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18/06/2024 | FRANCE | N°21/03353

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 2, 18 juin 2024, 21/03353


18/06/2024



ARRÊT N°24/429



N° RG 21/03353 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OJTZ

VM/IA



Décision déférée du 16 Juin 2021 - Juge aux affaires familiales de CASTRES - 20/00368

O.SCHWEITZER

















[C] [K]





C/





[G], [I], [U] [W]





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



Madame [C] [K]

[Adresse 5]

[Localité 9]



Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP SCP DESSART, av...

18/06/2024

ARRÊT N°24/429

N° RG 21/03353 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OJTZ

VM/IA

Décision déférée du 16 Juin 2021 - Juge aux affaires familiales de CASTRES - 20/00368

O.SCHWEITZER

[C] [K]

C/

[G], [I], [U] [W]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

Madame [C] [K]

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP SCP DESSART, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555.2021.018273 du 23/08/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIMÉ

Monsieur [G], [I], [U] [W]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE Assisté de Me Frederic HERMET, avocat au barreau de CASTRES

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. MICK, et MC. CALVET, conseillers chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. DUCHAC, présidente

V. MICK, conseiller

MC. CALVET, conseiller

Greffier, lors des débats : M. TACHON

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par C. DUCHAC, président, et par M. TACHON, greffier de chambre.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :

Mme [C] [K] et M. [G] [W] ont contracté mariage le 19 décembre 1989 devant l'officier d'état civil de la commune d'[Localité 7] (81), sans contrat de mariage préalable.

Le couple s'est séparé.

Par jugement contradictoire en date du 4 novembre 1998, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Castres a prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de M. [W], statué sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et ordonné la réouverture des débats quant à la demande de dommages et intérêts et la prestation compensatoire.

Par jugement contradictoire en date du 2 juin 1999, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Castres a :

- dit que l'intégralité des droits de propriété de M. [W] sur l'immeuble appartenant à la communauté formée par ce dernier et par Mme [K], sis [Adresse 5] à [Localité 9], est attribuée à Mme [K] à titre de prestation compensatoire,

- dit que Mme [K] supportera le paiement de l'intégralité des frais notarié de liquidation du régime matrimonial et de mutation de l'immeuble,

- commis Me [V], notaire à [Localité 8], pour procéder à la liquidation des droits matrimoniaux des époux,

- condamné M. [W] à payer à Mme [K] la somme de 30 000 F à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil.

Des difficultés liquidatives sont survenues.

Par acte d'huissier en date du 10 mars 2020, M. [W] a assigné Mme [K] aux fins de partage.

Par jugement contradictoire en date du 16 juin 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Castres a :

- ordonné les opérations de compte de liquidation et partage de la communauté formée par M. [W] et Mme [K],

- désigné Me [E] et lui donné mandat de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage conformément aux dispositions dudit jugement,

- constaté que le jugement du 2 juin 1999 est prescrit, faute d'avoir été exécuté dans le délai légal,

- constaté que Mme [K] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter de mars 2015,

- ordonné la licitation amiable de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 9] et à défaut la licitation judiciaire au plus offrant et au dernier enchérisseur suivant cahier des charges déposé au greffe par le conseil de M. [W], à la barre du tribunal judiciaire de Castres de l'immmeuble sis commune de [Localité 9] cadastré section B [Cadastre 1] d'une contenance de 6A 99 CA,

- ordonné avant dire-droit sur la licitation de l'immeuble et la fixation de l'indemnité d'occupation, une expertise et commet pour y procéder M. [Z], [Adresse 2] - [Localité 6],

- dit que l'expert devra faire connaître sans délai son acceptation au juge chargé du contrôle de l'expertise et commencer ses opérations sans délai,

- dit qu'en cas d'empêchement ou de refus de l'expert, il sera procédé à son remplacement par ordonnance du juge chargé du contrôle de l'expertise,

- dit que l'expert devra accomplir sa mission conformément aux articles 232 et suivants du Code de procédure civile, notamment en ce qui concerne le caractère contradictoire des opérations,

- dit que l'expert devra informer le juge chargé du contrôle de l'expertise du déroulement de ses opérations et des difficultés rencontrées dans l'accomplissement de sa mission,

- dit que l'expert est autorisé à s'adjoindre tout spécialiste de son choix sous réserve d'en informer préalablement le juge chargé du contrôle de l'expertise et les parties,

- dit que l'expert pourra en cas de besoin, remettre un pré-rapport aux parties en considération de la complexité technique de la mission,

- dit que l'expert devra déposer son rapport définitif et sa demande de rémunération au greffe du tribunal, dans le délai de rigueur de 3 mois à compter de l'avis du versement effectif de la consignation qui lui sera adressé, et communiquer ces deux documents aux parties,

- dit que les parties disposeront d'un délai de quinze jours à compter de la réception de ces documents pour adresser au greffe leurs observations sur la demande de rémunération,

- fixé à 1 000 € le montant de la consignation que devra verser chacune des deux parties, soit 2 000 € au total, à valoir sur les honoraires de l'expert, auprès du régisseur d'avances et de recettes du tribunal dans le délai de deux mois suivant la présente décision, étant précisé que la charge définitive de la rémunération de l'expert ressortira en principe des frais privilégiés de liquidation,

- dit que chaque partie est autorisée à consigner au lieu et place de l'autre si nécessaire,

- dit qu'il appartiendra aux parties de faire réinscrire au rôle cette affaire après dépôt du rapport d'expertise par de nouvelles conclusions,

- condamné Mme [K] à payer à M. [W] la somme de 886,65 € au titre de l'impôt foncier,

- rejeté la demande formulée par M. [W] au titre de l'article 700 € du code de procédure civile,

- rejeté le surplus des demandes des parties.

Par déclaration électronique en date du 23 juillet 2021, Mme [K] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- constaté que le jugement du 2 juin 1999 est prescrit faute d'avoir été exécuté dans le délai légal,

- constaté que Mme [K] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter de mars 2015,

- ordonné la licitation amiable de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 9] et à défaut la licitation judiciaire au plus offrant et au dernier enchérisseur suivant cahier des charges déposé au greffe par le Conseil de M. [W] à la barre du Tribunal Judiciaire de Castres de l'immeuble sis commune de [Localité 9] cadastré section B [Cadastre 1] d'une contenance de 6A 99 CA,

- ordonné avant dire droit sur la licitation de l'immeuble et la fixation de l'indemnité d'occupation une expertise et commet pour y procéder M. [L] [Z] [Adresse 2] [Localité 6],

- fixé à 1 000 € le montant de la consignation que devra verser chacune des deux parties soit 2 000 € au total, à valoir sur les honoraires de l'expert auprès du régisseur d'Avances et de Recettes du Tribunal dans le délai de deux mois suivant la présente décision, étant précisé que la charge définitive de la rémunération de l'expert ressortira en principe des frais privilégiés de liquidation,

- dit que chaque partie est autorisée à consigner au lieu et place de l'autre si nécessaire,

- dit qu'il appartiendra aux parties de faire réinscrire au rôle cette affaire après dépôt du rapport d'expertise par de nouvelles conclusions,

- condamné Mme [K] à payer à M. [W] la somme de 886,65 € au titre de l'impôt foncier,

et par voie de conséquence,

- débouté Mme [K] de l'ensemble de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions d'appelante en date du 8 janvier 2024, Mme [K] demande à la cour de bien vouloir :

- déclarer recevable en la forme l'appel interjeté le 23 juillet 2021 par Mme [K] à l'encontre du jugement rendu le 16 juin 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Castres,

sur le fond,

- infirmer le jugement dont appel,

par voie de conséquence,

vu l'article 408 du CPC,

vu l'acquiescement de M. [W] quant à l'abandon de ses droits sur l'immeuble commun,

- déclarer irrecevables les demandes présentées par M. [W],

à défaut,

vu les articles 544 et 2227 du code civil,

- juger que la prescription du jugement n'emporte pas celle du droit de propriété,

à titre subsidiaire,

vu l'article 2272 du code civil,

- si par impossible la cour confirmait la décision déférée en ce qu'elle a déclaré prescrit le jugement du 2 juin 1999 et tiré comme conséquence la licitation de l'immeuble, elle jugerait que Mme [K] a acquis la propriété des parts de M. [W] sur l'immeuble par voie d'usucapion,

en toutes hypothèses,

- débouter M. [W] de sa demande de licitation,

- débouter M. [W] de sa demande de paiement d'une indemnité d'occupation,

- juger subsidiairement que si par impossible il y avait lieu à indemnité d'occupation elle s'analyserait comme la contrepartie de l'obligation alimentaire de M. [W],

- juger sans objet la réalisation d'une expertise,

- ordonner la liquidation du régime matrimonial, conformément au transfert de propriété ordonné par jugement en date du 2 juin 1999,

- juger que les comptes entre parties seront faits par devant le notaire,

- débouter M. [W] de sa demande au titre de l'article 700 du CPC,

- condamner M. [W] au paiement de la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du CPC dont distraction au profit de l'avocat soussigné.

Dans ses dernières conclusions d'intimé en date du 21 février 2024, M. [W] demande à la cour de bien vouloir :

confirmant le jugement dont appel en toutes ses dispositions et déboutant la défenderesse de l'ensemble de ses fins moyens et prétentions,

- déclarer irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par l'appelante pour la première fois en cause d'appel devant le juge du fond incompétent pour en connaître,

- constater que le jugement du tribunal de grande instance de Castres du 2 juin 1999 est prescrit,

- ordonner les opérations de compte, de liquidation et partage de l'indivision existant entre M. [W] et Mme [K],

- désigner Maître [E], ou tel notaire qu'il plaira à la Cour pour procéder aux opérations et recevoir l'acte de partage,

à défaut de licitation amiable, eu égard aux droits de M. [W],

- ordonner sur poursuite de celui-ci et en présence de Mme [K] où celle-ci dûment appelée au plus offrant et au dernier enchérisseur suivant cahier des charges déposé au greffe par le conseil de M. [W], la licitation à la barre du Tribunal judiciaire de Castres de l'immeuble sis commune de [Localité 9] cadastré section B [Cadastre 1] d'une contenance de 6A 99CA et selon la mise à prix fixée à 60 0000 €, les droits immobiliers en pleine propriété portant sur une maison d'habitation d'une contenance de 6A 99 CA située sur la commune de [Localité 9] figurant au cadastre sous les relations suivantes section B [Cadastre 1] de ladite ville,

- condamner Mme [K] à payer à M. [W] la somme de 242,50 € par mois depuis le mois de mars 2015 au titre des indemnités d'occupation ayant couru sur cet immeuble depuis le divorce,

à titre subsidiaire,

vu le jugement du tribunal de grande instance de Castres du juge aux affaires familiales du 2 juin 1999,

- condamner Mme [K] à régulariser l'acte de cession tel que prévu par ledit jugement et ce en l'étude de Maître [E], notaire à [Localité 8] sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la convocation qui lui sera faite,

- condamner Mme [K] à payer à M. [W] la somme de 888 65 € au titre des impenses exposées par celui-ci au titre de l'impôt foncier,

- condamner Mme [K] à payer à M. [W] la somme de 242,50 € par mois depuis le mois de mars 2015 au titre des indemnités d'occupation ayant couru sur cet immeuble depuis le divorce,

- condamner la défenderesse à payer au requérant la somme de 3 000 € au visa de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de compte, liquidation et partage et en ordonner distraction au profit de Maître Gilles Sorel.

La clôture de la mise en état a été ordonnée le 11 mars 2024 et l'audience de plaidoiries fixée le 26 mars 2024 à 14 heures.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la demande d'irrecevabilité pour cause d'acquiescement développée par l'appelante :

M. [W] soutient l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir soutenue par Mme [K] portant sur le fait que celui-ci aurait acquiescé à l'abandon du bien en pleine propriété au titre de prestation compensatoire à son profit durant l'instance en divorce. Il soutient qu'une telle fin de non-recevoir ressort de la compétence du conseiller de la mise en état, et par ailleurs, constitue une demande nouvelle.

Mme [K] n'y rétorque rien.

Aux termes de l'article 907 du code de procédure civile, à moins qu'il ne soit fait application de l'article 905, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée, dans les conditions prévues par les articles 780 à 807 et sous réserve des dispositions qui suivent.

L'article 789, alinéa 6 du code de procédure civile énonce lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.

Si, aux termes des dispositions précitées, le conseiller de la mise en état emprunte les pouvoirs conférés au juge de la mise en état lors de la première instance, il est néanmoins constant que sa compétence de principe reste exclusive de sa connaissance des fins de non-recevoir tranchées par le juge de la mise en état ou par le tribunal mais encore de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge dès lors qu'une telle compétence empiéterait sur le périmètre de compétence de la cour.

Tel est le cas de la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir soutenue par l'appelante à raison de l'acquiescement de l'intimé, précision faite que l'article 123 du code de procédure civile édicte que ladite fin de non-recevoir est recevable en tout état de cause, c'est à dire y compris si celle-ci est soumise pour la première fois en cause d'appel.

Dans ces conditions, cette demande d'irrecevabilité sera rejetée.

Sur l'irrecevabilité des demandes présentées par M. [W] :

Mme [K] fait valoir que M. [W] ayant accepté devant le juge du divorce l'abandon du bien commun en pleine propriété comme modalité de règlement de la prestation compensatoire, il a acquiescé à sa demande, partant reconnu son bien-fondé et par voie de conséquence renoncé à toute action en application de l'article 408 du code de procédure civile. Elle en déduit l'irrecevabilité de 'ses demandes', c'est-à-dire l'intégralité de ses demandes, au dispositif de ses conclusions.

M. [W] y rétorque que le jugement en question étant prescrit, la position qu'il avait pu développer à propos des modalités de règlement de la prestation compensatoire querellée est éteinte quand bien même il aurait formulé son accord quant à cette modalité lors de l'instance de divorce. Il affirme que Mme [K] a ainsi renoncé à sortir de l'indivision de sorte qu'il ne saurait être privé de son côté du droit à en sortir.

En soulevant la prescription du titre exécutoire de Mme [K], M. [W] ne remet pas en cause au fond le principe du règlement de la prestation compensatoire qui a été mise à sa charge sous la forme d'un abandon du bien commun en pleine propriété, auquel il avait effectivement pleinement consenti pour le proposer lui-même. Il s'attaque au délai d'exécution du jugement ayant consacré cette modalité, ce qui est tout à fait distinct, de sorte que le moyen développé par Mme [K] manque en droit.

L'irrecevabilité sera rejetée.

Sur la prescription du jugement en date du 2 juin 1999 consacrant le transfert de droits réels par l'abandon en pleine propriété du bien commun à titre de prestation compensatoire :

Mme [K] fait valoir que l'absence de publicité foncière n'a pas atteint son droit de propriété dès lors que le jugement en date du 2 juin 1999 l'a consacré de manière définitive. Elle y ajoute que l'action en partage étant par ailleurs imprescriptible, elle ne pouvait se voir opposer aucun délai pour mettre un terme à l'indivision et se voir attribuer ses droits sur l'immeuble. Elle demande donc réformation du jugement à ce titre ainsi que de l'ensemble des chefs de dispositif dépendant de la consécration erronée du caractère indivis du bien (indemnité d'occupation, licitation etc...). A titre subsidiaire, elle revendique l'usucapion de bonne foi fondée sur la prescription acquisive décennale et oppose encore la contrepartie à l'obligation alimentaire pour l'indemnité d'occupation.

M. [W] demande confirmation et se prévaut des dispositions de l'article L.111-4 alinéa 1 du CPCE. Il affirme que dès lors que Mme [K] n'a jamais donné suite aux demandes qu'il avait formulées à l'acte de mutation de propriété en exécution du jugement, l'attribution des droits en pleine propriété n'a jamais été mise en oeuvre. Il ajoute que si l'action en partage est imprescriptible, certaines prétentions des indivisaires le sont et qu'en l'absence de réïtération en la forme authentique de cette attribution, commandée par le jugement, l'attribution, elle, est prescrite. Il conteste tout usucapion considérant que Mme [K] ne dispose pas d'un juste titre tenant la prescription de celui-ci, la prescription acquisitive étant par ailleurs trentenaire selon lui en l'absence de toute bonne foi de Mme [K].

Par jugement définitif en date du 2 juin 1999, le juge du divorce, après réouverture des débats, exposant faire application des dispositions de l'article 274 du code civil en vigueur, a 'dit que l'intégralité des droits de propriété de M. [W] sur l'immeuble appartenant à la communauté formée par ce dernier et par Mme [K], sis [Adresse 5] à [Localité 9], est attribué à Mme [K] à titre de prestation compensatoire'. Il y a ajouté, dans un chef de dispositif distinct, que 'Mme [K] supporterait le paiement de l'intégralité des frais notariés de liquidation du régime matrimonial et de mutation de l'immeuble'. Il s'agit de la reprise des prétentions formulées par M. [W] lui-même au cours de l'instance qui indiquait 'ne pouvoir financièrement assumer une prestation compensatoire' mais 'ne pas s'opposer' aux modalités précitées de règlement, Mme [K] revendiquant de son côté uniquement 'l'ensemble des droits en usufruit que pouvait détenir son mari sur l'immeuble familial'.

Le jugement en question a opéré transfert de droits réels immobiliers portant sur le bien commun devenus indivis à travers la fixation de la modalité de règlement de la prestation compensatoire au profit de Mme [K].

Nul ne discute ni que ladite décision, en dépit de son caractère authentique, n'ait pas été publiée au service de la publicité foncière, ni encore, en réalité, que celle-ci ne comportait pas les mentions prescrites par le décret n°55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière (extrait cadastral, fiche d'immeuble, état hypothécaire hors formalité), reprises par l'article 1080 alinéa 2 du code de procédure civile dans une version entrée en vigueur seulement par un décret postérieur au jugement en date du 29 octobre 2004.

Il n'en demeurait pas moins que par l'effet même dudit jugement, dans le prolongement du jugement de divorce, Mme [K] devenait propriétaire de la totalité du bien dès lors que l'opération relevait des seuls rapports entre époux, le défaut de publicité foncière ne portant que sur la question de l'opposabilité dudit jugement à l'égard des tiers. Le règlement des 'frais de liquidation du régime matrimonial et de mutation' par Mme [K] était par ailleurs non seulement un chef de dispositif distinct mais, à supposer un lien encore différent de celui avancé par l'intimé qui évoque uniquement 'la régularisation de l'acte de mutation', ce qui est plus restreint que le règlement des frais notariés de liquidation du régime matrimonial, ne pouvait en toutes hypothèses qualifier une exigibilité différée tenant l'interdiction qui aurait résulté de ce terme suspensif incertain. Le notaire chargé du règlement du régime matrimonial n'avait aussi qu'à procéder aux formalités de publicité foncière qui s'imposaient en intégrant le bien cédé dans l'actif commun avant de la soustraire de la masse à partager suite à son attribution à titre de prestation compensatoire.

Cet abandon de bien en pleine propriété était donc en réalité acquis dès après le caractère définitif du principe même du divorce.

Dans ces conditions, et par voie de conséquence, nulle prescription du titre exécutoire n'était nécessairement encourue, précision faite que la prescription était alors trentenaire avec application des dispositions transitoires de l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 de sorte que l'article L.111-4 alinéa 1 n'était pas dans le débat, dès lors que la propriété de l'immeuble était acquise à Mme [K] par l'effet dudit jugement.

Le chef de dispositif ayant accueilli la prescription du titre exécutoire sera donc réformé.

Sur l'expertise du bien, la demande d'indemnité d'occupation du bien à la charge de Mme [K] et la licitation :

Le bien en question n'étant plus dans le partage pour être un bien personnel de Mme [K] depuis la date précitée, il ne saurait être question ni d'une indemnité d'occupation à compter de cette date ou dans le délai de prescription quinquennale (mars 2015) ni de licitation du bien, non indivis, et l'expertise revendiquée est dès lors sans objet.

Les chefs de dispositif déférés seront infirmés en ce sens.

Sur le règlement de la somme de 886,65 € au titre de la taxe foncière sur le bien de l'année 2018 par M. [W] :

M. [W] ayant réglé cette somme sans cause à Mme [K] pour lui profiter à travers un bien qui lui était propre, il y a lieu de retenir à son profit, sur le fondement de l'enrichissement injustifié, par application de l'article 1303 du code civil, cette créance, retenue incidemment à tort par le premier juge directement contre Mme [K] alors que s'il s'était agi d'un bien indivis, il aurait été question d'une créance contre l'indivision à suivre ce raisonnement.

Mme [K] ne conteste d'ailleurs finalement pas cette créance, indiquant simplement qu'elle entendra revendiquer devant notaire elle aussi les frais et échéances d'emprunt réglés entre la date de l'ordonnance de non-conciliation et la date du caractère définitif du jugement de divorce.

Le chef de dispositif déféré sera donc in fine confirmé par substitution de motifs.

Sur la demande d'astreinte aux fins de régularisation de l'acte de cession :

M. [W] demande une astreinte de 500 € par jour de retard aux fins de régularisation de l'acte de cession 'tel que prévu par le jugement' en date du 2 juin 1999, indiquant que Mme [K] s'est accomodée de cette situation, par son inertie, l'autorisant notamment à échapper au règlement de la taxe foncière et à occuper le bien sans régler de charges.

Mme [K] indique de son côté que son inaction était liée à son impécuniosité, tenant l'abandon financier total de l'époux et son désintérêt aussi conséquent envers les quatre enfants dont elle a assumé la charge intégrale.

Le jugement en date du 2 juin 1999 ne prescrivant aucun acte de cession mais uniquement le règlement par Mme [K] de l'intégralité des frais notariés de liquidation du régime matrimonial et de mutation de l'immeuble, la demande est nécessairement sans objet telle que formulée.

Cette demande sera rejetée alors qu'il est par ailleurs de l'intérêt même de Mme [K] désormais de procéder à toute démarches administratives complémentaires auprès du notaire afin, le cas échéant, de définitivement apurer sa situation administrative et fiscale.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les entiers dépens seront partagés par moitié entre les parties.

L'équité ne commande pas l'application d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

statuant dans les limites de sa saisine :

- infirme le jugement attaqué en ce qu'il a :

- constaté que le jugement du 2 juin 1999 est prescrit faute d'avoir été exécuté dans le délai légal,

- constaté que Mme [K] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter de mars 2015,

- ordonné la licitation amiable de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 9] et à défaut la licitation judiciaire au plus offrant et au dernier enchérisseur suivant cahier des charges déposé au greffe par le conseil de M. [W] à la barre du tribunal Judiciaire de Castres de l'immeuble sis commune de [Localité 9] cadastré section B [Cadastre 1] d'une contenance de 6A 99 CA,

- ordonné avant dire droit sur la licitation de l'immeuble et la fixation de l'indemnité d'occupation une expertise et commet pour y procéder M. [L] [Z] [Adresse 2] [Localité 6],

- fixé à 1 000 € le montant de la consignation que devra verser chacune des deux parties soit 2 000 € au total, à valoir sur les honoraires de l'expert auprès du régisseur d'avances et de recettes du Tribunal dans le délai de deux mois suivant la présente décision, étant précisé que la charge définitive de la rémunération de l'expert ressortira en principe des frais privilégiés de liquidation,

- dit que chaque partie est autorisée à consigner au lieu et place de l'autre si nécessaire,

- dit qu'il appartiendra aux parties de faire réinscrire au rôle cette affaire après dépôt du rapport d'expertise par de nouvelles conclusions,

statuant à nouveau des chefs de jugement infirmés :

- rejette la demande de prescription du jugement en date du 2 juin 1999 ;

- dit que Mme [C] [K] est propriétaire du bien sis [Adresse 5] à [Localité 9] cadastré section B[Cadastre 1] depuis que le principe du divorce a été définitivement acquis entre les époux ;

- rejette la demande d'indemnité d'occupation formulée à son encontre à compter du mois de mars 2015 ;

- rejette la demande d'expertise du bien précité ;

- rejette la demande de licitation du bien précité ;

- confirme le jugement attaqué pour le surplus ;

- rejette toute autre demande plus ample ou contraire ;

- dit que les entiers dépens seront partagés par moitié entre les parties.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,

M.TACHON C. DUCHAC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 2
Numéro d'arrêt : 21/03353
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;21.03353 ?
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