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28/05/2024 | FRANCE | N°22/03891

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 28 mai 2024, 22/03891


28/05/2024



ARRÊT N°



N° RG 22/03891

N° Portalis DBVI-V-B7G-PCPK

AMR/DG



Décision déférée du 25 Octobre 2022

Juge de la mise en état de TOULOUS

21/05040

Mme GIGAULT

















Communauté COMMUNAUTE DE COMMUNES PYRENEES HAUT GARONNAISES





C/



S.C.I. JPL [Localité 5]




































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à



Me DESSART

Me THEVENOT

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



COMMUNAUTE DE COMMUNES PYRENÉES HAUT GARONNAISES

Poursuit...

28/05/2024

ARRÊT N°

N° RG 22/03891

N° Portalis DBVI-V-B7G-PCPK

AMR/DG

Décision déférée du 25 Octobre 2022

Juge de la mise en état de TOULOUS

21/05040

Mme GIGAULT

Communauté COMMUNAUTE DE COMMUNES PYRENEES HAUT GARONNAISES

C/

S.C.I. JPL [Localité 5]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

Me DESSART

Me THEVENOT

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

COMMUNAUTE DE COMMUNES PYRENÉES HAUT GARONNAISES

Poursuites et diligences de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP SCP DESSART, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

S.C.I. JPL [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Louis THEVENOT de la SELEURL LT AVOCAT, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

A.M. ROBERT, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte du 15 décembre 2019, la Communauté de Communes Pyrénées Haut Garonnaises (Ccphg) a conclu avec la Sci Jpl [Localité 5] un compromis de vente portant sur un ensemble immobilier situé à [Localité 5].

La Ccphg avait pour projet d'y installer la partie administrative des bureaux de l'Office de Tourisme et de réaliser divers aménagements touristiques.

La réitération de la vente par acte authentique était conditionnée à l'obtention par la Ccphg, avant le 30 juin 2021, des autorisations administratives relatives au changement de destination du bien et aux établissements recevant du public.

Par arrêté du 30 décembre 2020, la commune de [Localité 5] a refusé de délivrer le permis de construire sollicité par la Ccphg du fait du risque d'inondation affectant le site.

Estimant que ce refus empêchait la réalisation des conditions suspensives prévues au compromis, la Ccphg informait par courrier du 3 février 2021 la Sci Jpl [Localité 5] qu'elle n'entendait plus réitérer la vente par acte authentique.

Par acte d'huissier du 4 novembre 2021, la Sci Jpl [Localité 5] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse la communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises (Ccphg), aux fins, notamment, d'obtenir la vente forcée du bien immobilier lui appartenant.

Par ordonnance du juge de la mise en état, du 25 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse, a :

-rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action soulevée par la Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises,

-condamné la Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises à payer à la Sci Jpl [Localité 5] la somme de 1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises aux dépens de l'incident,

-renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 27 décembre 2022 avec injonction péremptoire de conclure au fond pour la Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises.

Le juge de la mise en état a considéré que le délai de un mois critiqué était une manière de conditionner dans le temps l'existence des obligations issues d'un contrat et devait donc être qualifié de délai de forclusion auquel ne s'applique pas les dispositions de l'article 2254 du Code civil.

Il a estimé que l'appréciation du non-respect du droit à un procès équitable par la clause litigieuse ne devait pas se faire au regard du délai réel dont a disposé la Sci Jpl [Localité 5] mais uniquement au regard des termes de la clause elle-même.

Il a considéré que le délai stipulé par la clause du compromis de vente pour agir en justice était particulièrement bref, alors même que l'action en justice devant le tribunal judiciaire en matière de vente forcée impose de se faire représenter par un avocat pour introduire l'instance tout en tenant compte des délais de signification des actes extra-judiciaires, et qu'il était dès lors de nature à priver le justiciable du droit de soumettre son litige au tribunal et contraire à l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Par déclaration du 7 novembre 2022, la Communauté de Communes Pyrénées Haut- Garonnaises a relevé appel de cette ordonnance en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 décembre 2022, la communauté de communes Pyrénées Haut-Garonnaises, appelante, demande à la cour de :

-annuler l'ordonnance du 25 octobre 2022,

-déclarer la société Jpl [Localité 5] irrecevable en son action,

-condamner la société Jpl [Localité 5] à lui verser la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 décembre 2022, la Sci Jpl [Localité 5], intimée, demande à la cour de :

-confirmer l'ordonnance d'incident rendue le 25 octobre 2021,

Y ajoutant

-condamner la Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises à payer à la Sci Jpl [Localité 5] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 janvier 2024 et l'affaire a été examinée à l'audience du 29 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En vertu des dispositions des articles 1103 et 1188 du code civil les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et ils s'interprètent d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes.

Le compromis de vente signé le 15 décembre 2019 stipule notamment, au chapitre « REITERATION AUTHENTIQUE » : «En cas de réalisation des conditions suspensives (...), la signature de l'acte authentique de vente aura lieu au plus tard le 30 juin 2021. ll est ici précisé que les conditions suspensives devront être réalisées dans le délai de validité des présentes sauf à tenir compte des délais et procédures spécifiques convenus.

Toutefois, ce délai sera automatiquement prorogé jusqu'à réception des pièces administratives nécessaires à la perfection de l'acte authentique et sans que la liste qui suit soit limitative : renonciation expresse ou tacite à un droit de préemption, certificats d'urbanisme, arrêtés d'alignement, états hypothécaires hors formalités de moins de deux mois, cadastre, répertoire civil.

En toute hypothèse, cette prorogation ne pourra excéder le 30 juillet 2021.

La date d'expiration de ce délai, ou de sa prorogation ainsi qu'il est indiqué ci-dessus, n'est pas extinctive mais constitutive du point de départ de la période à partir de laquelle l'une des parties pourra obliger l'autre à s'exécuter.

Si l'une des parties vient à refuser de réitérer la présente vente, l'autre pourra invoquer le bénéfice de la clause pénale ou saisir le Tribunal compétent afin de faire constater la vente par décision de Justice, la partie défaillante supportant les frais de justice, le tout dans un délai d'un mois de la date indiquée en tête du présent paragraphe, et cette partie devra en outre payer à son cocontractant le montant de la clause pénale stipulée aux présentes, nonobstant tous dommages et intérêts ».

La Communauté de communes Pyrénées Haut Garonnaises soutient que ce délai d'un mois est un délai de forclusion, que la clause contractuelle ci-dessus rappelée n'offre aux parties aucune possibilité d'agir en justice au-delà du délai d'un mois à compter du 30 juin 2021 ou à compter du 30 juillet 2021 et qu'ainsi l'action initiée par la Sci Jpl [Localité 5] le 4 novembre 2021 est tardive et partant irrecevable.

La Sci Jpl [Localité 5] fait valoir que ce délai est contraire à l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme en ce qu'il n'est ni raisonnable ni suffisant pour lui permettre d'agir en justice et qu'en tout état de cause il est illicite en ce qu'il est inférieur à un an et contrevient ainsi aux dispositions de l'article 2254 du code civil.

Il résulte des termes de la clause contractuelle litigieuse que les parties n'ont pas entendu fixer un terme définitif à la possibilité, pour l'une ou pour l'autre, d'agir en justice pour obtenir la vente forcée.

En effet, le point de départ de ce délai n'est pas fixé avec précision, la première partie de la clause prévoyant la possibilité d'une prorogation du délai pour signature de l'acte authentique de vente jusqu'au 30 juillet 2021 et indiquant que « la date d'expiration de ce délai, ou de sa prorogation ainsi qu'il est indiqué ci-dessus, n'est pas extinctive mais constitutive du point de départ de la période à partir de laquelle l'une des parties pourra obliger l'autre à s'exécuter » alors que la deuxième partie de la clause fixe le point de départ du délai d'un mois pour agir à « la date indiquée en tête du présent paragraphe », soit le 30 juin 2021 sans aucune référence à la date du 30 juillet 2021 à laquelle pourtant la signature de l'acte pouvait être prorogée.

En outre, dans l'expression « le point de départ de la période à partir de laquelle l'une des parties pourra obliger l'autre à s'exécuter » le délai d'un mois n'apparaît pas comme un délai pour agir mais comme une « période » initiant la possibilité pour chacune des parties de contraindre l'autre à exécuter ses obligations, en vue du paiement de la clause pénale ou de la vente forcée.

Enfin aucune sanction n'est précisément formulée, les parties contractantes n'ayant mentionné à aucun moment le terme « irrecevabilité ».

Cette analyse est confortée par les deux derniers paragraphes du chapitre « REITERATION AUTHENTIQUE » qui stipule : « Si le défaut de réitération à la date de réalisation ci-dessus prévue provient de la défaillance de l'acquéreur, le vendeur pourra renoncer à poursuivre l'exécution de la vente en informant l'acquéreur de sa renonciation par lettre recommandée avec accusé de réception, ce dernier faisant foi, ou par exploit d'huissier.

Dans ce cas, il pourra immédiatement disposer du bien dont il s'agit : il pourra le vendre à toute autre personne ou en faire tel usage qu'il avisera et il lui sera dû par l'acquéreur, le montant de la clause pénale stipulée aux présentes, déduction faite des frais de celles-ci. ».

Il apparaît ainsi que l'obtention du paiement de la clause pénale par le vendeur en cas de défaillance de l'acquéreur n'est enfermée dans aucun délai, ce qui serait en totale contradiction avec le paragraphe précédent s'il était interprété dans le sens de l'instauration d'un délai de mois pour agir en justice aux fins d'obtenir paiement de la clause pénale ou la vente forcée.

Dans ces conditions la fin de non recevoir tirée du délai de forclusion de un mois contractuellement prévu soulevée par la Communauté des communes Haut-Garonnaises doit être rejetée et la demande de vente forcée de la Sci Jpl [Localité 5] déclarée recevable, le jugement étant confirmé.

Les demandes annexes

Confirmé en toutes ses dispositions principales l'ordonnance entreprise doit aussi être confirmée quant à ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant en appel, la Communauté des communes Pyrénées Haut Garonnaises supportera les dépens d'appel et se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

-Confirme l'ordonnance rendue le 25 octobre 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse ;

Y ajoutant,

-Condamne la Communauté des communes Pyrénées Haut Garonnaises aux dépens d'appel ;

-Condamne la Communauté des communes Pyrénées Haut Garonnaises à payer à la Sci Jpl [Localité 5] la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

-Déboute la Communauté des communes Pyrénées Haut Garonnaises de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N.DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 22/03891
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;22.03891 ?
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