La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2024 | FRANCE | N°22/02119

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 21 mars 2024, 22/02119


21/03/2024



ARRÊT N° 91/24



N° RG 22/02119 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O2K6

NA/RL



Décision déférée du 09 Mai 2022 - Pole social du TJ d'AGEN (20/00194)

G. [V]























[X] [D]





C/





CPAM LOT-ET-GARONNE



[9]

es qualités mandataire ad'hoc

Me Clément THIERRY - SCP BTSG


























>





































CONFIRMATION PARTIELLE







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT ET UN MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT



Monsieur [X] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]



ayant pour...

21/03/2024

ARRÊT N° 91/24

N° RG 22/02119 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O2K6

NA/RL

Décision déférée du 09 Mai 2022 - Pole social du TJ d'AGEN (20/00194)

G. [V]

[X] [D]

C/

CPAM LOT-ET-GARONNE

[9]

es qualités mandataire ad'hoc

Me Clément THIERRY - SCP BTSG

CONFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT ET UN MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

Monsieur [X] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]

ayant pour avocat Me Elisabeth LEROUX de la SELARL TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS

partie dispensée de comparaître à l'audience en application de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile

INTIMEE

CPAM LOT-ET-GARONNE

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Anthony PEILLET, avocat au barreau de TOULOUSE

[9]

es qualités mandataire ad'hoc Me Clément THIERRY - SCP BTSG

[Adresse 3]

[Localité 6]

non comparant, non représenté

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2024, en audience publique, devant Mme N. ASSELAIN,conseillère chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.

Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

M. DARIES, conseillère

M. SEVILLA, conseillère

Greffière : lors des débats M.POZZOBON

ARRÊT :

- REPUTÉ CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente, et par M.POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE

M.[X] [D] a été employé à l'usine de [Localité 8], devenue [9], du 1er janvier 1982 au 31 mai 2011, en qualité d'ouvrier puis contrôleur. La société [9] a pour activité principale la fabrication, le traitement et la distribution de produits en fonte, acier et autres métaux ou alliages destinés notamment à l'industrie.

M.[D] a souscrit une déclaration de maladie professionnelle le 17 janvier 2018, mentionnant une surdité bilatérale.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Lot-et-Garonne a reconnu le caractère professionnel de sa pathologie, le 19 décembre 2018, au titre du tableau n°42.

Elle lui a notifié le 24 décembre 2018 une décision portant attribution d'une rente pour un taux d'incapacité permanente partielle fixé à 40%.

Par lettre du 9 mai 2020, après échec de la tentative de conciliation, M.[D] a saisi le tribunal pour obtenir reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Par jugement du 9 mai 2022, le tribunal judiciaire d'Agen a:

- Dit que la maladie professionnelle contractée par M.[D] est due à la faute inexcusable de son ancien employeur la société [9],

- Ordonné la majoration maximale de la rente servie à M.[D] par la CPAM,

- Fixé l'indemnisation des préjudices personnels de M.[D] comme suit:

- Souffrances physiques et morales : 11.500 euros,

- Préjudice d'agrément : 1.500 euros,

- Déficit fonctionnel temporaire : 2.688 euros.

- Débouté M.[D] de ses demandes de réparation au titre du préjudice esthétique et des dépenses de santé;

- Dit que la CPAM versera à M.[D] la somme de 450 euros au titre de la rémunération du mandataire ad hoc,

- Dit que la CPAM de Lot et Garonne versera directement à M.[D] les sommes ci-dessus,

- Condamné la société [9] à verser à M.[D] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné l'exécution provisoire de la décision.

M.[D] a relevé appel partiel de ce jugement par déclaration du 3 juin 2022, en ce qui concerne l'évaluation de son préjudice.

M.[D] conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que la maladie professionnelle dont il est atteint est la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la société [9], fixé au maximum légal la majoration de la rente, fixé la réparation du déficit fonctionnel permanent à hauteur de 2.688 euros, et dit que la CPAM versera à M.[D] la somme de 450 euros au titre de la rémunération du mandataire ad hoc. Il demande la réformation du jugement pour le surplus, et, outre la condamnation de la CPAM de Lot et Garonne à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la fixation de l'indemnisation des préjudices subis comme suit :

- en réparation du préjudice de souffrances physiques et morales : 50.000 euros

- en réparation du préjudice d'agrément : 10.000 euros

- en réparation du préjudice esthétique : 5.000 euros

- en réparation des dépenses de santé : 4.289 euros

- en réparation du déficit fonctionnel permanent : 102.000 euros.

La société [9], en liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif, représentée par son mandataire ad hoc, la société [7], n'a pas comparu.

La CPAM de Lot et Garonne s'en remet à la décision de la juridiction sur les demandes indemnitaires de M.[D], sauf à limiter les sommes allouées aux chefs de préjudice prévus par l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale ainsi qu'aux chefs de préjudice non déjà couverts par le livre IV du même code, et à débouter M.[D] de sa demande au titre des dépenses de santé.

MOTIFS

Il résulte de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale que la victime d'une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l'employeur peut demander, en sus de la majoration de la rente qu'elle reçoit, indemnisation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d'agrément, et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Il résulte par ailleurs de la décision du conseil constitutionnel du 18 juin 2010 que la victime d'une faute inexcusable de l'employeur peut également demander réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, soit notamment le déficit fonctionnel temporaire, l'assistance par tierce personne avant consolidation, le préjudice sexuel et le préjudice exceptionnel.

L'assemblée pleinière de la cour de cassation retient, dans deux arrêts rendus le 20 janvier 2023, que la rente ne répare pas le déficit fonctionnel permanent. Il en résulte que ce poste de péjudice peut également faire l'objet d'une indemnisation complémentaire en cas de faute inexcusable de l'employeur.

Les différents postes de préjudice faisant l'objet de l'appel de M.[D] doivent être indemnisés au regard des pièces versées aux débats, en l'absence d'expertise médicale.

- souffrances physiques et morales endurées avant consolidation

Dès lors que M.[D] demande désormais l'indemnisation de son déficit fonctionnel permanent, incluant les souffrances physiques et morales postérieures à la consolidation de son état de santé, seules les souffrances antérieures à la consolidation peuvent faire l'objet d'une indemnisation complémentaire distincte.

Le médecin conseil de la caisse a fixé la date de la première constatation médicale de la maladie au 15 mai 2017, et l'état de M.[D] a été considéré comme consolidé à la date du 18 janvier 2018.

Les souffrances physiques et morales subies par M.[D] de fait de son hypoacousie bilatérale, en ce qu'elles se rapportent à cette période d'incapacité temporaire de huit mois, ne peuvent pas être compensées par une somme excédant 3.000 euros.

- dommage esthétique temporaire et définitif:

M.[D], né le 7 mars 1957, est contraint de porter des prothèses auditives externes, qui marquent de façon visible l'existence d'un handicap.

Une indemnité de 3.000 euros doit lui être allouée en réparation de ce préjudice.

- préjudice d'agrément:

Ce préjudice est constitué par l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs.

Le témoignage du fils de M.[D] ne démontre pas en l'espèce d'impossibilité de pratiquer la randonnée ou le vélo, ni de difficultés spécifiques à l'exercice de ces activités. L'incidence de la surdité sur l'exercice de l'ensemble des actes de la vie courante est par ailleurs compensée par l'indemnité allouée au titre du déficit fonctionnel permanent.

Il n'y a donc pas lieu à réparation d'un préjudice d'agrément ainsi défini, qui n'est pas caractérisé.

- déficit fonctionnel permanent:

Ce préjudice est constitué par l'atteinte physiologique ainsi que par la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence. Il inclut les souffrance physiques et morales postérieures à la consolidation.

La CPAM de Lot et Garonne a retenu que M.[D], né le 7 mars 1957, présente un taux d'incapacité permanente partielle de 40% à la date de la consolidation de son état de santé, le 18 janvier 2018. Les séquelles reconnues par la caisse consistent en une surdité professionnelle bilatérale sévère.

Au regard du déficit fonctionnel permanent résultant de cette atteinte physiologique, et en considération du fait que M.[D] était âgé de plus de 60 ans à la date de la consolidation de son état de santé, une indemnité de 90.600 euros doit lui être allouée en réparation de ce chef de préjudice.

- dépenses de santé:

M.[D] invoque les frais de prothèse auditive restés à sa charge.

Cependant, les dommages couverts, même partiellement, par le livre IV du code de la sécurité sociale, ne peuvent pas faire l'objet d'une indemnisation complémentaire lorsque la faute inexcusable de l'employeur est retenue.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de ce chef.

***

Conformément aux dispositions de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, la réparation de ces préjudices doit être versée directement à M.[D] par la CPAM de Lot et Garonne.

L'action récursoire de la CPAM de Lot et Garonne à l'encontre de la société [9], en liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif, a été écartée par le jugement de première instance, qui ne fait l'objet d'aucune critique de ce chef.

En considération des circonstances de la cause, il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La CPAM de Lot et Garonne doit supporter les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement rendu le 9 mai 2022, sauf en ce qu'il a statué sur les demandes formées au titre des souffrances endurées, du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique ;

Statuant à nouveau sur ces chefs de décision infirmés et y ajoutant,

Fixe l'indemnisation des souffrances endurées et du préjudice esthétique aux sommes suivantes:

- 3.000 euros au titre des souffrances endurées avant consolidation,

- 3.000 euros au titre du préjudice esthétique;

Rejette la demande d'indemnité présentée au titre du préjudice d'agrément,

Fixe l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de M.[D] à la somme de 90.600 euros;

Dit que la réparation de ces préjudices doit être versée directement à M.[D] par la CPAM de Lot et Garonne;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

Dit que la CPAM de Lot et Garonne doit supporter les dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par M. POZZOBON, greffière

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

M. POZZOBON N. ASSELAIN .


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 22/02119
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;22.02119 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award