25/06/2024
ARRÊT N°
N° RG 22/01149
N° Portalis DBVI-V-B7G-OV65
AMR/ND
Décision déférée du 07 Mars 2022
TJ de TOULOUSE
(20/04999)
Madame [V]
[W] [E]
[H] [I] épouse [E]
C/
[T] [G] [J]
[N] [Z] [C] [D] épouse [J]
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
Me JEAY
Me VILLEPINTE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANTS
Monsieur [W] [E]
[Adresse 3]
[Adresse 3] (ROYAUME UNI)
Représenté par Me Dominique JEAY de la SCP JEAY & JAMES-FOUCHER, AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [H] [I] épouse [E]
[Adresse 3]
[Adresse 3] (ROYAUME UNI)
Représentée par Me Dominique JEAY de la SCP JEAY & JAMES-FOUCHER, AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMES
Monsieur [T] [G] [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Eric VILLEPINTE, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [N] [Z] [C] [D] épouse [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Eric VILLEPINTE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A.M. ROBERT , chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. DEFIX, président
J.C. GARRIGUES, conseiller
A.M. ROBERT, conseillère
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte du 6 mars 2020, M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] ont consenti une promesse unilatérale de vente à M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] portant sur un appartement situé [Adresse 2] et [Adresse 1] au prix de 700.000 €, bien immobilier dont ces derniers étaient locataires en vertu d'un bail meublé signé le 18 juin 2019.
La promesse a été consentie jusqu'au 4 juin 2020. Le versement par M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] était prévu de 35.000 € au titre d'une indemnité d'immobilisation entre les mains maître [K] [A], notaire.
La vente n'a pas été réitérée. (REMARQUE : Cf conclusions appelants, M. et Mme [J] reprochaient aux vendeurs d'avoir manqué à leur obligation d'information complète au motif qu'ils n'auraient pas été en mesure de produire tous les documents réclamés s'agissant des travaux de rénovation préalablement entrepris).
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 septembre 2020, M. et Mme [E] ont mis en demeure M. et Mme [J] de leur payer l'indemnité forfaitaire de non réalisation de la vente.
Par acte d'huissier du 10 décembre 2021, M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] ont fait assigner Mme [N] [D] épouse [J] et M. [G] [J] devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de paiement de l'indemnité d'immobilisation.
Par jugement du 7 mars 2022, le tribunal judiciaire Toulouse a :
-débouté M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] de leurs demandes à l'encontre de M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J],
-dit que M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] sont bien fondés à solliciter que M. [K] [A], notaire, leur restitue la somme de 35.000 euros versée par eux à titre d'indemnité d'immobilisation,
-débouté M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] de leur demande au titre du préjudice moral,
-débouté M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] de leur demande au titre de l'impossibilité d'acquérir un bien équivalent,
-condamné solidairement M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] à verser à M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
-condamné solidairement M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] aux dépens,
-rappelé que le présent jugement est de droit assorti de l'exécution provisoire.
Pour statuer ainsi le tribunal, après avoir relevé qu'au 4 juin 2020 l'attestation d'assurance décennale de l'entreprise ayant effectué des travaux dans l'immeuble vendu n'était pas produite et qu'ainsi les dispositions de l'article L 243-2 du code des assurances n'avaient pas été respectées, a considéré qu'au vu de l'importance que revêt pour un acquéreur le point de savoir si le ou les constructeurs étant intervenus sur l'immeuble vendu sont ou non assurés en responsabilité décennale, et compte tenu du problème d'étanchéité de la terrasse relevé par les époux [J], le défaut de respect du texte précité constituait un manquement sérieux aux obligations de renseignement pesant sur le vendeur et justifiait le refus des acquéreurs de poursuivre la vente et de signer l'acte notarié.
Par déclaration du 21 mars 2022, M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il :
-les a déboutés de leurs demandes à l'encontre M. et Mme [J],
-a dit que M. et Mme [J] sont bien fondés à solliciter que M. [A], notaire, leur restitue la somme de 35.000 euros versée par eux à titre d'indemnité d'immobilisation,
-les a condamnés solidairement à verser M. et Mme [J] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700,
-a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
-les a condamnés solidairement aux dépens.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 24 mai 2022, M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E], appelants, demandent à la cour de :
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou mal fondées,
-infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 7 mars 2022 en ce qu'il les a débouté de leurs demandes dirigées à l'encontre de M. et Mme [J] et les a condamnés à leur payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 ainsi qu'aux dépens.
Statuant à nouveau,
-condamner M. et Mme [J] à leur payer la somme de 35.000 euros au titre de l'indemnité d'immobilisation convenue et majorée des intérêts de droit courus depuis le 16 septembre 2020 jusqu'au complet paiement, outre celle de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires du fait de la perte de chance d'avoir été en mesure de disposer librement de ce bien immobilier avant l'échéance du 31 décembre 2020.
-les condamner à leur payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
-les condamner aux entiers dépens, distraction en étant prononcée au profit de Mme Jeay, avocat associé, sur son affirmation de droit.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 août 2022, M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J], intimés, demandent à la cour de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et de condamner M. et Mme [E] à leur payer la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 novembre 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 28 novembre 2023 à 14h.
MOTIFS DE LA DECISION
La saisine de la cour
Au regard de la déclaration d'appel et du dispositif des dernières conclusions des parties, les dispositions du jugement ayant débouté M. et Mme [J] de leurs demandes au titre du préjudice moral et au titre de l'impossibilité d'acquérir un bien équivalent ne font l'objet ni de l'appel principal ni d'un appel incident de sorte que la cour n'en est pas saisie.
L'indemnité d'immobilisation
L'acte sous seing privé signé le 6 mars 2020 est une promesse de vente, M. et Mme [E] conférant à M. et Mme [J] la faculté d'acquérir et ces derniers acceptant cette promesse mais se réservant la faculté d'en demander ou non la réalisation.
Il est stipulé :
-que la promesse de vente est consentie pour une durée expirant le 4 juin 2020 à 16 heures et que la réalisation de la promesse aura lieu soit par la signature de l'acte authentique accompagnée du versement du prix notamment, soit par la levée d'option par le bénéficiaire à l'intérieur de ce délai,
-qu'en l'absence de levée d'option ou de signature de l'acte de vente dans le délai, le bénéficiaire sera de plein droit déchu du bénéfice de la promesse au terme dudit délai de réalisation sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure de la part du promettant qui disposera alors librement du bien nonobstant toute manifestation ultérieure de la volonté du bénéficiaire de l'acquérir.
Il est prévu le versement par le bénéficiaire d'une indemnité d'immobilisation d'un montant de 35 000 € ; il est stipulé en page 9 de la promesse que :
-«en cas de non réalisation de la vente promise selon les modalités et délais prévus au présent acte, la somme ci-dessus versée restera acquise au promettant à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains de l'immeuble formant l'objet de la présente promesse de vente pendant la durée de celle-ci »;
-«toutefois, dans cette même hypothèse de non réalisation de la vente promise, la somme ci-dessus versée sera intégralement restituée au bénéficiaire s'il se prévalait de l'un des cas suivants : (') en cas d'infraction du promettant ou des précédents propriétaires à une obligation administrative ou légale relative aux biens promis (') ou si la non réalisation de la vente promise était imputable au seul promettant ».
En page 16 de la promesse le promettant a déclaré avoir fait effectuer différents travaux de rénovation entre juillet et novembre 2016, notamment par la société Ag Plomberie, dont les factures ont été annexées à l'acte, a déclaré qu'aucune police d'assurance dommages ouvrage ni responsabilité décennale constructeur non réalisateur n'a été souscrite et s'est obligé (cette mention étant en gras) « à tout mettre en oeuvre afin de fournir au bénéficiaire dans les plus brefs délais et au plus tard dans le mois des présentes la copie des attestations d'assurance décennale des entreprises ci-dessus visées. ».
Il ressort des divers messages électroniques adressés à Mme [I] épouse [E] par Mme [J] entre le mois de février et le mois de juin 2020, que M. et Mme [J] avaient refusé de signer un projet de promesse de vente en février 2020 au motif qu'il ne mentionnait pas les travaux réalisés dans l'immeuble vendu depuis moins de 10 ans, qu'ils se sont inquiétés de la présence d'eau stagnante sur la terrasse et ont réclamé les factures de travaux de la société ayant réalisé la rénovation de la terrasse.
En application des articles L 241-1 à L 242-1 du code des assurances et de l'alinéa 1er de l'article L. 243-2 du même code, le vendeur est tenu de justifier de la souscription d'une assurance de dommages-ouvrage et d'une assurance de responsabilité décennale, sans attendre la rédaction de l'acte authentique par le notaire.
Cette obligation générale de justification de l'assurance obligatoire ne peut être tenue pour suffisante si elle n'est rapportée qu'à la date de signature de l'acte translatif de propriété.
Il est constant qu'au 4 juin 2020 l'attestation d'assurance décennale de l'entreprise Ag Plomberie n'était pas produite par les vendeurs alors qu'au regard des factures produites les travaux effectués par cette société en 2016 portaient sur les lots placo-plâtre, plomberie, peinture, électricité, bardage, étanchéité terrasse.
Au surplus, il ressort de l'attestation d'assurance finalement produite devant le premier juge que la société Ag Plomberie n'est assurée que pour l'activité plomberie-installation sanitaire.
Il ressort du tout que le défaut de réitération de la vente par acte authentique est imputable
au seul promettant de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] de leurs demandes à l'encontre de M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J], dit que M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] sont bien fondés à solliciter que M. [K] [A], notaire, leur restitue la somme de 35.000 € versée par eux à titre d'indemnité d'immobilisation.
Les demandes annexes
Succombant, M. et Mme [E] supporteront les dépens de première instance ainsi que retenu par le premier juge, et les dépens d'appel. Ils se trouvent dès lors redevables d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première instance, telle qu'appréciée justement par le premier juge, qu'au titre de la procédure d'appel, dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt et ne peuvent eux-mêmes prétendre à l'application de ce texte à leur profit.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant dans les limites de sa saisine,
-Confirme le jugement rendu le 7 mars 2022 par le tribunal judiciaire de Toulouse ;
Y ajoutant,
-Condamne M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] aux dépens d'appel ;
-Condamne M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] à payer à M. [T] [J] et Mme [N] [D] épouse [J] la somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
-Déboute M. [W] [E] et Mme [H] [I] épouse [E] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
N. DIABY M. DEFIX
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