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24/05/2024 | FRANCE | N°22/02552

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 24 mai 2024, 22/02552


24/05/2024



ARRÊT N°2024/173



N° RG 22/02552 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O4GT

MD/CD



Décision déférée du 31 Mai 2022 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( F 20/00494)

J. RAYSSEGUIER

Section Commerce chambre 1

















[B] [M]





C/



S.C.M. ORTHOPEDIA







































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CONFIRMATION







Grosse délivrée

le 24/5/24

à Me BOUGUE,

Me DEHERMANN-ROY

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



Madame [B] [M]

[Adresse 1]

[Lo...

24/05/2024

ARRÊT N°2024/173

N° RG 22/02552 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O4GT

MD/CD

Décision déférée du 31 Mai 2022 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( F 20/00494)

J. RAYSSEGUIER

Section Commerce chambre 1

[B] [M]

C/

S.C.M. ORTHOPEDIA

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 24/5/24

à Me BOUGUE,

Me DEHERMANN-ROY

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

Madame [B] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3] /FRANCE

Représentée par Me Françoise BOUGUE, avocat au barreau de BAYONNE

INTIM''E

S.C.M. ORTHOPEDIA

CLINIQUE [4], [Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Emilie DEHERMANN-ROY de la SCP ACTEIS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DARIES, conseillère, chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUM'', présidente

M. DARIES, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffière, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DARIES, conseillère, pour S. BLUM'', présidente empêchée, et par C. DELVER, greffière de chambre

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [B] [M] a été engagée par la clinique [5] située à [Localité 8] comme secrétaire médicale à temps partiel, en contrats à durée déterminée du 14 mars 2011 au 30 juin 2011 puis du 01 juillet au 16 septembre 2011. La relation contractuelle s'est poursuivie à durée indéterminée à compter du 17 septembre 2011 à temps partiel, régi par la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but lucratif.

Mme [M] a ensuite été embauchée du 3 au 23 décembre 2013 par la SCM Orthopédia dont le siège est à la clinique [4] à [Localité 7], en qualité de secrétaire médicale suivant contrat de travail à durée déterminée à temps partiel pour surcroît d'activité, régi par la convention collective nationale des cabinets médicaux, lié à la mise en place d'un nouvel établissement au sein de la clinique [5].

Le 31 décembre 2013, Mme [M] notifiait sa démission à la clinique [5].

Le 02 janvier 2014, elle a été engagée par la SCM Orthopédia en contrat à durée indéterminée à temps partiel de 104 heures par mois.

La SCM Orthopédia a notifié un avertissement à Mme [M] le 18 octobre 2016.

Mme [M] a été placée en arrêt de travail du 2 au 10 août 2018, puis à compter du 5 septembre 2018.

A compter du 5 novembre 2018, Mme [M] a repris son poste en mi-temps thérapeutique.

Par courrier du 25 février 2019, la SCM Orthopédia a alerté le conseil de l'ordre des médecins quant à un faux certificat médical établi par Mme [M] au nom de la clinique [4].

Par courrier du 15 mars 2019, la SCM Orthopédia a convoqué Mme [M] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 3 avril 2019. Son licenciement pour faute grave lui a été notifié par courrier du 8 avril 2019.

Mme [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse le 4 mai 2020 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Le conseil de prud'hommes de Toulouse, section commerce chambre 1, par jugement du 31 mai 2022, a :

- débouté la SCM Orthopédia de sa demande de fin de non-recevoir liée à l'effet libératoire de la signature du reçu pour solde de tout compte,

- dit que la demande de paiement du préavis et des congés afférents de Mme [M] est fondée dans le cadre de la contestation de son licenciement pour faute grave,

- jugé que le licenciement notifié le 8 avril 2019 à Mme [M] n'est pas nul,

- débouté Mme [M] de ses demandes salariales et indemnitaires afférentes,

- jugé que le licenciement pour faute grave notifié le 8 avril 2019 à Mme [M] est fondé,

- débouté Mme [M] de ses demandes salariales et indemnitaires afférentes,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les dépens à la charge de Mme [M].

Par déclaration du 7 juillet 2022, Mme [M] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 17 juin 2022, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 05 mars 2024, Mme [B] [M] demande à la cour de :

- juger recevables ses demandes,

- sur le fond, réformer la décision dont appel.

- à titre principal, juger que son licenciement est nul.

- par voie de conséquence, condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 29.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul en application de l'article L 1235-3-1 du code du travail.

Y ajoutant :

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 7270,14 euros brut à titre d'indemnité de préavis outre 727,01 euros à titre de congés payés y afférents en application de l'article L 5213-9 du code du travail,

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 5048,71 euros nets à titre d'indemnité de licenciement.

- à défaut et à titre subsidiaire juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 19.388 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur la base de l'article L 1235-2 du code du travail.

Y ajoutant :

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 7270,14 euros brut à titre d'indemnité de préavis outre 727,01 euros à titre de congés payés y afférents en application de l'article L 5213-9 du code du travail,

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 5048,71 euros net à titre d'indemnité de licenciement.

- à titre infiniment subsidiaire : juger que son licenciement est irrégulier,

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 2423,38 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier sur la base de l'article L 1235-2 du code du travail,

- condamner la société Orthopédia au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 13 mars 2024, la SCM Orthopédia demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

Sur la demande nouvelle au titre de l'irrégularité de procédure formulée sur le fondement de l'article L 1235-2 du Code du travail :

A titre principal :

- déclarer irrecevable la demande de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier, en application des articles 564 et 566 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire :

- déclarer infondée la demande de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

En toute hypothèse :

- débouter purement et simplement Mme [M] de l'intégralité de ses demandes.

Et, y ajoutant :

- condamner Mme [M] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance en disant qu'ils seront recouvrés par Me Emilie Dehermann-Roy en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner Mme [M] aux éventuels entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance en date du 15 mars 2024.

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur le licenciement pour faute grave 

Tout licenciement doit être fondé sur une cause à la fois réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L1232-6 du code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer dans la lettre de licenciement, le ou les motifs du licenciement. La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur. En cas de doute, celui-ci profite au salarié.

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

« (..) Vous occupez au sein de notre structure un poste de secrétaire médicale depuis le 2 janvier 2014. A cet effet, nous attendons de vous une parfaite loyauté dans l'exécution de vos missions.

Or, à la fin du mois de février 2019, nous avons été informés du fait que vous aviez établi pour vous-même un certificat médical au nom du Docteur [V], à en-tête de la clinique [4], daté du 7 janvier 2019. Et ce sans informer le Dr [V].

Nous avons été dans l'obligation d'en informer immédiatement le Conseil de l'ordre des médecins.

Lors de l'entretien préalable, vous avez reconnu les faits, en expliquant que vous pensiez avoir informé ce médecin, ce qui n'est pas le cas.

Vous comprendrez que compte tenu de la nature de vos missions, et du milieu professionnel dans lequel vous évoluez, il est totalement inadmissible que vous ayez utilisé votre droit d'accès aux dossiers médicaux afin de fabriquer un document médical pour votre compte personnel, en utilisant le nom d'un médecin.

Il s'agit d'une faute professionnelle extrêmement grave, qui empêche la poursuite de la relation contractuelle, y compris pendant la durée d'un préavis.

Nous vous rappelons que nous avons déjà été contraints de vous alerter sur votre comportement par la notification d'un avertissement en octobre 2016.

En conséquence, nous avons pris la décision de prononcer votre licenciement pour faute grave, sans indemnité ni préavis. Vous sortez des effectifs à la date d'envoi du présent courrier. »

Mme [M] sollicite, à titre principal, la nullité du licenciement comme étant fondé sur son état de santé et son handicap, et à titre subsidiaire, qu'il soit déclaré sans cause réelle et sérieuse.

Comme elle le répond à l'employeur, l'absence de dénonciation du solde de tout compte n'exclut pas des demandes financières afférentes à la contestation du licenciement qui n'en font pas l'objet.

1/ Sur la discrimination en raison de son état de santé

Par application de l'article L1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de son état de santé.

En ce cas le licenciement est nul de plein droit.

Selon le régime probatoire de l'action en discrimination fixé par l'article L 1134-1 du code du travail, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Mme [M] rappelle que:

. elle bénéficie d'une reconnaissance en qualité de travailleur handicapé depuis l'année 2000, renouvelée,

. elle a été arrêtée 2 mois après avoir subi une intervention chirurgicale en juin 2015 (hernie discale),

. elle a été en arrêt de travail à plusieurs reprises courant 2017 puis 2018 pour accident du travail puis à compter du 5 septembre 2018 pour des problèmes de santé d'ordre personnel avant de reprendre son poste en mi-temps thérapeutique à compter du 6 novembre 2018 jusqu'au 8 avril 2019,

. elle devait subir une intervention chirurgicale le 24 juin 2019 pour la mise en place d'une prothèse totale du genou devant entraîner un nouvel arrêt de travail, ce qui n'était pas ignoré par l'employeur, puisque la 'fausse prescription' alléguée aurait été découverte par le Dr [H], associé et co-gérant de la SCM Orthopédia, dans le cadre de la visite pré-opératoire du 5 février 2019.

Elle argue que le motif du licenciement était fondé sur son état de santé, ses absences répétées et justifiées à ce titre perturbant le bon fonctionnement du secrétariat médical et que le personnel engagé ne l'a pas été pour la remplacer. Ainsi Mme [T], embauchée par contrats à durée déterminée, n'avait pas le même coefficient, ni le même taux de rémunération normalement applicable en matière de remplacement.

***

La cour relève que la salariée ne remet pas en cause le respect du mi-temps thérapeutique par l'employeur à compter du 05 novembre 2018 pendant 5 mois, pendant lesquels elle n'a pas fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail pour raison professionnelle et n'a pas sollicité l'intervention du médecin du travail.

Il ressort de l'examen des pièces, que dès cette période, la société a pourvu aux absences de Mme [M] en engageant Mme [T] en contrat de travail à durée déterminée du 6 novembre 2018 au 2 décembre 2018, puis dans le cadre d'un contrat de professionnalisation du 18 décembre 2018 au 29 novembre 2019 afin de suivre une formation de secrétaire médicale au sein de l'Ecole [6] et passer le diplôme afférent, ce qui de fait permettait un fonctionnement normal du service.

S'il existe une différence de coefficient de rémunération: 205 pour Mme [T] et 209 pour Mme [M], celle-ci est admise au regard de facteurs individuels (ancienneté, qualification professionnelle, expérience, états de services), ce qui est le cas en l'espèce, Mme [T] ne disposant pas de la formation et de l'ancienneté de l'appelante.

A l'issue du contrat de professionnalisation, a été signé un contrat à durée indéterminée pour pouvoir au poste vacant suite au départ de Mme [M], aux mêmes coefficient et taux de rémunération que celle-ci.

Par ailleurs, l'employeur connaissait la date de son intervention chirurgicale prévue le 24 juin 2019 ce d'autant qu'il était programmé une consultation pré-opératoire début février 2019, laquelle a amené la découverte du 'faux certificat médical' reproché à Mme [M] et qui a entraîné son licenciement.

La cour considère que l'appelante ne présente pas d'élément matériel laissant présumer une discrimination à son encontre. Aussi elle sera déboutée de ses demandes afférentes.

2/ Sur l'absence de cause réelle et sérieuse

* Sur le pouvoir du signataire de la lettre de licenciement

La lettre de licenciement a été signée par le docteur [P].

Mme [M] énonce que la société est organisée en co-gérance dont les statuts prévoient que le gérant peut donner mandat à un autre associé pour un ou plusieurs objets déterminés ou temporairement pour l'ensemble des affaires sociales.

Elle soutient que la lettre de licenciement devait être signée par l'ensemble des co-gérants ou par celui ayant reçu expressément délégation de pouvoir entérinée par l'assemblée des associés, pour gérer toutes les questions sociales de la SCM et qu'il n'est pas démontré que le docteur [P] avait ainsi reçu pouvoir.

L'intimée rétorque qu'aux termes des articles 1846, 1848 et 1849 du code civil applicables à la société civile de moyens, le co-gérant est juridiquement capable de passer les actes au nom de la société et de l'engager à l'égard des tiers et que les associés ayant la qualité de gérants, tel le docteur [P], doivent être considérés comme l'employeur des salariés de la société.

Sur ce:

Aux termes de l'article 1849 du code civil, dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social. En cas de pluralité de gérants, ceux-ci détiennent séparément les pouvoirs prévus à l'alinéa précédent.

Il ressort de la lecture des statuts de la SCM Orthopédia, mis à jour suite à l'assemblée générale extraordinaire du 09 janvier 2017, que:

. la société est administrée par un ou plusieurs gérants,

. le gérant ( et donc le co-gérant) est investi des pouvoirs les plus étendus pour administrer les biens et affaires de la société, sans qu'il soit attribué à chaque co-gérant un domaine de gestion spécifique et sans qu'il soit exigé une décision collective des associés comme pour les actes d'aliénation ou de disposition.

. le docteur [P], associé, a été désigné co-gérant de la société.

Au regard de ces éléments, la lettre de licenciement a été signée par une personne habilitée à cet effet.

* Sur le bien fondé du licenciement

Le certificat litigieux est rédigé comme suit:

« Je soussigné Docteur [V] [U] certifie que l'état de santé de Mademoiselle [B] [M], née le 21/03/1971, l'oblige à porter un néoprène lors de sa pratique sportive en piscine. Certificat fait à la demande de l'intéressée et remis en main propre pour faire valoir ce que de droit. Docteur [V] [U].».

L'appelante invoque la tardiveté du licenciement au motif qu'étant notifié le 08 avril 2019, il est intervenu 2 mois après la découverte de la prétendue fausse prescription établie par elle le 5 février 2019.

Elle oppose l'absence de tout fait fautif, l'employeur ne pouvant lui reprocher d'avoir accédé le 07 janvier 2019 à son propre dossier médical.

Elle rappelle qu'elle a travaillé initialement pour le docteur [X] au sein de la clinique [5] puis au sein de la clinique [4] qu'il a intégré fin 2013 en entrant dans la SCM Orthopédia jusqu'à son départ à la retraite en 2017, puis pour son remplaçant le docteur [V].

Elle explique qu'elle pratique l'aquagym en piscine mais qu'étant allergique, à compter de 2016, elle a dû porter une combinaison néoprène, pour laquelle le docteur [X] établissait un certificat, reconduit tous les ans, ce que ne pouvait ignorer le docteur [V]. Ainsi l'établissement du certificat à son seul bénéfice ne peut constituer une faute professionnelle.

La société conclut au bien fondé au regard de la chronologie des événements, de l'absence de connaissance du certificat par le médecin concerné et du défaut de loyauté de la salariée.

Sur ce:

- La société ne reproche pas à Mme [M] d'avoir accédé à son propre dossier médical mais d'y avoir établi un certificat sous l'intitulé 'certificat libre', pour elle-même, au nom d'un médecin de la société, sans l'information ni l'accord de ce dernier.

Peu importent que figure sur la capture d'écran du dossier de Mme [M] ( pièce 20 employeur), la mention 'certificat libre' en octobre 2016 et décembre 2017.

Il est à relever que cette mention ne figure pas pour l'année 2018 (la salariée ne produisant pas de document pour cette période) avant la date du 01 février 2019, à laquelle le certificat, daté du 07 janvier 2019, a été enregistré au nom du docteur [V].

- Il ne peut être fait grief à la société d'un non respect d'un délai restreint dans l'engagement de la procédure de licenciement le 15 mars 2019 dès lors qu'elle a eu connaissance des faits au mieux le 25 février 2019, date à laquelle elle a informé l'ordre des médecins et plus amplement des conséquences possibles à la suite de la réponse de l'organe professionnel représentatif.

Tel que le précise l'intimée, Mme [M] devant subir une intervention chirurgicale orthopédique le 24 juin 2019, le docteur [H], associé de la SCM a consulté en vue d'une consultation pré-opératoire prévue le 5 février 2019, le dossier médical de la patiente et a pris connaissance du certificat médical litigieux, relatif au port d'une combinaison en néoprène pour la pratique de la natation, antidaté, au nom du docteur [V] et sur papier à en-tête de la clinique [4].

Plusieurs jours après, lors d'un échange sur la chirurgie de la patiente avec le docteur [V], ce dernier apprenait par son confrère l'existence ce certificat, établi en son nom, ce qu'il atteste.

La preuve est libre en droit du travail et le témoignage de M. [V] ne peut être écarté, étant directement concerné par le certificat en tant que médecin prescripteur au delà de sa qualité d'employeur. Il atteste ne pas être à l'origine de l'établissement du certificat litigieux et ' avoir été personnellement particulièrement choqué d'apprendre que Mme [M] (..) avait pris l'initiative d'établir un certificat, sur mon papier à en-tête, sans jamais m'en parler préalablement. '.

Le docteur [V] informait les autres associés, qui décidaient de signaler la situation au Conseil de l'ordre des médecins, lequel répondait que la responsabilité professionnelle du docteur [V] pouvait être engagée des suites de tels agissements du personnel par courrier du 04 mars 2019. La société engageait la procédure de licenciement.

- Les éléments développés démontrent que l'appelante a utilisé ses fonctions pour établir un faux document à son profit, sur papier à en-tête de la clinique, portant le nom d'un médecin à son insu, ce qui constitue une faute.

Au regard de ses fonctions, de la nécessaire confiance devant exister entre le salarié et son employeur et des incidences pénales pouvant en découler, la cour retient le caractère de gravité de la faute de Mme [M], ayant manqué à son obligation de loyauté.

Le licenciement est fondé. L'appelante sera déboutée de ses demandes afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

* Sur la demande au titre de la procédure irrégulière

La société soulève l'irrecevabilité de la demande formée seulement en cause d'appel.

L'article 566 du code de procédure civile dispose que les parties ne peuvent ajouter auxprétentions soumises au 1er juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

La cour estime la demande recevable comme étant complémentaire à celles relatives à la remise en cause du licenciement et tendant aux mêmes fins d'obtenir des dommages et intérêts.

L'appelante souligne qu'il résulte de la lettre de licenciement que lors de l'entretien préalable du 3 mars 2019, le docteur [P] était assisté de deux personnes Mme [W], responsable des ressources humaines et Mme [C] représentant du personnel, Mme [M] étant elle-même assistée de Mme [E], représentante du personnel.

Elle précise que celle-ci a refusé de lui communiquer le compte rendu d'entretien préalable qui est produit par l'employeur dans le cadre de la procédure prud'homale.

Elle sollicite le versement de 2423,08 euros en application de l'article L 1235-2 du code du travail.

L'intimée conclut au débouté.

L'employeur ne peut se faire assister que par une personne appartenant au personnel de l'entreprise. A défaut la procédure est irrégulière.

L'employeur reconnaît avoir été assisté de Mme [W] mais oppose que Mme [C] assistait en réalité la salariée à sa demande, tel qu'elle le certifie dans une attestation du 05-12-2022.

Compte tenu de ce témoignage non utilement remis en cause, la cour déboute l'appelante de sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement.

Sur les demandes annexes

Mme [M], partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS:

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare recevable mais non fondée la demande de Mme [M] de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

Condamne Mme [B] [M] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. DARIES, conseillère, pour S. BLUM'', présidente, empêchée et par C. DELVER, greffière.

La greffière P/ La présidente empêchée,

La conseillère

C. DELVER M. DARIES

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 22/02552
Date de la décision : 24/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-24;22.02552 ?
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