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23/05/2024 | FRANCE | N°22/03454

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 23 mai 2024, 22/03454


23/05/2024



ARRÊT N° 165/24



N° RG 22/03454 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PAPB

NA/MP



Décision déférée du 07 Septembre 2022 - Pole social du TJ de Toulouse (19/10065)

C. [S]























ACTIF [8]





C/





[K] [T]

CPAM HAUTE-GARONNE































































CONFIRMATION











































REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANT



ACTIF [8]

[Adresse 9]

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par Me Margaux P...

23/05/2024

ARRÊT N° 165/24

N° RG 22/03454 - N° Portalis DBVI-V-B7G-PAPB

NA/MP

Décision déférée du 07 Septembre 2022 - Pole social du TJ de Toulouse (19/10065)

C. [S]

ACTIF [8]

C/

[K] [T]

CPAM HAUTE-GARONNE

CONFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

ACTIF [8]

[Adresse 9]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Margaux PIANTONI de l'AARPI FAIVRE-VILOTTE & PIANTONI ASSOCIES, avocate au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

Madame [K] [T]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Laurence DESPRES de la SELARL DESPRES, avocate au barreau de TOULOUSE

CPAM HAUTE-GARONNE

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Mme [W] [X] (membre de l'organisme) en vertu d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 mars 2024, en audience publique, devant N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.

Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. SEVILLA, conseillère

M. DARIES, conseillère

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE

Mme [K] [T] a été employée par la société [7] à compter du 1er janvier 2001. Elle exerçait en dernier lieu un emploi de responsable financière et administrative.

Elle a été victime d'un accident du travail le 3 mai 2016, lui occasionnant des douleurs lombaires.

La déclaration d'accident du travail souscrite par l'employeur le 17 mai 2016 indique qu'alors qu'elle 'faisait de la saisie informatique', 'Mme [T] a donné un coup de rein pour faire avancer sa chaise et elle a ressenti une forte douleur dans le dos'.

Le 31 mai 2016, la CPAM de la Haute-Garonne a reconnu le caractère professionnel de l'accident de Mme [T].

La caisse a fixé au 18 novembre 2016 la date de guérison des lésions.

Mme [T] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 1er août 2016.

Par lettre du 25 janvier 2019, après échec de la tentative de conciliation, Mme [T] a saisi le tribunal pour obtenir reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Par jugement du 7 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse a:

- dit que la société [7] est responsable d'une faute inexcusable en lien avec l'accident du travail dont a été victime Mme [T] le 3 mai 2016,

- avant dire droit sur l'indemnisation des préjudices de Mme [T], ordonné une expertise médicale, confiée au docteur [O],

- alloué à Mme [T] une provision de 1.000 euros,

- condamné la société [7] à payer à Mme [T] la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles.

La société [7] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 27 septembre 2022.

La société [7] conclut à l'infirmation du jugement, au rejet de la demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, et au paiement d'une indemnité de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La société [7] indique que les relations contractuelles se sont dégradées à compter du mois d'octobre 2015. Elle invoque l'absence de preuve que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposée la salariée, dès lors que le médecin du travail avait préconisé la mise à disposition d'un siège ergonomique avec soutien lombaire, alors que l'accident s'est produit en raison d'un blocage des roues du fauteuil, que rien ne laissait supposer. Elle invoque d'autre part l'absence de lien causal entre la survenance de l'accident et une faute de l'employeur, en soutenant que les circonstances de l'accident sont indéterminées, Mme [T] n'expliquant pas comment les roues du fauteuil se sont bloquées. Elle soutient que le prétendu manquement de l'employeur relatif aux préconisations du médecin du travail demeure parfaitement étranger à l'accident. Elle fait valoir également qu'elle a aménagé les horaires de travail de Mme [T].

Mme [T] conclut à la confirmation du jugement, sauf à porter à 2.000 euros la provision allouée et à 3.000 euros l'indemnité au titre des frais irrépétibles.

Mme [T] expose qu'alors qu'elle était assise sur une vieille chaise de bureau, en voulant se rapprocher du bureau, elle en a attrapé le bord et a tiré avec les bras, que les roulettes se sont bloquées et qu'elle a ressenti une très vive douleur dans le bas du dos. Elle reproche à son employeur d'avoir refusé pendant plus d'un an de respecter les préconisations du médecin du travail, émise le 19 mars 2015 et réitérée les 18 février et 14 mars 2016, puisque le siège ergonomique préconisé n'a pas été acheté et que la société [7] n'a rien fait pour adapter ses postures de travail, consistant pour l'essentiel à effectuer assise de la saisie sur ordinateur de pièces comptables. Elle indique être reconnue travailleur handicapé depuis le 1er juin 2016.

La CPAM de la Haute-Garonne s'en remet à la décision de la juridiction, et dans l'hypothèse où une faute inexcusable serait retenue, demande remboursement par la société [7] des sommes dont elle fera l'avance. Elle demande en revanche restitution de la provision versée si le jugement est infirmé.

MOTIFS

La société [7] conteste la faute inexcusable qui lui est imputée.

Dans le cadre de l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur, les dispositions des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail lui font obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Le manquement à cette obligation de sécurité a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurite sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il suffit que la faute inexcusable de l'employeur soit l'une des causes de l'accident du travail pour engager sa responsabilité.

En l'espèce, le tribunal a rappelé les avis du médecin du travail émis les 19 mars 2015, 18 février 2016 et 14 mars 2016, desquels il résulte qu'avant l'accident du travail dont Mme [T] a été victime le le 3 mai 2016, lui occasionnant des douleurs lombaires, la société [7] était parfaitement informée des précautions nécessaires pour éviter l'aggravation des douleurs dorsales dont souffrait la salariée, ayant déjà bénéficié d'un arrêt de travail pour maladie du 17 novembre 2014 au 8 mars 2015.

L'avis d'aptitude du 19 mars 2015 subordonne ainsi la déclaration d'aptitude à la reprise à temps plein à un 'aménagement de poste'. Il recommande d'une part un 'siège ergonomique de haut confort', et mentionne d'autre part la 'nécessité d'alternance de postures debout/assise'.

L'avis du 18 février 2016 rappelle que l'aménagement de poste est 'indispensable pour préserver la santé de la salariée', que 'la mise à disposition d'un siège ergonomique neuf de haut confort avec soutien lombaire est indispensable pour la santé', et que 'l'alternance de posture debout et assise est indispensable'.

La fiche d'aptitude du médecin du travail datée du 14 mars 2016 indique que les restrictions formulées restent pérennes et que la mise à disposition d'un siège ergonomique reste à finaliser.

La déclaration d'accident du travail souscrite par l'employeur le 17 mai 2016, sans réserve, indique qu'alors qu'elle 'faisait de la saisie informatique', 'Mme [T] a donné un coup de rein pour faire avancer sa chaise et elle a ressenti une forte douleur dans le dos'.

Les circonstances et la matérialité de l'accident, immédiatement porté à la connaissance de l'employeur, n'ont pas été contestées par celui-ci avant la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. Elles sont corroborées par la constatations du certificat médical initial du 3 mai 2016, mentionnant des 'lombalgies aiguës suite à un effort. Contractures musculaires lombaires droites ++'.

Le défaut de mise à disposition effective d'un 'siège ergonomique neuf de haut confort avec soutien lombaire', plus d'un an après la première recommandation du médecin du travail, a contribué à l'accident, imputable à l'inadaptation de l'ancienne chaise de bureau dont disposait la salariée.

Par ailleurs, la société [7] ne précise pas les aménagements du poste de Mme [T] auxquels elle a procédé, pour lui permettre d'alterner effectivement les postures. Si Mme [T] ne conteste pas que ses horaires de travail aient été aménagés, elle indique en revanche que ses tâches, consistant principalement à effectuer, assises, de la saisie informatique de pièces comptables, n'ont pas été modifiées.

Ce manquement de l'employeur à son obligation de prévention et d'adoption des mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de sa salariée a de même fragilisé Mme [T] et favorisé la réapparition soudaine de ses douleurs lombaires.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu la faute inexcusable de l'employeur.

Dans l'attente du rapport d'expertise, le montant de la provision alloué doit de même être confirmé.

Il n'y a pas lieu à nouvelle application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La société [7], dont le recours n'est pas fondé, ne peut prétendre à une indemnité au titre des frais irrépétibles et doit supporter les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 7 septembre 2022 en toutes ses dispositions;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

Dit que la société [7] doit supporter les dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/03454
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;22.03454 ?
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