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04/07/2023 | FRANCE | N°21/03438

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 04 juillet 2023, 21/03438


04/07/2023



ARRÊT N°



N° RG 21/03438

N° Portalis DBVI-V-B7F-OJ5I

SL/RC



Décision déférée du 09 Juillet 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (17/01605)

MME GAUMET

















[O] [W] veuve [V]

[U] [V]





C/



SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7] à [Localité 3]































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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



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à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTS



Madame [O] [W] veuve [V]

[Adresse 8]

[Localit...

04/07/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/03438

N° Portalis DBVI-V-B7F-OJ5I

SL/RC

Décision déférée du 09 Juillet 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (17/01605)

MME GAUMET

[O] [W] veuve [V]

[U] [V]

C/

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7] à [Localité 3]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTS

Madame [O] [W] veuve [V]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Représentée par Me Ludovic SEREE DE ROCH, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [U] [V]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Ludovic SEREE DE ROCH, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7] à [Localité 3], représenté par son syndic en exercice, Monsieur [A] [N],

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Gaëlle LEFRANCOIS de la SELARL DBA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, Conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre

Exposé des faits et de la procédure :

Suivant acte authentique des 1er avril et 6 mai 1987, [F] [V] a acquis les lots 5, 7, 10 et 11 dans un immeuble en copropriété sis à [Adresse 7], cadastré section AD n°[Cadastre 6] d'une contenance de 1 a 43 ca.

[F] [V] a revendu les lots 5 et 10 suivant acte reçu par Maître [G] le 18 septembre 2006.

[F] [V] est décédé le 12 décembre 2010 laissant pour lui succéder sa veuve, Mme [O] [W] veuve [V], et son fils issu d'une première union, M. [U] [V].

Estimant que [F] [V] avait procédé à une annexion des parties communes en condamnant l'accès au troisième étage de l'immeuble, ainsi qu'à des travaux de transformation aux troisième et quatrième étages de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] représenté par son syndic bénévole M. [A] [N], a fait assigner suivant actes d'huissier des 24 et 26 avril 2017, Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] devant le tribunal de grande instance de Toulouse, aux fins d'obtenir avant dire droit, que soit organisée une expertise judiciaire du lot n°7et au fond, la condamnation des défendeurs, sous astreinte, à remettre les parties communes en leur état originaire.

Par ordonnance rendue le 10 janvier 2019, le juge de la mise en état a ordonné une expertise avec pour mission essentielle de décrire les travaux modificatifs apportés sur le lot n°7 par rapport au règlement descriptif de copropriété et dire s'ils ont affecté les parties communes ou ont conduit à une appropriation des parties communes, et désigné M. [Z] [P] pour y procéder. Il a rejeté la demande de production de pièces formée par M. [U] [V]. Il a réservé les dépens.

L'expert a déposé son rapport au greffe le 23 septembre 2019.

Par jugement du 09 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse, a :

- déclaré recevable l'action engagée par le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] représenté par son syndic bénévole M. [A] [N] contre Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] en l'absence d'acquisition de la prescription trentenaire ;

- condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] in solidum à faire réaliser, sur l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 3] (31) les travaux déterminés par M. [Z] [P], à savoir :

* déconnexion et neutralisation des alimentations en eau et électricité spécifiques au lot n° 7,

* dépose des cloisons et des portes dans la cage d'escaIier à partir du R+2,

*démolition complète de la surélévation (R+3 et R+4) tous corps d'état,

* réalisation de la maçonnerie, de la charpente et de la couverture à I'altimétrie initiale de l'immeuble,

* réalisation d'un plancher bois dans les combles,

* remise en état de la cage d'escalier à partir du R+2 ;

- assorti cette condamnation d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un an après la signification du présent jugement et pendant une durée de 6 mois ;

- débouté le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice esthétique ;

- condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] in solidum à payer au Syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] représenté par son syndic bénévole M. [A] [N] les sommes de :

* 1.000 euros au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun,

* 1.000 euros au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture,

* 4.000 euros au titre du préjudice de jouissance pendant la durée de réalisation des travaux ;

- débouté Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] de leur demande de dommages et intérêts ;

- condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] aux dépens de I'instance, en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire ;

- condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] à payer au Syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] représenté par son syndic bénévole M. [A] [N] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le tribunal retient, notamment, que les consorts [V] ont fait une lecture erronée du règlement de copropriété et n'ont pas obtenu l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires conformément aux prescriptions de la loi du 10 juillet 1965. Les travaux sont donc dépourvus de toute autorisation de la copropriété et d'urbanisme. Le tribunal judiciaire de Toulouse écarte également le moyen de défense tiré de l'irrecevabilité de l'action pour cause de prescription, au motif que l'action est une action réelle immobilière et non personnelle, se prescrivant ainsi par 30 ans. En conséquence la juridiction a condamné les consorts [V] à réaliser les travaux tels que préconisés par l'expert et à indemniser le syndicat pour le préjudice de jouissance subi du fait de la privatisation et le préjudice résultant de la nuisance et des désagréments.

Par déclaration en date du 28 juillet 2021, Mme [O] [W] veuve [V] a interjeté appel total de ce jugement en ce qu'il a :

- déclaré recevable l'action du syndicat des copropriétaires en l'absence d'acquisition de la prescription trentenaire,

- condamné Mme [W] et M. [V] in solidum à faire réaliser les travaux déterminés par Mr [P] (déconnexion et neutralisation des alimentations en eau et électricité spécifiques au lot n° 7), dépose des cloisons et des portes dans la cage d'escalier à partir du R+2, démolition complète de la surélévation R+2 et R+3, réalisation de la maçonnerie, de la charpente et de la couverture à l'altimétrie initiale de l'immeuble, réalisation d'un plancher bois dans les combles, remise en état de la cage d'escalier à partir du R+2),

- assorti cette condamnation d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un an après la signification du jugement et pendant une durée de 6 mois,

- condamné Mme [W] et Mr [V] in solidum à payer 1000 euros au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun, 1000 euros au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture, 4000 euros au titre du préjudice de jouissance pendant la durée des travaux,

- débouté Mme [W] et M. [V] de leur demande de dommages et intérêts,

- condamné Mme [W] et M. [V] aux dépens de l'instance en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire,

- condamné Mme [W] et M. [V] à payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prétentions et moyens des parties :

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 25 octobre 2021, Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V], appelants, au visa des articles 1134 du code civil ancien, 42 de la loi du 10 juillet 1965 et 700 du code de procédure civile, demandent à la cour de :

- rejeter toutes écritures adverses comme étant injustes et infondées ;

- réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ;

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes formulées à leur encontre, totalement infondées juridiquement compte tenu de la validité de l'engagement contractuel de l'ensemble des copropriétaires, et de la prescription décennale acquise en l'espèce au regard de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

- condamner le syndicat des copropriétaires à leur verser à la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

- condamner le syndicat des copropriétaires à leur verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Ils soutiennent que les travaux ont fait l'objet d'une autorisation préalable par la copropriété dans un acte annexé au règlement de copropriété. Ils font valoir que les travaux ont été réalisés le 1er avril 1993 ; que le 10 décembre 1993 l'ensemble des copropriétaires ont signé une convention valant autorisation.

Ils ajoutent que l'action est une action personnelle enfermée dans un délai de prescription de 10 ans car il n' y a pas eu annexion, et car les travaux ont été autorisés par l'assemblée générale.

Ils contestent le préjudice du syndicat des copropriétaires et demandent des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Dans ses dernières écritures communiquées par voie électronique le 21 janvier 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3], intimé et appelant incident, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et du décret du 17 mars 1967, demande à la cour de :

- rejeter toutes conclusions comme injustes et en tous les cas mal fondées,

- débouter Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] de l'ensemble de leurs demandes et prétentions,

- confirmer partiellement le jugement dont appel en ce qu'il a :

* déclaré recevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires contre M. et Mme [V] en l'absence d'acquisition de la prescription trentenaire,

* condamné M. et Mme [V] in solidum à faire réaliser, sur l'immeuble sis [Adresse 7] à [Localité 3] les travaux déterminés par M. [P], à savoir :

- déconnexion et neutralisation des alimentations en eau et électricité spécifiques au lot n° 7,

- dépose des cloisons et des portes dans la cage d'escalier à partir du R+2,

- démolition complète de la surélévation (R+3 et R+4) tous corps d'état,

- réalisation de la maçonnerie, de la charpente et de la couverture à l'altimétrie initiale de l'immeuble,

- réalisation d'un plancher bois dans les combles,

- remise en état de la cage d'escalier à partir du R+2.

* assorti cette condamnation d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un an après la signification du jugement et pendant une durée de 6 mois,

* débouté Mme et M. [V] de leur demande de dommages et intérêts,

* condamné Mme et M. [V] aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire,

* condamné Mme et M. [V] à payer au Syndicat des copropriétaires la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- le réformer quant à la réparation des préjudices du syndicat des copropriétaires,

En conséquence,

- condamner in solidum Mme [O] [V] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros au titre du préjudice esthétique subi,

- condamner in solidum Mme [O] [V] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun,

- condamner in solidum Mme [O] [V] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture,

- condamner in solidum Mme [O] [V] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10.000 euros au titre du préjudice de jouissance pendant la durée de réalisation des travaux,

En toutes hypothèses,

- condamner in solidum Madame [O] [V] et Monsieur [U] [V] à

payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Mme [O] [V] et M. [U] [V] à payer les entiers dépens d'appel.

Il soutient que les travaux ont consisté à s'approprier des parties communes, et pas seulement à faire communiquer deux lots superposés par un escalier intérieur ou transformer un lot en terrasse, et qu'ainsi, ils n'étaient pas autorisés par le règlement de copropriété. Il soutient qu'ils n'ont pas été autorisés par l'assemblée générale.

Il soutient que son action est une action réelle en restitution des parties communes, soumise à la prescription trentenaire.

Il demande la remise en état des parties communes, et expose son préjudice.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2023.

L'affaire a été examinée à l'audience du 18 avril 2023.

Motifs de la décision :

Sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires :

En vertu de l'article 2227 du code civil, le droit de propriété est imprescriptible. Sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En vertu de l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, les actions personnelles nées de l'application de la loi du 10 juillet 1965 entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.

En l'espèce, l'acte de vente date du 1er avril et 6 mai 1987, avec jouissance à compter du 1er avril 1987, étant précisé que les biens acquis étaient alors donnés à bail à Mme [T] [L].

Le règlement de copropriété et l'état descriptif de division reçu par Me [S] le 2 février 1983 et publié le 14 mars 1983 prévoit que le lot n°7, situé au 3ème étage, est un ensemble de divers locaux à usage d'habitation portant le n°7 du plan, représentant 8 millièmes de la propriété du sol et des parties communes de l'ensemble immobilier.

A titre de comparaison, hormis les caves qui représentent 0,45 millièmes chacune, les autres lots de l'immeuble sont des appartements représentant 330 (lot 2), 184 (lot 3), 146 (lot 4), 200 (lot 5) et 130 millièmes (lot 6).

Le lot n°7 était ainsi une surface sous combles réduite.

Le règlement de copropriété dans une disposition finale intitulée 'autorisations' prévoit notamment que les propriétaires de deux lots superposés pourront les faire communiquer et installer à perpétuelle demeure un escalier intérieur reliant les deux lots, et que le propriétaire du lot n° 7 pourra transformer son lot en terrasse. Dans ce cas, l'établissement et l'étanchéité de la terrasse seront à sa charge exclusive, tant lors de l'établissement que par la suite pour la réparation et le renouvellement.

Le syndicat des copropriétaires estime que [F] [V] a de son vivant procédé à une 'annexion sauvage' de parties communes, d'une part en condamnant l'accès au 3è étage par la fermeture de l'escalier à partir du palier du 2ème étage et d'autre part en réalisant en-dehors de toute autorisation de la copropriété et de permis de construire, une surélévation sur toute la surface de l'immeuble pour créer un appartement privatif au 3ème étage.

Le 26 septembre 2011, la Sci Evon, copropriétaire dans le même immeuble, a fait établir par Me [D], clerc au sein de la Selarl Xavier Arnaud, huissier de justice, un constat selon lequel à partir du palier du 2ème étage, l'accès à l'escalier partie commune était condamné par une porte fermée par 3 verrous et une cloison.

Selon le rapport d'expertise de Mme [I] [X] du 7 janvier 2015, M. [V] a privatisé l'escalier d'accès au 3ème étage par une porte. Il a annexé des parties communes au 3ème étage en occupant toute la superficie. Il a réuni divers locaux à usage d'habitation formant le lot n°7 pour n'en former qu'un seul qu'il a surélevé, modifié, transformé en un appartement de type 4.

M. [P] indique qu'à partir du palier R+2, l'escalier est encloisonné et fermé par une porte. Toute la surface de l'immeuble a été surélevée créant ainsi un appartement privatif au 3ème étage (+ 2,10 m en façade côté rue et + 3 m en façade arrière).

S'agissant de l'escalier reliant le 2ème au 3ème étage, il ne s'agit pas d'un escalier intérieur qui aurait été créé pour relier les deux lots. Il s'agit de la privatisation d'un escalier partie commune.

Le lot 7 consistait en des locaux à usage d'habitation en R+3. Ces locaux ont été reliés et une surélévation a été faite pour créer un seul appartement T4, sur deux niveaux (R+3 et R+4) avec terrasse en R+4.

Dès lors, M. [V] s'est approprié des parties communes.

Le règlement de copropriété, s'il autorisait à transformer le lot n°7 en terrasse, n'autorisait pas la surélévation de l'immeuble. Il a ainsi été porté atteinte aux parties communes.

L'action du syndicat des copropriétaires contre les héritiers de [F] [V] n'est pas une action personnelle. La situation litigieuse révèle une appropriation de parties communes, dont la cessation ouvre droit à une action réelle qui se prescrit par trente ans.

M. [P] écrit que les travaux de privatisation de l'escalier et de surélévation de l'immeuble ont été réalisés entre 2008 et 2010.

Cependant, les travaux de surélévation étaient déjà réalisés le 21 décembre 1993 lorsque M. [H] [B] est intervenu en tant qu'expert. Il note qu'au 3ème étage, M. [V] a procédé à des travaux de surélévation.

Dans une lettre du 21 février 2001, Mme [M] [C] indique que M. [V] s'était engagé par courrier du 10 décembre 1993 à effectuer ou faire effectuer à ses frais tous les travaux de réparation consécutifs aux dégâts éventuels provoqués par la surélévation.

Mme [W] et M. [U] [V] allèguent que les travaux ont été réalisés le 1er avril 1993. Ils produisent un commandement de payer émis par l'administration fiscale pour une amende liée à des faits d'infraction aux règles d'exécution des travaux ou d'utilisation des sols en date du 1er avril 1993.

L'assignation étant du 24 et 26 avril 2017, le délai de 30 ans depuis les travaux, que l'on retienne la date du 1er avril 1993 ou celle de décembre 1993, n'était donc pas écoulé. En conséquence, l'action du syndicat des copropriétaires n'est pas prescrite.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires contre Mme [W] et M. [U] [V].

Sur le fond :

Mme [W] et M. [U] [V] soutiennent que leur auteur a obtenu l'accord des copropriétaires pour les travaux.

Le 10 décembre 1993, M. [F] [V] a écrit : 'Je m'engage à effectuer ou à faire effectuer les réparations des dégâts consécutifs aux travaux de surélévation [Adresse 7] qui seront constatés par un expert nommé par la copropriété (en occurrence M. [B]). Suite aux rapports de l'expert confirmant que les travaux de surélévation ne mettant pas en cause la solidité du bâtiment un accord peut être envisagé pour la demande de permis de construire'.

Ce courrier porte 5 signatures, sans que les noms des signataires soient mentionnés sur le document. Mme [W] et M. [U] [V] soutiennent qu'il s'agit des signatures de tous les copropriétaires de l'époque.

Ce courrier contient un engagement de M. [F] [V] de réparer des désordres consécutifs aux travaux de surélévation. Il dit qu'un accord peut être envisagé pour une demande de permis de construire. Cependant, il ne constitue pas d'ores et déjà un accord de tous les copropriétaires.

Le 21 décembre 1993 dans son rapport M. [B] a indiqué : 'Nous avons tenté de savoir dans quelle condition cette surélévation avait été réalisée. Mme [E] syndic de cet immeuble nous a indiqué qu'il n'y avait eu aucune assemblée générale des copropriétaires qui avait donné l'autorisation à M. [V] de faire réaliser ces travaux. Dans la mesure où cette autorisation n'a pas été donnée, il semblerait que les travaux ont été réalisés sans permis de construire. Dans ce cas, la responsabilité de M. [V] serait entièrement engagée. A notre avis, il y aurait lieu de faire vérifier les travaux réalisés par M. [V] par un architecte désigné par le syndic, ceci afin de vérifier d'une part que ces travaux sont compatibles avec les structures existantes et ensuite il y aurait lieu de demander à M. [V] d'obtenir un permis de construire en passant tout d'abord par la demande d'autorisation à la copropriété'.

Ainsi, une demande d'autorisation de la copropriété était envisagée. Néanmoins, il n'est pas démontré que cette autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires a été donnée.

Le compte-rendu de la réunion des copropriétaires du 21 décembre 1999 mentionne que M. [V] est débiteur de la somme de 10.778,70 francs au 31 décembre 1999 envers la copropriété. Il mentionne également que M. [V] a effectué des travaux pour le compte de la copropriété. Un solde de tout compte doit être établi. M. [V] propose d'établir des devis pour des travaux d'entretien de l'immeuble à venir.

Ce compte-rendu n'établit pas un accord pour les travaux faits par M. [V] concernant la surélévation, et en outre il ne peut s'agir d'un procès-verbal régulier d'assemblée générale, en l'absence des noms des présents et représentés, des tantièmes qu'ils détiennent et de mention d'un vote. Il ne peut donc pas valoir autorisation de l'assemblée générale pour les travaux de surélévation effectués par M. [V].

Dans une lettre du 21 février 2001, Mme [C] écrit à M. [V] : 'Monsieur, lors des réunions de copropriétaires où vous étiez présent, j'avais émis quelques réserves quant à la surcharge occasionnée par votre surélévation des combles [Adresse 7] à [Localité 3]. [...] Vous vous étiez engagé par courrier du 10 décembre 1993 à effectuer ou faire effectuer à vos frais tous les travaux de réparation consécutifs aux dégâts éventuels provoqués par la surélévation.'

Ce courrier ne fait que reprendre l'engagement de M. [V] de remédier aux dégâts provoqués par la surélévation. Il ne fait pas état d'un accord de l'assemblée générale des copropriétaires pour cette surélévation.

Ainsi, il n'est pas produit l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires, permettant une appropriation des parties communes.

Dès lors, Mme [W] et M. [U] [V] doivent remettre les parties communes en état.

Sur les travaux de remise en état des parties communes :

L'expert judiciaire indique que l'immeuble est en R+3 sur un niveau de sous-sol. Il est de construction ancienne :

- planchers étage bois ;

- murs en élévation en briques de terre cuite ;

- surélévation de l'immeuble : murs en maçonnerie et enduit projeté ;

- charpente bois traditionnelle ;

- couverture tuiles terre cuite.

L'expert judiciaire a préconisé en p 16 les travaux de remise en état des parties communes dans leur état originaire. Il a précisé que ces travaux devaient obligatoirement faire l'objet d'une demande de permis de démolir auprès des services compétents de la ville de [Localité 3], et que leur coût, selon les devis remis par les parties, s'élevait à la somme de 71.500 euros.

Les travaux tels que préconisés par l'expert judiciaire ne font l'objet d'aucune observation de la part des appelants, et les demandes du syndicat des copropriétaires y sont conformes.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a :

- condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] in solidum à faire réaliser, sur l'immeuble sis [Adresse 7] à [Localité 3] (31) les travaux déterminés par M. [Z] [P], à savoir :

* déconnexion et neutralisation des alimentations en eau et électricité spécifiques au lot n° 7,

* dépose des cloisons et des portes dans la cage d'escaIier à partir du R+2,

*démolition complète de la surélévation (R+3 et R+4) tous corps d'état,

* réalisation de la maçonnerie, de la charpente et de la couverture à I'altimétrie initiale de l'immeuble,

* réalisation d'un plancher bois dans les combles,

* remise en état de la cage d'escalier à partir du R+2 ;

- assorti cette condamnation d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard pendant une durée de 6 mois, sauf à préciser qu'elle courra passé un délai d'un an après la signification du présent arrêt.

Sur le préjudice esthétique :

L'escalier commun était fermé par une porte verrouillée. Néanmoins, il ne présentait pas un état plus dégradé que le reste des parties communes. Dès lors, il n'est pas démontré de préjudice esthétique subi par le syndicat des copropriétaires.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice esthétique.

Sur le préjudice de jouissance :

Les copropriétaires ne pouvaient pas accéder par l'escalier commun aux parties communes du 3ème étage, car la porte était verrouillée, ni à la toiture pour effectuer son entretien.

Cependant, ils ne démontrent pas qu'ils aient eu besoin d'y avoir accès, ni avoir dû effectuer une demande amiable ou une mise en demeure en ce sens.

Le jugement dont appel sera donc infirmé en ce qu'il a condamné Mme [W] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de :

- 1.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun ;

- 1.000 euros au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture ;

Le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun et au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture

Durant les travaux de remise en état qui dureront 4 mois selon l'expert judiciaire, les copropriétaires supporteront des nuisances et désagréments importants.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [W] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 4.000 euros au titre du préjudice de jouissance pendant la durée de réalisation des travaux de remise en état.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts de Mme [W] et M. [U] [V] :

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] et M. [U] [V], parties perdantes, de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Mme [W] et M. [U] [V], parties perdantes, doivent supporter in solidum les dépens de première instance, en ce compris les dépens de référé, et les frais d'expertise judiciaire, ainsi que décidé par le premier juge, et les dépens d'appel.

Ils se trouvent redevable in solidum d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, que le premier juge a justement estimée au titre de la procédure de première instance, et dans les conditions définies par le dispositif du présent arrêt au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel.

Ils seront déboutés de leur demande sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 9 juillet 2021, sauf à préciser que l'astreinte courra passé un délai d'un an après la signification du présent arrêt,

et sauf en ce qu'il a condamné Mme [O] [W] veuve [V] et M. [U] [V] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] les sommes de :

- 1.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun ;

- 1.000 euros au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,

Déboute le syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance de l'escalier commun et au titre du préjudice résultant de l'impossibilité d'accéder à la toiture ;

Condamne in solidum Mme [W] et M. [U] [V] aux dépens d'appel ;

Les condamne in solidum à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 3] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Les déboute de leur demande sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/03438
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;21.03438 ?
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