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19/03/2024 | FRANCE | N°20/03183

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 19 mars 2024, 20/03183


19/03/2024



ARRÊT N°



N° RG 20/03183

N° Portalis DBVI-V-B7E-N2FF

MD / RC



Décision déférée du 25 Septembre 2020 Juridiction de proximité de MURET

(1119000535)



MME DUVERT

















[F] [Z]





C/



[V] [P]




















































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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANT



Monsieur [F] [Z]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Anne MARIN de la SELARL MARIN AVOCATS, avocat au b...

19/03/2024

ARRÊT N°

N° RG 20/03183

N° Portalis DBVI-V-B7E-N2FF

MD / RC

Décision déférée du 25 Septembre 2020 Juridiction de proximité de MURET

(1119000535)

MME DUVERT

[F] [Z]

C/

[V] [P]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

Monsieur [F] [Z]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Anne MARIN de la SELARL MARIN AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Madame [V] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Julie SALESSE de la SCP D'AVOCATS SALESSE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [F] [Z] a fait édifier une véranda adossée au mur de l'habitation de Mme [V] [P]. Cette dernière s'est plainte des nuisances sonores.

La conciliation initiée par Mme [V] [P] n'a pas abouti en raison de l'absence de réponse de M. [Z] à l'invitation du conciliateur de justice.

Par déclaration au greffe du 21 juin 2019, Mme [V] [P] a saisi le tribunal de proximité de Muret aux fins de voir condamner M. [F] [Z] à lui verser la somme de 4 000 euros au titre du préjudice lié à la construction d'une véranda en se servant du mur privé de la chambre comme cloison, ce qui a entraîné des nuisances sonores importantes. Elle sollicite également le démontage de la véranda ainsi que la réfection du mur.

Par un jugement contradictoire en date du 25 septembre 2020, le tribunal de proximité de Muret, a :

- condamné M. [F] [Z] à démolir la véranda édifiée en appui sur le mur privatif de Mme [V] [P] et à procéder à la réfection du mur dans le délai de quatre mois à compter de la signification du jugement, à défaut à lui payer la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné M. [F] [Z] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré que la véranda avait été édifiée sur la 'partie privative du mur' appartenant à Mme [V] [P]. Par conséquent, il a fait droit à la demande de démolition de la véranda et de réfection du mur.

Par déclaration en date du 18 novembre 2020, M. [F] [Z] a relevé appel de l'ensemble des dispositions de ce jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 15 février 2021, M. [F] [Z], appelant, demande à la cour, au visa de l'article 653 du code civil, de :

- réformer en tout point le jugement dont appel,

Statuant à nouveau,

- constater que le mur séparatif des fonds n° 130 et 131 est mitoyen et qu'en conséquence il pouvait parfaitement y adosser une véranda sans obtenir un accord préalable de Mme [V] [P] ;

- constater que Mme [V] [P] ne démontre pas la réalité des nuisances sonores qu'elle invoque,

- débouter Mme [V] [P] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner Mme [V] [P] au paiement de la somme de 1.500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [V] [P] aux entiers dépens, en ce compris ceux de première instance.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 10 mai 2021, Mme [V] [P], intimée, demandent à la cour, au visa de articles 653 et 662 du code civil, de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

Par conséquent,

- débouter M. [F] [Z] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner M. [F] [Z] à lui régler la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre la prise en charge des entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 septembre 2023. L'affaire a été examinée à l'audience du 19 septembre 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

1. Selon l'article 653 du code civil, dans les villes et les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, est présumé mitoyen, s'il n'y a titre ou marque du contraire.

1.1 En l'espèce, M. [Z] a construit une véranda apposée sur le mur séparant le jardin de ce dernier et la chambre de sa voisine, au niveau de la côte 3.25.

Les actes d'acquisition des immeubles respectifs des parties comportent une clause constituant une servitude de vue et faisant chacun état de l'existence d'un mur mitoyen et contigu du jardin (page 8 de l'acte d'acquisition par M. [Z] et Mme [O] de la parcelle n° [Cadastre 4] à Mme [D] du 10 octobre 2013 et page 4 de l'acte d'acquisition par Mme [P] de la parcelle n° [Cadastre 3] à Mme [W] du 27 juin 2013). Le plan de bornage des deux propriétés, annexé à l'acte d'acquisition de Mme [P] porte la mention sur la ligne divisoire 'mur mitoyen' à l'endroit où les murs des maisons sont liés (pièce n° 2 du dossier de Mme [P]).

Le géomètre expert qui a dressé ce plan de bornage et de division le 20 avril 2011 a répondu par courrier du 5 décembre 2019 à Mme [P] en indiquant : 'Par la présente, j'atteste que la partie du mur du bâtiment au Sud est entièrement privatif et rattaché au Lot 1, c'est à dire que cette partie du mur n'appartient qu'au Lot 1. Cela signifie également qu'aucun élément du lot 2 ne peut prendre appui sur ce mur sauf à vous racheter la mitoyenneté du mur'. Cette affirmation faite en cours d'instance et se référant à la légende applicable à la mitoyenneté effectivement présente sur la partie de mur commune aux deux maisons, entre cependant en contradiction avec les actes de propriété qui ne font pas état d'une mitoyenneté limitée à une partie du mur.

Spécialement, il est mentionné 'afin de permettre à Mme [V] [D], intervenant aux présentes, de profiter du jour et de l'ouverture de la fenêtre, percée dans le mur mitoyen et contigu du jardin de Mme [P], cette dernière lui consent à titre de servitude réelle et perpétuelle grevant la partie non bâtie de sa propriété un droit de vue'. Or, le plan du géomètre, réalisé antérieurement à l'acte, fait figurer pour ce pan de mur affecté de la servitude de vue une légende applicable à un mur privatif.

Les parties n'ont donc pas entendu limiter la mitoyenneté de ce mur à la seule partie située à la jonction des bâtiments mais l'étendre conformément à la présomption légale à l'étendue du mur. En effet, cette mitoyenneté globale est par ailleurs confirmée par les propres affirmations de Mme [P] dans ses courriers adressés à M. [Z] par lesquels elle indique 'vous avez construit une véranda en vous adossant au mur mitoyen de ma maison sans fermeture indépendante' (21 novembre 2016) et 'ma demande consiste à la construction par un professionnel d'un mur sur votre partie privative en doublant ainsi le mur mitoyen de ma chambre' (7 décembre 2016).

Dans un courrier de réponse à la mise en demeure faite par Mme [P] aux fins d'enlèvement de la véranda du 7 décembre 2018 par lequel elle évoque le caractère privatif de son mur, M. [Z] a précisé que 'suite à nos renseignements pris auprès du notaire et du géomètre, je vous confirme que ce mur est bien mitoyen et que de ce fait vous n'en avez pas l'exclusivité'.

Il ressort ainsi de l'ensemble de ces constatations que le mur supportant la véranda litigieuse doit être considéré comme mitoyen.

2. Selon l'article 662 du code civil, 'L'un des voisins ne peut pratiquer dans le corps d'un mur mitoyen aucun enfoncement, ni y appliquer ou appuyer aucun ouvrage sans le consentement de l'autre, ou sans avoir, à son refus, fait régler par experts les moyens nécessaires pour que le nouvel ouvrage ne soit pas nuisible aux droits de l'autre'.

2.1 En l'espèce, Mme [P] fait état de nuisances sonores dans sa chambre, mitoyenne avec la véranda et avait écrit au maire de la commune d'[Localité 7] pour indiquer le 25 décembre 2018 pour savoir si M. [Z] avait obtenu un accord de la mairie pour la construction de cette véranda, Mme [P] précisant : 'J'habite depuis 5 ans la maison mitoyenne au[Adresse 1] dont les voisins M. [Z] [F] et Mme [O] [Y] habitant au [Adresse 1] ont édifié il y a 2 ans 1/2 environ une véranda avec appui sur le mur mitoyen au niveau de ma chambre à coucher'.

Il n'est pas établi que Mme [P] a clairement contesté le principe de cet adossement. Toutefois, les pièces précitées et d'autres courriers échangés entre les voisins ont en réalité fait état de travaux pour mettre fin aux nuisances sonores et il n'est produit à la procédure aucun élément caractérisant un consentement préalable de Mme [P] à l'appui de la véranda sur le mur mitoyen.

2.2 Le propriétaire qui s'est abstenu de se conformer à la prescription de l'article 662 n'encourt aucune sanction mais le voisin ne peut solliciter la démolition et/ou des dommages et intérêts que s'il parvient à démontrer que les travaux litigieux portent atteinte à la solidité du mur et lui causent un préjudice.

M. [Z] a effectué des travaux de doublage phonique comme l'atteste une facture en date du 04 décembre 2019 soit près de dix mois avant le jugement critiqué. En l'absence d'élément de preuve corroborant les faits rapportés par Mme [P] sur la persistance et l'intensité des désagréments, la démolition de la véranda n'apparaît pas justifiée.

2.3 En conséquence, le jugement du tribunal de proximité de Muret sera réformé en ce qu'il a ordonné la démolition de l'ouvrage.

2.4 En revanche, il convient de considérer que Mme [P] est en droit de réclamer pour les dommages subis avant ces travaux, troubles que M. [Z] n'a jamais contestés en leur principe puisque ses courriers évoquaient lors de la phase non contentieuse de leur litige, diverses modalités pour mettre fin à ces nuisances. Le jugement entrepris qui a condamné M. [Z] à payer à défaut de démolition du mur dans le délai imparti par cette décision, la somme de 4 000 euros à Mme [P] à titre de dommages intérêts doit être infirmé en ce qu'il a prévu cette condamnation à titre subsidiaire et le montant ramené à la somme de 2 000 euros à titre de réparation du préjudice subi tel que ressortant des développements qui précèdent.

3. M. [Z], partie principalement perdante, sera condamné aux entiers dépens d'appel, la décision entreprise étant confirmée en ce qu'elle a condamné cette partie aux dépens de première instance.

4. Mme [P] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû exposer en appel. M. [Z] sera condamné à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de proximité de Muret du 25 septembre 2020 à l'exception de sa disposition relative aux dépens.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mme [V] [P] de sa demande de démolition de la véranda.

Condamne M. [F] [Z] à payer à Mme [V] [P] la somme de 2 000 euros au titre des dommages et intérêts.

Condamne M. [Z] aux dépens d'appel.

Condamne M. [F] [Z] à payer à Mme [V] [P] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 al. 1er, 1° du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03183
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;20.03183 ?
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