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20/06/2024 | FRANCE | N°24/00088

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Recours hospitalisation, 20 juin 2024, 24/00088


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E





DU 20 Juin 2024





ORDONNANCE



N° 24/89



N° N° RG 24/00088 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QI5Y

Décision déférée du 11 Juin 2024

- Juge des libertés et de la détention de CASTRES - 24/861



APPELANT



Monsieur [K] [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Simon ARHEIX, avocat au barreau de TOULOUSE





INTIME



CENTRE HOSPITALIER DE [Loca

lité 4] UNITE [7]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Régulièrement convoqué, non comparant





INTERVENANT



Madame [H] [W] épouse [T], mère de Monsieur [K] [M]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Régulièrement convoq...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E

DU 20 Juin 2024

ORDONNANCE

N° 24/89

N° N° RG 24/00088 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QI5Y

Décision déférée du 11 Juin 2024

- Juge des libertés et de la détention de CASTRES - 24/861

APPELANT

Monsieur [K] [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Simon ARHEIX, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4] UNITE [7]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Régulièrement convoqué, non comparant

INTERVENANT

Madame [H] [W] épouse [T], mère de Monsieur [K] [M]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Régulièrement convoquée, non comparante,

DÉBATS : A l'audience publique du 19 Juin 2024 devant A. DUBOIS, assistée de M. QUASHIE

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée et qui a fait connaître son avis.

Nous, A.DUBOIS, présidente de chambre déléguée par ordonnance de la première présidente en date du 20 décembre 2023, en présence de notre greffier et après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications :

- avons mis l'affaire en délibéré au 20Juin 2024

- avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, l'ordonnance suivante :

Le 6 juin 2024, M. [K] [M] a été admis en soins psychiatriques sans consentement sur décision du directeur du centre hospitalier [7] à [Localité 4].

Par ordonnance du 11 juin 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Castres l'a maintenu sous le régime de l'hospitalisation complète sous contrainte.

M. [K] [M] en a relevé appel par l'intermédiaire de son avocat par déclaration reçue au greffe le 11 juin 2024.

Sa fugue constitue une circonstance insurmontable mais l'appelant a été valablement représentée par son avocat.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 18 juin 2024, soutenues oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, ce dernier demande au magistrat délégataire de :

* à titre principal :

- ordonner la mainlevée de la mesure d'hospitalisation en soins contraints,

* à titre subsidiaire :

- ordonner une expertise médicale confiée à un psychiatre et qui aura pour mission d'apprécier si les conditions d'admission en hospitalisation sous contrainte sont réunies et surseoir à statuer, renvoyer l'affaire à une prochaine audience,

- réserver les dépens (frais d'expertise),

- en tout état de cause,

- condamner le centre hospitalier de [Localité 4] à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [H] [T], mère de l'appelant, a fait parvenir ses observations le 14 juin 2024. Elle indique qu'elle est très inquiète pour la santé de son fils qu'elle aime profondément, qu'il est dangereux pour lui-même et pour les autres quand il conduit à vive allure, sous emprise d'alcool ou de stupéfiants, qu'il promène son serpent autour du cou dans les magasins sous ses vêtements, ou quand il dort avec son serpent, s'agissant d'un animal sauvage qui étrangle ses proies ; que c'est avec le plus grand désarroi et avec beaucoup de regrets qu'elle réaffirme ici qu'il est, pour le moment, incontrôlable et actuellement sans retenue ; qu'il est absolument nécessaire qu'il reçoive des soins appropriés à son état.

Elle souligne que son fils a fugué de l'hôpital psychiatrique le 12 juin 2024, après avoir acheté un billet d'avion pour l'Equateur le 11 juin 2024 (jour du premier jugement), donc en ayant prémédité son départ, et qu'à ce jour et à cette heure, il n'a toujours pas été retrouvé.

Le centre hospitalier, régulièrement convoqué, n'a pas comparu.

Selon l'avis motivé du médecin psychiatre du 17 juin 2024, le patient est en fugue depuis le 12 juin 2024 à 23h20.

Par avis écrit du 17 juin 2024 mis à disposition des parties, le ministère public a conclu à la confirmation de la décision entreprise.

-:-:-:-:-

MOTIVATION :

Selon l'article L.3212-1 I du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur décision du directeur de l'établissement que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement,

- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au deuxièmement du grand I de l'article L.3211-2-1.

L'article L.3212-3 précise qu'en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur de l'établissement peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

En l'espèce, le conseil de M. [M] demande la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète aux motifs que son hospitalisation en urgence, qui doit être l'exception constitue un détournement de procédure, que la commission départementale des soins psychiatriques n'a pas été avisée de la mesure par le directeur d'établissement et qu'il en résulte une atteinte à ses droits puisque cette commission est composée de médecins extérieurs à l'établissement qui peuvent exercer un contrôle sur le bien-fondé de la mesure d'autant que la demande d'hospitalisation a été présentée par la mère sur le fondement de l'article L3212-1 du code de la santé publique alors qu'il a été hospitalisé sur le fondement de l'article L3212-3 et qu'il était compliant aux soins.

Il résulte des articles L. 3223-1, L. 3212-9 et L. 3216-1, alinéa 2, du code de la santé publique que le défaut d'information de la commission départementale des soins psychiatriques des décisions d'admission peut porter atteinte aux droits de la personne concernée et justifier une mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement dont celle-ci fait l'objet.

Il est exact que le directeur d'établissement ne justifie pas avoir informé la commission départementale des soins psychiatriques de l'hospitalisation complète de M. [M] intervenue à la demande d'un tiers en urgence le 6 juin 2024.

Cependant, le juge ne devant pas se limiter au seul constat de l'irrégularité de la décision administrative, il est nécessaire opérer un contrôle in concreto de la procédure, et d'apprécier si l'irrégularité affectant la décision a porté atteinte aux droits du patient.

En l'espèce, le certificat médical d'admission mentionne chez l'intéressé des troubles du comportement, une familiarité, un contact hypersyntone, une accélération psychique, une logorrhée, des éléments de mégalomanie, une désinhibition dans les contacts sociaux, des éléments de persécution, un discours projectif envers son entourage qui s'inquiète de son état de santé, des passages à l'acte impulsifs, une insomnie sans fatigue, des comportements impulsifs avec décisions inappropriées (achat d'un python royal dont il ne se sépare plus) et une consommation de substances psycho-actives aboutissant à des risques pour son intégrité psychique et physique, dans un cadre de forte irritabilité avec tension interne majeure qu'il contient difficilement, un refus catégorique de tout traitement et une absence de reconnaissance des troubles.

Contrairement à ce qui est plaidé, ces difficultés comportementales ne sont ni caractéristiques d'une crise d'adolescence tardive ni la seule conséquence de prise de substances illicites. Elles sont démonstratives de troubles mentaux de nature à créer un danger grave pour l'intéressé justifiant une hospitalisation en urgence étant rappelé que la notion d'urgence s'apprécie au moment de l'admission et que la prise de toxiques peut être un facteur de décompensation.

Le moyen tiré du détournement de procédure est en conséquence inopérant.

Les certificats médicaux des 24 h et 72 h ont certes évoqué une évolution clinique positive mais trop récente pour se prononcer sur une amélioration notable au regard des événements des semaines précédentes.

Si l'avis motivé du 9 juin 2024 a également décrit un patient compliant dont l'état s'améliore, force est néanmoins de constater que le jour de sa comparution devant le premier juge, l'appelant avait déjà acheté un billet pour l'Equateur, préméditant son départ, et qu'il a fugué de l'établissement le 12 juin 2024.

Il en résulte que l'adhésion aux soins alléguée ne peut être retenue.

D'ailleurs, dans son avis du 14 juin 2024, le Dr [I] précise notamment que malgré une relative contenance initiale de son exaltation psychique interne sur le service, nous avons pu observer de multiples troubles du comportement avec des mises en danger importantes de lui-même ou d'autrui (fugues multiples, alcoolisations sur la voie publique, consommations de toxiques, influence très néfaste sur des personnes vulnérables, agressivité...). Nous avons pu noter une présentation particulièrement extravagante avec un déni des troubles massifs, une importante rationalisation de ses symptômes thymiques et des troubles des conduites des dernières semaines. Son humeur était exaltée, accélérée avec un sentiment de toute-puissance et des idées délirantes congruentes à son humeur. Il peut se montrer inadapté auprès de personnes vulnérables jusqu'à potentiellement les mettre en danger.

Issu du milieu médical et bien au fait des fonctionnements des institutions, le patient a pu arriver à esquiver les soins de manière répétée. Le patient est actuellement en fugue depuis le 12/06/2024 à 23h20.

Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que l'absence d'information de la commission n'a pu causer d'atteinte aux droits du malade compte tenu des troubles de M. [M], de sa mise en danger et de son refus actuel des soins.

Ces mêmes éléments caractérisent l'existence des troubles mentaux rendant impossible le consentement de l'appelant et imposant des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.

Ils établissent que les conditions de l'article L.3212-1 I sont remplies de sorte que la demande d'expertise subsidiairement formulée doit être écartée.

C'est donc à bon droit que le premier juge a ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète sous contrainte de M. [M].

L'ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée.

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PAR CES MOTIFS

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Castres du 11 juin 2024,

Disons n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Disons que la présente décision sera notifiée selon les formes légales, et qu'avis en sera donné au ministère public,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

M. QUASHIE A. DUBOIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Recours hospitalisation
Numéro d'arrêt : 24/00088
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.00088 ?
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