La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2024 | FRANCE | N°18/00163

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 21 mai 2024, 18/00163


21/05/2024



ARRÊT N°



N° RG 18/00163

N° Portalis DBVI-V-B7C-MBRF

CR/DG



Décision déférée du 11 Janvier 2018

Tribunal de Commerce de TOULOUSE 2016J00947

M. SERNY

















SAS ARTEMY DEVELOPPEMENT CONSTRUCTION





C/



SAS SOCIETE DU [Adresse 6]











































CONFIRM

ATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à



Me THEVENOT

Me RIBAUTE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT ET UN MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



S.A.S. ARTEMY DEVELOPPEMENT CONSTRUCTION

[Adresse 1]

[Localité 2]



Rep...

21/05/2024

ARRÊT N°

N° RG 18/00163

N° Portalis DBVI-V-B7C-MBRF

CR/DG

Décision déférée du 11 Janvier 2018

Tribunal de Commerce de TOULOUSE 2016J00947

M. SERNY

SAS ARTEMY DEVELOPPEMENT CONSTRUCTION

C/

SAS SOCIETE DU [Adresse 6]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

Me THEVENOT

Me RIBAUTE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT ET UN MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

S.A.S. ARTEMY DEVELOPPEMENT CONSTRUCTION

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Louis THEVENOT de la SELEURL LT AVOCAT, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

S.A.S. DU [Adresse 6]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Xavier RIBAUTE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. ROUGER, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. ROUGER, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

OBJET DU LITIGE ET PROCÉDURE

Suivant marché de travaux à forfait et clés en main, passé le 13 mai 2016, la Sci du [Adresse 6], devenue Sas, a confié à la Sas Artemy Développement Construction (Adc) la construction d'un bâtiment de stockage d'une surface de plancher totale de 1 858 m² situé [Adresse 3] à [Localité 4] (31) pour un prix de 1.250.000 euros Ht soit

1.500.000 euros TTC sous la condition de la présentation par le maître de l'ouvrage d'une garantie de paiement conformément à l'article 1799-1 du code civil.

Ce contrat prévoyait un échéancier de facturation et notamment un versement de 10% à la signature du contrat et de 25 % au démarrage des travaux, ainsi qu'un délai de réalisation de six mois assorti de pénalités de retard.

L'ordre de service pour débuter les travaux a été donné par écrit par le gérant de la société maître d'ouvrage, M. [U], le 17 mai 2016.

La Sas Adc a demandé paiement, selon facture du 17 mai 2016, de la somme de 525.000 euros à échéance du 31 mai 2016, en vain ; les mises en demeure adressées par lettre recommandée avec accusé de réception des 24 juin 2016 et 1er juillet 2016 sont demeurées infructueuses.

-:-:-:-:-

Par acte d'huissier du 26 juillet 2016 la Sas Adc a fait assigner la Sci du [Adresse 6] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse pour obtenir paiement de la somme provisionnelle de 525 000 euros en règlement de la facture du 17 mai 2016 avec anatocisme outre intérêts majorés depuis le 18 mai 2016 et de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 12 août 2016 confirmée par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 26 janvier 2017, la juridiction de référé a enjoint à la Sci du [Adresse 6] de payer une provision de 300 000 euros à la Sas Adc outre intérêts au taux légal depuis la date de l'ordre de service et avec anatocisme.

-:-:-:-:-

Par acte d'huissier du 28 octobre 2016, la Sas Acd a fait assigner le maître de l'ouvrage devenu Sas du [Adresse 6], devant le tribunal de commerce de Toulouse en paiement de sa facture en date du 17 mai 2016 d'un montant de 525 000 euros augmentée d'une somme de 101 791,71 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de ses engagements outre 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, avec intérêts au taux légal majoré conformément à l'article L. 441-6 du code de commerce.

Par jugement contradictoire du 11 janvier 2018, le tribunal de commerce de Toulouse a :

- condamné 'en deniers ou quittances valables' la Sas du [Adresse 6] à payer à la Sas Artémy Développement Construction, la somme de 525 000 euros, avec intérêt au taux légal majoré suivant l'article L. 441-6 du code de commerce à compter du 6 juin 2016,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- débouté la Sas Artémy Développement Construction de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires

- débouté la Sas Artémy Développement Construction de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

- condamné la Sas du [Adresse 6] à payer à la Sas Artémy Développement Construction la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sas du [Adresse 6] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal de commerce a considéré que M. [U] avait contracté en pleine connaissance de ses moyens, déboutant la société du [Adresse 6] de sa demande en nullité du contrat de construction, et que l'échéancier de paiement n'ayant pas été respecté, les travaux ont été légitimement suspendus. Il a ajouté que le contrat ne prévoyait pas de clause pénale et que la résiliation du contrat n'effaçait pas les créances antérieures nées de la signature du contrat.

-:-:-:-:-

I - Par déclaration en date du 12 janvier 2018 la Sas Adc a interjeté appel de cette décision avec la mention 'appel total déboute la sas Artemy Développement Construction de sa demande de dommages et intérêts complémentaires ; déboute la sas Artemy Développement Construction de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée'.

II - Par déclaration en date du 5 février 2018, la Sas société du [Adresse 6] a également relevé appel de cette même décision en critiquant expressément chacune de ses dispositions, sauf celles ayant rejeté les demandes en dommages et intérêts.

Les procédures ont été jointes par ordonnance du 18 octobre 2018.

Par ordonnance rendue le 5 novembre 2020, le magistrat chargé de la mise en état a rejeté une demande d'expertise sollicitée par la Sas du [Adresse 6].

-:-:-:-:-

Par arrêt du 16 mai 2022 la cour d'appel de Toulouse a :

- reçu la prétention présentée en appel par la Sas Société du [Adresse 6] aux fins de

voir prononcer la caducité du marché forfaitaire de construction,

- au fond, l'a rejetée,

- infirmé le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulouse le 11 janvier 2018 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- constaté la résiliation unilatérale du contrat de construction du 13 mai 2016 signé entre la Sas Société du [Adresse 6] et la Sas Artemy Développement Construction sur le fondement de l'article 1794 du code civil,

Avant dire droit sur l'intégralité des demandes d'indemnisation des dépenses et des gains manqués du fait de cette résiliation unilatérale :

- invité la Sas Artémy Développement Production à s'expliquer et produire toutes pièces utiles sur les éléments qui justifieraient l'obligation de dédommagement qu'elle invoque (règlements déjà opérés, actions de justice en cours ou mesures conservatoires engagées contre elle tant pour le paiement des dépenses engagées pour la réalisation des travaux que pour l'indemnisation des gains manqués par les sous-traitants) ainsi que l'évaluation de ses propres gains manqués,

- ordonné la réouverture des débats à l'audience de plaidoirie du lundi 17 octobre 2022 à 14 heures.

- fixé la nouvelle date de clôture au 10 octobre 2022,

- réservé l'ensemble des demandes restant à trancher, les dépens et les frais irrépétibles.

La Sas Artémy Développement Construction ayant constitué un nouvel avocat, l'affaire a été défixée le 4 octobre 2022 et renvoyée à la mise en état.

Un nouvel avis de fixation a été notifié aux parties le 20 décembre 2022 pour l'audience du 9 octobre 2023 à 14 h avec clôture devant intervenir le 11 septembre 2023.

La Sas Artémy Développement Construction n'a pas notifié de nouvelles écritures.

En l'état de l'ordonnance de clôture intervenue le 11 septembre 2023, les prétentions des parties sont les suivantes :

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 mai 2018, la Sas Artemy Développement Construction (Adc), appelante et intimée, demande à la cour, au visa des articles 1217, 1343-2 du code civil et 441-6 du code de commerce, de :

- rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande de nullité du contrat de construction formée par la Sas du [Adresse 6] et l'a condamnée à lui payer la somme de 525 000 euros en règlement de sa facture du 17 mai 2016 avec intérêts majorés et capitalisation des intérêts ainsi que la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- réformer la décision entreprise pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

- condamner la Sas du [Adresse 6] à lui payer la somme supplémentaire de

101 791,71 euros à titre de dommages et intérêts en raison du non-respect de ses engagements et de la brusque rupture du contrat,

- condamner la Sas du [Adresse 6] à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

- 'dire et juger' que ces sommes porteront également intérêts au taux légal majoré conformément à l'article 441-6 du code de commerce, à compter pour la première de la mise en demeure adressée le 18 mai 2016 et pour la seconde de la date de l'assignation engageant la présente procédure ;

- ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil ;

- valider la saisie conservatoire de créance du 30 mars 2018 intervenue sur le compte bancaire de la Sas du [Adresse 6] ;

- condamner la Sas du [Adresse 6] à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais de saisie conservatoire.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 janvier 2023, la Sas du [Adresse 6], intimée et appelante, demande à la cour, au visa des articles 1794 et suivants du même code, de :

- débouter la société Adc de l'intégralité de ses demandes à défaut pour elle de rapporter la

preuve de la réalité de son préjudice dont elle se prévaut lequel doit être nécessairement limité aux dépenses de travaux effectivement engagées/réglées et éventuellement au manque à gagner dans l'entreprise.

En conséquence de quoi,

- condamner la société Adc à répéter les sommes par elle reçues à titre provisionnel soit la somme de 300 000 € en vertu de l'ordonnance en date du 12 août 2016 du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse confirmée par l'arrêt du 16 janvier 2017 rendu par la cour d'appel de Toulouse,

- condamner la société Adc aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Ribaute, avocat en application de l'article 699 du code de procédure civile et au paiement d'une indemnité de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Il a d'ores et déjà été jugé par l'arrêt mixte de la présente cour du 16 mai 2022 que devait être constatée la résiliation unilatérale du contrat de construction du 13 mai 2016 signé entre la Sas Société du [Adresse 6] et la Sas Artemy Développement Construction sur le fondement de l'article 1794 du code civil s'agissant d'un marché à forfait dont la résiliation unilatérale par le maître de l'ouvrage, en l'espèce la Sas Société Louis Breguet, est autorisée par sa seule volonté, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, et ce en dehors de toute idée de faute de la part du constructeur.

Selon les dispositions de ce texte, cette résiliation unilatérale impose au maître de l'ouvrage de dédommager l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

Ainsi que déjà rappelé par la cour, l'indemnisation prévue par l'article 1794 du code civil ne correspond pas à l'exécution des paiements contractuellement prévus par le marché de travaux avant la résiliation mais à la valeur des dépenses effectivement exposées pour la réalisation des travaux exécutés à la date de la résiliation, à la rémunération des prestations effectivement fournies, et à la perte de gains, toutes prestations et pertes dont la Sas Artémy Développement Construction doit justifier.

En l'espèce, il ressort du procès-verbal de constat d'huissier établi le 21 juin 2016 par Me [J], huissier de justice à [Localité 7], en présence des deux parties, qu'à cette date avaient été réalisés les travaux de terrassement d'une plateforme d'environ 2000 m2 avec remblayage sur toute la longueur de la plateforme, des réseaux enterrés visibles non recouverts matérialisés par une partie visible d'édifice constitué de rangées de moellons, un réseau en buse béton, deux petites dalles béton au niveau du coffrage desdits réseaux (pièce 7 de la Sas Adc).

Ces travaux ont été réalisés par la société Eurovia. La société du [Adresse 6] admet en page 7 de ses écritures que la société Adc peut seulement prétendre au remboursement de la facture Eurovia. Au vu d'une pièce 17 visée au bordereau annexé aux dernières écritures de l'appelante, qui ne correspond pas à celle effectivement numérotée 17 dans le dossier déposé devant la cour après réouverture des débats sans nouvelles écritures, laquelle est constituée par une expédition de l'arrêt du 26 janvier 2017 (mentionnée comme pièce 29 dans ledit bordereau), la cour a retenu dans l'arrêt mixte susvisé que les travaux préparatoires de terrassement, fourniture et pose de canalisations du réseau EP avec création d'un regard constatés comme réalisés dans le constat du 21 juin 2016 avaient été facturés par Eurovia le 31 mai 2016 pour un montant de 51.895 € Ttc. L'intimée admettant que le paiement de cette facture peut être réclamé, il doit être retenu que la société du [Adresse 6] est redevable envers la société Adc, à titre de dédommagement des travaux effectivement exécutés, de la somme de 51.895 € correspondant au montant de la facture Eurovia du 31 mai 2016.

Les pièces produites au dossier établissent par ailleurs que la société Adc a établi pour le compte de la société du [Adresse 6] le 13/05/2016 un descriptif technique complet avec plans du projet lot par lot ( Vrd, gros-'uvre, charpente métallique-bardage, couverture-étanchéité, menuiseries extérieures aluminium, serrurerie, plâtrerie-faux plafond, menuiserie bois, carrelage-faïences, peinture, courant fort, courant faible, plomberie-sanitaire, Cvc ) validé par le maître d'ouvrage et ayant servi de base à la proposition clef en main tant pour le bâtiment que pour les Vrd pour le coût total du contrat de construction accepté à hauteur de 1 250 000 Ht le 13 mai 2016 (pièce 2 de la Sas Adc), ainsi que les plans du dossier de consultation des entreprises le 24/05/2016 (pièce 32 de la Sas Adc) et qu'elle a mandaté tant le Gfc que Ginger Cebtp pour la réalisation d'études géotechniques de conception (phase avant-projet) dont les rapports lui ont effectivement été adressés les 26/05 et en juin 2016 (pièces 33 et 34 de la Sas Adc). Ces diligences effectivement accomplies pour le compte du maître de l'ouvrage justifient un dédommagement à hauteur de la rémunération contractuellement fixée à la signature du contrat de construction soit 10% Ht du marché confié, représentant 125.000 €.

Pour le surplus il n'a pas été justifié par la société Adc, malgré l'injonction donnée par la cour par l'arrêt mixte susvisé, ni du règlement des mémoires de réclamation ou factures initialement numérotés 18, 19 et 20 dans le bordereau annexé à ses dernières écritures qui ne figurent plus au dossier déposé devant la cour après réouverture des débats, ni des actions en justice en cours ou mesures conservatoires éventuellement engagées contre elle aux fins de règlement desdits mémoires et factures, de sorte que, à défaut d'établir soit qu'elle les a effectivement réglés, soit qu'elle se trouve bien encore débitrice de ces dépenses plus de cinq ans après l'émission desdits mémoires ou factures alors qu'il n'est justifié d'aucun acte interruptif de prescription, aucune autre créance certaine ne peut être retenue au titre de ces mémoires et/ou factures comme ayant été engagée par la société Adc en exécution du marché de travaux résilié dont elle pourrait réclamer le remboursement à la société du [Adresse 6].

En conséquence, en application des dispositions de l'article 1794 du code civil, au titre des prestations effectivement réalisées et des travaux exécutés et réglés pour le compte du maître d'ouvrage initiateur de la résiliation du marché de travaux, la société du [Adresse 6] doit être déclarée redevable envers la société Adc d'un dédommagement d'un montant de 176.895 € (51.895+125.000).

Par ailleurs, ainsi que déjà retenu par la cour dans le précédent arrêt, le non amortissement des frais généraux constitue une part de manque à gagner que la société Adc est en droit de voir indemniser pour elle-même et pour celui des sous-traitants qui ont vu résilier les contrats les liant à l'entrepreneur général susceptible de les en indemniser, tout comme le bénéfice escompté de l'opération non menée à terme du fait du maître de l'ouvrage, le principe d'un tel préjudice imposant réparation en fonction des seuls éléments dont dispose la cour à ce jour en l'absence de toute explication apportée par l'appelante concrètement justifiée sur le montant des frais généraux qu'elle invoque et des données présentées au même titre par certains de ses sous-traitants ainsi que de toute justification de l'obligation de dédommagement qu'elle invoque à l'égard de ces derniers nonobstant l'injonction donnée avant dire droit par la cour.

Au vu des résultats des exercices des années 2014, 2015 et 2016 tels qu'ils résultent des comptes annuels 2014 et 2015 (pièce 41 de la Sas Adc) et de la pièce 19 produite par la société du [Adresse 6] tirée du site societe.com, il ressort que :

-pour l'exercice 2014 la production vendue par la Sas Arte.Développement Construction au capital de 40.000 € ressort à 5.384.529 € pour un résultat d'exploitation bénéficiaire avant impôt hors produits et charges financiers et hors charges et produits exceptionnels de 197.019 €,

- pour l'exercice 2015, année de la fusion-absorption de la Sas Arte.Développement Construction au capital de 40.000 € par la Sas Artemy, devenue au 1er octobre 2015 Artemy Développement Construction au capital de 438.600 €, arrêté au 30/09/2015, la production vendue en services par la Sas Artemy Développement Construction, c'est-à-dire son chiffre d'affaires sur la vente de travaux, s'établit à 4.198.792 € pour un résultat d'exploitation bénéficiaire avant impôts et hors produits financiers et résultat exceptionnel de 7.795 €,

-pour l'exercice clos au 31 décembre 2016, année du contrat résilié, soit sur 15 mois, la production vendue de la Sas Artemy Développement Construction s'établit à 5.828.200 € pour un résultat d'exploitation bénéficiaire avant impôts et hors produits financiers et résultat exceptionnel de 319.000 €,

Sur ces trois exercices, la production globale vendue ressort à 15.411.521€ (5.384.529+4.198.792+5.828.200) et les résultats bénéficiaires représentent un total de 523.814 € (197.019+7.795+319.000). La marge bénéficiaire moyenne sur la production vendue sur 39 mois consécutifs d'activité s'établit ainsi à 3,3988 % arrondie à 3,399%.

Sur la base de ce critère objectif, à défaut de tout autre élément comptable contraire, il peut en conséquence être considéré que la résiliation unilatérale du marché de travaux ayant lié les parties par la société du [Adresse 6] a fait perdre à la Sas Artemy Développement Construction sur le solde du marché restant à réaliser, soit sur la somme de 1.125.000 € Ht (1.250.000-125.000), la Sas Artemy Développement Construction étant assujettie à la Tva, une perte de marge bénéficiaire de l'ordre de 38.239 € (1.125.000 x 3,399% arrondi au centime supérieur).

En conséquence, rejetant le surplus des demandes injustifiées de la Sas Artemy Développement Construction, il convient de condamner la société du [Adresse 6] à lui payer à titre de dédommagement des suites de la résiliation unilatérale du marché de travaux, la somme totale de 215.134 € (176.895 +38.239), et ce, sous déduction des sommes d'ores et déjà perçues en exécution de l'ordonnance de référé du 12 août 2016, confirmée par arrêt de la cour du 26 janvier 2017, et de la saisie attribution du 7 septembre 2016 dont les contestations, formalisées par la société du [Adresse 6] ont été rejetées par décision du juge de l'exécution du 1er mars 2017 confirmée par arrêt de la cour du 7 juillet 2017, le compte restant à faire entre les parties pour la détermination de l'éventuel trop perçu au regard des diverses condamnations aux dépens d'instances et au paiement d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile mises à la charge de la société du [Adresse 6] dans le cadre de ces différentes procédures.

S'agissant d'un dédommagement à caractère indemnitaire, les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce relatives aux pénalités de retard ne sont pas applicables.

La somme ci-dessus allouée à titre indemnitaire ne peut porter intérêts légaux à compter du présent arrêt en application des dispositions de l'article 1231-7 du code civil qu'à la condition qu'elle reste due. Le compte entre les parties restant à intervenir entre elles à compter du prononcé de la présente décision aux fins de détermination de l'éventuel trop perçu par provision, il n'y a pas lieu à capitalisation des intérêts sur le dédommagement alloué, telle que sollicitée, la saisie-attribution du 7 septembre 2016, dont les contestations ont été rejetées, ayant été pratiquée pour un montant de 301.926,02 € sur un compte C.I.O n° 20549101 créditeur de 300.000 € (pièce 13 de l'appelante) et ayant permis le règlement de la provision de 300.000 € ainsi qu'admis par la Sas Adc.

Il n'y a pas davantage lieu de statuer sur la demande de la Sas Artemy Développement Construction tendant à la validation par la cour de la saisie conservatoire qu'elle a diligentée par acte du 30 mars 2018 sur le compte de la société du [Adresse 6] pour un montant complémentaire de 226.000 €, seules les dispositions de l'article L 523-2 du code des procédures civiles d'exécution étant applicables pour la conversion d'une saisie-conservatoire en saisie attribution dès lors que le créancier obtient un titre exécutoire, étant relevé qu'en l'espèce, le présent arrêt ne vaut titre que pour une créance en principal de 215.134 € d'ores et déjà intégralement réglée des suites de la saisie-attribution du 7 septembre 2016. Il n'y a dés lors pas lieu de mettre à la charge de la société du [Adresse 6] les frais de saisie-conservatoire comme le sollicite la Sas Artemy Développement Construction.

Selon les dispositions de l'article 1231-6 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant du retard de paiement peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire. Au regard du montant du dédommagement effectivement retenu et de la saisie-attribution fructueuse pratiquée dès le 7 septembre 2016, la Sas Artemy Développement Construction ne justifie d'aucun préjudice financier distinct du retard de paiement de nature à justifier des dommages et intérêts complémentaires. La Cour dans son précédent arrêt ayant, bien qu'infirmant sur la condamnation principale, réservé l'ensemble des demandes restant à trancher, y compris dépens et frais irrépétibles, le jugement entrepris doit être confirmé en ce que le premier juge a débouté la Sas Artemy Développement Construction de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée.

Chacune des parties succombant en leurs prétentions respectives, les dépens de première instance et ceux d'appel seront supportés pour moitié par chacune d'elles, avec autorisation de recouvrement direct pour la part le concernant par Me Ribaute, avocat qui le demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Compte tenu de ce partage, l'équité ne commande pas que soit allouée à l'une ou l'autre des parties une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Vu l'arrêt mixte, partiellement infirmatif, du 16 mai 2022,

Confirme le jugement du tribunal de commerce du 11 juillet 2018 uniquement en ce que le premier juge a débouté la Sas Artemy Développement Construction de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la Sas du [Adresse 6] à payer à la Sas Artemy Développement Construction à titre de dédommagement des conséquences préjudiciables de la résiliation unilatérale du marché de travaux du 13 mai 2016 la somme de 215.134 € sous déduction des sommes déjà encaissées des suites de la saisie-attribution pratiquée le 7 septembre 2016 en exécution de la condamnation provisionnelle prononcée par ordonnance de référé du 12 août 2016, confirmée par arrêt de la cour du 26 janvier 2017

Dit que le compte entre les parties reste à établir entre elles pour la détermination de l'éventuel trop perçu au regard des diverses condamnations aux dépens d'instances et au paiement d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile mises à la charge de la société du [Adresse 6] dans le cadre des différentes procédures de mise à exécution de l'ordonnance de référé du 12 août 2016

Déboute la Sas Artemy Développement Construction du surplus de ses demandes en paiement, intérêts et/ou pénalités de retard, et de capitalisation d'intérêts

Déclare sans objet la demande de la Sas Artemy Développement Construction tendant à la « validation » de la saisie conservatoire qu'elle a diligentée par acte du 30 mars 2018 sur le compte de la Sas du [Adresse 6] et la déboute de sa demande tendant à la mise à la charge de la Sas du [Adresse 6] des frais inhérents à cette saisie-conservatoire

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés à hauteur de moitié chacune par la Sas Artemy Développement Construction et la Sas du [Adresse 6] avec autorisation de recouvrement direct pour la part le concernant par Me Ribaute, avocat qui le demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première instance que de celle d'appel.

Le Greffier Le Président

N.DIABY C. ROUGER

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 18/00163
Date de la décision : 21/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-21;18.00163 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award