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30/04/2024 | FRANCE | N°21/05084

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 30 avril 2024, 21/05084


30/04/2024



ARRÊT N°



N° RG 21/05084 - N° Portalis DBVI-V-B7F-ORBR

MD/DG



Décision déférée du 12 Novembre 2021

TJ de TOULOUSE

19/02978

Mme GAUMET

















S.E.L.A.R.L. [R] & ASSOCIES





C/



S.A. GAN

S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS













































CONFIRMATION TOTALE







Grosse délivrée



le



à



Me BENOIT-PALAYSI

Me CABALET

Me CANTALOUBE-FERRIEU

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANTE



S.E.L.A.R.L. BENOIT & ASSOCIES

ès quali...

30/04/2024

ARRÊT N°

N° RG 21/05084 - N° Portalis DBVI-V-B7F-ORBR

MD/DG

Décision déférée du 12 Novembre 2021

TJ de TOULOUSE

19/02978

Mme GAUMET

S.E.L.A.R.L. [R] & ASSOCIES

C/

S.A. GAN

S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS

CONFIRMATION TOTALE

Grosse délivrée

le

à

Me BENOIT-PALAYSI

Me CABALET

Me CANTALOUBE-FERRIEU

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

S.E.L.A.R.L. BENOIT & ASSOCIES

ès qualités de mandataire judiciaire de la SCCV PORTETENY

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric BENOIT-PALAYSI de la SCP ACTEIS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A. GAN

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Ingrid CANTALOUBE-FERRIEU, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 11 Décembre 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. IZARD

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société civile de construction vente (Sccv) Porteteny a entrepris la construction d'un immeuble dénommé "Les Bastides de Jaure', comprenant 52 logements et 91 emplacements de parking sur une parcelle sise [Adresse 7] (31), dont elle a cédé l'intégralité des lots à la société par actions simplifiées (Sas) Solinter Actifs 1 suivant acte authentique du 29 décembre 2016 sous la forme d'une vente en l'état futur d'achèvement.

Suivant acte d'engagement du 16 décembre 2016, la Sccv Porteteny avait confié à la société par actions simplifiées (Sas) Bâtiment Habitation Maison (BHM) assurée en responsabilité civile décennale auprès de la société anonyme (Sa) Gan Assurances, la réalisation du lot gros oeuvre, pour un montant total de 1.300.000 euros hors taxes, soit 1.560.000 euros toutes taxes comprises.

Le 29 novembre 2016, la société anonyme (Sa) Compagnie Européenne de Garanties et Cautions (Cegc) s'était engagée en qualité de caution solidaire de la Sas Bhm à une restitution d'acompte pour un montant maximum de 312.000 euros représentant 20% du montant total de la commande.

Suivant deux lettres de change des 16 décembre 2016 et 15 janvier 2017, la Sccv Porteteny a versé à la Sas Bhm, deux acomptes d'un montant respectivement de

120.000 euros et 140.000 euros.

Par courrier recommandé de son conseil en date du 22 septembre 2017, la Sccv Porteteny a demandé à la Sa Cegc la mobilisation de sa garantie à hauteur de 312.000 euros.

Le 29 septembre 2017, la Sccv Porteteny estimant que la Sas Bhm avait abandonné le chantier, a fait établir un constat relatif à l'état d'avancement des travaux par Maître [J] [S], huissier de justice.

Par courrier du 03 octobre 2017, la Sa Cegc, dont la Sccv Porteteny entendait mobiliser le cautionnement, a sollicité auprès de cette dernière la transmission de diverses pièces. Des pièces ont été adressées à l'organisme de caution par courriers des 23 et 27 octobre 2017.

Par jugement rendu par le tribunal de commerce de Narbonne en date du 25 octobre 2017, la Sas Bhm a été placée en liquidation judiciaire.

Par courrier recommandé du 07 novembre suivant, la Sccv Porteteny a déclaré une créance d'un montant de 658.559,90 euros entre les mains de Maître [G] [T] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sas Bhm.

Les échanges entre la Sccv Porteteny et la Sa Cegc se sont poursuivis, cette dernière ne versant pas la caution réclamée par le promoteur.

-:-:-:-

Suivant ordonnance de référé rendue le 30 janvier 2018, le président du tribunal de grande instance de Toulouse, a rejeté la demande de provision d'un montant de 312.000 euros formée par la Sccv Porteteny.

La Sccv Porteteny a saisi le juge des référés du tribunal de grande Instance de Toulouse aux fins d'expertise. Par ordonnance rendue le 21 juin 2018, il a été fait droit à sa demande et a désigné à cette fin M. [G] [B] qui a déposé son rapport le 22 mai 2019.

-:-:-:-

Par acte d'huissier du 08 août 2019, la Sccv Porteteny a fait assigner la Sa Cegc, Maître [T] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sas Bhm et la Sa Gan Assurances devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins, notamment, de restitution d'acomptes indûment perçus.

-:-:-:-

Par jugement du 12 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Compagnie Européenne de Garanties et Cautions,

- prononcé la réception judiciaire des travaux réalisés par la Sas Bhm à la date du 29 septembre 2017 avec les réserves suivantes :

Sous-sol :

piquage et finitions de la paroi moulée (la solution de retenue des terres en phase chantier mal mis en oeuvre),

reprise des tableaux et des linteaux des portes d'accès aux escaliers (huisseries abîmées ou mal posées),

création de seuils sur les portes d'accès aux escaliers pour accès Pmr (Problème d'accès Pmr),

carottages dans voiles, poutres et plancher (Réservations manquantes),

reprises des cunettes périphériques,

reprises des regards à grilles (manque fond en béton),

création de joints d'isolement au droit des poteaux sur dallage,

reprise des fissures sur le dallage,

reprise éventuelle du séparateur hydrocarbure,

reprise de la poutre P0104 fissurée,

reprise du plancher fissuré entre la poutre P0104 et P0108,

piquage, évacuations des gravats et finitions au droit des plots de la grue (positionnée au dessus du dallage fini alors que demandée plus bas),

Étages :

création des réservations dans les gaines techniques palières,

reprise des réservations du plombier (et création des manquantes) dans les planchers béton,

reprise des surfaces des terrasses avant intervention étancheur, (désaffleurs, armatures à couper, mauvaise qualité de surface, etc.),

reprise des surfaces des planchers RDC, R+1 et R+2 du collectif 2. (Mise en oeuvre médiocre des bétons, impossibilité de pose de l'isolant acoustique sans reprise),

reprise faux-aplomb blocs à bancher dans collectif 2,

enduit plâtre sur blocs à bancher (initialement prévu en voiles, modification faite sans autorisation du Moe),

recharge des balcons coulés trop bas,

sondages et éventuelles reprises au niveau des balcons (contrôle de la bonne mise en oeuvre du ferraillage car certaines armatures visibles sur les balcons semblent anormalement basses),

essai en charge des planchers Ht R+1 collectif 2 et reprise éventuelle (constat de flash et nombreuses fissures anormales),

- débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Gan Assurances,

- fixé la somme de 658.559,90 euros au profit de la Sccv Porteteny au passif de la Sas Bhm, représentée par Maître [G] [T] ès qualités de mandataire liquidateur,

- condamné la Sccv Porteteny aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire dont distraction au profil de la Scp Terracol Cabalet Nerot,

- rejeté l'ensemble des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent Jugement.

Considérant que ne sont pas discutées ni la défaillance du débiteur principal de l'exécution du marché de gros oeuvre ni la résiliation du marché, lesquelles résultent de la procédure de liquidation judiciaire de ce débiteur, le tribunal a constaté que la seule difficulté tenait en une différence d'appréciation sur la méthode à retenir pour l'imputabilité des avances consenties par le maître de l'ouvrage pour un montant non contesté de 260 000 euros et en l'absence de précision sur ce point dans les documents contractuels.

Le premier juge a relevé que la norme NF retenue par l'expert judiciaire, précisant que le remboursement des avances devient immédiatement exigible du seul fait de la résiliation du marché à la suite d'un placement en liquidation judiciaire ne pouvait être appliquée dès lors qu'aucun des éléments contractuels ne démontrait que les parties avaient entendu se référer à l'usage mentionné par l'expert préexistant à l'inscription de cette règle dans la norme, antérieurement à sa version de 2017 non applicable au litige.

Relevant que la Sas Bhm avait réalisé une part des travaux supérieure à 20 %, le tribunal jugé qu'il n'était pas établi que l'engagement de caution puisse être mobilisé.

Le tribunal a fixé la réception judiciaire à la date du constat de l'abandon du chantier et a jugé que les désordres constatés par l'expert judiciaire étaient apparents justifiant le rejet des demandes formées à l'endroit de l'assureur décennal.

-:-:-:-

La Sccv Porteteny a été placée en liquidation judiciaire par voie d'extension à la suite d'un jugement du tribunal de commerce de Toulouse rendu le 21 septembre 2021 soit en cours de délibéré du jugement rendu par le tribunal judiciaire.

Par déclaration du 24 décembre 2021, la Selarl [R] & Associes ès qualités de mandataire judiciaire de la Sccv Porteteny a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Compagnie Europeenne de Garanties et de Cautions,

- débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Gan Assurances,

- condamné la Sccv Porteteny aux dépens de l'instance, en ceux compris les frais de la procédure de référé et ceux de l'expertise judiciaire dont distraction au profit de la Scp Terracol Cabalet Nerot.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 août 2022, la Selarl [R] & Associes, ès qualités de mandataire liquidateur de la Sccv Porteteny, appelante, demande à la cour, au visa des article 1101, de l'article 1792 , et des articles 2288 et suivants du code civil, de :

- déclarer recevable et régulier l'appel interjeté par la Selarl [R] et Associes, ès qualités de mandataire judiciaire de la Sccv Porteteny à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse en date du 12 novembre 2021,

- réformer en toutes ses dispositions cette décision,

- déclarer fondés en droit l'application de la norme NF P 03-001 et des usages y afférents.

- rejeter toutes prétentions adverses comme étant infondées,

En conséquence,

- condamner la société compagnie européenne de garanties et de cautions (Cegc) à payer à la Selarl [R] & Associes, ès qualités de mandataire judiciaire de la Sccv Porteteny la somme de 260.000,00 euros correspondant à la restitution d'acompte indûment perçu par la société Bhm, le trop perçu par la société Bhm ayant été évalué à 409 009,56 euros,

- condamner la Sa Gan Assurances à payer à la Selarl [R] et Associes, ès qualités de mandataire judiciaire de la Sccv Porteteny la somme de 204.395,45 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise du bâtiment,

- condamner solidairement la Sa Gan Assurances et la Sa Compagnie Européenne de Garanties et de Cautions aux entiers dépens de première instance et de la présente instance ainsi qu'aux entiers frais d'expertise,

- condamner tout succombant à payer à la Selarl [R] & Associes ès qualités de mandataire judiciaire de la Sccv Porteteny la somme de 8.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mars 2023, la Sa Compagnie Europeenne de Garanties et de Cautions, intimée, demande à la cour, au visa de articles 2292 et 2306 du code civil, de :

- la déclarer recevable et bien fondée en ses conclusions,

En conséquence, y faisant droit

À titre principal

- confirmer le jugement querellé du 12 novembre 2021, en ce qu'il a débouté la société Porteteny de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions,

En conséquence,

- débouter Maître [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Porteteny de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre de la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions,

À titre subsidiaire

- débouter Maître [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Porteteny de ses demandes, fins et prétentions tendant à voir condamner la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions à lui payer une somme supérieure à 16 458 euros toutes taxes comprises en application du droit à prise en compte des frais exposés pour la réalisation des prestations contractuelles de la société Bhm,

En tout état de cause,

- condamner Maître [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Porteteny à verser à la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions une somme de 5.000 euros (cinq mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer, au besoin, au passif de la société Porteteny la somme précitée de 5.000 euros (cinq mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Maître [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Porteteny aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui incluront les frais d'expertise.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mars 2023, la Sa Gan Assurances, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, des articles L 242-1 et suivants du code des assurances, ainsi que de l'article 700 du code de procédure civile, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,

- confirmer en toutes ces dispositions le jugement dont appel

En conséquence,

- débouter la Sccv Porteteny de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions,

- condamner la Sccv Porteteny au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 novembre 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 11 décembre 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

1. Il résulte des conclusions du rapport d'expertise judiciaire déposé par M. [B] que l'ouvrage dont le lot 'gros oeuvre' a été confié à la société BHM qui n'a pas achevé les travaux relevant de son lot et dont une partie de ceux réalisés sont affectés de désordres et malfaçons provenant de fautes d'exécution imputables à cette société. Aucune réception n'est intervenue à l'égard de la société BHM avant la fixation au 29 septembre 2017 de la réception judiciaire avec réserve par le jugement devenu définitif sur ce point en l'absence d'appel de ce chef.

L'état d'avancement des travaux confiés à la société BHM était de 58,67 % à la date de la résiliation du marché intervenue de plein droit le 25 octobre 2017 par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire et de la disposition du CCAP (Chap. IX-1) le prévoyant, sans aucune formalité judiciaire ou mise en demeure préalable.

Chargé de proposer un apurement des comptes entre les parties, l'expert judiciaire a notamment précisé que :

- le montant prévisionnel des délégations de paiement (fournisseurs et sous-traitants à paiement direct) s'élevait à la somme de 1 051 062,08 euros TTC,

- le montant des avances consenties par le maître de l'ouvrage à la société BHM s'élevait à la somme de 260.000 euros TTC,

- le montant des sommes réglées à la société BHM, avances comprises, s'élève à la somme de 495 893,84 euros TTC,

- le coût des travaux de réparation est évalué à la somme de 204 395,45 euros TTC.

2. L'objet de l'appel formé par le liquidateur judiciaire de la société Porteteny vise principalement à voir condamner, d'une part la compagnie européenne de garanties et de cautions à lui payer la somme de 260 000 euros correspondant à la restitution de l'acompte qu'il estime indûment perçu par la société BHM et, d'autre part la Sa Gan, assureur décennal de la société BHM, à lui payer la somme de 204 395,45 euros TTC correspondant au coût des travaux de reprise des bâtiments.

3. Suivant acte de 'caution de restitution d'acompte' du 29 novembre 2016, la compagnie européenne de garanties et de caution s'est engagée, à titre de caution personnelle et solidaire de la société Bâtiment Habitation Maison, à garantir au bénéfice de la Sccv Porteteny la restitution de l'acompte de 312 000 euros représentant 20 % de la commande référencée Les Bastides de Jaurès et ayant pour objet le lot Gros oeuvre/terrassement avec mention d'un délai de livraison au plus tard le 15 décembre 2017, date constituant le terme de cet engagement.

Il est constant que seulement deux acomptes pour un montant total TTC de

260 000 euros ont été versés par la Sccv Porteteny à la société BHM.

3.1. L'expert judiciaire a retenu à l'occasion de l'examen des comptes entre les parties l'application au litige de l'article 20.2 de la norme NF P 03-001 dans sa version homologuée en décembre 2000 et précisant :

'20.2.1 Le cahier des clauses administratives particulières fixe, s'il y a lieu, les modalités de paiement de remboursement des avances.

20.2.2 Le remboursement de celles-ci est immédiatement exigible en cas de résiliation par défaillance de l'entrepreneur ou de résiliation à sa demande'.

3.2. Si le cahier des clauses administratives particulières fait effectivement référence ponctuellement à cette norme (marchés passés par l'entrepreneur avec la sous-traitance, régime des dépenses communes de chantier, sort des frais d'hygiène et de sécurité afférents à chaque entrepreneur, établissement et transmission des mémoires définitifs, réception des travaux), il ne résulte d'aucune mention de ce document que cette norme a été rendue expressément applicable en sa totalité au marché, le CCAP n'ayant manifestement contractualisé cette norme que pour certaines des clauses. Il n'est nullement fait référence à la norme précitée dans les dispositions du CCAP en cas de résiliation du marché.

Au demeurant, la norme à la supposer même applicable, ne prévoit pas le caractère immédiatement exigible des avances en cas de résiliation de plein droit du fait du placement en liquidation judiciaire de l'entrepreneur, aucune résiliation du marché n'avait été notifiée avant le jugement d'ouverture de la procédure collective.

3.3. L'expert judiciaire, se prononçant sur une question de droit, a évoqué l'application d'un usage selon lequel 'le remboursement de l'avance commence quand le montant des situations atteint 65 % du marché et que cette avance est totalement remboursée quand les situations atteignent 80 %'.

Ainsi que l'a justement constaté le premier juge, il n'est nullement démontré qu'un tel usage ait préexisté ni même qu'il aurait été contractualisé alors que le CCAP prévoit, en son chapitre VII 'paiement du prix', une présentation mensuelle des situations sans aucune référence à une imputation différée des avances ni à la défintion d'un seuil de réalisation du marché cela d'autant que le décompte général définitif de la société BHM établi par le maître d'oeuvre faisait apparaître une réalisation correspondant à 58,67 % du marché la concernant de sorte que, sauf à dénaturer l'objet de ces avances qui consiste à favoriser la constitution d'une trésorerie pour le démarrage des travaux et la portée des conventions passées entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur d'une part comme sa caution d'autre part, les sommes réglées à titre d'avances devaient être remboursées mensuellement et la caution a été libérée après que la part de marché réalisée avait dépassé le seuil de 20 % du montant total de la commande.

3.4. Le défaut d'imputation de ces avances dans le décompte général définitif ne saurait avoir pour effet d'étendre le cautionnement consenti par la CEGC au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté, en méconnaissance des dispositions de l'article 2292 du code civil en sa rédaction applicable au litige.

3.5. Il suit de l'ensemble des développements qui précèdent que le jugement doit être confirmé en ce que la société Porteteny, aujourd'hui représentée par son mandataire liquidateur, a été déboutée de ses demandes présentées à l'endroit de la CEGC.

4. Le mandataire liquidateur de la Sccv Porteteny sollicite la réformation du jugement en ce qu'il la débouté la Sccv Porteteny de sa demande d'indemnisation des coûts des travaux de reprise des désordres formée à l'endroit de l'assureur décennal. Il a soutenu que ces derniers avaient tous la nature des désordres visés à l'article 1792 du code civil et que le premier juge a mal interprété les textes applicables en matière de contrat d'entreprise, et notamment en ce qui concerne les règles relative à la réception des ouvrages.

La société Le Gan a considéré que le tribunal a jugé à juste titre que les désordres constatés constituent des vices apparents à la réception et dont la réparation ne pouvait relever de la garantie décennale due par l'assureur, ce dernier ajoutant que les désordres litigieux sont tous survenus en cours de chantier, avant la réception.

4.1. L'examen de l'acte d'appel fait clairement apparaître que le mandataire judiciaire a sollicité dans l'acte d'appel la réformation du jugement de la manière suivante : 'réformation totale du jugement du 12 novembre 2021 en qu'il a : - débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Compagnie Europeenne de Garanties et de Cautions, - débouté la Sccv Porteteny de ses demandes formées à l'encontre de la Sa Gan Assurances, - condamné la Sccv Porteteny aux dépens de l'instance, en ceux compris les frais de la procédure de référé et ceux de l'expertise judiciaire dont distraction au profit de la Scp Terracol Cabalet Nerot'.

En ne visant pas le chef distinct du dispositif du jugement prononçant la réception judiciaire avec réserves au 29 septembre 2017, l'appelant n'a pas saisi la cour de cette disposition, la référence à la réformation totale du jugement, mention contradictoire avec l'énoncé restrictif dans l'acte d'appel des dispositions critiquées, aurait pour conséquence d'englober d'autres dispositions qui sont pourtant favorables à la société Porteteny telles que la fixation à son profit d'une créance non contestée au passif de la société BHM.

4.2. L'appelant ne propose d'ailleurs aucune autre date précise de réception tacite de l'ouvrage qu'il lie à l'abandon du chantier sans plus de précision autre que la conséquence de la résiliation du marché par l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire (p. 8 des conclusions responsives de l'appelant) dont il convient de rappeler qu'elle est postérieure. Il sera relevé que la date du 29 septembre 2017 correspond à celle du constat d'huissier très détaillé constatant cet abandon par l'indication par le maître d'oeuvre de l'absence de tout ouvrier sur le chantier depuis le vendredi précédant le constat et listant l'ensemble des désordres pour lesquels l'expert judiciaire a effectivement constaté que, pour certains ils portaient atteinte à la solidité de l'ouvrage et pour d'autres constituaient une impropriété à destination. La question de leur conséquences techniques n'est d'ailleurs contestée par aucune des parties mais seulement leur caractère apparent à la date de la réception.

4.3. Les désordres constatés par l'huissier, repris dans l'assignation ayant conduit à la désignation de l'expert judiciaire et figurant dans les réserves énoncées dans le jugement querellé étaient par essence apparents à cette date. Évoquant la dalle de béton que l'huissier a décrite comme présentant des défaut de planeité avec des phénomènes de vaguelettes importants dans toutes les pièces et comme étant 'très grossièrement réalisée', l'appelant ne peut déduire de ce constat une absence de visibilité de ce désordre à cette date. L'analyse de l'expert judiciaire relativement aux désordres concernant les balcons et les aciers affleurants, présentés comme de nature à constituer une atteinte à la solidité de l'ouvrage porte sur des défauts déjà relevés dans le compte-rendu de chantier du 24 juillet 2017 : 'aciers haut des balcons visible au niveau des ouvertures' (page 5), annexé au constat d'huissier précité.

Ce sont les seuls points explicités par l'appelant dans ses conclusions au soutien de ses prétentions étant ajouté dans ces mêmes écritures : 'Il faut donc en conclure qu'il ne s'agit pas de vices apparents mais bien des vices qui ne sont pas apparents, pas nécessairement visibles mais qui affectent la solidité de l'ouvrage ains que sa destination et qui sont par conséquent de nature décennale'.

4.4. Il résulte au contraire des constatations qui précèdent que c'est à bon droit que la société Le Gan dénie sa garantie en raison de ce que l'apparition de tous les désordres litigieux a été constatée avant la réception de l'ouvrage et que ceux-ci, s'étant déjà révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences sur la solidité de l'ouvrage ou sa destination, ont été justement considérés comme relevant de réserves excluant le régime de la garantie décennale, seule garantie contractée auprès de l'assureur par l'entrepreneur concerné et sur le fondement de laquelle l'appelant recherche à tort la condamnation du Gan.

Le jugement sera donc confirmé en sa disposition ayant rejeté les demandes formées contre ce dernier.

5. La Sccv Porteteny a été à bon droit condamnée aux dépens de première instance qui comprennent aussi les frais de référé et d'expertise qui ont été exposés en lien étroit et nécessaire avec l'instance au fond. La décision rendue après clôture des débats intervenue avant le placement de la société Porteteny en liquidation judiciaire sera confirmée sur ce point.

La Selarl [R] & Associés ès qualités, sera tenue des dépens d'appel qu'il convient de fixer au passif de la société Porteteny.

6. La société CGEC comme la société Le Gan sont en droit de réclamer chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le paiement d'une somme au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle ont dû exposer à l'occasion de l'instance d'appel. Il convient, à ce titre, de fixer au passif de la société Porteteny la somme de 3 000 euros au bénéfice de la société CGEC et celle de 3 000 euros au bénéfice de la société Le Gan.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions frappées d'appel le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 12 novembre 2021.

Et y ajoutant,

Fixe au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la Sccv Porteteny :

- les dépens de l'instance d'appel,

- la somme de 3 000 euros au bénéfice de la Sa Compagnie Européenne de Garantie et Cautions en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la somme de 3 000 euros au bénéfice de la Sa Gan Assurances en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N.DIABY M.DEFIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/05084
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;21.05084 ?
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