La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2024 | FRANCE | N°22/03613

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 23 mai 2024, 22/03613


23/05/2024



ARRÊT N° 168/24



N° RG 22/03613 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PBGZ

NA/MP



Décision déférée du 05 Septembre 2022 - Pole social du TJ de TOULOUSE (21/711)

S. LOBRY























CPAM DU TARN-ET-GARONNE





C/





[7]



































































INFIRMATION







































REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***





APPELANTE



CPAM DU TARN-ET-GARONNE

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée pa...

23/05/2024

ARRÊT N° 168/24

N° RG 22/03613 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PBGZ

NA/MP

Décision déférée du 05 Septembre 2022 - Pole social du TJ de TOULOUSE (21/711)

S. LOBRY

CPAM DU TARN-ET-GARONNE

C/

[7]

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

CPAM DU TARN-ET-GARONNE

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Mme [N] [C] (membre de l'organisme) en vertu d'un pouvoir

INTIMEE

[7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Laurent SAUTEREL de la SELARL TESSARES AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée à l'audience par Me Pascal BABY, avocat au barreau d'ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 mars 2024, en audience publique, devant N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.

Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. SEVILLA, conseillère

M. DARIES, conseillère

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE

M.[R] [J], employé par la société [7] en qualité de conducteur receveur, a demandé à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Tarn-et-Garonne la prise en charge au titre de la législation professionnelle d'un accident survenu le 21 juin 2019.

La déclaration d'accident du travail souscrite par l'employeur le 25 juin 2019, sans réserves, mentionne un accident survenu le 21 juin 2019 à 7 H 05 sur le lieu de travail occasionnel, porté à la connaissance de l'employeur le jour même à 8H15, et relaté en ces termes: ' le salarié déclare avoir ressenti une douleur dans le bras en tournant le volant du véhicule', alors qu'il conduisait un autocar.

Par lettre du 18 décembre 2029, la société [7] a fait part à la caisse de ses réserves, tenant à la matérialité d'un accident du travail et à l'imputabilité au travail de la lésion déclarée: l'employeur soulignait l'absence d'évocation d'un fait traumatique et le fait qu'à la suite de l'hospitalisation de M.[J], il s'est avéré qu'il avait été victime d'un AVC.

Le certificat médical initial du 22 juin 2019, reçu en duplicata par la caisse le 8 janvier 2020, mentionne une 'douleur hémicrâne et coude supérieur gauche par AVC- bilan rhumatologique fait ensuite qui retrouvera une rupture du tendon du supra-épineux', et prescrit un arrêt de travail.

A réception du certificat médical initial, la caisse a diligenté une enquête.

Par lettre du 18 mars 2020, la CPAM de Tarn-et-Garonne a informé la société [7] de la clôture de l'instruction et de la possibilité de consulter le dossier avant la date de décision du 3 avril 2020.

Par lettre du 3 avril 2020, la CPAM de Tarn-et-Garonne a notifié à l'employeur, la société [7], la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle.

La société [7] a saisi la commission de recours amiable pour demander l'inopposabilité à son égard de la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle.

La commission de recours amiable de la CPAM de Tarn-et-Garonne a rejeté ce recours par décision du 6 mai 2021.

Par requête du 8 juillet 2021, la société [7] a porté sa contestation devant le tribunal judiciaire de Toulouse.

Par jugement du 5 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse a déclaré la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle inopposable à l'employeur, la société [7], en considérant que la caisse n'avait pas respecté le caractère contradictoire de la procédure d'instruction, faute pour elle de justifier de l'envoi d'un questionnaire à l'employeur.

La CPAM de Tarn-et-Garonne a relevé appel de ce jugement par déclaration du 6 octobre 2022.

La CPAM de Tarn-et-Garonne demande infirmation du jugement et conclut à l'opposabilité à la société [7] de la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident du travail subi par M.[J] le 21 juin 2019. Elle soutient avoir respecté le principe du contradictoire en ayant, après une première information par mail de l'envoi d'un questionnaire dématérialisé à compléter, envoyé un questionnaire papier à la société [7], joint à la lettre recommandée du 5 février 2020 par laquelle elle l'informait de la nécessité de recourir à un délai complémentaire. Elle produit par ailleurs l'accusé de réception du courrier par lequel elle a informé la société [7] de la clôture de l'instruction, et fait valoir qu'elle a respecté les délais d'instruction imposés par l'article R 441-8 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable. Elle soutient également que la preuve de deux faits accidentels successifs au temps et au lieu du travail, et de l'imputabilité des lésions au travail, par application de la présomption, est rapportée.

La société [7] demande confirmation du jugement, en ce qu'il a déclaré la décision de la caisse du 3 avril 2020 inopposable à son égard. Elle soutient à titre principal que la CPAM de Tarn-et-Garonne n'a pas respecté le caractère contradictoire de la procédure d'instruction, faute pour elle de justifier de l'envoi d'un questionnaire à l'employeur. A titre subsidiaire elle soutient que la CPAM de Tarn-et-Garonne ne rapporte pas la preuve de la survenue d'un fait accidentel aux temps et lieu du travail, en l'absence de témoin, en l'état également de l'impossibilité de conférer une date certaine au fait accidentel dont aurait été victime l'assuré, et alors que le lien entre le prétendu sinistre en cause et le travail effectué par l'assuré est tout autant incertain. A titre plus subsidiaire, elle soutient que les lésions de M.[J] n'ont pas une origine professionnelle, mais sont uniquement dues à l'AVC dont il a été victime, constitutif d'une cause totalement étrangère, M.[J] ne s'étant plaint d'aucun stress ni difficultés particulières en lien avec le travail, durant les heures et les jours qui ont précédé l'apparition de la lésion décrite.

MOTIFS

* Sur la régularité de la procédure

Pour déclarer la décision de prise en charge de l'accident du travail inopposable à l'employeur, le tribunal retient une violation du caractère contradictoire de la procédure, faute pour la caisse de justifier de l'envoi du questionnaire à l'employeur.

La CPAM de Tarn-et-Garonne, appelante, soutient avoir respecté le principe du contradictoire en ayant, après une première information par mail de l'envoi d'un questionnaire dématérialisé à compléter, envoyé un questionnaire papier à la société [7], joint à la lettre recommandée du 5 février 2020 par laquelle elle l'informait de la nécessité de recourir à un délai complémentaire.

Devant la cour, la CPAM de Tarn-et-Garonne produit, en pièces 11-b à 11-e, les impressions écran du document en format PDF établi par son prestataire [6], chargé de matérialiser les courriers que la caisse lui adresse par voie dématérialisée, et de les envoyer par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce document PDF, déposé dans le coffre-fort électronique de la [5], comporte quatre pages mentionnant la même référence de document, dont la première page correspond à la lettre du 5 février 2020 intitulée 'délai complémentaire d'instruction', la page 2 à une page blanche, et les pages 3 et 4 au recto et au verso du questionnaire adressé à l'employeur. Cet envoi a été reçu par la société [7] le 10 février 2020.

La CPAM de Tarn-et-Garonne rapporte ainsi la preuve de l'envoi effectif du questionnaire à la société [7], joint à la lettre du 5 février 2020.

Le tribunal a par ailleurs justement noté que concernant la clôture de l'instruction, la CPAM de Tarn-et-Garonne produit la preuve de distribution du courrier daté du 18 mars 2020, remis à la société [7] le 23 mars 2020, et mentionnant la possibilité pour l'employeur de consulter les pièces du dossier avant la décision sur le caractère professionnel de l'accident, conformément à l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale. Contrairement à ce que soutient la société [7], l'accusé de réception dématérialisé produit comporte bien une signature.

Enfin, la décision de prise en charge du 3 avril 2020 a été notifiée à la société [7] moins de 90 jours après la réception du certificat médical initial, le 8 janvier 2020, conformément à l'article R 441-8 du code de la sécurité sociale , dans sa rédaction applicable en la cause.

La procédure d'instruction est donc régulière.

Le jugement est infirmé sur ce point.

* Sur le fond

La société [7] conteste, comme en première instance, la matérialité d'un fait accidentel et l'origine professionnelle des lésions.

- matérialité d'un fait accidentel au temps et au lieu du travail

Le tribunal, pour retenir la matérialité d'un accident au temps et au lieu du travail, relève à juste titre que:

- M.[J], conducteur receveur, a immédiatement porté à la connaissance de son employeur, le 21 juin à 8H15, l'accident survenu le jour même à 7H05, alors qu'il conduisait un autocar, ainsi que cela résulte des mentions de la déclaration d'accident du travail ;

- les déclarations du salarié, parfaitement compatibles avec son activité professionnelle, sont constantes et circonstanciées: M.[J] a immédiatement indiqué, ainsi que cela résulte des mentions de la déclaration d'accident souscrite par l'employeur, 'avoir ressenti une douleur dans le bras en tournant le volant du véhicule'; il a ensuite précisé dans le questionnaire qui lui a été adressé avoir été contraint de forcer sur les bras pour tourner sur un rond-point, la direction du véhicule étant devenue brusquement très dure, ce mouvement étant à l'origine d'un craquement et immédiatement après d'une très forte douleur au niveau de l'épaule gauche, puis avoir commencé à ressentir, alors qu'il était arrivé au dépôt après sa tournée, des fourmillements au visage;

- les déclarations de M.[J] sont corroborées par les constatations médicales: M.[J] a été immédiatement hospitalisé, et le certificat médical initial d'accident du travail du 22 juin 2019, dont un duplicata a été établi le 5 décembre 2019, mentionne une 'douleur hémicrâne et coude supérieur gauche par AVC- bilan rhumatologique fait ensuite qui retrouvera une rupture du tendon du supra-épineux'.

Ces éléments établissent ainsi deux lésions distinctes affectant d'une part l'épaule gauche, et résultant d'autre part d'un AVC, toutes deux brutalement apparues pendant le travail, après un effort effectué dans le cadre de la conduite de l'autocar.

La matérialité d'un fait accidentel survenu à l'occasion du travail est donc démontrée, nonobstant l'absence de témoignage ou le fait que l'arrêt de travail aurait été initialement prescrit au titre du risque maladie.

- l'origine professionnelle des lésions

Les deux lésions distinctes brutalement apparues pendant le travail, après un effort effectué dans le cadre de la conduite de l'autocar, bénéficient de la présomption d'imputabilité au travail résultant de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale.

Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'elles ont une cause totalement étrangère à l'activité professionnelle.

En l'espèce, le tribunal a considéré à juste titre que la société [7] ne démontre pas, par ses seules affirmations, que l'activité professionnelle n'a joué aucun rôle dans l'appartion des lésions. Devant la cour, aucune pièce complémentaire n'est versée aux débats sur ce point par l'employeur.

En considération de ces éléments, la cour, statuant à nouveau, déclare oppsable à la société [7] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident subi par M.[J] le 21 juin 2019.

La CPAM de Tarn-et-Garonne ne demande pas paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de la société [7].

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 5 septembre 2022,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette la contestation de la société [7];

Déclare opposable à la société [7] la décision de prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, de l'accident subi par M.[J] le 21 juin 2019;

Dit que la société [7] doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/03613
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;22.03613 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award