La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2023 | FRANCE | N°20/01633

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 27 juin 2023, 20/01633


27/06/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/01633

N° Portalis DBVI-V-B7E-NTXN

MD/OC



Décision déférée du 27 Mai 2020

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE ( 18/02806)

MME [W]

















[Z] [H]





C/



[G] [B]

S.A.R.L. SAINT PIERRE IMMOBILIER





























































CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



Madame [Z] [H]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Matthieu MAUREL-FIORENTINI de la SELARL MONTA...

27/06/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/01633

N° Portalis DBVI-V-B7E-NTXN

MD/OC

Décision déférée du 27 Mai 2020

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE ( 18/02806)

MME [W]

[Z] [H]

C/

[G] [B]

S.A.R.L. SAINT PIERRE IMMOBILIER

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [Z] [H]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Matthieu MAUREL-FIORENTINI de la SELARL MONTARRY-MAUREL-FIORENTINI AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIM''ES

Madame [G] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. SAINT PIERRE IMMOBILIER

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M.DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par R. CHRISTINE faisant fonction de greffier

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte notarié du 17 octobre 2014, Mme [Z] [H] a acquis de Mme [G] [B], par l'intermédiaire de l'agence Saint-Pierre Immobilier, une maison à usage d'habitation de type F4 avec terrain autour et sise à [Localité 4]. Avant sa mise en vente, la location de ce bien était gérée par cette même agence immobilière.

À l'occasion de travaux dans sa maison, Mme [H] a constaté la présence d'ouvertures et de fissures au niveau des sols et des soubassements des murs, désordres dont elle a fait dresser constat le 12 février 2016 par Maître [R], huissier de justice à [Localité 5].

Après s'être adressée à d'anciens locataires de Mme [B] et avoir eu confirmation de l'existence d'un problème d'humidité important, elle a obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse par ordonnance du 5 août 2016 qu'une expertise soit ordonnée ; cette mesure a été confiée à M. [L], expert judiciaire.

Ce dernier a déposé son rapport définitif le 3 mai 2018.

En lecture de ce rapport et par acte d'huissier du 2 août 2018, Mme [H] a fait assigner Mme [B] et la Sarl Saint Pierre Immobilier devant le tribunal judiciaire de Toulouse afin d'obtenir leur condamnation au paiement des travaux de reprise, ainsi qu'à des dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 27 mai 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- débouté Mme [H] de l'ensemble de ses prétentions tant à l'encontre de Mme [B] qu'à l'encontre de la Sarl Saint-Pierre Immobilier,

- condamné Mme [H] aux dépens de l'instance et autorisé la Scp Camille à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision,

- condamné Mme [H] à payer à Mme [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- rejeté le surplus des demandes, fins et prétentions des parties.

Pour débouter Mme [H] de ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés, le premier juge a considéré que les fissures étaient visibles lors de la vente, même par des non-professionnels et que les vices affectant le hérisson n'ont été découverts qu'au cours des opérations d'expertise de sorte que la clause de non garantie insérée à l'acte de vente est opposable à la demanderesse, la venderesse ne les ayant pas connus.

De même, pour débouter Mme [H] de sa demande en dommages et intérêts dirigée contre la Sarl Saint-Pierre immobilier, il a retenu que cette dernière ignorait le vice affectant le hérisson lors de la vente.

Par déclaration du 7 juillet 2020, Mme [H] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- débouté Mme [H] de l'ensemble de ses prétentions tant à l'encontre de Mme [B] qu'à l'encontre de la Sarl Saint-Pierre Immobilier,

- débouté Mme [H] de sa demande tendant à voir caractériser l'existence de vices cachés affectant l'immeuble vendu par Mme [B],

- débouté Mme [H] de sa demande visant à voir Mme [B] garantir les vices cachés affectant l'immeuble,

- débouté Mme [H] de sa demande visant à retenir la responsabilité de la Sarl Saint-Pierre Immobilier,

- débouté Mme [H] de sa demande tendant à voir condamner solidairement Mme [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier au paiement des sommes de 34 266,54 euros, au titre de la réduction du prix équivalent au montant des travaux de reprise, 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance à parfaire, 5 000 euros au titre du préjudice moral, 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [H] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [B] et de la Sarl Saint-Pierre Immobilier,

- condamné Mme [H] aux entiers dépens.

Par conclusions d'incident du 3 novembre 2022, Mme [G] [B] et la société Saint-Pierre Immobilier ont saisi le conseiller de la mise en état visant à voir juger irrecevable l'ensemble des demandes de Mme [H] pour défaut d'intérêt à agir.

Par une ordonnance d'incident du 23 janvier 2023, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Toulouse a dit qu'il n'avait pas le pouvoir de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée devant lui par Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier et tirée du défaut d'intérêt de Mme [H] à agir pour maintenir après la revente de l'immeuble ses demandes présentées au fond pas plus qu'il n'avait le pouvoir de statuer sur la demande reconventionnelle présentée par Mme [Z] [H] en dommages et intérêts en application de l'article 123 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du 14 mars 2023 à 14 heures et que la clôture interviendra le 7 mars 2023.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 1er mars 2023, Mme [Z] [H], appelante, demande à la cour de :

-'Rejeter toutes conclusions contraires comme nulles et en tout cas mal fondées',

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Sur la procédure

À titre principal

- 'dire et juger' l'appel recevable et bien fondé,

- rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt présentée par les intimés,

- débouter Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier de l'intégralité de leurs prétentions,

Subsidiairement,

Vu l'article 123 du Code de procédure civile,

- limiter l'irrecevabilité à la seule demande visant à obtenir la réduction du prix,

- déclarer parfaitement recevables toutes les autres demandes qu'elle a formulées devant la cour d'appel de Toulouse contre Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier,

- condamner solidairement Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre Immobilier au paiement de la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Au Fond

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Vu les articles 1230 et suivant et 1641 et suivants du Code civil s'agissant de Mme [B],

Vu les articles 1240 et suivants du Code civil s'agissant de la société Sarl Saint-Pierre Immobilier,

Vu la jurisprudence visée,

Vu les pièces,

- 'dire et juger' que la maison vendue était affectée d'un vice caché préalablement connu du vendeur,

- 'dire et juger' qu'il y a lieu d'écarter la clause d'exonération contenue dans l'acte de vente,

- 'dire et juger' que Mme [B] est tenue de garantir les vices cachés affectant la maison qu'elle lui a vendu,

- condamner Mme [B] au paiement de la somme de 34 266,54 euros au titre de la réduction du prix de vente correspondant au prix des travaux,

- condamner Mme [B] au paiement des sommes de :

- 28.500 euros au titre du préjudice de jouissance,

- 5.000 euros au titre du préjudice moral

- 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance de référé et de fond, qui comprendront les frais entraînés par l'expertise judiciaire

- 'dire et juger' que l'agence Saint-Pierre Immobilier est responsable des conséquences des vices affectant la maison par le silence gardé lors de l'opération de vente à son égard,

- condamner solidairement l'agence Saint-Pierre Immobilier au paiement de toutes les sommes susvisées, soit aux sommes de :

- 28.500 euros au titre du préjudice de jouissance,

- 5.000 euros au titre du préjudice moral

- 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance de référé et de fond, qui comprendront les frais entraînés par l'expertise judiciaire.

Au soutien de ses prétentions, l'appelante explique que ses demandes sont recevables, l'article 1641 ne soumettant pas l'intérêt à exercer l'action estimatoire à la conservation de la qualité de propriétaire du bien. En outre, elle rappelle qu'elle forme des demandes sur le fondement de la responsabilité délictuelle et sur celui de la responsabilité contractuelle, fondements qui sont étrangers à la garantie des vices cachés.

Sur le fond, elle expose que Mme [B], qui connaissait les vices affectant le bien lors de la vente, en devait garantie nonobstant la clause de non-garantie insérée à l'acte, notamment s'agissant de la descente du carrelage, fait sur lequel elle fonde essentiellement sa demande.

S'agissant de la responsabilité de la société Saint-Pierre immobilier, l'appelante soutient qu'elle est engagée en raison d'un défaut d'information au moment de la vente, l'agence connaissant nécessairement les désordres auxquels elle avait tenté de remédier lors des périodes de location antérieures et ne l'ayant pas informée.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 22 février 2023, Mme [G] [B] et la Sarl Saint Pierre Immobilier, intimées, demandent à la cour, au visa des articles 1240, 1641 et 1643 du code civil, et 122 du code de procédure civile, de :

- déclarer irrecevables l'intégralité des demandes, fins et prétentions de Mme [H], faute d'avoir un intérêt à agir,

- rejeter toutes les demandes, fins et prétentions de Mme [H],

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- les mettre hors de cause,

Y ajoutant,

- condamner Mme [H] au paiement d'une indemnité de 10 000,00 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens de l'instance (première instance et appel), dont distraction au profit de Me Nicolas Dalmayrac, avocat, qui pourra les recouvrer sur son offre de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire

- débouter Mme [H] de ses demandes relatives à son préjudice de jouissance et moral,

À tout le moins,

- les ramener à de plus strictes proportions.

À l'appui de leurs prétentions, les intimées soutiennent que l'appelante est irrecevable en ses demandes ayant vendu le bien litigieux antérieurement à la déclaration d'appel, de sorte qu'elle n'a plus intérêt à l'action estimatoire, celle-ci présupposant la conservation du bien en échange d'un remboursement d'une partie du prix de vente.

Sur le fond, Mme [B] expose qu'elle ignorait, au moment de la vente, les vices affectant l'immeuble, notamment s'agissant du hérisson. Quant à la Sarl Saint-Pierre immobilier, elle soutient ne pas avoir manqué à son devoir de conseil, étant dans l'ignorance des désordres lors de la vente. Elle explique encore que le lien de causalité entre le préjudice et la faute qui lui est reprochée n'est pas établi.

Subsidiairement, les intimées sollicitent la minoration des demandes indemnitaires de l'appelante.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 mars 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 14 mars 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

- Sur la recevabilité des demandes de l'appelante :

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

L'exercice de l'action en garantie des vices cachés offre à l'acquéreur d'un bien vicié une option entre la résolution de la vente (action résolutoire) et la diminution du prix (action estimatoire). En ce sens, l'article 1644 du code civil prévoit que « l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. » Il résulte de ce texte, que dans le cadre de l'action estimatoire, l'acheteur garde la chose, par opposition au mécanisme de l'action résolutoire qui implique la restitution de la chose au vendeur. L'indication de la conservation de la chose dans le cadre de l'action en garantie des vices cachés vient simplement expliquer le devenir du bien vicié à l'issue de l'action estimatoire et ne fait pas dépendre l'intérêt à agir en garantie des vices cachés de la conservation de la propriété du bien
1:
.

En l'espèce, les intimées contestent l'intérêt à agir de l'appelante du seul fait de la revente de l'immeuble litigieux et de l'ignorance subséquente dans laquelle elles se trouvent de la conservation de la maîtrise du procès par l'appelante.

Toutefois, l'appelante, qui exerce l'action estimatoire seule possible en cas de revente du bien, par dérogation à l'option de l'article 1644 du code civil, conserve un intérêt à agir, cet intérêt né lors de la vente, perdure même en cas de revente du bien, ne serait-ce que parce que l'existence d'un vice a une incidence sur la valeur de revente de la chose qui en est affectée

La seule revente du bien litigieux n'est donc pas suffisante à démontrer l'absence d'intérêt à agir de Mme [H] ; ses demandes seront jugées recevables.

- Sur l'action en garantie des vices cachés dirigée contre Mme [B] :

Aux termes de l'article 1641 du code civil, « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »

L'article 1642 du code précité exclut de la garantie du vendeur les vices apparents et ceux dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Encore, l'article 1643 du même code prévoit qu' « Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. »

Enfin, l'acte de vente stipule que « L'ACQUEREUR prend le BIEN dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le VENDEUR pour quelque cause que ce soit notamment en raison :

' des vices apparents,

' des vices cachés et ce par dérogation à l'article 1643 du Code civil.

S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas:

' si le VENDEUR a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel,

' s'il est prouvé par l'ACQUEREUR, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du VENDEUR. »

En l'espèce, l'appelante se prévaut « du vice relatif à la descente du carrelage (vide intérieur entre les plinthes et le carrelage), à l'origine du défaut d'étanchéité relevé par l'expert » et seulement de ce vice. Il ressort de ses conclusions qu'elle n'invoque spécialement que ce fait au soutien de son action indemnitaire. Elle explique dans ses conclusions que la descente du carrelage est apparue postérieurement à l'achat.

Le rapport d'expertise décrit ainsi les faits dont se prévaut l'appelante : « Pour ce qui concerne la descente du sol carrelé intérieur, et le vide ainsi créé entre ce carrelage et les plinthes fixées sur les doublages, nous confirmons que ce phénomène est, sans aucun doute possible, la conséquence d'un tassement du hérisson supportant le dallage. Pour autant, ce phénomène n'est pas de nature à provoquer une déstabilisation de l'immeuble. Nous rappellerons à cet effet que ce dallage n'est pas étroitement lié aux fondations et à l'infrastructure du bâtiment. Il s'agit d'un dallage dit « flottant ». »

S'agissant de la cause de ces désordres constatés, le rapport d'expertise précise que « (') pour ce qui concerne la descente du sol carrelé, celle-ci est bien la conséquence du tassement du hérisson, qui est composé de matériaux ne pouvant être efficacement compactés, puisqu'il s'agit de gravier aux formes arrondies, et ne pouvant de fait présenter des surfaces permettant un bon compactage ; ces graviers, ou petits galets, peuvent rouler les uns contre les autres. En conséquence, nous considérons qu'il s'agit d'une faute d'exécution résultant de la nature même du matériau mis en 'uvre ».

Il ressort de ces observations que le vice de la chose réside dans la mauvaise réalisation du hérisson par l'emploi de matériaux inadaptés. Ce vice a eu pour conséquence une descente de la dalle ainsi que du carrelage qu'elle supportait ; cette descente ne constitue qu'une manifestation du vice et ne peut se confondre avec lui.

Encore, il est établi par le rapport d'expertise que ce vice existait lors de la vente intervenue entre les parties, puisqu'il trouve son origine dans la construction même de l'immeuble.

Il reste à déterminer si le vice, à savoir le tassement du hérisson, était, au moment de la vente, visible et s'il était connu de Mme [B].

Il résulte des opérations d'expertise elles-mêmes que le vice de la chose n'a pu être déterminé dans ce cadre qu'à l'observation de la descente des sols dont l'observation a conduit l'expert à solliciter l'intervention d'un sapiteur. Ce dernier a dû procéder à des sondages qui ont consisté à percer la dalle et la façade au niveau de la dalle, ces opérations ayant permis d'établir de manière certaine la malfaçon du hérisson lors de la construction. La nature des opérations et leur technicité rendent le vice ainsi décelé occulte à un acquéreur profane en matière de construction. En conséquence, la mauvaise réalisation du hérisson par l'emploi de matériaux inadaptés constitue un vice caché

En application de la convention des parties rappelée plus haut, Mme [B] ne doit garantir Mme [H] qu'à la condition que cette dernière rapporte la preuve de la connaissance du vice de la chose par la première. L'objet de cette preuve est la connaissance du vice lui-même et non de ses conséquences, étant rappelé que ce vice s'entend du tassement du hérisson et non de la descente de la dalle ainsi que du carrelage qui en sont la conséquence.

En l'espèce, l'appelante, qui n'invoque pas au soutien de sa demande le vice lui-même, mais ses conséquences, n'établit pas la connaissance du premier par Mme [B] lors de la vente. Les conclusions de l'expert et les circonstances de découverte du vice établissent son caractère occulte pour Mme [B] également, cette dernière devant être regardée comme profane en matière de construction immobilière.

Par ailleurs, de manière surabondante et pour répondre aux détails des arguments de l'appelante, la descente du carrelage n'était pas cachée aux yeux des parties à la vente, l'expert ayant considéré « pour ce qui concerne la descente du carrelage intérieur, la logique aurait voulu que celle-ci fût visible au moment de l'acquisition de l'immeuble. Pour autant, nous n'avons pas d'éléments factuels le mettant en évidence ».

Le témoignage de Mme [X], laquelle a précédemment occupé les lieux en qualité de locataire, vient étayer l'hypothèse émise par l'expert par des éléments factuels. Elle décrit dans son attestation produite par l'appelante « un affaissement de la dalle qui permettait aux limaces de s'introduire dans le salon / salle à manger. L'agence immobilière est intervenue pour combler ces fentes (entre carrelage et plinthe) avec du silicone, mais pas dans la totalité de la pièce' ».

Il résulte ces éléments que la fissure était d'une importance certaine puisqu'elle permettait à des petits animaux tels des limaces de s'introduire dans l'habitation. La fissure ayant été partiellement rebouchée, elle laissait donc voir, pour la partie reprise, un joint en silicone de la hauteur de la fissure et pour le reste, le vide de la fissure non colmatée. Il s'ensuit que la fissure était visible au moment de la vente entre les parties et sa connaissance leur était acquise.

En conclusion, cette manifestation des conséquences du vice était visible et à ce titre connues tant de Mme [B] qui avait reçu les plaintes de ses locataires que de Mme [H] qui avait pu s'en convaincre lors de la visite des lieux, de sorte qu'en application des dispositions susvisées, la première ne devait aucune garantie à la seconde de ce chef.

18. Il résulte de ce qui précède que « la descente du carrelage (vide intérieur entre les plinthes et le carrelage), à l'origine du défaut d'étanchéité relevé par l'expert » est un désordre connu du vendeur et apparent pour l'acheteur qui ne peut être qualifié de vice caché.

Le vice affectant l'immeuble et à l'origine de la descente de la dalle consiste en la mauvaise réalisation du hérisson par l'emploi de matériaux inadaptés lors de sa construction. Il s'agit là d'un vice caché en ce qu'il n'était pas décelable par les parties avant les opérations d'expertise et en ce que Mme [H] ne rapporte pas la preuve de sa connaissance par Mme [B] au moment de la vente. En conséquence, cette dernière ne lui doit pas garantie en application de la clause précitée insérée à l'acte de vente.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [H] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Mme [B].

- Sur l'action en responsabilité délictuelle dirigée contre la société Saint-Pierre immobilier :

19. Aux termes de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

En application de ce texte, l'agent immobilier est tenu d'une obligation d'information envers l'acquéreur ; il répond des dommages qui découlent d'un manquement à cette obligation.

20. En l'espèce, l'appelante reproche à la société Saint Pierre Immobilier de ne pas l'avoir informée du défaut « d'étanchéité affectant la maison, autant que de sa persistance » après l'injection de silicone dans l'espace entre le sol et les plinthes.

21. Il ressort de l'attestation de Mme [X] qu'elle avait bien constaté un défaut d'étanchéité. Ce défaut a été corrigé par la réalisation d'un joint en silicone sur une partie du pourtour de la pièce affectée. Par la suite, l'occupant suivant, M. [T] ne s'est pas plaint de ce désagrément de sorte que la société Saint-Pierre immobilier pouvait déduire que sa réparation de fortune était efficace. La preuve de la connaissance de la persistance d'un défaut d'étanchéité par la société intimée n'est donc pas rapportée.

En outre, il sera rappelé que l'agent immobilier n'est pas un professionnel de la construction et qu'à ce titre, il n'était pas attendu de lui qu'il identifie le défaut de tassement du hérisson à la vue de la descente de la dalle et du carrelage.

22. S'agissant de la manifestation du vice, à savoir la descente de la dalle et du carrelage, il a été expliqué plus haut qu'il ressortait suffisamment des éléments de la cause que cette descente était apparente, de sorte que l'acquéreur pouvait s'en convaincre lui-même, sans que l'agent immobilier ne soit tenu d'attirer spécialement son attention sur ce point. Il n'est donc pas établi de la part de ce dernier un manquement à son obligation d'information.

23. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [H] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la Sarl Saint-Pierre immobilier.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

24. Mme [Z] [H], partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens d'appel en faisant droit aux demandes présentées par Maître Nicolas Dalmayrac, avocat, en lui accordant le bénéfice du droit de recouvrement direct des dépens.

25. Le jugement rendu le 27 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [Z] [H] aux entiers dépens et à payer à Mme [G] [B] et à la Sarl Saint Pierre immobilier la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

26. Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre immobilier sont en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. Mme [Z] [H] sera condamnée à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [Z] [H], partie perdante, ne peut bénéficier d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevables les demandes de Mme [Z] [H].

Confirme, en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse.

Y ajoutant,

Condamne Mme [Z] [H] aux dépens d'appel.

Autorise Maître Nicolas Dalmayrac, avocat, à recouvrer directement contre Mme [Z] [H] les frais dont il a eu à faire l'avance sans avoir reçu provision,

Condamne Mme [Z] [H] à payer à Mme [G] [B] et la Sarl Saint-Pierre immobilier la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Déboute Mme [Z] [H] de sa propre demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

R.CHRISTINE M.DEFIX

*******.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01633
Date de la décision : 27/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-27;20.01633 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award