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28/05/2024 | FRANCE | N°22/01787

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 28 mai 2024, 22/01787


28/05/2024



ARRÊT N°



N° RG 22/01787

N° Portalis DBVI-V-B7G-OY3A

SL/DG



Décision déférée du 05 Avril 2022

TJ de [Localité 9]

21/00446

Mme [T]

















[J] [M]

[L] [A]





C/



[U] [W] veuve [D]

[I] [D] épouse [Y]

COMMUNAUTE DE COMMUNES TERRES DES CONFLUENCES

































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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à



Me NORAY-ESPEIG

Me CAMBRIEL

Me LANEELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTS



Monsieur [J] [M]

[Adresse 3]

[Localité ...

28/05/2024

ARRÊT N°

N° RG 22/01787

N° Portalis DBVI-V-B7G-OY3A

SL/DG

Décision déférée du 05 Avril 2022

TJ de [Localité 9]

21/00446

Mme [T]

[J] [M]

[L] [A]

C/

[U] [W] veuve [D]

[I] [D] épouse [Y]

COMMUNAUTE DE COMMUNES TERRES DES CONFLUENCES

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

Me NORAY-ESPEIG

Me CAMBRIEL

Me LANEELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTS

Monsieur [J] [M]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Me Jérôme NORAY-ESPEIG de la SELARL NORAY-ESPEIG, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [L] [A]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me Jérôme NORAY-ESPEIG de la SELARL NORAY-ESPEIG, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉS

Madame [U] [W] veuve [D]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL - DE MALAFOSSE - STREMOOUHOFF - GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Madame [I] [D] épouse [Y]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL - DE MALAFOSSE - STREMOOUHOFF - GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMMUNAUTE DE COMMUNES TERRES DES CONFLUENCES

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

A.M. ROBERT, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

Exposé des faits et de la procédure :

Par acte authentique du 27 décembre 2018, passé devant Me [K] [R], notaire à [Localité 8], Mme [U] [W] veuve [D] et Mme [I] [D] épouse [Y] ont vendu à M. [J] [M] et Mme [L] [A] une maison d'habitation sise [Adresse 4] (82), moyennant le prix de 230.000 euros.

Le vendeur a déclaré que l'immeuble n'était pas raccordé à un réseau d'assainissement collectif des eaux usées à usage domestique, et qu'il était situé dans une zone non encore desservie par un réseau collectif d'assainissement.

Il était précisé dans l'acte de vente qu'un diagnostic en date du 17 mai 2018 constatait :

'Installation non conforme à la réglementation en vigueur.

- Si existante, la ventilation secondaire doit être remontée au-dessus de la toiture ;

- les arbres et arbustes ne sont pas à 3 m minimum du dispositif de traitement ;

- absence de regard de bouclage.

Conseils :

- mettre en place la ventilation secondaire ;

- arracher les arbres et les arbustes sur le dispositif de traitement,

- mettre en place le regard de bouclage (traitement).

Le nouvel acquéreur doit se mettre en conformité dans l'année qui suit la date de signature de l'acte de vente.'

Le vendeur a informé l'acquéreur qu'à sa connaissance, les ouvrages permettant d'amener les eaux usées domestiques de l'immeuble à la partie publique ne présentaient pas d'anomalie ni aucune difficulté particulière d'utilisation.

Ce diagnostic du dispositif d'assainissement non collectif avait été effectué par le Service Public d'Assainissement Non Collectif (ci-après désigné Spanc) de la communauté de communes Terres des Confluences.

M. [M] et Mme [A] se sont plaints d'un dysfonctionnement du réseau des eaux usées avec débordement.

Par ordonnance du 9 juillet 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban a institué une expertise, et désigné pour y procéder M. [P] [Z].

L'expert judiciaire a clôturé son rapport le 10 mars 2021.

Par actes du 18 mai 2021, M. [J] [M] et Mme [L] [A] ont fait assigner Mme [I] [D] épouse [Y] et Mme [U] [W] veuve [D] et la communauté de communes Terres des Confluences devant le tribunal judiciaire de Montauban, aux fins d'indemnisation de leurs préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés et de la responsabilité du diagnostiqueur.

Par jugement du 5 avril 2022, le tribunal judiciaeire de Montauban a :

- débouté [J] [M] et [L] [A] de toutes leurs demandes,

- mis hors de cause la communauté de communes Terres des Confluences,

- condamné [J] [M] et [L] [A] à payer à [U] [W] veuve [D] et à [I] [D] la somme de 1.500 euros en application de l'article 700,1° du code de procédure civile,

- condamné [J] [M] et [L] [A] à payer à la communauté de communes Terres des Confluences, la somme de 1.500 euros en application de l'article 700,1° du code de procédure civile,

- rejeté toutes autres demandes,

- condamné [J] [M] et [L] [A] aux dépens, en ceux compris les frais de référé et d'expertise judiciaire,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu qu'il n'était pas démontré le caractère rédhibitoire du vice affectant cette installation alors que la diagnostic établi par le Spanc et visé par la promesse de vente et l'acte authentique de vente concluait à la non-conformité de l'installation d'assainissement à la réglementation en vigueur et préconisait la réalisation de travaux dans le délai d'un an suivant l'acte de vente ; que ces éléments étaient de nature à susciter chez les acquéreurs, dès la signature de la promesse de vente, et a minima, une réflexion sur le chiffrage des travaux préconisés dont l'évaluation par l'expert confirme l'importance, et de nature à modifier l'équilibre du contrat.

Il a ajouté qu'il n'était pas démontré que les venderesses avaient connaissance de l'existence du vice affectant l'installation d'assainissement de l'immeuble vendu, et qu'ainsi la clause exonératoire de garantie des vices cachés avait vocation à s'appliquer.

Il a estimé que la responsabilité du diagnostiqueur ne pouvait être engagée, car il n'avait pas commis de faute, son diagnostic ayant été réalisé conformément aux prescriptions réglementaires et aux règles de l'art prescrivant un contrôle visuel, qu'il avait fait état des non-conformités que son contrôle avait pu mettre en évidence et qu'il ne saurait être considéré comme erroné car il avait informé les acquéreurs de la non-conformité de l'installation et préconisé des travaux conformes à ceux prescrits par l'expert judiciaire, travaux dont il appartenait aux acquéreurs de faire chiffrer le coût.

-:-:-:-

Par déclaration du 9 mai 2022, M. [J] [M] et Mme [L] [A] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions, sauf celle relative à l'exécution provisoire.

Prétentions et moyens des parties

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 juillet 2022,

M. [J] [M] et Mme [L] [A], appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1603, 1641 et suivant du code civil, de l'article 1382 ancien du code civil (devenu 1240), et des articles 696, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme étant injustifiées et en tout cas mal fondées

- déclarer les appelants recevables et fondes en leurs demandes,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

débouté M. [M] et Mme [A] de toutes leurs demandes,

mis hors de cause la communauté de communes « Terres des Confluences »,

condamné M. [M] et Mme [A] à payer à Mme [W] et Mme [D] la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné M. [M] et Mme [A] à payer à la communauté de communes « Terres des Confluences » la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné M. [M] et Mme [A] aux dépens, y compris les frais de référé et d'expertise judiciaire,

Et statuant à nouveau :

- condamner, in solidum, Mme [W], Mme [D] et la communauté de communes « Terres des Confluences » à payer M. [M] et Mme [A] la somme de 13.786,30€ toutes taxes comprises, au titre de la reconstruction du système d'assainissement,

- condamner, in solidum, Mme [W], Mme [D] et la communauté de communes « Terres des Confluences » à payer à M. [M] et Mme [A] la somme de 5.000,00€, au titre du préjudice de jouissance,

- Condamner, in solidum, Mme [W] et Mme [D] à payer à M. [M] et Mme [A] la somme de 2.000,00 €, à titre de dommages et intérêts,

- condamner, in solidum, Mme [W], Mme [D] et la communauté de communes « Terres des Confluences » à payer à M. [M] et Mme [A] la somme de 452,00€, au titre des débouchages du réseau,

- condamner, in solidum, Mme [W], Mme [D] et la communauté de communes « Terres des Confluences » à payer à M. [M] et Mme [A] la somme de 9.000,00€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Ils soutiennent que les vices sont antérieurs à la vente, qu'ils n'étaient pas apparents lors de la vente, qu'ils rendent l'immeuble impropre à sa destination et que s'ils les avaient connus, ils n'auraient pas acquis le bien immobilier ou n'en auraient donné qu'un moindre prix. Ils soutiennent que les constatations du SPANC relèvent de points mineurs, qu'il ne fait pas état d'une impossibilité pour le réseau d'assainissement de fonctionner correctement, que les venderesses ont déclaré que le système fonctionnait sans difficulté, et qu'ainsi, ils ont pas eu la possibilité d'envisager le moindre dysfonctionnement.

Ils soutiennent que les venderesses avaient connaissance du vice, et qu'ainsi la clause d'exclusion des vices cachés ne peut jouer.

Ils estiment que la responsabilité du diagnostiqueur est engagée à leur égard car il existe des points inexacts dans la rédaction du diagnostic, alors que ces points auraient pu être constatés sans investigations destructives. Ils conviennent en revanche que le diagnostiqueur a mentionné dans son rapport que le regard de bouclage et la ventilation secondaire n'avaient pu être vérifiés lors de la visite. Ils soutiennent que si les non-conformités avaient été renseignées par le SPANC dans toute leur ampleur, ou à tout le moins si les éléments avaient été renseignés comme non vérifiables, le chiffrage de la mise aux normes de l'installation aurait été sans commune mesure avec celui avancé lors de la vente, les venderesses ayant indiqué lors des négociations que le devis réalisé pour la mise en conformité de la fosse s'élevait à 1.960 euros.

Ils exposent leur préjudice.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 septembre 2022, Mme [I] [D] et Mme [U] [W] veuve [D], intimées, demandent à la cour, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, de:

À titre principal,

- confirmer en l'ensemble de ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Montauban le 5 avril 2022.

- débouter M. [M] et Mme [A] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions présentées à l'encontre de Mme [D] et Mme [W] veuve [D] en principal, frais et accessoires,

Y ajoutant,

- condamner M. [M] et Mme [A] au paiement d'une indemnité de 5.000 € au profit de Mme [D] et Mme [W] veuve [D] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de leurs frais irrépétibles d'appel,

- condamner M. [M] et Mme [A] aux entiers dépens de la procédure d'appel,

Subsidiairement,

si par impossible la Cour devait réformer la décision de première instance et juger que la garantie des vices cachés doit recevoir application :

- débouter M. [M] et Mme [A] de leur demande estimatoire au titre du préjudice matériel fondée sur la reprise du réseau et plus infiniment subsidiairement encore limiter la réparation au coût évalué par l'expert judiciaire, dont à déduire le coût de la remise en état du réseau suivant rapport du Spanc et devis produit par les appelants, soit à la somme de 8.104,80 € toutes taxes comprises,

- statuer ce que de droit sur la demande présentée au titre des frais de débouchage du réseau sur facturation,

- limiter à 500 € l'indemnisation qui pourra être allouée aux requérants au titre de l'indemnisation de leur préjudice de jouissance,

- les débouter de leur demande de dommages et intérêts complémentaire,

En tout état de cause,

si les prétentions de la communauté de communes Terres des Confluences devaient être reprises subsidiairement à hauteur d'appel,

- débouter la communauté de communes Terres des Confluence de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions tendant à être relevée et garantie indemne des condamnations prononcées à son encontre par Mme [D] et Mme [W] veuve [D].

Elles reconnaissent que les vices étaient antérieurs à la vente. Elles soutiennent que le rapport du SPANC alertait les acquéreurs sur le fait que le traitement n'était pas contrôlable, que les vices étaient en partie dénoncés au rapport du SPANC et qu'ils participaient au dysfonctionnement, que leurs conséquences auraient dû être envisagées par les acquéreurs, et qu'ils impliquaient la reprise complète des réseaux. Elles soulignent que les travaux propres à remédier aux désordres mentionnés au diagnostic du SPANC annexé à l'acte de vente et ceux rendus nécessaires par l'ensemble des vices constatés dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire sont strictement identiques ; que les acquéreurs n'ont pas fait établir avant la vente de chiffrage des travaux en lien avec les non-conformités relevées par la SPANC, alors que l'existence d'un traitement opérationnel demeurait réservée.

Elles invoquent la clause de non garantie des vices cachés, estimant qu'il n'est pas démontré qu'elles avaient connaissance des vices avant la vente.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 octobre 2022, la communauté de communes Terres des Confluences, intimée, demande à la cour, de:

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et, en tout cas, mal fondées,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 5 avril 2022 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

-condamner in solidum M. [M] et Mme [A] au paiement d'une indemnité de 1.500€ au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la Selas Clamens Conseil, qui pourra les recouvrer sur son offre de droit conformément à l'article 699 du Cpc,

En cas de réformation,

- limiter le préjudice matériel de M. [M] et Mme [A] à la somme de 9.050 €,

- débouter M. [M] et Mme [A] de leur demande portant sur le préjudice de jouissance,

- A défaut, le ramener à de plus strictes proportions, tout comme la demande formée au titre des frais irrépétibles.

En tout état de cause

Si par extraordinaire la responsabilité de la communauté de communes Terres des Confluences devait être retenue,

- condamner Mme [W] et Mme [D] à relever et garantir la communauté de communes Terres des Confluences de toute condamnation au titre des préjudices autant matériels qu'immatériels affectant l'immeuble cédé à M. [M] et Mme [A].

Elle soutient que la mission du SPANC ne consistait qu'en des constatations visuelles tel que prévu par l'arrêté du 27 avril 2012 relatif aux modalités de l'exécution de la mission de contrôle des installations d'assainissement non collectif. Elle fait valoir que seules des investigations invasives lors de l'expertise judiciaire ont permis de voir l'ampleur des vices.

Elle rappelle que son diagnostic a conclu à la non conformité de l'installation, et que dans la mesure où les travaux à réaliser sont équivalents à ceux nécessités du fait des non-conformités relevées par le diagnostiqueur, la réalisation de sa mission par ce dernier a donc permis aux acquéreurs d'être informés de la nécessité de refaire l'ouvrage en cause en conformité avec les règles de l'art et les règles sanitaires en vigueur. Il ajoute qu'il appartenait aux acquéreurs de faire chiffrer avant la signature de la vente, le coût de remédiation pour une éventuelle négociation avec les venderesses.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 décembre 2023.

L'affaire a été examinée à l'audience du 16 janvier 2024.

Motifs de la décision

Sur l'action en garantie des vices cachés :

Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Selon l'article 1642 du même code, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Selon l'article 1643 du même code, il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

En l'espèce, l'acte authentique de vente contient en sa page 9 une clause de non-garantie des vices cachés.

'L'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelques cause que ce soit notamment en raison :

- des vices apparents ;

- des vices cachés.

S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas :

- si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel ;

- s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur.'

Sur les constatations de l'expert judiciaire :

Deux réunions d'expertise se sont déroulées sur les lieux :

- 17 décembre 2020 : constatations ;

- 6 janvier 2021 : inspection vidéo et vérifications altimétrie.

L'expert judiciaire a conclu que l'installation d'assainissement souffrait de plusieurs défauts et notamment de :

- contre-pente du tuyau d'évacuation en amont de la fosse septique ;

- pentes trop faibles des canalisations ;

- arrivée d'eau pluviale dans le réseau d'eaux usées ;

- lit filtrant inopérant ;

- raccordement du lit filtrant au fossé de la route communale.

Il a indiqué que ces désordres étaient dus à une réalisation qui n'a pas respecté les règles de l'art en terme de niveau. Les ouvrages ont été implantés trop haut par rapport au niveau des sorties du bâtiment. Cette implantation n'a pas permis d'avoir une pente correcte (au minimum 1 cm/mètre) entre l'habitation et les ouvrages de traitement afin d'assurer l'autocurage des canalisations. Cette pente insuffisante et les contre-pentes observées altèrent le fonctionnement correct de l'installation en bloquant les matières et le papier de toilette, occasionnant des bouchages répétés.

En outre, les dysfonctionnement sont dus à l'arrivée dans l'installation (qui ne devrait recevoir que des eaux usées) d'eaux pluviales qui empêchent les drains de fonctionner correctement en engorgeant le terrain d'infiltration.

Selon l'expert judiciaire, le système a pu fonctionner à peu près correctement pendant une période, et par la suite, la saturation du terrain autour des drains due à l'apport des eaux pluviales et des eaux usées et les malfaçons d'origine concernant les faibles pentes des canalisations et les contre-pentes ont accéléré la fréquence des dysfonctionnements. Un exutoire du drainage au fossé de la route a été réalisé pour le désengorger, à une date qu'il n'est pas possible de préciser, ce qui représente une non-conformité supplémentaire.

Afin de remédier aux désordres de cette installation, il a indiqué qu'il était nécessaire de la reconstruire intégralement car les défauts constatés (altimétrie, intrusion des eaux pluviales, contre-pente) constituent des sources de dysfonctionnement irréversibles.

Il a indiqué que le coût de cette reconstruction était donné par un devis de l'entreprise Dupouy, fourni par les parties et qui se montait à la somme de 9.050 euros HT.

La durée des travaux était d'environ 1 semaine.

Il a dit que les travaux étaient identiques à ceux qui auraient dû être engagés du fait des non-conformités avant la vente de l'immeuble.

L'expert a relevé que les désordres ont été partiellement relevés lors du diagnostic technique datant du 17 mai 2018 ; que les constatations de ce diagnostic étaient faites sur les déclarations des propriétaires ; que le technicien qui a dressé ce constat n'avait pas les moyens de faire des investigations complémentaires.

Néanmoins, il a souligné qu'il existait des points inexacts dans la réalisation de ce diagnostic :

- il y a un mélange des eaux pluviales et des eaux usées ;

- il n'est pas mentionné la présence d'un exutoire du lit filtrant au fossé de la route, ce qui aurait dû alerter le technicien sur son non-fonctionnement.

Sur l'existence d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil :

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que l'installation d'assainissement est affectée de désordres et notamment de :

- contre-pente du tuyau d'évacuation en amont de la fosse septique ;

- pentes trop faibles des canalisations ;

- arrivée d'eau pluviale dans le réseau d'eaux usées ;

- lit filtrant inopérant ;

- raccordement du lit filtrant au fossé de la route communale.

Ces désordres sont antérieurs à la vente, car les contre-pentes et pentes trop faibles et arrivée d'eau pluviale dans le réseau d'eaux usées remontent à l'origine de l'installation, tandis que le raccordement du lit filtrant au fossé de la route communale a été fait par la suite, en vue de désengorger le dispositif, à une date non précisée mais dont il n'est pas contesté par les venderesses qu'elle est antérieure à la vente.

Le vice était caché pour des acquéreurs profanes.

Certes, le fait que l'installation d'assainissement autonome était non conforme à la réglementation en vigueur était apparent, puisque c'était mentionné dans la promesse de vente du 24 septembre 2018 et dans l'acte authentique de vente du 27 décembre 2018. Les acquéreurs étaient informés dans l'acte authentique de vente qu'ils avaient un an à compter de l'acte de vente pour se mettre en conformité.

Néanmoins, le diagnostic de conformité ne faisait pas état des contre-pentes et pentes trop faibles, du raccordement du lit filtrant au fossé, du mélange eaux usées / eaux pluviales.

Ces défauts rendent l'immeuble impropre à sa destination.

L'attestation du SPANC mentionne en page 3 que le dimensionnement du traitement est 'non vérifiable - absence de regard de bouclage' ; 'absence de regard de bouclage - non visible sur le terrain - donc le traitement n'est pas contrôlable.'

Le regard de bouclage permet de contrôler les différentes parties du système d'assainissement. Il est situé à la fin du traitement des eaux usées. Il permet de vérifier la qualité des effluents.

En l'absence de regard de bouclage, le SPANC n'a pu s'assurer que les eaux prétraitées se sont bien infiltrées.

Au vu de ce rapport de diagnostic que le vendeur était tenu de fournir à l'acquéreur, l'acquéreur a quand même acheté le bien, alors qu'il avait été avisé de la non conformité du système d'assainissement à la réglementation en vigueur, et de ce que des vérifications restaient à faire pour contrôler le traitement.

L'acte authentique de vente reprend les mentions : 'absence de regard de bouclage' ; 'mettre en place le regard de bouclage (traitement).'

Ainsi, bien que tant la promesse de vente que l'acte authentique de vente indiquent 'le vendeur informe l'acquéreur qu'à sa connaissance, les ouvrages permettant d'amener les eaux usées domestiques de l'immeuble à la partie publique ne présentent pas d'anomalie ni aucune difficulté particulière d'utilisation', l'acquéreur a acquis le bien en connaissance de la non conformité de l'installation à la réglementation en vigueur, et du manque de vérification par le SPANC du bon fonctionnement du système d'assainissement.

En conséquence, les acquéreurs savaient qu'ils s'exposaient à devoir effectuer une réfection complète de l'installation. Ils ne pouvaient se reposer sur un courriel des venderesses du

4 septembre 2018 dans le cadre des négociations indiquant que le devis réalisé pour la mise en conformité de la fosse s'élevait à 1.960 euros, et proposant un nouveau prix de

233.000 euros. Finalement, la maison a été vendue à 230.000 euros, une baisse de prix complémentaire ayant donc été obtenue. Le rapport du SPANC a donc permis aux acquéreurs d'être informés de la nécessité de refaire l'ouvrage en cause en conformité avec les règles de l'art et les règles sanitaires en vigueur. Il appartenait aux acquéreurs de faire chiffrer avant la signature de la vente, le coût des travaux de remise aux normes.

En tout état de cause, l'expert judiciaire a dit que les travaux à faire pour remettre l'installation en conformité étaient les mêmes que ceux qui auraient dû être engagés suite au certificat de non-conformité remis par le SPANC. Il a retenu un montant de 9.050 euros HT suivant devis de l'entreprise Dupouy fourni par les parties. Le montant pour la réalisation d'une installation aux normes est corroboré par un devis de l'entreprise Dupouy du 23 février 2021 d'un montant de 10.826 euros HT pour la réalisation d'une microstation et la séparation du réseau pluvial et eau vanne, et réalisation du réseau pluvial, produit par M. [M] et Mme [A]. Les devis d'un montant supérieur produits aux débats ne seront donc pas retenus. Le devis du 27 mai 2022 de la Sas MA2S TP d'un montant de 1.682 euros HT qui concerne uniquement la ventilation secondaire et l'installation d'un regard de bouclage, devis présenté par les acquéreurs comme suffisant pour répondre aux anomalies mentionnées dans le rapport du SPANC, apparaît toutefois insuffisant pour assurer la conformité de l'assainissement aux normes, car suite au rapport du SPANC, il ne s'agissait pas uniquement de mettre en place une ventilation secondaire et un regard de bouclage, mais de s'assurer du traitement effectif des eaux, notamment de vérifier que les eaux prétraitées s'étaient bien infiltrées.

Ainsi, il n'est pas démontré que le coût pour remédier à l'ensemble des défauts, y compris ceux qui étaient cachés, est supérieur au coût de remise en conformité tel que ressortant du rapport du SPANC.

Dès lors, il n'est pas démontré que les acquéreurs n'auraient pas acquis le bien, ou n'en n'auraient donné qu'un moindre prix, s'ils avaient connu les vices mis en évidence par le rapport d'expertise judiciaire, alors qu'ils connaissaient la non-conformité de l'installation au vu des défauts signalés par le SPANC ainsi que des points mentionnés comme non vérifiés par ce dernier.

En conséquence, l'existence d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil n'est pas démontrée.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [M] et Mme [A] de leur action en garantie des vices cachés à l'encontre de Mme [U] [W] veuve [D] et Mme [I] [D] épouse [Y].

Sur l'action en responsabilité contre la communauté de communes Terres des Confluences :

L'arrêté du 27 avril 2012 relatif aux modalités de l'exécution de la mission de contrôle des installations d'assainissement non collectif définit les modalités de contrôle du SPANC.

Il prescrit un contrôle visuel.

Le SPANC de la communauté de communes Terres des Confluences indique avoir délivré un certificat de non-conformité au vu de ses constatations visuelles et des déclarations des venderesses.

Certains défauts n'étaient pas mentionnés dans ce certificat de non-conformité, comme les contre-pentes et défauts de pente. Néanmoins, ils n'ont pu être établis que dans le cadre de l'expertise judiciaire, avec inspection vidéo et vérifications d'altimétrie. Il n'y a donc pas de faute à ne pas avoir signalé les contre-pentes et défauts de pente.

Certains points sont inexacts : il existe un mélange des eaux usées et des eaux pluviales, contrairement à ce qui est indiqué dans le rapport, et il n'est pas mentionné la présence d'un exutoire du lit filtrant au fossé de la route, en-dehors de la propriété, ce qui selon l'expert judiciaire aurait dû alerter le technicien sur le non fonctionnement de l'installation.

Est discuté le point de savoir si le mélange des eaux usées et des eaux pluviales, et la présence d'un exutoire du lit filtrant au fossé de la route étaient visibles, et auraient dû être signalés par le SPANC. Quoi qu'il en soit, ces inexactitudes n'ont pas pu causer de préjudice aux acquéreurs. En effet, le rapport du SPANC a permis aux acquéreurs d'être informés de la nécessité de refaire l'ouvrage en cause en conformité avec les règles de l'art et les règles sanitaires en vigueur. Il appartenait aux acquéreurs de faire chiffrer avant la signature de la vente, le coût des travaux de remise aux normes. Comme indiqué ci-dessus, les travaux à faire pour remettre l'installation en conformité étaient les mêmes que ceux qui auraient dû être engagés suite au certificat de non-conformité remis par le SPANC. Le coût pour remédier à l'ensemble des défauts, y compris ceux qui étaient cachés, n'est donc pas supérieur au coût de remise en conformité tel qu'il ressortait du rapport du SPANC.

La responsabilité de la communauté de communes Terres des Confluences n'est donc pas engagée.

Le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a mis hors de cause la communauté de communes Terres des Confluences. Il n'y a pas lieu de la mettre hors de cause, même si sa responsabilité n'est pas engagée, car elle est bien une partie concernée par le litige et forme un recours en garantie.

M. [M] et Mme [A] seront déboutés de leurs demandes à l'encontre de la communauté de communes Terres des Confluences.

Sur le recours en garantie de la communauté de communes Terres des Confluences contre les venderesses :

Ce recours en garantie est sans objet, aucune condamnation n'ayant été prononcée contre la communauté de communes Terres des Confluences.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

M. [M] et Mme [A], parties perdantes, devront supporter les dépens de première instance, en ce compris des frais de référé et d'expertise judiciaire, le jugement étant confirmé sur ce point, et les dépens d'appel.

Ils se trouvent redevables envers Mme [W] veuve [D] et Mme [D] épouse [Y] prises ensemble d'une part et envers la communauté de communes Terres des Confluences d'autre part sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile d'une somme que le premier juge a justement estimée au titre de la procédure de première instance, et dans les conditions définies par le dispositif du présent arrêt au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel.

Ils seront déboutés de leur demande sur le même fondement.

Par ces motifs

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Montauban du 5 avril 2022, sauf en ce qu'il a mis hors de cause la communauté de communes Terres des Confluences ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé, et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la communauté de communes Terres des Confluences ;

Déboute M. [M] et Mme [A] de toutes leurs demandes à son encontre ;

Déclare sans objet le recours en garantie de la communauté de communes Terres des Confluences contre Mme [U] [W] veuve [D] et Mme [I] [D] épouse [Y] ;

Condamne M. [J] [M] et Mme [L] [A] aux dépens d'appel ;

Les condamne à payer à Mme [U] [W] veuve [D] et Mme [I] [D] épouse [Y] prises ensemble d'une part et à la communauté de communes Terres des Confluences d'autre part la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Les déboute de leur demande sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 22/01787
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;22.01787 ?
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