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30/05/2024 | FRANCE | N°22/01418

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 30 mai 2024, 22/01418


30/05/2024



ARRÊT N° 187/24



N° RG 22/01418 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OXIY

MS/MP



Décision déférée du 15 Février 2022 - Pole social du TJ de TOULOUSE (21/00794)

R. BONHOMME























CAF HAUTE-GARONNE





C/





[F] [Z]

[M] [Z]

[Y] [Z]





























































INFIRMATION







































REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***





APPELANTE



CAF HAUTE-GARONNE

POLE JURIDIQUE

[Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par M...

30/05/2024

ARRÊT N° 187/24

N° RG 22/01418 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OXIY

MS/MP

Décision déférée du 15 Février 2022 - Pole social du TJ de TOULOUSE (21/00794)

R. BONHOMME

CAF HAUTE-GARONNE

C/

[F] [Z]

[M] [Z]

[Y] [Z]

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

CAF HAUTE-GARONNE

POLE JURIDIQUE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par M. [K] [C] (Membre de l'organisme) en vertu d'un pouvoir général

INTIMES

Monsieur [F] [Z] (décédé)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [M] [Z]

en qualité d'ayant droit de M. [Z] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparante en personne, non assistée

Madame [Y] [Z]

en qualité d'ayant droit de M. [Z] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparante en personne, assistée de Me Ouafae EL ABDELLI, avocate au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 315550022022010176 du 11/07/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2024, en audience publique, devant M. SEVILLA, conseillère chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.

Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. SEVILLA, conseillère

M. DARIES, conseillère

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

M. [F] [Z] , né le 15 novembre 1958 bénéficiait de l'allocation adulte handicapés(AAH) depuis le 1er décembre 1998 à hauteur de 887,57 euros par mois.

Il percevait également l'allocation de solidarité spécifique à hauteur de 500 euros par mois, et la majoration pour la vie autonome à hauteur de 104,77 euros par mois.

Par courrier du 22 février 2021, la caisse d'allocations familiales (CAF) de la Haute Garonne a notifié à M. [F] [Z] la fin du versement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) à compter du 1er janvier 2021.

M. [F] [Z] a contesté la décision devant la commission de recours amiable de la CAF par courrier du 6 avril 2021.

Par requête du 31 août 2021, M. [Z] a saisi le tribunal judiciaire de Toulouse d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Par jugement du 15 février 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

-Ordonné à la CAF de la Haute-Garonne de rétablir M. [F] [Z] dans ses droits à l'AAH et à la majoration pour la vie autonome à compter du 1 er janvier 2021 après déduction du montant des avantages vieillesse dont il peut bénéficier,

-Rejeté les demandes de condamnation en paiement de M. [F] [Z] pour le surplus,

-Rejeté la demande de dommages-intérêts,

-Condamné la CAF de la Haute-Garonne à payer à M. [Z] la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamné la CAF de la Haute-Garonne aux dépens.

M. [Z] est décédé le 25 février 2022.

Par déclaration du 6 avril 2022, la CAF de la Haute-Garonne a interjeté appel.

Dans ses dernières écritures, reprises oralement la caisse demande à la cour d'infirmer le jugement, de rejeter les demandes indemnitaires des ayants droits du défunt et de les condamner à lui verser 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse rappelle que M. [Z] avait atteint l'âge légal de départ à la retraite à compter de décembre 2020 et que dès cette date la CAF lui a demandé de faire valoir ses droits, l'AAH ayant un caractère subsidiaire.

Elle ajoute qu'en dépit de cette demande, M. [Z] a renoncé à liquider sa retraite à l'âge de 62 ans demandant un report de liquidation à 67 ans.

Elle insiste sur le fait que M. [Z] avait été alerté sur les conséquences de son choix de reporter sa demande de liquidation de pension de retraite à l'âge de 67 ans et considère n'avoir commis aucune faute.

Dans ses dernières écritures reprises oralement, Mme [Y] [Z] venant aux droits de son père M. [F] [Z] demande à la cour :

-d'infirmer le jugement,

-de constater le droit de M. [Z] au bénéfice de l'AAH et de la majoration pour la vie autonome jusqu'au 25 février 2022,

-d'ordonner à la CAF de verser rétroactivement à Mme [Y] [Z] l'AAH de 887,57 euros à compter du 1er janvier 2021 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 7 jours suivant signification de la décision,

-d'ordonner à la CAF de verser rétroactivement la majoration pour la vie autonome d'un montant de 104,77 euros à compter du 1er janvier 2021 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 7 jours suivant signification de la décision,

-de condamner la CAF de Haute Garonne à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la suspension arbitraire des droits à l'AAH.

Elle soutient que son père a choisi de reporter son départ à la retraite à 67 ans ce qui est parfaitement autorisé par les textes et qu'il était en droit de continuer à bénéficier de l'AAH.

Elle affirme que les textes ne soumettent pas le bénéfice de l'AAH à la condition de faire valoir ses avantages vieillesses.

Dans ses dernières écritures reprises oralement, Mme [M] [Z] venant aux droits de son père, demande à la cour d'infirmer le jugement, et d'ordonner à la CAF de lui verser rétroactivement :

-l'AAH soit 887,57 euros par mois à compter du 1er janvier 2021, jusqu'au décès du 25 février 2022 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 7 jours suivant signification de la décision,

-la majoration pour la vie autonome soit 104,77 euros à compter du 1er janvier 2021 jusqu'au 25 février 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter l'expiration d'un délai de 7 jours suivant signification de la décision,

-15.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la suspension de l'AAH,

-1.445,73 euros en réparation du préjudice économique,

-5.000 euros en réparation du préjudice moral.

Subsidiairement elle demande de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les dommages et intérêts et de condamner la CAF aux dépens et à lui payer la somme de 94,50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que par courrier du 23 novembre 2020 son père a demandé à la CARSAT de reporter son départ à la retraite à 67 ans. Elle affirme que l'article L 821-1 du code de la sécurité sociale ne prévoit pas la suspension de l'AAH en cas de refus de faire valoir ses droits à retraite. Elle soutient que l'article L 821-2 du code de la sécurité sociale qui prévoit la fin du versement de l'allocation à l'âge de 62 ans n'est pas applicable son père ayant un taux d'incapacité supérieur à 80%.

Motifs:

Sur les droits à AAH de M. [Z] à compter du 1er janvier 2021:

L'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige prévoit:

'Toute personne résidant sur le territoire métropolitain ou dans les collectivités mentionnées à l'article L. 751-1 ou à Saint-Pierre-et-Miquelon ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L.. 541-1 et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés.

(...)

Le droit à l'allocation aux adultes handicapés est ouvert lorsque la personne ne peut prétendre, au titre d'un régime de sécurité sociale, d'un régime de pension de retraite ou d'une législation particulière, à un avantage de vieillesse, à l'exclusion de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1, ou d'invalidité, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à constante d'une tierce personne visée à l'article L. 355-1, ou à une rente d'accident du travail, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne mentionnée à l'article L. 434-2, d'un montant au moins égal à cette allocation.

Lorsque cet avantage ou le montant mensuel perçu au titre de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 est d'un montant inférieur à celui de l'allocation aux adultes handicapés, celle-ci s'ajoute à la prestation sans que le total des deux avantages puisse excéder le montant de l'allocation aux adultes handicapés.

Pour la liquidation des avantages de vieillesse, les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés sont réputés inaptes au travail à l'âge minimum auquel s'ouvre le droit à pension de vieillesse.

Lorsqu'une personne bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés se voit allouer une pension de retraite en application de l'article L. 351-7-1 A du présent code ou de l'article L. 732-30 du code rural et de la pêche maritime ou fait valoir son droit à un avantage de vieillesse, d'invalidité ou à une rente d'accident du travail, l'allocation aux adultes handicapés continue de lui être servie jusqu'à ce qu'elle perçoive effectivement l'avantage auquel elle a droit. Pour la récupération des sommes trop perçues à ce titre, les organismes visés à l'article L. 821-7 sont subrogés dans les droits des bénéficiaires vis-à-vis des organismes payeurs des avantages de vieillesse, d'invalidité ou de rentes d'accident du travail.'

Contrairement à ce qu'affirme les intimées, l' AAH est une prestation sociale qui a un caractère subsidiaire ce qui signifie que le bénéficiaire doit d'abord faire valoir ses droits à une retraite de base ou complémentaire lorsqu'il atteint l'âge légal de la retraite à savoir 62 ans et ce y compris pour les personnes en situation de handicap justifiant d'un taux d'incapacité d'au moins 80 %.

C'est donc de manière erronée que les intimées soutiennent que M. [Z] était en droit de ne pas liquider ses droits à retraite à l'âge légal et pouvait continuer de percevoir l'AAH jusqu'à ses 67 ans.

En outre, M. [Z] qui présentait un taux d'incapacité permanente minimum de 80 %, aurait pu percevoir une AAH différentielle afin de compenser la perte de revenu liée à la liquidation de droits à retraite à l'âge de 62 ans.

A plusieurs reprises la CARSAT a attiré l'attention de M. [Z] sur les conséquences de son refus de partir à la retraite à l'âge légal.

Ainsi , dans un courrier du 4 décembre 2020, la CARSAT lui a indiqué 'Si vous annulez votre demande de retraite vous allez vous retrouver sans ressources car l'AAH est supprimée à l'âge légal soit 62 ans'.

Ainsi, M. [Z] qui a atteint l'âge légal de la retraite le 15 novembre 2020, pouvait dès le 1er décembre 2020 prétendre à une pension de retraite de sorte que l' AAH a été à juste titre suspendue par la CAF à compter du mois de janvier 2021 dès lors qu'il n'a pas fait valoir ses droits à la retraite.

Les demandes formulées par ses ayants droits au titre d'un rappel d' AAH à compter du 1er janvier 2021 doivent par conséquent être rejetées.

Sur les droits à AAH différentielle:

L'article L821-1 du code de la sécurité sociale rappelle que lorsque cet avantage(vieillesse) ou le montant mensuel perçu au titre de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 est d'un montant inférieur à celui de l'allocation aux adultes handicapés, celle-ci s'ajoute à la prestation sans que le total des deux avantages puisse excéder le montant de l'allocation aux adultes handicapés.

Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, M. [Z] ne pouvait prétendre à ce dispositif nommé AAH différentielle à compter de janvier 2021, ce versement étant conditionné par la loi, à la perception des avantages vieillesse, avantages que M. [Z] a refusé de liquider à l'âge légal.

Cette demande ne saurait par conséquent aboutir et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts:

Les appelantes reprochent à la caisse d'avoir commis une faute en refusant l'attribution de l'AAH à leur père. Toutefois la CAF n'a fait qu'appliquer la loi et aucun manquement au devoir de conseil n'est par ailleurs reproché par les appelantes à l'égard de la CAF.

Les manquements évoqués à l'égard de la CARSAT ne sont pas opposables à la CAF.

Dans ces conditions à défaut de preuve d'une faute commise par la CAF, les intimées seront déboutées de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation de préjudices.

Sur les mesures accessoires

Par souci d'équité les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens seront rejetées et la CAF supportera les dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs:

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts

Statuant à nouveau,

Dit que la CAF a à juste titre suspendu les droits AAH et à majoration pour vie autonome de M. [F] [Z] à compter du 1er janvier 2021,

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la CAF aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/01418
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;22.01418 ?
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