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20/06/2023 | FRANCE | N°20/01488

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 20 juin 2023, 20/01488


20/06/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/01488

N° Portalis DBVI-V-B7E-NTEN

MD / RC



Décision déférée du 29 Avril 2020

Tribunal de Grande Instance de FOIX

19/00303

M.[R]

















[C] [X]

[G] [Y] épouse [X]





C/



Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC









































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INFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTS



Monsieur [C] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Quentin GUY-FAVIER, avocat au barreau d...

20/06/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/01488

N° Portalis DBVI-V-B7E-NTEN

MD / RC

Décision déférée du 29 Avril 2020

Tribunal de Grande Instance de FOIX

19/00303

M.[R]

[C] [X]

[G] [Y] épouse [X]

C/

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTS

Monsieur [C] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Quentin GUY-FAVIER, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [G] [Y] épouse [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Quentin GUY-FAVIER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 391 851 557, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 31 Janvier 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

-:-:-:-

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte authentique du 28 mars 2008, M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] ont acquis une parcelle de terrain sise à [Localité 2].

Ils se sont rapprochés de la société à responsabilité limitée (Sarl) Benagues services pour faire construire leur maison d'habitation et réaliser des aménagements extérieurs tels que des terrasses, trottoirs et une piscine.

La Sarl Benagues services a édité un devis le 25 avril 2008 qui proposait la réalisation de plusieurs postes de travaux :

- BAT-UO1 : plans - études - terrassement - installations de chantier incluant le montage du dossier permis de construire,

- BAT -UO2 : soubassement - plancher béton - dalle,

- BAT-UO3 : murs périphériques,

- BAT-UO4 : charpente - couverture,

- BAT-UO5 : eaux pluviales,

- BAT-UO6 : étanchéité - drainage périphérique des parties enterrées,

- BAT-UO7 : menuiseries extérieures pvc,

- BAT-UO8 : plafond placoplatre - isolation,

- BAT-UO9 : doublage placoplatre, cloisons, isolation, menuiserie intérieure,

- BAT-UO10 : carrelage/faïence,

- BAT-UO11 : plomberie,

- BAT-UO12 : électricité,

- BAT-UO13 : façade,

- PAC-UO1 : énergie renouvelable,

- PAC-UO2 : réseau de chaleur - plancher chauffant,

- PAC-UO3 : appoints électriques,

- PAC-UO4 : étude thermique - mise en oeuvre - prestations complémentaires - mise en service,

- CESI-UO1 : production eau chaude sanitaire solaire,

- PIS-UO1 : terrassement,

- PIS-UO2 : piscine maçonnée,

- PIS-UO3 : filtration / pièces à sceller / canalisations,

- PIS-UO4 : étanchéité,

- OPT-PIS UO1 : automatismes de traitement + régulation du pH,

- OPT-PIS UO2 : robot nettoyeur,

- OPT-PIS UO3 : nage à contre courant complète,

- OPT-PIS UO4 : volet immergé,

pour un prix total de 174 479,48 euros hors taxes, soit 184 637,86 euros toutes taxes comprises.

Il a été signé par M. et Mme [X] le 25 avril 2008.

Par avenant du 9 juillet 2008, la Sarl Benagues services a proposé un devis supplémentaire prévoyant : plus value pour fondations suite à la préconisation de l'étude de sol,

pour un prix de 4800 euros toutes taxes comprises.

Il a été signé par M. et Mme [X] le 11 juillet 2008.

La Sarl Benagues services était assurée auprès de la société Groupama au titre de la responsabilité civile décennale pour les activités suivantes, telles que figurant sur l'attestation d'assurance du 9 décembre 2007 remise aux maîtres de l'ouvrage :

- charpentes en bois,

- maçonnerie ou béton armé,

- carrelage,

- cloisons sèches posées,

- isolation thermique par l'intérieur ou pose de survitrage,

- plâtrerie,

- parquets traditionnels ou collés.

M. [X] a déposé une demande de permis de construire pour une maison individuelle le 3 juin 2008 à la Mairie de Benagues.

Par arrêté du 9 juillet 2008, le permis de construire a été accordé.

M. et Mme [X] ont fait réaliser les menuiseries de la maison par la Sarl Cd menuiseries et l'électricité par M. [M] [N].

La Sarl Benagues services a édité une facture le 26 mars 2009 pour un prix de 93 640,07 euros hors taxes, indiquant les mêmes postes de travaux à l'exception des lots menuiseries extérieures pvc, électricité et énergie renouvelable.

Par jugement du 14 septembre 2009, la Sarl Benagues services a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du 3 janvier 2011, la liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif et la Sarl Benagues services radiée du registre du commerce et des sociétés.

Au cours de l'année 2016, M. et Mme [X] ont constaté l'apparition de désordres sur les terrasses, trottoirs et piscine : dégradation des joints du carrelage, affaissement des trottoirs par rapport à la terrasse et apparition de déformation sur des marches de la piscine.

Par saisie via internet du 4 septembre 2017, ils ont fait une déclaration de sinistre auprès de leur assureur la Sa Amf.

La Sa Amf a missionné le cabinet Equadom afin de réaliser une expertise au contradictoire de la compagnie d'assurance Groupama d'Oc, assureur de la Sarl Benagues qui a pour sa part saisi le cabinet Eurisk.

Dans son rapport d'expertise du 16 août 2018, le cabinet Equadom a relevé :

- une évolution significative et la généralisation des désordres matérialisés par une instabilité structurelle des trottoirs, plages et terrasses disposés autour de la villa,

- l'instabilité structurelle génère des désaffleurs, décollement du revêtement de sol carrelé relevant des conditions d'application de la garantie décennale des constructeurs,

- aucun désordre n'affecte le bien à usage d'habitation ainsi que sa terrasse couverte sur vide sanitaire,

- les plis au niveau du liner de la piscine ne génèrent aucun défaut d'étanchéité. Ce point de désordre a été écarté de toute prise en garantie.

Ce rapport précise : 'd'un commun accord avec notre confrère Eurisk, nous avons convenu de la nécessité d'une démolition/reconstruction à neuf de tous les trottoirs, terrasses et plages de piscine, dans le périmètre de l'habitation'.

M. et Mme [X] ont fait réaliser un devis édité le 20 septembre 2018 par la Sarl Les logis d'Ariège d'un montant de 52 823,54 euros toutes taxes comprises.

-:-:-:-

Par acte d'huissier du 20 mars 2019, M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] ont fait assigner la Groupama d'Oc en sa qualité d'assureur de la Sarl Benagues services aux fins de voir déclarer la Sarl Benagues services responsable des désordres affectant l'habitation sur le fondement de la garantie décennale et ordonner une expertise.

-:-:-:-

Par jugement rendu le 29 avril 2020, le tribunal judiciaire de Foix a :

- débouté M. et Mme [X] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné in solidum M. et Mme [X] aux dépens avec 'distraction' au profit de la Selas Clamens conseil qui pourra les recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme [X] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

Le tribunal a estimé que les désordres allégués relevaient de la garantie décennale des constructeurs et de la responsabilité de la Sarl Benagues services mais que le contrat d'assurance souscrit par l'entrepreneur auprès de Groupama d'Oc ne couvrait pas l'activité de construction de maison individuelle alors que l'entrepreneur s'est livré à une telle activité en réalisant l'ensemble des lots du projet de montage du dossier de permis de construire à la réception du chantier.

-:-:-:-

Par déclaration du 25 juin 2020, M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] ont interjeté appel total du jugement en ce qu'il les a débouté de leurs demandes consistant à :

- dire que la Sarl Benagues services est responsable des désordres affectant leur habitation sur le fondement de la responsabilité décennale,

- dire que son assureur doit être condamné à prendre en charge le coût des réparations,

- ordonner une expertise,

- subsidiairement, si le tribunal faisait sienne les conclusions du rapport d'expertise amiable du 16 août 2018 : fixer le montant des travaux de réparation à la somme de 52 823,54 euros, en conséquence 'demander' la société Groupama es qualité d'assureur responsabilité civile décennale de la Sarl Benagues services, au paiement de la somme de 52 823,54 euros au titre de l'indemnisation des travaux à réaliser, et à la somme de 5000 euros au titre de la réparation des préjudices subis du fait des désordres,

- condamner Groupama à payer une indemnité de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire pour le tout

- et en ce qu'il les a condamnés à payer 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 30 juillet 2020, M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X], appelants, demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, et 700 du code de procédure civile, de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Foix le 29 avril 2020,

En conséquence,

- constater que la Sarl Benagues services est responsable des désordres affectant l'habitation de M. et Mme [X] sur le fondement de la garantie décennal,

- condamner la société Groupama es qualité d'assureur responsabilité civile décennale de la Sarl Benagues services au paiement de la somme de 52 823,54 euros au titre de l'indemnisation des travaux à réaliser, et à la somme de 5 000 euros au titre de la réparation des préjudices subis du fait des désordres,

En tout état de cause,

- condamner la société Groupama à payer une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

À l'appui de leurs prétentions, les appelants soutiennent que :

- le permis de construire comporte uniquement la signature de M. [X] et ne mentionne pas l'intervention de la société Benagues services en qualité de contractant général,

- les juges de première instance ont commis une erreur dans l'appréciation du contenu de la prestation réalisée par l'assuré, la mention sur la facture 'Bat U01 : plans- études - terrassement - installation de chantier' désigne un ensemble de prestations pouvant être réalisées dans le cadre de la préparation d'un chantier et aucune prestation de réalisation de plan ou conception du projet immobilier n'a été facturée par l'entrepreneur, qui n'a pas non plus procédé au dépôt et suivi de l'instruction du permis de construire alors qu'en vertu de l'article L.231-1 du code de la construction et de l'habitation, pour entrer dans la qualification de construction de maison individuelle la personne doit réaliser un ouvrage 'd'après un plan qu'elle a proposé ou fait proposé',

- l'absence de facturation d'une telle prestation démontre que la société Benagues services ne l'a pas réalisé,

- la société Groupama assurait l'activité de locateur d'ouvrage titulaire d'un marché de travaux de la société Benagues services,

- seuls les aménagements extérieurs sont affectés de désordre, et non pas la maison,

- la société Groupama a acquiescé aux conclusions du rapport d'expertise amiable, concernant la nature des désordres, leurs causes et la responsabilité de la société Benagues services, seul le montant des travaux est discuté.

Dans ses dernières écritures transmises à la cour par voie électronique le 15 septembre 2021, la Caisse de réassurances mutuelles agricoles Groupama d'Oc, intimée, demande à la cour, au visa des articles L.231-2 et L.232-1 du code de la construction et de l'habitation, L.112-6 et A. 243-1 du code des assurances, de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- condamner in solidum M. et Mme [X] au paiement d'une indemnité de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la Selas Clamens conseil, qui pourra les recouvrer sur son offre de droit conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

En cas de réformation,

- limiter l'obligation de la compagnie Groupama d'Oc à la somme de 46 790,32 euros toutes taxes comprises,

- débouter M. et Mme [X] du surplus de leurs demandes,

En tout état de cause,

- les ramener à de plus strictes proportions au titre du préjudice de jouissance, sous déduction de la franchise contractuelle opposable aux tiers s'agissant d'une garantie facultative.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- l'activité à l'origine des désordres litigieux n'est pas contractuellement garantie puisqu'il s'agit d'une activité non déclarée par l'entrepreneur : celle de contractant général tel que cela ressort du devis établi le 25 avril 2008, la société Benagues services s'engageant à réaliser tous les lots du projet,

- cette activité s'apparente à une activité de constructeur de maisons individuelles ou de contractant général (conception et réalisation de l'ouvrage), or cette activité doit être expressément déclarée à l'assureur,

- le défaut de déclaration de l'activité de construction de maison individuelle ou de contractant général prive le maître de l'ouvrage de la garantie d'assurance même si les désordres se rapportent aux activités déclarées,

- il ressort des pièces produites que la société Benagues services a réalisé le montage du dossier du permis de construire et les plans,

- il est indifférent que M. [X] ait rempli seul le formulaire de dépôt du permis de construire puisque c'est toujours le propriétaire du terrain qui se charge de cette formalité,

- M. [X] n'aurait pu réaliser toutes les pièces techniques obligatoires pour la demande de permis de construire, sans l'aide de l'entrepreneur,

- est également qualifié de contrat de construction de maison individuelle un contrat sans réalisation de plans qui a pour objet l'exécution de travaux de gros oeuvre, de mise hors d'eau et hors d'air d'un immeuble à usage d'habitation,

- le devis de travaux a été ramené à 46 790,32 euros toutes taxes comprises,

- le préjudice de jouissance est un dommage immatériel consécutif qui ne saurait être pris en charge par l'assureur, outre que la preuve d'un tel préjudice n'est pas rapportée,

- il s'agit d'un préjudice soumis à une garantie facultative pour laquelle la franchise contractuelle est opposable.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

- Sur la garantie de la compagnie Groupama d'Oc :

1. Aux termes de l'article 1792 du code civil, est de nature décennale un désordre qui compromet la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rend impropre à sa destination.

Dans son rapport édité le 16 août 2018, le cabinet Equadom, mandaté par l'assureur de M. et Mme [X], a relevé : un affaissement des trottoirs, un désaffleur d'un revêtement de sol carrelé, le développement de fissures sur les trottoirs, des fissures au niveau des terrasses, la non-conformité altimétrique au niveau de la pose du revêtement de sol carrelé des terrasses et plages de piscine par rapport aux parois verticales et seuils des portes fenêtres, le délitement de l'enduit extérieur des façades, des boursouflures du liner au niveau de l'escalier maçonné de la piscine qui pourraient être liés à un équilibre des pressions hydrostatiques du puit d'infiltration situé à un mètre de l'extrémité est du bassin de piscine.

Il en a conclu à :

- une évolution significative et la généralisation des désordres matérialisés par une instabilité structurelle des trottoirs, plages et terrasses disposés autour de la villa,

- l'instabilité structurelle génère des désaffleurs, décollement du revêtement de sol carrelé relevant des conditions d'application de la garantie décennale des constructeurs,

- aucun désordre n'affecte le bien à usage d'habitation ainsi que sa terrasse couverte sur vide sanitaire,

- les plis au niveau du liner de la piscine ne génèrent aucun défaut d'étanchéité.

La réunion d'expertise du 13 août 2018 a été réalisée en présence de M. et Mme [X], du cabinet Eurisk pour Groupama et de l'expert Equadom pour Amf. Cette expertise a été réalisée contradictoirement et la Groupama d'Oc affirme que la cause du sinistre se trouve dans des fautes d'exécution imputables à la société Benagues service, ne contestant pas que les désordres relèvent de la garantie décennale due par l'entrepreneur assuré.

Le principe de la garantie décennale due par l'entrepreneur en l'espèce sera retenu.

2. En application de l'article L. 241-1 du code des assurances, toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance.

Lors de la conclusion d'un contrat d'assurance, le risque garanti fait l'objet d'une délimitation contractuelle spécifique, l'assureur ne couvrant la responsabilité de l'assuré que dans le cadre de l'exercice des activités déclarées pour lesquelles le contrat a été souscrit. De sorte que, toute activité non prévue par le contrat n'est pas garantie par l'assurance de responsabilité obligatoire.

La Sarl Benagues services était assurée auprès de la Groupama au titre de la responsabilité civile décennale pour les activités de charpentes en bois, maçonnerie ou béton armé, carrelage, cloisons sèches posées, isolation thermique par l'intérieur ou pose de survitrage, plâtrerie, parquets traditionnels ou collés.

Les désordres précités découlent de l'exécution d'activités de maçonnerie et de carrelage en ce qui concerne les trottoirs, terrasses et plages de piscine.

Toutefois, la boursouflure du liner au niveau de l'escalier ne peut être attribuée à l'activité de maçonnerie car elle a une origine incertaine, puisqu'il n'est pas indiqué dans le rapport s'il s'agit d'un défaut de l'escalier maçonné lui-même ou de la seule pose du liner, le cabinet Equadom se contentant à ce titre d'émettre une hypothèse non vérifiée.

Ainsi, les désordres affectant les terrasses, trottoirs et plages de piscine relèvent donc des activités couvertes par le contrat d'assurance conclu entre la Sarl Benagues services et la compagnie Groupama d'Oc et sont, à ce titre, couverts par la garantie d'assurance.

Il faut, à ce titre, souligner que tant la nature du contrat conclu que le fait que les activités couvertes s'inscrivent dans un cadre plus large et non précisément visé par le contrat d'assurance, sont indifférentes, et qu'il importe peu qu'il s'agisse d'un contrat de construction de maison individuelle ou d'un contrat d'entreprise classique dès lors que l'activité à l'origine des désordres fait l'objet de la garantie d'assurance, ce qui est le cas en l'espèce.

(Civ. 3e, 18 févr. 2016, n°14-29.268 : 'Qu'en statuant ainsi, alors que l'activité déclarée doit être appréciée indépendamment de la forme du contrat conclu avec le maître de l'ouvrage, la cour d'appel, qui a constaté que les activités déclarées par la société Gréselle lors de la souscription du contrat d'assurance incluaient la maîtrise d'oeuvre des opérations de rénovation et que cette activité était en relation avec les travaux à l'origine des désordres, a violé les textes susvisés')

L'imprécision du rapport du Cabinet Equadom sur l'origine du désordre, à savoir s'il s'agit d'une erreur de conception ou d'exécution des travaux n'est pas un obstacle à l'application du contrat d'assurance dès lors qu'entre dans les activités de maçonnerie et de carrelage la conception et l'exécution des seuls travaux qui en relèvent.

3. Entrent donc dans le champ d'application du contrat d'assurance responsabilité civile décennale des entreprises du bâtiment souscrit par la Sarl Benagues services auprès de la compagnie Groupama d'Oc, les désordres affectant les trottoirs, plages de piscine et terrasses.

Le cabinet Equadom a préconisé, en accord avec le cabinet Eurisk mandaté par la Groupama d'Oc, la démolition et la reconstruction à neuf des trottoirs, terrasses et plages de piscine.

Dans leurs conclusions, M. et Mme [X] ainsi que la Groupama d'Oc adhèrent à ces modalités de réparation des désordres.

Elles s'opposent en revanche sur le montant des travaux à effectuer.

M. et Mme [X] produisent un devis du 20 septembre 2018 de la Sarl Les logis d'Ariège avec démolition, terrassement, dallage et carrelage pour un montant total de 52 823,54 euros toutes taxes comprises.

La Groupama d'Oc produit un rapport de vérification du coût des travaux réalisés par la Sas Alayrac le 3 avril 2019 qui indique que certaines prestations visées par le devis de la Sarl Les logis d'Ariège ne sont pas justifiées ou adaptées : les reprises de canalisations sous dallage, la création d'un caniveau et la réfection des margelles. Il propose de retenir la somme de 46.790,32 euros toutes taxes comprises.

Dans leurs conclusions, M. et Mme [X] indiquent en réponse que l'entrepreneur qu'ils ont mandaté maintient le devis initial, sans pour autant justifier de la nécessité d'effectuer les travaux dont la Groupama d'Oc conteste la pertinence.

Il convient donc de retenir les prestations qui ont reçu l'accord des deux parties et des experts qu'elles ont mandaté et de condamner la compagnie Groupama d'Oc à payer à M. et Mme [X] la somme de 46 790,32 euros.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement rendu le 29 avril 2020 par le tribunal judiciaire de Foix en ce qu'il a débouté M. et Mme [X] de l'ensemble de leurs demandes.

4. Le contrat d'assurance produit en pièce 2 par la compagnie Groupama d'Oc et souscrit par la Sarl Benagues services couvre la responsabilité civile décennale obligatoire 'dont garantie de bon fonctionnement, dont dommages immatériels consécutifs'. Dans les dispositions générales du contrat d'assurance (pièce 1-2), le dommage immatériel consécutif est défini comme 'tout préjudice pécuniaire résultant de la privation de jouissance, de l'interruption d'un service rendu ou de la perte d'un bénéfice consécutif à un dommage corporel ou matériel garanti au contrat'.

M. et Mme [X] sollicitent la condamnation de l'assureur Groupama à leur payer la somme de 5 000 euros 'au titre des troubles de jouissance et divers préjudices subis' alors qu'il ne résulte du dossier aucun élément de nature à établir l'existence d'un dommage immatériel rentrant dans la définition de la garantie précitée étant relevé que le préjudice moral ou l'absence de jouissance des abords de la piscine ne peuvent recevoir la qualification de préjudice immatériel au sens de la police d'assurance souscrite par l'entrepreneur.

La demande formée par M. et Mme [X] sera en conséquence rejetée.

- Sur les dépens et frais irrépétibles :

5. La compagnie Groupama d'Oc, partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à M. et Mme [X] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Il convient, à ce titre, d'infirmer le jugement rendu le 29 avril 2020 par le tribunal judiciaire de Foix qui a condamné in solidum M. et Mme [X] aux dépens avec distraction au profit de la Selas Clamens conseil, ainsi qu'au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 avril 2020 par le tribunal judiciaire de Foix.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la compagnie Groupama d'Oc à payer à M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] la somme de 46 790,32 euros TTC en réparation des désordres causés par l'activité de la Sarl Benagues services.

Rejette la demande de M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] formée contre la compagnie Groupama d'Oc au titre du trouble de jouissance.

Condamne la Compagnie Groupama d'Oc aux dépens de première instance et d'appel.

Condamne la Compagnie Groupama d'Oc à payer à M. [C] [X] et Mme [G] [Y] épouse [X] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01488
Date de la décision : 20/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-20;20.01488 ?
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