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07/07/2023 | FRANCE | N°21/02410

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 07 juillet 2023, 21/02410


07/07/2023





ARRÊT N°2023/358



N° RG 21/02410 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OGEO

MS/LSLA



Décision déférée du 15 Avril 2021

Pole social du TJ de TOULOUSE

18/11415

I.GHARBI























S.A.S. [4]





C/



Caisse URSSAF DE [Localité 8]









































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INFIRMATION







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANT



S.A.S. [4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Jean-romain RAPP de la SELARL PRICENS, avocat au barreau de TO...

07/07/2023

ARRÊT N°2023/358

N° RG 21/02410 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OGEO

MS/LSLA

Décision déférée du 15 Avril 2021

Pole social du TJ de TOULOUSE

18/11415

I.GHARBI

S.A.S. [4]

C/

Caisse URSSAF DE [Localité 8]

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

S.A.S. [4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Jean-romain RAPP de la SELARL PRICENS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

URSSAF DE [Localité 8]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

représentée par Me Margaux DELORD de la SCP BLANCHET-DELORD-RODRIGUEZ, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 25 Mai 2023, en audience publique, devant la Cour composée de:

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

MP. BAGNERIS, conseillère

M. SEVILLA, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : L. SAINT LOUIS AUGUSTIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signées par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par C.GIRAUD, directeur des services de greffe.

EXPOSE DU LITIGE

La Société civile de construction vente [6] a confié à la Société [4] la construction d'un ensemble immobilier.

Courant 2015, la société [4] a sous-traité une partie de l'exécution des travaux aux sociétés [2], [5] et [3], lesquelles ont fait l'objet de redressements pour travail dissimulé par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de [Localité 8] (l'URSSAF).

Les 30 mars et 13 avril 2017, l'URSSAF [Localité 7] a notifié à la société [4] trois lettres d'observations au titre de la solidarité financière du donneur d'ordre, prévue aux articles L.8222-1 et suivants du code du travail. L'inspecteur du recouvrement a considéré que la société n'avait pas respecté son obligation de vigilance.

Pour 2015, la solidarité financière de la société [4] a été évaluée à 22.754 euros pour la société [3], 20.893 euros pour la société [2] et 100.953 euros pour la société [5].

Le 29 novembre 2017, trois mises en demeure ont été délivrées à la société [4] pour les montants respectifs de 23.891 euros concernant la société [3], dont 22.754 euros au titre des cotisations et 1.137 euros au titre des majorations, 21.937 euros concernant la société [2], dont 20.893 euros au titre des cotisations et 1.044 euros au titre des majorations, et 106.000 euros concernant la société [5], dont 100.953 euros au titre des cotisations et 5.047 euros au titre des majorations.

Par courriers du 26 janvier 2018, la société [4] a contesté ces mises en demeure devant la commission de recours amiable de l'URSSAF.

Le 6 novembre 2018, la commission de recours amiable a fait droit au recours s'agissant de la solidarité financière avec la société [3], le donneur d'ordre justifiant du respect de l'obligation de vigilance, et a annulé la mise en demeure correspondante. La commission a rejeté le surplus du recours.

Par requête du 11 décembre 2018, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne d'une contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable.

Par acte d'huissier du 5 mars 2020, la société [4] a appelé en garantie la Sci [6], maître de l'ouvrage.

Par jugement du 15 avril 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse, succédant au tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne, a:

- rejeté le recours de la société [4];

- validé en conséquence les redressements de la société [4] au titre de la solidarité financière à l'égard des sociétés [2] et [5], notifiés par lettres d'observations des 30 mars et 13 avril 2017;

- condamné la société [4] à payer à l'URSSAF la somme de 21.937 euros, hors majorations complémentaires de retard, au titre de la solidarité financière avec la société [2];

- condamné la société [4] à payer à l'URSSAF la somme de 106.000 euros, hors majorations complémentaires de retard, au titre de la solidarité financière avec la société [5];

- déclaré la société [4] irrecevable en ses demandes dirigées à l'encontre de la Sci [6];

- débouté la Sci [6] de sa demande de dommages et intérêts;

- condamné la société [4] à payer à l'URSSAF d'une part, et à la Sci [6] d'autre part la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

La société [4] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 28 mai 2021, exclusivement à l'encontre de l'URSSAF.

Dans ses dernières écritures, reprises oralement et auxquelles il convient de renvoyer pour complet exposé, elle conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a validé les redressements opérés à son égard par l'URSSAF.

Elle demande à la cour, outre le paiement de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, de:

* A titre principal,

- dire infondée la mise en oeuvre de la procédure de solidarité financière à l'encontre de la société [4], et ordonner la suspension définitive de toute procédure de redressement à son encontre;

* A titre subsidiaire,

- dire que la société [4] ne pouvait obtenir l'attestation de vigilance qu'à compter du 15 octobre 2015 et en conséquence ramener le montant du redressement au titre de la solidarité financière à la somme totale de 58.773 euros.

Au soutien de son appel la société [4] considère que les conditions de la mise en oeuvre de la solidarité financière ne sont pas réunies, dès lors que:

- l'URSSAF ne lui a pas communiqué les procès-verbaux de constatations de travail dissimulé dans leur intégralité, ni le détail des sommes mises à la charge de [5] et [4].

-elle a respecté son obligation de vigilance, et se prévaut de sa bonne foi.

-Concernant la société [5], elle fait valoir notamment qu'elle a obtenu une attestation sur l'honneur du dirigeant et des attestations du comptable, datées des 25 juin et 26 novembre 2015, déclarant que compte tenu de sa création et de ses embauches récentes la société [5] ne pouvait obtenir d'attestation de cotisations à jour, et qu'elle s'est fait remettre chacune des déclarations préalables à l'embauche. Elle souligne qu'elle ne pouvait obtenir aucune attestation avant le 15 octobre 2015, la société n'ayant employé des salariés qu'à compter du 1er juillet 2015.

-Concernant la société [2], elle fait valoir qu'elle a obtenu notamment une attestation sur l'honneur du dirigeant, des justificatifs de déclarations préalables à l'embauche et une attestation d'affiliation à l'URSSAF. Elle souligne qu'à la date du 1er juillet 2015, elle ne pouvait obtenir d'attestation, la société n'ayant embauché des salariés qu'en mai 2015, et qu'en outre, [2] était à jour de ses cotisations jusqu'au 30 septembre 2015, l'attestation de l'URSSAF du 4 novembre 2015 attestant de ce paiement. Elle indique avoir déposé une plainte pénale à l'encontre des sociétés [5] et [2], qui l'ont abusée et insiste sur sa bonne foi.

-A titre subsidiaire elle soutient que le calcul du redressement au titre de la solidarité financière ne peut s'opérer que sur les factures postérieures au 15 octobre 2015 et produit son journal d'achat quelques jours avant l'audience.

Dans ses dernières écritures, reprises oralement et auxquelles il convient de renvoyer pour complet exposé, l'URSSAF demande:

-De confirmer le jugement en toutes ses dispositions et y ajoutant,

-De condamner la Société [4] aux dépens et au paiement de la somme de 2 000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'organisme soutient notamment que les conditions de la solidarité financière sont bien réunies puisqu'elle a communiqué le procès-verbal de travail dissimulé en cause d'appel.

S'agissant de la société [2], l'URSSAF affirme qu'à compter du 1er juillet 2015, elle disposait de salariés pour qui des cotisations sociales étaient dues à compter du 1 er octobre 2015.

-S'agissant de la Société [2] avec qui un contrat de sous-traitante a été conclu le 1 er juillet 2015, elle indique que cette entreprise a recruté du personnel dès le mois de juin 2015 et devait donc déclarer et payer des cotisations au titre du 2 ème trimestre 2015 lesquelles sont exigibles en juillet 2015.

L'audience s'est déroulée le 25 mai 2023. La décision a été mise en délibéré au 7 juillet 2023.

MOTIFS

Sur la communication du procès-verbal de travail dissimulé:

L'article L. 8222-1 du code du travail fait peser sur les donneurs d'ordre et maîtres de l'ouvrage, lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum en vue de l'exécution d'un contrat de travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement d'un acte de commerce, une obligation de vérification sanctionnée par l'article L. 8222-2 du même code par une obligation solidaire au paiement, notamment, des cotisations obligatoires dues aux organismes de protection sociale.

Il résulte des dispositions de l'article D. 8222-5 du code du travail, que le donneur d'ordre est considéré comme ayant procédé aux vérifications imposées par l'article L. 8222-1 s'il se fait remettre par son cocontractant, lors de la conclusion du contrat et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution, dans tous les cas, les documents suivants :

- une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévue à l'article L. 243-15 émanant de l'organisme de protection sociale chargé du recouvrement des cotisations et des contributions datant de moins de six mois dont elle s'assure de l'authenticité auprès de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale,

L'article 9 du code de procédure civile prévoit qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Ainsi, le donneur d'ordre qui méconnaît les obligations de vigilance énoncées est tenu solidairement au paiement des cotisations obligatoires, pénalités et majorations dues par son sous-traitant qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé.

Par une décision n° 2015-479 QPC du 31 juillet 2015, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du deuxième alinéa de

l'article L. 8222-2 du code du travail, sous réserve qu'elles n'interdisent pas au donneur d'ordre de contester la régularité de la procédure, le bien-fondé et l'exigibilité des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations y afférentes au paiement solidaire desquels il est tenu.

Il en résulte que si la mise en oeuvre de la solidarité financière du donneur d'ordre n'est pas subordonnée à la communication préalable à ce dernier du procès verbal pour délit de travail dissimulé, établi à l'encontre du cocontractant, l'organisme de recouvrement est tenu de produire ce procès-verbal devant la juridiction de sécurité sociale en cas de contestation par le donneur d'ordre de l'existence ou du contenu de celui-ci.

En l'espèce l'URSSAF a produit 8 pages sur 21 pages du procès-verbal 37UC22016 concernant le contrôle des entreprises [2], [3], [5] et Sas [4].

La page 3, mentionne une rubrique 1 intitulée 'Constatations'. Sur quelques lignes , sont décrites les constatations effectuées par l'inspecteur le 9 juin 2015 à l'égard de la société [2].

L'inspecteur renseigne la présence de 8 salariés sans préciser leur noms et affirme qu'ils ont confirmé l'identité de leur employeur.

Les pages 4 à 12 concernant les autres constatations effectuées par l'inspecteur sont manquantes.

Les pages 13, 14 et 15 sont produites. Elles reprennent les qualifications juridiques retenues à l'encontre de la société [5] et [2] et renvoient à un tableau qui reprend les pointages effectués sur le chantier par l'inspecteur. Ce tableau n'est pas produit.

Enfin, les pages 17, 19 et 20 développent les délits reprochés aux sociétés [2], [5] et Sas [4].

Les huit pages produites par l'URSSAF sur les 21 existantes, ne décrivent pas les constatations de l'inspecteur qui a effectué les contrôles et vérifications sur site à plusieurs dates. Aucun document ne renseigne l'identité des travailleurs contrôlés par l'inspecteur.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la communication d'un procès procès-verbal de constat de travail dissimulé incomplet, qui ne détaille pas les constatations de l'inspecteur, et dont le donneur d'ordre conteste l'existence ou le contenu, ne permet pas de mettre en oeuvre la solidarité financière.

Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.

Par souci d'équité les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront intégralement rejetées.

Par ces motifs :

La Cour statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort:

Infirme en toutes ses dispositions le jugement du 15 avril 2021 rendu par le Tribunal judiciaire de Toulouse,

Statuant à nouveau:

Dit infondée la mise en oeuvre de la procédure de solidarité financière à l'encontre de la société [4],

Rejette les demandes de l'URSSAF,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'URSSAF [Localité 7] aux dépens,

Le présent arrêt a été signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par C.GIRAUD, directeur des services de greffe.

DIRECTEUR DES SERVICES DE GREFFE LA PRESIDENTE

C.GIRAUD N.ASSELAIN

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 21/02410
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;21.02410 ?
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