendant votre horaire de travail et vous a finalement adressé un courriel.
Persistant dans votre posture d'évitement et d'opposition à votre supérieure hiérarchique, vous n'avez accordé aucune réponse à Madame [B] [J].
Ce même jour, vous avez d'ailleurs considéré pouvoir quitter votre poste de travail 30 minutes plus tôt.
Une telle attitude témoigne d'un manque de respect des personnes avec lesquelles vous travaillez et des valeurs de l'entreprise, mais surtout d'une volonté de cesser toute collaboration au sein de notre entreprise.
Ce constat intervient après plusieurs insubordinations, en l'occurrence, plus plusieurs refus de réaliser les missions confiées par votre supérieure hiérarchique.
Ainsi, le 18 juin 2018, sans en discuter avec vos supérieurs hiérarchiques, vous considériez ne pas pouvoir relancer les contacts de prospection "ayant d'autres priorités".
Le 20 juillet 2018, vous indiquiez ne pas vouloir continuer le démarchage téléphonique, en raison de la difficulté que cela représentait durant la période de congés. Cette décision, qui vous est propre, n'a fait l'objet d'aucune validation de la part de vos supérieurs.
De la même manière, vous avez refusé, sans autre motif une réunion organisée le 30 août 2018, par vos supérieurs.
Plus particulièrement, le 7 décembre 2018, vous écriviez à Monsieur [P]:
"Je vous informe que je ne ferais donc aucune action commerciale pour la QAI"
Enfin, le 18 décembre 2018, sous prétexte que vous faisiez parvenir à Madame [B] [J] vos synthèses mensuelles, vous avez refusé d'établir une synthèse annuelle de vos actions commerciales, conformément à la demande de votre supérieure.
Votre supérieur hiérarchique a donc été contraint de réaliser cette synthèse elle-même, ce qui nous a permis de constater que vous n'atteignez pas vos objectifs pour l'année 2018.
En effet, Monsieur [P] avait fixé les objectifs de rendez-vous à 15 rendez-vous par mois, soit 170 RDV sur l'année. Or, sur l'année 2018, vous n'en avez réalisé que 59.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments votre impossibilité de travailler en équipe, une volonté de votre part, de vous inscrire en constante opposition de votre supérieur hiérarchique, et par conséquent de ne plus poursuivre votre contrat de travail.
Dès lors, nous considérons que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Votre préavis d'une durée de 2 mois débutera à la première présentation de la présente lettre. Nous entendons néanmoins vous dispenser de l'exécution de votre préavis qui vous sera rémunéré aux échéances normales. ['] »
Mme [W] soulève la prescription de faits allégués antérieurs à la convocation à entretien préalable du 13 décembre 2018 et en tout état de cause conteste, le bien fondé du licenciement.
A l'examen des griefs, la cour constate qu'ils participent d'un même comportement de dénigrement et de refus d'exécution des missions reproché sur la durée à la salariée et que dès lors que certains faits allégués datent de moins de 2 mois avant le 13 décembre 2018, ils ne sont pas prescrits.
* Sur le dénigrement et l'opposition à sa supérieure hiérarchique
- La société expose que Mme [W] a par courriel du 28 octobre 2018 ( et non 2017 comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement) remis en cause le travail de sa collègue, Mme [U] [N] et de Mme [B] [J], directrice commerciale régionale et supérieure hiérarchique, laquelle lui a demandé le lendemain de mettre fin à ce type d'échanges non constructifs.
Un nouvel incident a eu lieu à l'issue d'une réunion téléphonique du 7 décembre 2018 intervenue suite à la demande de Mme [J] faite à Mmes [I], [W] et [N], attachées commerciales, de préparer une action commerciale QAI («qualité de l'air intérieur») de Qualiconsult Exploitation sur les départements du sud.
Mme [W] ( de même que Mme [I]) a adressé l'après-midi même un courriel à M. [P], directeur régional, avec copie à Mme [J] et Mme [N], aux termes duquel elle s'est plainte d'avoir pendant la pause déjeuner et alors qu'elle n'avait pas raccroché le téléphone ' eu la bonne surprise d'entendre une conversation tel entre [B] et [U].
[B] et [U] se sont empressées de nous critiquer et se moquer de nous suite à la conf call. [R] et moi ne comprenons rien, nous sommes des idiotes et passons du temps à faire des documents et posons trop de questions. [B] valide les remarques et les commentaires d'[U]. Toutes les 2 je les ai entendu rire aux éclats en se moquant de notre travail et de nos initiatives.
Je m'interroge sur la fonction et la moralité de la directrice commerciale qui valide les commentaires d'[U] en se moquant de nous. Je constate que ma directrice commerciale me démotive au lieu de me soutenir et de mettre en place une stratégie commerciale et des actions pour 2019 qui seraient bien plus constructives en ces temps difficiles pour tout le monde.
Je ne vois pas comment je pourrai continuer cette action au vu des propos tenus par ma direction commerciale et je vous informe que je ne ferais donc aucune action commerciale pour la QAI'.
L'employeur poursuit qu'après avoir gravement mis en cause de façon injustifiée ses deux collègues, Mme [W] a rejeté tout dialogue avec Mme [J] et a quitté son poste de travail sans autorisation.
Le 17 décembre 2018, lors du démarrage de l'«opération coup de poing QAI », Mme [J] a demandé à l'équipe de lui faire un retour des démarches entreprises et un bilan chiffré pour savoir si l'opération devait être maintenue ou pas et l'appelante a refusé d'exécuter ces directives:
« Bonjour, Suite à la conf call du 7 décembre et comme convenu entre nous 4, nous devions reprendre à 14h afin de finaliser les documents pour cette opération QAI. Celle-ci n'ayant pas eu lieu, je suis donc dans l'attente et par conséquent ne pouvant donc pas avancer sur cette action. »
- Mme [W] confirme que le 07 décembre 2018, elle a été ainsi que sa collègue Mme [I] (elle-même licenciée) victime de moqueries et de dénigrement de la part de Mme [N] et de leur responsable Mme [J].
Elle argue qu'elle n'a pas commis d'abus de sa liberté d'expression en dénonçant les propos blessants tenus à son encontre et que cette information à la direction ne présente pas un caractère diffamant.
Elle ajoute qu'aucune directive ne lui a été donnée avant le 17 décembre, date à laquelle il a été demandé de reprendre l'action interrompue par l'incident, raison pour laquelle elle a répondu le 18 décembre être dans l'attente des consignes.
Sur ce:
L'exercice de la liberté d'expression par un salarié trouve sa limite dans un éventuel abus.
Des critiques peuvent être formulées sur le fonctionnement de l'entreprise ou le comportement d'un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles ne sont pas émises en termes injurieux, diffamatoires ou excessifs.
S'agissant du courriel du 28-10-2018, la cour relève que Mme [J] a répondu, non pas uniquement à Mme [W], mais également à Mme [I] et Mme [N], en qualifiant leurs échanges d'inappropriés et précisant revenir vers elles individuellement, ce qui induit que l'appelante n'était pas seule en cause et aucune suite donnée n'est communiquée.
Sur les circonstances de l'incident du 06 décembre, Mme [N] a attesté ne pas être en communication téléphonique avec Mme [J] à 12H10 mais avec son conjoint, ce dont il s'évince qu'elle réfute les propos reprochés.
La directrice régionale n'a pas établi d'attestation et a adressé un courriel le 07 décembre à Mme [W] en ces termes: ' je souhaiterai pouvoir échanger avec vous mais pour cela il faudrait que je puisse vous joindre par téléphone'.
Mme [I] et Mme [W] ont décrit chacune les circonstances et nature des propos qu'elles imputent à Mme [N] et Mme [J], dans des termes analogues, sauf à Mme [I] à conclure qu'elle a été choquée de cette situation et que la collaboration ne pourra aboutir au résultat souhaité.
En l'absence d'intervention de l'employeur à l'issue pour appréhender la réalité de l'incident et les relations entre les salariées, il ne peut être fait grief à Mme [W] d'avoir évoqué cette difficulté auprès du directeur régional et d'avoir exprimé, avec des termes forts mais non diffamatoires, son ressenti et ses interrogations.
A défaut d'échanges postérieurs à la réunion et de consignes transmises par Mme [J], la réponse de Mme [W] du 18 décembre ne sera pas considérée comme un refus de suivre des directives.
Aussi le grief sera écarté.
* Sur les autres griefs d'insubordination
La société invoque que Mme [W] a refusé à plusieurs reprises d'exécuter les directives, ainsi en refusant :
. le 18 juin 2018, de relancer des contacts de prospection,
. le 20 juillet 2018 de continuer le démarchage téléphonique pendant la période de congés,
. le 30 août 2018, de participer à une réunion concernant l'action commerciale pour la QAI,
. le 18 décembre 2018, d'établir la synthèse annuelle de son activité, alors qu'elle assurait la gestion administrative et commerciale.
- En tant qu'attachée commerciale, l'appelante avait notamment pour mission d'effectuer de la prospection téléphonique et de la prise de rendez-vous.
La société explique que la prospection des contrats de construction Colas et Bouygues a été planifiée par la direction commerciale en mai 2018 pour un retour entre le 11 et 13 juin 2018, Mme [W] devant procéder à la prise de rendez-vous des contacts concernant [Localité 5] et le Futuroscope et elle a été relancée par M. [D], directeur sud-ouest.
L'intimée ajoute que la salariée n'a pas non plus assuré le suivi et les relances de mails sollicités par M. [V], chargé d'affaires, à une liste de prospects pour proposer des services de photométrie des stades.
Contrairement à ce qu'indique l'employeur et tel que relevé par le premier juge, il s'évince des courriels de réponse de Mme [W] du 11 juin 2018 à M. [D] et du 18 juin 2018 à M. [V], qu'elle a rencontré des difficultés pour l'accomplissement de ces missions et n'a pas poursuivi plus amplement au regard d'autres tâches en cours précisées. Il n'y a donc pas de refus exprès d'exécuter les missions et l'employeur ne communique pas de relances postérieures à ces échanges.
Le 20 juillet 2018, l'appelante informait Mme [J] des relances effectuées dans le cadre du bilan QAI et ajoutait: ' la période des congés n'est pas très propice pour la relance et la prise de rendez-vous donc je ne vais pas continuer car difficile d'avoir le personnes au tel surtout sem 29".
Il n'est pas produit de réponse de la supérieure hiérarchique lui demandant de poursuivre néanmoins les démarches et qu'elle n'aurait pas exécutées.
S'agissant de l'invitation à une réunion par Mme [J] le 30 août 2018 'attcom-jeu' à [Localité 6], mention est faite du refus de Mme [W] laquelle réplique que la réunion a été reportée.
L'employeur n'établit ni que la réunion a eu lieu ni quelle a été l'incidence de l'absence de la salariée à laquelle il n'a pas été fait rappel de la nécessité d'être présente.
Ces trois griefs seront donc écartés.
- Sur la demande de synthèse des actions 2018 faite le 17 décembre 2018 par Mme [J], pour le 19 décembre, l'appelante a indiqué par mail du 18 décembre que s'agissant de la synthèse commerciale réalisée en 2018 elle avait fait parvenir par mail chaque mois les CR de ses actions sur l'ensemble de la région sud et pour les matinales, les points et retours ont été faits après chaque événement lors d'échange par tel, mail ou lors de la réunion du 06/09 à [Localité 6].
Il s'en déduit que l'appelante ne souhaitait pas apporter une réponse positive à la demande précise et légitime de la supérieure hiérarchique en vue de définir des axes d'amélioration, alors qu'il lui appartenait de par ses fonctions d'établir un bilan de ses actions, même si cette requête est intervenue postérieurement à la réception de la lettre de convocation à un entretien à un éventuel licenciement.
Le grief sera donc retenu.
Le fait que la société énonce avoir à la suite de l'établissement de la synthèse par le directeur régional constaté que l'intéressée avait réalisé un nombre de rendez-vous inférieur à celui sollicité est sans apport, à défaut de production du document de synthèse et de fixation d'objectifs (contestée par l'appelante), alors même que l'employeur recevait les synthèses d'activités mensuelles.
Le refus d'établir la synthèse annuelle des actions commerciales, dans un contexte particulier après l'incident du 07 décembre 2018, est insuffisant pour caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement, ce d'autant que Mme [W] a reçu des remerciements du chef de service et du directeur de développement le 21 décembre 2018 pour son travail de prospection réalisé depuis octobre et pour son engagement pour le développement du pôle BTP.
Cela contredit, au-delà des difficultés relationnelles ayant pu exister avec sa supérieure hiérarchique, qui néanmoins la félicitait le 05 décembre 2018 à la suite de son rapport d'activité, les conclusions de l'employeur selon lesquelles Mme [W] était dans l'impossibilité de travailler en équipe.
En outre, le 18 janvier 2019, soit après le licenciement de la salariée qu'il ne pouvait ignorer, M. [P], directeur régional, a rédigé une lettre de recommandation circonstanciée louant l'exécution par l'intéressée de ses missions, son discernement, sa force de proposition et sa capacité à gérer les relations avec les clients.
Aussi la cour considère que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse par infirmation du jugement déféré.
S'agissant d'une salariée de plus de deux ans d'ancienneté et d'une entreprise d'au moins 10 salariés, il y a lieu de faire application d'office de l'article L 1235-4 du code du travail dans les conditions fixées au dispositif.
Sur l'obligation de sécurité
En vertu des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
L'appelante fait valoir que le refus de l'employeur de prendre en compte sa plainte concernant le comportement blessant de Mesdames [N] et [J] constitue un manquement à l'obligation de sécurité qui lui a causé un grave préjudice pour lequel elle réclame 10000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral.
La société conclut au débouté.
A la suite de la 'plainte' de Mme [W] et de la contestation de Mme [N], il n'est pas intervenu d'autre incident et l'appelante ne justifie d'aucun préjudice. Elle sera déboutée de sa demande par confirmation du jugement déféré.
Sur l'indemnisation
Mme [W], bénéficiait d'une ancienneté de plus de 2 ans dans une entreprise d'au moins 10 salariés au moment de la rupture du contrat de travail et d'un salaire mensuel de 2385,57euros. Elle a perçu des allocations chômage en mai et juin 2019 et a retrouvé un emploi comme attachée commerciale à compter de septembre 2019, tel qu'il ressort du profil Linkedin.
En application de l'article L 1235-3 du code du travail, le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, elle peut prétendre, à défaut de réintégration à une indemnité à la charge de l'employeur comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire.
Au vu de sa situation, il sera alloué à Mme [W] la somme de 7156,71 euros ( soit 3 mois de salaire brut).
III/ Sur les demandes annexes:
La SAS Qualiconsult Exploitation, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
La condamnation de Mme [W] aux dépens et frais irrépétibles par le conseil de prud'hommes sera infirmée.
Madame [W] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l'occasion de cette procédure.
La SAS Qualiconsult Exploitation sera condamnée à lui verser une somme de 2000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. La SAS Qualiconsult sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes afférentes à un licenciement nul et à des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la SAS Qualiconsult Exploitation à payer à Mme [F] [W] la somme de:
- 7156,71 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Ordonne le remboursement par la SAS Qualiconsult Exploitation aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement payées à Mme [W] dans la limite de trois mois.
Dit que conformément aux dispositions des articles L 1235-4 et R 1235-2 du code du travail, une copie du présent arrêt sera adressée par le greffe à France Travail du lieu où demeure la salariée.
Condamne la SAS Qualiconsult Exploitation aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Mme [W] la somme de 2000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute la SAS Qualiconsult Exploitation de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. DARIES, faisant fonction de présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
C. DELVER M. DARIES
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