La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2023 | FRANCE | N°21/01912

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 13 juin 2023, 21/01912


13/06/2023



ARRÊT N°



N° RG 21/01912

N° Portalis DBVI-V-B7F-OECB

MD/ND



Décision déférée du 26 Mars 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE ( 15/00485)

Mme GIGAULT

















[L] [O] [J]





C/



Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE AUX DROITS DE LA BANQUE POPULAIRE D'ALSACE

S.A.R.L. CABINET OPTIMUM

S.A.S.U. TAGERIM PROMOTION ALITE DE MANDATAIRE ADHOC DE LA SCCV LE

S COTEAUX D





























































INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1e...

13/06/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/01912

N° Portalis DBVI-V-B7F-OECB

MD/ND

Décision déférée du 26 Mars 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE ( 15/00485)

Mme GIGAULT

[L] [O] [J]

C/

Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE AUX DROITS DE LA BANQUE POPULAIRE D'ALSACE

S.A.R.L. CABINET OPTIMUM

S.A.S.U. TAGERIM PROMOTION ALITE DE MANDATAIRE ADHOC DE LA SCCV LES COTEAUX D

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [L] [O] [J]

[Adresse 2]

[Localité 1]-SUISSE

Représenté par Me Cécile VILLARD, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE AUX DROITS DE LA BANQUE POPULAIRE D'ALSACE

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. CABINET OPTIMUM

[Adresse 3]

[Localité 8]

S.A.S.U. TAGERIM PROMOTION SASU TAGERIM PROMOTION prise en son nom propre et en qualité de mandataire ad hoc de la SCCV LES COTEAUX D'ENTRAYGUES

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Sylvie FONTANIER de la SCP R.F. RASTOUL-S. FONTANIER-A. COMBAREL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX,, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- PAR DEFAUT

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société civile de construction vente (Sccv) Les coteaux d'Entraygues a fait construire un ensemble immobilier situé à [Localité 10] formant la résidence Les coteaux d'Entraygues.

Par contrat conclu le 23 juillet 2007 avec la Sarl Tagerim investissement, M. [L] [J] a réservé un appartement de type T2 et un parking situés au sein de la résidence Les coteaux d'Entraygues.

Par acte authentique du 22 janvier 2008, M. [J] a acquis les dits biens en l'état futur d'achèvement pour un prix de 142 000 euros.

Pour financer cet achat, il a conclu, par offre acceptée le 24 octobre 2007, un contrat de prêt avec la Banque populaire d'Alsace portant sur la somme de 239 000 francs suisses.

La vente devait permettre à l'acquéreur de bénéficier du régime fiscal instauré par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, dite « Borloo », codifiée à l'article 31, h) du Code général des impôts. En contrepartie d'une déduction d'impôt, le propriétaire devait louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d'habitation principale à une personne autre qu'un membre de son foyer fiscal et pour un loyer ne devant pas excéder un plafond fixé par décret.

M [J] a confié la gestion locative de ses biens et souscrit des assurances.

Les biens ont été livrés le 12 février 2009 puis ont fait l'objet d'un contrat de location le 8 mai 2009.

La Sccv Les coteaux d'Entraygues a fait l'objet d'une liquidation amiable dont la clôture a été enregistrée au registre du commerce et des sociétés le 30 septembre 2012.

La Sccv Les coteaux d'Entraygues a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 15 novembre 2012.

Par acte authentique du 17 septembre 2021, M. [J] a vendu son bien pour un prix de 54 000 euros net vendeur.

-:-:-:-

Par actes d'huissier des 23 décembre 2014 et 5 janvier 2015, M. [J] a fait assigner la Sas Tagerim promotion, la Banque populaire d'Alsace et la Sarl Cabinet optimum devant le tribunal de grande instance de Toulouse.

Par ordonnance du 7 avril 2016, le tribunal de grande instance d'Angoulême a nommé la Sas Tagerim promotion mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues avec pour mission de la représenter dans le cadre de l'action en nullité de la vente immobilière.

Par actes d'huissier du 27 septembre et 7 décembre 2016, M. [J] a fait assigner la société April assurances et la Sas Tagerim promotion en qualité de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues.

Par ordonnances des 27 octobre 2016 et 10 janvier 2017, les affaires ont été jointes.

-:-:-:-

Par jugement du 26 mars 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- déclaré irrecevable pour cause de prescription l'action introduite par M. [J] fondée sur l'existence d'un manquement à une obligation d'information, de conseil ou de mise en garde,

- rejeté les demandes en nullité du contrat de vente, de résolution du contrat de prêt et en dommages et intérêts fondées sur l'existence de man'uvres dolosives,

- rejeté les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux entiers dépens de l'instance,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

-:-:-:-

Par déclaration du 26 avril 2021, M. [L] [J] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable pour cause de prescription l'action introduite par M. [J] fondée sur l'existence d'un manquement à une obligation d'information, de conseil ou de mise en garde,

- rejeté les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux entiers dépens de l'instance.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 28 juin 2022, M. [L] [J], appelant, demande à la cour, au visa des articles 1154, 1382 du code civil, L.111-1 du code de la consommation, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

- déclarer l'appel régulier, recevable et fondé,

- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme étant prescrite l'action engagée par M. [J] sur le fondement d'un manquement à une 'obligation et de conseil' à l'encontre de la Sas Tagerim promotion prise en sa qualité de mandataire ad hoc et d'associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues et de la société Cabinet Optimum,

- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme étant prescrite l'action engagée par M. [J] sur le fondement d'un manquement au devoir de mise en garde à l'encontre de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace,

- déclarer que les demandes de M. [J] ne sont pas prescrites,

Et statuant à nouveau,

- déclarer que l'opération présentée à M. [J] était une opération financière complexe à long terme ayant pour support un bien immobilier géré par un tiers, intégralement financée par un emprunt remboursé par la perception de loyers, par les réductions d'impôt procurées par le dispositif d'incitation fiscale Borloo avec en complément un effort d'épargne mensuel, destiné à permettre, suivant la revente du bien au terme de l'engagement de location, le remboursement du prêt contracté et la réalisation d'un capital net supérieur à l'effort d'épargne fourni et donc la constitution d'un capital,

- déclarer que la société Cabinet optimum est intervenue dans le cadre d'un démarchage pour présenter l'opération à M. [J] était tenue à son égard à une obligation d'information et à un devoir de conseil,

- déclarer que dans le cadre de cette opération, les perspectives de valorisation du bien au terme de l'engagement de location revêtaient une importance essentielle pour ne pas dire cruciale dès lors que la possibilité d'atteindre l'objectif assigné à l'opération (la constitution d'un capital) dépendait très étroitement et principalement de la valeur du bien au terme de l'engagement de location,

- déclarer qu'il appartenait en conséquence à la société Cabinet Optimum de se renseigner sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location pour informer utilement M. [J] et satisfaire à son obligation d'information, vérifier que l'opération proposée était adaptée à l'objectif de constitution d'un capital de M. [J] et satisfaire à son devoir de conseil,

- déclarer qu'en s'abstenant de réaliser la moindre étude sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location et en communiquant à M. [J] une étude financière faisant état de perspectives de valorisation du bien litigieux au terme de l'engagement de location totalement irréalistes et fondées sur des données purement théoriques, la société Cabinet optimum a manqué à son obligation d'information et à son devoir de conseil,

- déclarer que la société Cabinet Optimum, nécessairement consciente en sa qualité de professionnel des risques qu'elle faisait courir à M. [J] aurait dû attirer son attention sur le caractère purement théorique des informations de l'étude financière relatives aux perspectives de réalisation d'un capital et les risques pour lui à s'engager dans une opération dont la réussite était fondée sur des données purement théoriques, qu'à aucun moment, cette mise en garde n'a été opérée, la seule mention du caractère non contractuel de l'étude financière étant parfaitement insuffisante à caractériser une telle mise en garde,

- déclarer que quand bien même M. [J] n'ignorait pas que l'investissement proposé (comme d'ailleurs tout investissement) comportait une part d'aléa, l'absence d'étude préalable par la société Cabinet Optimum sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location et la communication sans mise en garde d'une information y relative totalement irréaliste, a conduit M. [J] à s'exposer à un risque certain ou quasi-certain qui s'est réalisé,

- déclarer que les manquements de la société Cabinet Optimum à son obligation d'information et à son devoir de conseil ont privé M. [J] de la chance d'éviter le risque certain ou quasi certain qui s'est réalisé que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette pas de réaliser un capital net supérieur à l'effort d'épargne fourni, que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette même pas de rembourser le solde du capital restant dû auprès de l'établissement ayant financé l'opération litigieuse, d'avoir ainsi et pendant de nombreuses années, fourni en vain un important effort d'épargne (sans constituer le moindre capital),

En conséquence,

- condamner in solidum avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir, la société Cabinet optimum et la Sas Tagerim promotion prise en sa qualité de mandataire ad hoc et d'associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues et ce à dû concurrence de ses droits sociaux dans la Sccv Les coteaux d'Entraygues au paiement à M. [J] de la somme de 151 797,89 euros à titre de dommages et intérêts,

- déclarer que les manquements de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace à son obligation d'information et de mise en garde en ne l'informant pas des risques d'augmentation du capital emprunté, ont privé M. [J] de la chance d'éviter le risque certain ou quasi certain qui s'est réalisé,

En conséquence,

- condamner « in solidum » avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir, la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace au paiement à M. [J] de la somme de 99 418,37 euros à titre de dommages et intérêts,

- déclarer que les manquements de la société Cabinet Optimum à son obligation d'information et à son devoir de conseil sont aussi pour M. [J], la cause d'un préjudice moral distinct du préjudice financier causé par le stress lié à la présente procédure initiée pour faire valoir ses droits,

- condamner in solidum avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir, la Sas Tagerim promotion prise en sa qualité de mandataire ad hoc et d'associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues et ce à dû concurrence de ses droits sociaux dans la Sccv Les coteaux d'Entraygues, la société Cabinet Optimum et la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace, au paiement à M. [J] de la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause,

- condamner in solidum la Sas Tagerim promotion prise en sa qualité de mandataire ad hoc et d'associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues et ce à dû concurrence de ses droits sociaux dans la Sccv Les coteaux d'Entraygues, la société Cabinet optimum et la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace, au paiement à M. [J] de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- déclarer infondées les intimées en leur argumentation,

- les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires.

À l'appui de ses prétentions, l'appelant soutient que :

- il a été démarché par téléphone et invité à se rendre dans les locaux du Cabinet optimum, a signé un mandat de recherche d'opération de défiscalisation,

- le bien a été vendu 52 500 euros le 17 septembre 2021,

- l'investissement litigieux n'était pas une acquisition immobilière destinée à l'habitation mais une opération financière financée par la perception de loyers et des réductions d'impôt avec revente au terme de la période de défiscalisation pour un capital supérieur,

- le Cabinet optimum a manqué à son devoir de mise en garde quant au risque que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette pas de réaliser un capital supérieur à l'effort d'épargne,

- la prescription de l'action en responsabilité pour manquement au devoir d'information, de mise en garde et de conseil commence à courir au jour où le dommage est révélé à la victime qui en ignorait l'existence, et qui ne peut être fixé au jour de conclusion du contrat mais au terme de l'engagement de location (8 mai 2018), ou à la date à laquelle l'acheteur a eu connaissance de l'existence de son préjudice lors de l'évaluation de son bien de 50% inférieure à sa valeur d'achat,

- le préjudice consiste en la perte de chance d'éviter le risque, dont la réalisation est certaine, que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette pas de réaliser un capital supérieur à l'effort d'épargne, et ne peut être apprécié qu'au terme de l'opération,

- la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne a manqué à son obligation d'information et de conseil relativement au risque de change et le dommage qui en est résulté a été révélé à l'acheteur le 13 juillet 2012, date de l'avenant au contrat de prêt,

- le Cabinet optimum n'a pas respecté l'article L.111-1 du code de la consommation et présenté à l'acheteur les caractéristiques essentielles du bien ou du service et notamment des perspectives de valorisation du bien au terme de la période de défiscalisation, seuls ont été présentés les aspects favorables de l'opération proposée,

- le Cabinet optimum devait également conseiller l'acheteur et vérifier que l'opération proposée était adaptée aux besoins et objectifs du cocontractant, et aurait dû étudier son patrimoine et l'informer sur les risques de l'opération et notamment la valeur réelle du bien et le risque de perte à la revente, sur l'estimation théorique du loyer garanti, l'économie fiscale, le contexte défavorable de construction de nouveaux logements privés, le risque d'un prêt en devises et du change en cas d'augmentation du franc suisse par rapport à l'euro,

- la Sccv Les coteaux d'Entraygues est responsable des manquements du commercialisateur et des informations biaisées relatives à la valeur vénale et locative du bien mentionnées dans le contrat de réservation,

- en l'absence de ces manquements, M. [J] n'aurait jamais procédé à l'investissement litigieux,

- le Cabinet optimum a réalisé une simulation erronée qui promettait une prise de risque nulle alors que le bien a été vendu pour un prix représentant moins d'un tiers de la valeur d'achat, l'indication « document non contractuel » sur la simulation ne dégage pas le Cabinet de sa responsabilité,

- en sa qualité de professionnel, le Cabinet optimum ne pouvait ignorer le caractère théorique de l'information communiquée et les risques d'absence de succès de l'opération financière,

- c'est sur le fondement des informations remises lors de la phase précontractuelle et donc de l'étude financière que M. [J] a réalisé l'investissement présenté,

- le Cabinet optimum n'a pas communiqué à M. [J] d'étude de marché immobilier local et la brochure présente le lieu d'implantation de la résidence sous un aspect exclusivement favorable, de sorte que l'information communiquée n'est pas loyale et utile,

- alors que le nombre de logements augmentait et que la population diminuait avant la commercialisation, le parc locatif était déjà très développé avant la commercialisation, de sorte que la construction d'une grande résidence locative intervenait dans un contexte défavorable, et que la rentabilité locative annoncée serait nécessairement moindre que celle annoncée,

- s'agissant d'un investissement immobilier locatif, l'état du marché immobilier local fait partie du périmètre de l'obligation d'information,

- en raison de la relation de confiance entre M. [J] et le Cabinet optimum, professionnel, l'investisseur était dans un état d'ignorance légitime et n'était pas tenu de se renseigner sur le potentiel de rentabilité de l'investissement,

- le vendeur est tenu d'une obligation d'information sur les caractéristiques de l'investissement proposé et les risques encourus et est tenu par les fautes commises par les démarcheurs qu'il a mandaté,

- en vendant à un consommateur éloigné géographiquement un appartement en Vefa présenté comme un produit de défiscalisation, le promoteur et son mandataire, professionnels de la vente immobilière, devaient mettre l'acquéreur en mesure de connaître le potentiel locatif du bien,

- le promoteur professionnel comme son mandataire étaient censés connaître avec précision lors de la conclusion de la vente la tendance du marché local, or en l'espèce la rentabilité de l'opération était d'emblée hypothétique,

- M. [J] a intérêt à agir à l'encontre de la société Tagerim promotion prise en son nom propre compte tenu de sa qualité d'ancien associé du promoteur,

- du fait de ces manquements, M. [J] a perdu la chance d'éviter les risques qui se sont réalisés : que la valeur du bien ne permette pas de réaliser un capital supérieur à l'effort d'épargne fourni, que la valeur du bien au terme de l'engagement ne permette pas de rembourser le solde du capital restant dû auprès de la banque,

- il subit plusieurs préjudices tenant aux sommes qu'il n'aurait pas exposé (frais de l'opération, absence de réductions d'impôts en raison de sa qualité de résident fiscal suisse, la perte financière générée par la revente du bien pour un prix de 52 500 euros) et un préjudice moral,

- la société Cabinet optimum et la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne ont manqué à leur obligation d'information et de mise en garde en n'informant pas M. [J] des risques d'augmentation du capital emprunté du fait que l'emprunt est en franc suisse,

- présenté comme un emprunt stable et fixe, le capital dû et les intérêts s'accroissent en réalité avec le temps dès lors que l'euro perd de la valeur,

- l'interdiction sauf exception des prêts en devises étrangères par la loi du 26 juillet 2013 est une preuve de la culpabilité des banques qui les ont commercialisés et l'obligation qui incombe au banquier d'informer l'emprunteur des risques d'un tel emprunt que sont la variation du taux de change et ses conséquences sur l'amortissement,

- aucune information claire n'a été remise à M. [J] sur les dangers d'un tel emprunt, et le choix par la banque d'un emprunt en francs suisses ne correspond pas au besoin de l'emprunteur,

- le choix d'un emprunt en francs suisses lui a été imposé par la banque et le Cabinet optimum qui ont insisté sur la stabilité entre la valeur des deux monnaies,

- il revient à la banque et au Cabinet optimum de prouver que le choix d'un prêt en francs suisses était la meilleure solution pour l'emprunteur et qu'elles l'ont informé des risques de l'opération,

- s'il avait été correctement informé, M. [J] n'aurait pas conclu le contrat de prêt,

- la Banque populaire d'Alsace a manqué à son devoir de conseil quant aux caractéristiques du crédit, l'offre de prêt génère une confusion puisque les intérêts et le coût du crédit sont calculés par rapport à un taux fixe de 3,6% qui donne l'impression d'avoir souscrit à un prêt à taux fixe, aucune indication n'est apportée sur les conséquences néfastes de la variation du taux de change et leur ampleur,

- M. [J] subit un préjudice tenant à la somme qu'il doit encore à la banque compte tenu de l'augmentation de capital générée par la variation du taux de change.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 19 juillet 2022, la société anonyme coopérative à capital variable (Saccv) Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire Alsace, intimée, demande à la cour de :

- déclarer l'appel mal fondé,

- débouter l'appelant de toutes ses fins et prétentions,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- condamner l'appelant au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers frais et dépens.

À l'appui de ses prétentions, l'intimé soutient que :

- l'action en responsabilité dirigée à son encontre est prescrite, le point de départ du délai de prescription étant la date de conclusion du contrat, puisque l'exposition à un risque de change est réalisé dès ce moment et non pas la date à laquelle le taux de change a sensiblement varié au détriment de l'emprunteur,

- si le point de départ est la hausse du franc suisse, l'action est prescrite car les premières hausses importantes se sont produites en 2008 et 2009,

- M. [J] vivant à proximité de la frontière suisse et percevant des revenus en Suisse avait une parfaite conscience du risque de change,

- M. [J] avait la possibilité de solliciter la conversion du prêt en euro mais ne l'a jamais demandé,

- s'agissant du risque immobilier, de la baisse de valeur vénale et du rendement locatif, il s'est manifesté dès la crise immobilière de 2008, l'action est donc prescrite,

- la prescription ne peut courir à compter de l'évaluation immobilière faite par l'appelant en 2015 sauf à admettre la fixation du point de départ de la prescription à la convenance de l'acheteur, de manière potestative,

- la banque ne saurait être responsable de la rentabilité de l'opération immobilière, puisqu'elle n'est pas partie à la vente, et n'a pas été sollicitée pour un conseil quant à l'investissement financé par le prêt,

- aucune condamnation solidaire ne peut être prononcée avec les autres intimés puisqu'ils n'assument pas d'obligation commune relative au rendement de l'investissement,

- la banque n'engage pas sa responsabilité du fait du prêt en devises suisses puisque M. [J] percevait ses revenus en francs suisses et c'est en consentant un prêt en euro que la banque lui aurait fait courir un risque de change, il n'y avait pas lieu de l'informer sur le risque de change qui était ainsi évité,

- M. [J] a bénéficié d'un taux d'intérêt inférieur à celui des prêts en euros, or il ne peut demander d'échapper au risque de change tout en gardant le bénéfice du taux indissociablement lié à la devise,

- le préjudice ne peut être que la perte de chance d'opter pour un prêt en euros, or l'appelant ne caractérise aucune perte de chance et l'incidence de l'évolution du taux de change sur le prêt doit être corrigée de l'incidence du taux d'intérêts particulièrement avantageux et lié à la devise.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 7 janvier 2022, la Sasu Tagerim promotion prise en sa qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, intimée, demande à la cour, au visa des articles 32, 122, 124, 910-4 et 954 du code de procédure civile, L.110-4 du code de commerce et les dispositions de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, 1382 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, de :

À titre liminaire, sur la renonciation de M. [J] à certaines de ses demandes de première instance,

- prendre acte du fait que M. [J] a renoncé aux demandes suivantes :

* demande de nullité de l'acte de vente, résolution du prêt, restitutions liées à ces deux demandes et d'indemnisation d'un prétendu préjudice y afférent,

* demandes formulées dans le cadre de la première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

En conséquence,

- juger que la cour n'est pas saisie des demandes formulées par M. [J] dans le cadre de la première instance et auxquelles il a renoncé au titre de son appel,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

À tout le moins,

- confirmer le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [J] au titre de la nullité de l'acte de vente, de la résolution du prêt, des restitutions liées à ces deux demandes (celles-ci étant en tout état de cause prescrites), de l'indemnisation au titre d'un prétendu préjudice y afférent et des frais irrépétibles de l'article du code de procédure civile et en ce qu'il a condamné M. [J] aux entiers dépens de la première instance,

I ' À titre principal : sur la confirmation intégrale du jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse

- juger que l'action engagée par M. [J] est soumise au délai de la prescription quinquennale,

- juger que le point de départ de la prescription de cette action est la date à laquelle est intervenue la signature du contrat de réservation préliminaire et au plus tard sa réitération par acte authentique,

- juger que compte tenu des dispositions transitoires de la loi n°2008-561 portant réforme de la prescription civile, la prescription de cinq ans court à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi sans que la durée totale de la prescription puisse toutefois excéder dix ans,

- constater qu'en l'espèce, la prescription commence donc à courir à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi, soit le 19 juin 2008 pour une durée de cinq ans, c'est-à-dire jusqu'au 19 juin 2013,

- juger prescrite l'action de M. [J],

- déclarer M. [J] irrecevable en ses demandes pour défaut de droit à agir,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

En conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse en toutes ses dispositions,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

II ' Si par extraordinaire la cour devait infirmer le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse :

II ' 1. À titre subsidiaire : sur l'irrecevabilité de l'action de M. [J] à l'encontre de la société Tagerim promotion prise en son nom propre et es qualité d'ancien associée et mandataire ad hoc de la Sccv Les Coteaux d'Entraygues,

- juger que la société Tagerim promotion prise en son nom propre est un tiers à l'égard de l'opération quels que soient les documents dont se prévaut M. [J],

- juger que M. [J] formule uniquement des demandes de condamnation à l'égard de la société Tagerim es qualité de mandataire ad hoc ou d'ancien associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues sans solliciter que sa responsabilité soit engagée,

- juger que les demandes de M. [J] sont mal dirigées,

- juger en conséquence que M. [J] n'a pas d'intérêt et de qualité à agir à l'encontre de la société Tagerim promotion en quelque qualité que ce soit,

En conséquence,

- déclarer M. [J] irrecevable en l'intégralité de son action et de ses demandes à l'égard de la société Tagerim promotion prise en son nom propre et es qualité d'ancien associée et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

II ' 2. À titre très subsidiaire, sur le caractère infondé et injustifié de l'action engagée par M. [J] sur le fondement de la responsabilité délictuelle,

- juger que M. [J] ne démontre en aucune façon l'existence d'une faute de quelque nature qu'elle soit imputable à la société Tagerim promotion prise en son nom propre ou en qualité de mandataire ad hoc ou d'ancien associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, ni l'existence de son préjudice (tant dans son principe que dans son quantum) et d'un lien de causalité,

- juger que M. [J] avait en tout état de cause l'obligation de se renseigner sur l'opération qu'il envisageait de réaliser avant de s'engager,

En conséquence,

- débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

III ' En tout état de cause,

- juger que M. [J] ne formule aucune demande à l'encontre de la société Tagerim promotion prise en son nom propre,

- condamner M. [J] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Tagerim promotion prise en son nom propre et en qualité de mandataire ad hoc ou d'ancien associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues,

- condamner M. [J] aux entiers frais et dépens de l'instance,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires de M. [J],

À l'appui de ses prétentions, l'intimé soutient que :

- M. [J] ne sollicite pas, en appel, la nullité et la résolution de la vente,

- M. [J] ne reprend pas, dans le dispositif de ses conclusions, la réformation du jugement qui l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens de première instance, il convient donc de retenir que l'appelant a renoncé à ces demandes,

- l'action de M. [J] est prescrite puisque le délai de prescription a commencé à courir à compter de la conclusion du contrat, date de délivrance de l'information et non pas à la date de découverte du caractère erroné de l'information délivrée,

- M. [J] a connu ou aurait dû connaître les risques de l'acquisition à la date de conclusion du contrat de réservation ou au plus tard celle de réitération de la vente par acte authentique, les deux étant assortis de délais de réflexion et de rétractation,

- dès la conclusion du contrat de vente, le prix du mètre carré dans le secteur pouvait être vérifié par M. [J],

- l'équilibre financier de l'opération était connu depuis la première année de location du bien, le 8 mai 2009, or M. [J] n'a formulé de demande contre la société Tagerim promotion en qualité de mandataire ad hoc du promoteur que par assignation du 18 mai 2016,

- en outre, les demandes formulées contre elle sont irrecevables faute d'intérêt à agir car les sociétés Tagerim impliquées dans l'opération ne sont pas celle assignée et la société Tagerim promotion n'était pas débitrice d'une obligation d'information et de conseil envers M. [J],

- aucune demande n'est formulée contre la société Tagerim promotion en son nom propre alors que c'est en cette qualité qu'elle a été intimée par la déclaration d'appel,

- M. [J] n'a pas d'intérêt à agir contre la société Tagerim promotion en sa qualité de mandataire ad hoc du promoteur car il n'est pas demandé à la cour de constater de manquement de la société Tagerim promotion en cette qualité,

- M. [J] n'a pas d'intérêt à agir contre la société Tagerim promotion en qualité d'ancien associé du promoteur alors qu'il ne l'a jamais assigné en cette qualité, qu'elle n'est pas intervenue à la procédure en cette qualité, et aucune faute ne lui est imputée en qualité d'ancien associé,

- le promoteur n'a pas d'obligation d'information quant à l'opportunité de l'acquisition du bien, et les caractéristiques fiscales de l'opération,

- l'obligation d'information est une obligation de moyens qui suppose la preuve d'une faute du débiteur,

- l'acquéreur est tenu de s'informer sur le bien ou le service,

- la preuve d'un manquement à une obligation d'information du promoteur n'est pas rapportée par M. [J],

- le promoteur n'était pas présent lors du démarchage et n'a pas réalisé la simulation financière proposée par Optimum,

- il n'est pas établi que les charges de l'opération ont été sous évaluées,

- la surévaluation du bien lors de l'achat n'est pas démontrée,

- l'évolution du potentiel locatif ne relève pas d'une obligation d'information, outre que la garantie locative souscrite par l'acquéreur lui permettait de cerner les risques inhérents à l'investissement locatif, et le caractère aléatoire de l'opération,

- la présentation de la commune de [Localité 10] d'Entraygues faite dans la brochure n'est pas trompeuse,

- M. [J] a bénéficié de loyers et d'un avantage fiscal sur les revenus du bien indépendamment de la déduction fiscale d'une partie du prix d'achat du bien,

- le vendeur n'est pas tenu d'une obligation d'information relativement à l'estimation du potentiel locatif du bien et d'une étude de marché locatif,

- le promoteur n'a remis aucune brochure aux acquéreurs, la brochure ayant été éditée par la société Tagerim et remise par le Cabinet optimum,

- aucun document ne fait état d'une garantie d'investissement ou d'une promesse de loyers, les informations étaient claires et sans ambiguïté,

- l'estimation produite par M. [J] démontre une évolution du marché immobilier entre 2007 et 2013,

- la simulation réalisée par Optimum indique expressément ne pas avoir de valeur contractuelle.

La Sarl Cabinet Optimum qui a été régulièrement assignée devant la cour d'appel de Toulouse par dépôt de l'acte en l'étude de l'huissier n'a pas constitué avocat.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

1. M. [J] demande à la cour de déclarer recevables ses actions dirigées contre la Sas Tagerim promotion en qualité de mandataire ad hoc et associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, la société Cabinet Optimum et la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne.

2. Selon l'article 2270-1 du code civil en sa rédaction applicable à la date de l'acte de vente « les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par 10 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ». L'article 2224 du code civil, en vigueur à compter de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile dispose désormais que 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'. La loi du 17 juin 2008 précitée n'a pas eu pour effet de modifier le point de départ du délai de la prescription extinctive ayant commencé à courir antérieurement à son entrée en vigueur (Civ. 3e, 16 sept. 2021, n° 20-17.625).

Le dommage résultant d'un manquement à l'obligation précontractuelle d'information et de conseil peut soit consister en la perte de chance de ne pas contracter qui se manifeste dès la conclusion du contrat envisagé; soit consister en la perte de chance d'éviter le risque qui s'est réalisé, qui se manifeste lors de la réalisation de ce risque, à moins que l'emprunteur ne démontre qu'il pouvait, à ces dates, légitimement ignorer ces dommages. 

- Sur l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de la Sarl Cabinet optimum et la Sasu Tagerim promotion en sa qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues :

3. M. [J] sollicite la condamnation de la société Cabinet optimum et de la Sccv Les coteaux d'Entraygues représentée par la Sasu Tagerim, mandataire ad hoc, en raison de l'engagement de leur responsabilité pour manquement à leur devoir d'information et de conseil relativement aux perspectives de valorisation du bien au terme de l'engagement et aux informations théoriques de l'étude financière concernant le loyer garanti, l'économie fiscale, le contexte défavorable de construction de logements et le risque d'un prêt en devises.

3.1. S'agissant de la responsabilité de la Sarl Cabinet Optimum, il convient préalablement de rappeler que selon l'article 472 du code de procédure civile, le juge ne fait droit à la demande, en l'absence du défendeur, que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

- S'agissant de la recevabilité de l'action :

3.2.1 Dans l'hypothèse d'un investissement non rentable d'un point de vue locatif, le dommage se réalise lors de la vente mais n'est susceptible de se révéler qu'à l'issue d'une période de vacance locative significative et non couverte par l'assurance ou de la conclusion d'un contrat de bail moyennant paiement d'un loyer nettement inférieur au montant envisagé dans l'étude d'investissement.

Par annexe au contrat de mandat de gestion locative signé le 2 novembre 2008 par M. [J], la société Tagerim a consenti une garantie vacance locative de 12 mois dans le cadre de la première mise en location, de 6 mois ensuite. Par contrat d'assurance signé le 1er août 2010, M. [J] a souscrit une assurance vacance locative applicable pour une durée maximum de 6 mois de loyers de référence par sinistre.

M. [J] affirme que le bien a été livré le 12 février 2009, sans que cette information ne soit contestée par les autres parties à l'instance.

Un peu moins de trois mois plus tard, par contrat de bail conclu le 8 mai 2009, le logement a été loué moyennant paiement d'un loyer de 420 euros hors charges, et ce, jusqu'au 7 mai 2012 selon les dires de l'appelant, étant précisé que dans l'étude d'investissement réalisée le 23 juillet 2007, il était envisagé un loyer de 455 euros.

Ni la période de vacance locative de moins de trois mois, ni le loyer inférieur de 35 euros au loyer envisagé dans l'étude d'investissement ne peuvent être considérés comme révélant une éventuelle absence de rentabilité de l'investissement locatif.

Après une période de vacance locative de trois mois, le bien a fait l'objet d'une location du 18 août 2012 au 1er avril 2014 moyennant paiement d'un loyer mensuel hors charges de 385 euros.

La perception d'un loyer inférieur de 70 euros par rapport au loyer prévu dans l'étude d'investissement, et représentant plus de 15%, soit 1/6ème du montant du loyer indiqué dans ladite étude doit être considéré comme significatif.

C'est donc à compter du 18 août 2012 que le délai de prescription de l'action en responsabilité pour manquement au devoir d'information sur la rentabilité locative a commencé à courir.

3.2.2 S'agissant de la valeur de l'immeuble acquis, si le dommage lié à l'absence d'information sur la valeur réelle de l'immeuble est né au jour de la vente, celui-ci est susceptible de n'être révélé à l'acquéreur qu'après l'expiration du délai de 9 ans de location continue du bien pour le bénéfice des avantages fiscaux poursuivi par l'opération immobilière et ayant couru à compter de la date de première location ayant suivi la livraison du bien (8 mai 2009) soit au plus tard le 8 mai 2018.

Toutefois, M. [J] a fait réaliser une estimation de son bien le 5 juillet 2013 par la société Square habitat [Localité 9] qui a estimé le bien pour une valeur de 57 044 euros.

C'est donc à compter de cette date que le délai de prescription relativement à ce dommage est susceptible d'avoir couru.

3.2.3 S'agissant du risque du prêt en franc suisses, le dommage lié à l'absence d'information sur ce risque est né et connu au jour de la conclusion du contrat de prêt s'agissant du taux de change entre le prix d'acquisition en euros et le capital prêté en francs suisses, en présence d'un emprunteur percevant ses revenus en francs suisses mais résident français, et au jour de la première variation significative s'agissant du taux d'intérêt variable.

En l'espèce, par offre du 11 octobre 2007, acceptée par M. [J] le 24 octobre 2007, la société anonyme coopérative à capital variable (Saccv) Banque populaire d'Alsace a proposé la conclusion d'un contrat de prêt immobilier en devises portant sur la somme de 239 774 CHF (francs suisses) sur une durée de 264 mois au taux d'intérêt « donné à titre indicatif » de 3,6%, et remboursable en 24 échéances mensuelles de 717 CHF puis 240 échéances mensuelles de 1 398,42 CHF.

Il est indiqué à l'offre de prêt que « le taux des intérêts du prêt se compose :

- d'une partie variable, dénommée Tchf3 égale à la moyenne des taux quotidiens de Libor trois mois francs suisses écoulé. Ce taux est calculé avec trois décimales.

- d'une marge fixe : +0,8%.

Le taux résultant de ce calcul est applicable à partir du 6ème jour du mois.

Le taux des intérêts effectivement appliqué lors de la mise à disposition du prêt tiendra compte du Tchf3 en vigueur à la date d'effet du prêt ».

« Révision du taux : Les révisions de taux s'effectueront trimestriellement à compter de la date d'effet du prêt. Le taux des intérêts sera révisé tant à la hausse qu'à la baisse ('). Dans le cas où le taux est modifié, l'emprunteur reçoit un relevé annexe lui précisant les caractéristiques des modifications apportées ».

Il est indiqué dans un tableau que le montant des intérêts est de 113 828 CHF en application du taux de 3,6% et que le coût total du crédit s'élève à 355 075,68 CHF. « Le coût total du crédit a été calculé en fonction du montant nominal en CHF du prêt. Le montant exact sera défini au moment du déblocage des fonds et en fonction du cours du francs suisses existant à cette date ».

En l'espèce, le prêt a été contracté en franc suisses, le montant du capital prêté et les échéances mensuelles sont stipulées en francs suisses, avec indexation du taux d'intérêt sur les taux de Libor francs suisses, correspondant au taux d'intérêt auquel les banques se prêtent mutuellement de l'argent.

C'est à tort que M. [J] évoque la législation et la jurisprudence relatives aux « prêts en devises étrangères », en vertu desquels la devise étrangère est la monnaie de compte et l'euro est la monnaie de paiement des échéances avec pour effet de faire peser le risque de change sur l'emprunteur.

En l'espèce, la monnaie de compte est le franc suisse et la monnaie de paiement est le franc suisse.

M. [J] qui percevait, lors de l'acquisition, des revenus en francs suisses n'a subi le taux de change EUR/CHF que lors de l'acquisition du bien et du déblocage total du capital, puisque le prix de vente a été converti en franc suisse pour déterminer le montant du crédit. Mais depuis lors, il rembourse en francs suisses un prêt en franc suisse.

Le risque de conclusion d'un prêt en francs suisses pour l'acquisition d'un bien vendu en euros est né au jour de conclusion du contrat de vente le 22 janvier 2008 et était nécessairement connu de M. [J], résident français percevant des revenus suisses depuis 2003 tel que cela ressort de la pièce n° 1 produite par le prêteur.

Le risque tenant au taux d'intérêt, variable et indépendant du taux de change EUR-CHF puisque déterminé selon le Libor trois mois francs suisses a été connu de M. [J], non pas lors de la conclusion du contrat de prêt qui ne l'informe pas de ces risques, mais lors de la première variation significative du taux d'intérêt, à la hausse ou à la baisse, telle que communiquée par la banque par courrier du 6 novembre 2009, l'échéance mensuelle passant à 211,67 CHF au lieu de 717 CHF.

3.2.4 Il résulte du tout, que c'est au plus tard le 5 juillet 2013, que le dommage invoqué par M. [J] s'est manifesté, dans sa globalité, sur la base des faits qui le conduisent à rechercher aujourd'hui la responsabilité de la société Cabinet Optimum en tant que commercialisateur et la Sccv Les coteaux d'Entraygues pour manquements à leur obligation d'information et de conseil de sorte que le délai pour agir en responsabilité résultant des dispositions de l'article 2224 du code civil susvisé expirait consécutivement au plus tard le 5 juillet 2018, de sorte qu'à la date de l'assignation le 5 janvier 2015 à l'encontre de la société Cabinet Optimum, d'une part, et le 7 décembre 2016 à l'encontre de la Sasu Tagerim promotion en qualité de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, d'autre part, son action en responsabilité n'était pas prescrite, le jugement entrepris devant être réformé sur ce point.

3.2.5. S'agissant de la fin de non-recevoir spécialement soulevée par la Sasu Tagerim promotion en sa qualité d'associé, elle soutient qu'elle n'était tenue d'aucune obligation d'information à son encontre en sa qualité de tiers à l'opération d'investissement, et qu' aucune demande n'est formulée à son encontre « prise en son nom propre ».

Cependant, dans la déclaration d'appel, il est fait référence à la Sasu Tagerim promotion « prise en son nom propre et en qualité de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues », or le fait d'être visée en son nom propre inclut sa qualité d'associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues. Dans les premières conclusions transmises à la cour par M. [J] le 8 juillet 2021, la Sasu Tagerim promotion est visée « en qualité de mandataire ad hoc et d'associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues » et dans le dispositif des conclusions il est demandé à la cour de condamner la Sas Tagerim promotion « prise en qualité de mandataire ad hoc et d'associée de la Sccv Les coteaux d'Entraygues ».

La société Tagerim promotion demande à la cour de juger que M. [J] formule uniquement des demandes de condamnation à l'égard de la société Tagerim es qualité de mandataire ad hoc ou d'ancien associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues sans solliciter que sa responsabilité soit engagée.

Par ordonnance du 7 avril 2016, le président du tribunal de grande instance d'Angoulême a nommé la Sasu Tagerim promotion en qualité de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues dans le cadre de l'instance qui l'opposait à M. [J].

Il n'est nullement nécessaire de prouver une faute du mandataire ad hoc d'une société si c'est la responsabilité de cette dernière qui est recherchée, ce qui est bien le cas en l'espèce, et non pas une action en responsabilité dirigée contre le mandataire en raison d'une exécution défectueuse de sa mission.

En outre, en vertu de l'article 1857 du code civil, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à l'égard des tiers à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements.

L'obligation aux dettes sociales s'attache de plein droit à la qualité d'associé de société civile et n'est nullement subordonnée à l'engagement de la responsabilité de l'associé par la preuve d'une faute qui lui serait imputable.

Les fins de non-recevoir soulevées par la société Tagerim promotion prise en sa qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues doivent donc être rejetées.

Les actions en responsabilité dirigées contre la Sarl Cabinet optimum et la Sasu Tagerim promotion sont recevables et le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse sera infirmé sur ce point.

- S'agissant du bien-fondé de l'action :

3.3. En ce qui concerne la responsabilité du commercialisateur, il doit être rappelé que l'obligation d'information du commercialisateur d'un bien immobilier bénéficiant d'avantages fiscaux consiste à porter à la connaissance du client, actuel ou futur, des informations objectives sur les caractéristiques de l'investissement qu'il lui est proposé de réaliser afin que celui-ci puisse se faire une idée suffisamment précise du bien ou du service pour pouvoir s'engager en toute connaissance de cause. Cette obligation d'information doit être exécutée avec neutralité, exactitude et loyauté sans éluder les caractéristiques les moins favorables du produit et les risques inhérents au placement choisi. Elle est due, peu important que le client soit ou non averti, sous réserve des seules informations nécessairement connues de lui.

S'il appartient au commercialisateur de démontrer l'acquittement de son devoir d'information et de conseil, celui-ci doit s'analyser à l'aune de l'opération projetée.

Une étude d'investissement a été réalisée le 23 juillet 2007 au profit de M. [J] sans indication de l'identité du rédacteur.

Cette étude présente les dispositifs Robien recentre et Borloo populaire, puis  l'investissement personnalisé dans le cadre du programme Les coteaux d'Entraygues sous le régime Borloo. Il est indiqué « document non contractuel » et que le de l'opération est de 142 000 euros dont 7 100 euros de frais d'acte, la revalorisation du bien est estimée à 1% par an, que les revenus locatifs mensuels sont de 455 euros avec une revalorisation estimée à 1,50%, et un capital constitué au terme de 162 974 euros représentant la valeur du bien immobilier.

Tel que cela résulte des pièces qu'il produit devant la cour, M. [J] avait en vue une opération de défiscalisation. L'acquisition d'un immeuble pour une telle opération ne peut être seulement appréhendée pour ce qu'elle est, mais comme étant le support d'un investissement financier se déployant en plusieurs éléments formant un tout. Or, M. [J] querelle la rentabilité vénale et locative de l'opération ainsi que les conditions du prêt sans toutefois imputer au commercialisateur la perte ou l'insuffisance de l'avantage fiscal escompté. Il ne considère donc son investissement que du point de vue de l'acquisition immobilière à des fins de location.

À ce titre, l'étude d'investissement réalisée le 23 juillet 2007, sans indication de la société qui l'a établi, n'avait pas de caractère contractuel et prenait en compte les éléments personnels de l'acquéreur et une valorisation de l'immeuble à la vente et à la location sans qu'il soit démontré que les informations ayant servi de base à leur élaboration soient contredites par des données dissimulées ou non aisément accessibles par l'acquéreur. En outre, au cours de trois premières années de location, le bien a été loué pour un loyer proche de celui estimé dans l'étude d'investissement, à savoir pour un loyer de 420 euros au lieu de 455 euros, et ce du 8 mai 2009 au 7 mai 2012.

Le risque de perte de valeur vénale des biens acquis dans les années qui suivent la vente en raison d'une crise immobilière et de la fluctuation du marché est inhérent à tout achat immobilier et ne peut être ignoré de l'acquéreur au moment où l'opération est souscrite. En outre, M. [J] produit une estimation réalisée en 2013, soit 5 ans après l'acquisition et la crise immobilière de 2008.

M. [J] soutient que le parc locatif était déjà très développé sur la commune de [Localité 10] avant la commercialisation alors que la population diminuait, ce qui aurait eu une incidence sur la rentabilité locative du bien. Il produit à ce titre une analyse de statistiques Insee pour la période de 1990 à 1999 (pièce 35 visée qui est en fait une fiche de l'Insee consistant en un résumé statistique des données démographiques et économique pour la commune d'[Localité 9] pour l'année 2011 accrochée à un courrier de la société Tagerim du 15 mai 2009 qui lui est étranger), or le contrat de vente a été conclu en 2008, de sorte que les données établies neuf ans plus tôt ou trois ans plus tard ne peuvent être considérées comme probantes. En outre, la présentation favorable d'un investissement immobilier n'est pas en soi une faute, à défaut de démontrer que le commercialisateur disposait de connaissances sur l'état du marché qui rendaient son analyse trompeuse et que l'acquéreur ignorait légitimement.

Les éléments communiqués dans le cadre de l'opération litigieuse laissaient à M. [J], une liberté d'analyse de l'opportunité des acquisitions envisagées au regard de l'objectif de défiscalisation poursuivi et des données basiques et aisément accessibles sur l'état du marché immobilier.

Enfin, il ne saurait être reproché au commercialisateur l'absence d'information sur les risques du prêt.

En effet, si l'étude d'investissement indique les revenus nets imposables de M. [J], fait référence à un financement de l'acquisition immobilière via un prêt de 142 000 euros conclu en francs suisses au taux de 3,5% sur 240 mois, et propose des calculs relatifs aux dépenses et recettes mensuelles moyennes, il s'agit seulement d'une hypothèse, le contrat de prêt n'étant pas conclu par le biais du commercialisateur. Le fait de chiffrer les montants, nécessairement approximatifs, du taux d'intérêt et des mensualités de remboursement, n'entraîne pas à la charge du commercialisateur, une obligation de s'assurer de la capacité de remboursement de l'emprunteur, ou de le mettre en garde contre les risques engendrés par la conclusion d'un contrat prêt, cette obligation incombant au prêteur de deniers.

En outre, M. [J] percevant des revenus en francs suisses alors qu'il habitait en France, ne nécessitait pas de mise en garde particulière sur le risque de change pesant naturellement sur l'achat d'un bien immobilier situé en France à l'aide d'une devise étrangère.

La demande de condamnation dirigée contre la Sarl Cabinet optimum par M. [J] sera en conséquence rejetée.

3.4 S'agissant spécifiquement de l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de la Sasu Tagerim promotion, prise en sa qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, celle-ci suppose de statuer sur la responsabilité de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, vendeur des biens litigieux.

En effet, en vertu des articles 1857 et 1858 du code civil, le créancier social dispose d'une action contre les associés de la société dissoute.

L'obligation aux dettes sociales suppose la démonstration de trois conditions : la qualité d'associé, l'existence d'une dette de la société à l'encontre du demandeur et une vaine et préalable poursuite de la société sont les trois conditions de l'obligation aux dettes sociales de l'associé de société civile.

La qualité d'associé de la Sasu Tagerim promotion au sein de la Sccv Les coteaux d'Entraygues est établie par l'extrait k-bis du promoteur produit en pièce 37 par l'appelant.

S'agissant des vaines poursuites à l'encontre de la Sccv Les coteaux d'Entraygues, il convient de rappeler que si la personnalité morale d'une société dissoute subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés, la clôture de la liquidation dispense le créancier d'établir que le patrimoine social est insuffisant pour le désintéresser (3ème Civ., 10 février 2010, pourvoi n° 09-10.982).

La Sccv Les coteaux d'Entraygues a été dissoute à compter du 15 septembre 2012, ses opérations de liquidation ont été clôturées le 30 septembre 2012, et sa radiation au registre du commerce et des sociétés a été publiée le 15 novembre 2012. Il n'est donc pas nécessaire d'établir la preuve d'actions en paiement dirigée contre la société promoteur pour agir contre l'associé.

Il faut enfin rapporter la preuve d'une dette de la société à l'endroit du demandeur qui agit contre l'associé au titre de son obligation aux dettes sociales.

À ce titre, la Sasu Tagerim promotion a été nommée en qualité de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues pour représenter le promoteur dans le cadre de l'action engagée par M. [J] l'encontre de ce dernier.

M. [J] soutient que la Sccv Les coteaux d'Entraygues est responsable des fautes imputées au commercialisateur, en raison des informations biaisées relatives à la valeur vénale et locative du bien, de l'absence d'information sur les caractéristiques de l'investissement proposé et les risques encourus, sur l'état du marché local.

La responsabilité de la Sccv Les coteaux d'Entraygues ne saurait être retenue en sa qualité de mandant, dès lors que, aucune faute n'a été retenue à l'encontre de la Sarl Cabinet Optimum.

S'agissant de la valeur vénale, il convient de rappeler qu'aucune obligation d'information précontractuelle n'est due sur l'estimation de la valeur de la prestation. Le promoteur n'a donc pas à informer son cocontractant sur le prix de vente du bien immobilier, qui, dès lors que le contrat de vente a été conclu au prix retenu, a été accepté par l'acheteur.

En outre, aucune man'uvre frauduleuse n'est alléguée et démontrée relativement à des qualités essentielles du bien vendu qui aurait entraîné une erreur sur la valeur du bien au détriment de l'acheteur.

M. [J] produit une estimation de l'appartement qui date de 2013 alors que le bien a été acquis en janvier 2008. Aucune surévaluation du bien n'est donc établie en l'espèce, étant précisé que la baisse significative de la valeur d'un bien immobilier dépend de nombreux facteurs et que le maintien de sa valeur initiale ou d'une valeur supérieure au terme de la période de location obligatoire est aléatoire.

Enfin, le devoir de vigilance oblige l'acquéreur à faire preuve d'une certaine curiosité au moment de la vente. Ainsi, il doit effectuer une vérification élémentaire qui est de se renseigner sur le prix moyen au mètre carré, tant à la location qu'à la vente, dans le secteur du bien litigieux. Cette simple démarche facilement réalisable permet à l'investisseur de disposer des éléments tendant à confirmer ou non les informations communiquées lors de la signature du contrat de réservation.

S'agissant de la rentabilité locative de l'immeuble vendu, celle-ci n'a été évoquée qu'entre la société Tagerim investissement et M. [J], qui sont les réservant et réservataire dans le cadre du contrat de réservation conclu le 23 juillet 2007 et auquel la Sccv Les coteaux d'Entraygues n'est pas partie.

L'acte authentique de vente conclu le 22 janvier 2008 entre la Sccv Les coteaux d'Entraygues et M. [J] ne fait aucune référence à la rentabilité locative de l'appartement, ne stipule aucun loyer ni n'évoque la nécessité de louer le bien, ou le dispositif fiscal dont le bénéfice est recherché par l'acheteur. Aucune obligation d'information sur la rentabilité locative ne saurait en conséquence être mise à la charge du promoteur.

Enfin, la Sccv Les coteaux d'Entraygues n'étant pas partie au contrat de prêt conclu par M. [J] avec la Banque populaire d'Alsace, elle n'était pas tenue de mettre en garde l'acquéreur contre les risques présentés par la nature du prêt souscrit et ses modalités de remboursement, cette obligation n'incombant qu'au prêteur et à l'éventuel courtier en financement intervenu dans l'opération.

Ainsi, la Sccv Les coteaux d'Entraygues n'engage pas sa responsabilité à l'égard de M. [J].

En l'absence de dettes sociales, la Sasu Tagerim promotion, associé de la Sccv Les coteaux d'Entraygues ne peut être condamnée à indemniser M. [J] à hauteur des droits sociaux qu'elle possédait au sein de la Sccv Les coteaux d'Entraygues.

L'action dirigée par M. [J] à l'encontre de la Sasu Tagerim promotion prise en sa qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues doit en conséquence être rejetée.

- Sur l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne :

4. M. [J] sollicite la condamnation de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne fondée sur l'engagement de sa responsabilité pour manquement à son obligation d'information et de mise en garde contre les risques de variation du taux d'intérêt et d'augmentation du capital emprunté et la non-adaptation du prêt en devises à ses besoins.

- S'agissant de la recevabilité de l'action :

4.1. Il convient de rappeler que le dommage résultant d'un manquement du banquier à son obligation d'information, de mise en garde ou de conseil, qui consiste en une perte de chance de ne pas contracter ou d'éviter le risque qui s'est réalisé, se manifeste à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Ainsi qu'il a été jugé au paragraphe 3.2., le risque de conclusion d'un prêt en francs suisses pour l'acquisition d'un bien vendu en euros, et le préjudice de perte de chance résultant du caractère éventuellement inadapté du crédit à la situation de l'emprunteur sont nés le jour de conclusion du contrat de vente le 22 janvier 2008 et étaient nécessairement connus de M. [J], résident français percevant des revenus suisses depuis 2003 et, de la sorte, rompu aux opérations de conversion franc suisse-euro.

Le risque tenant au taux d'intérêt, variable et indépendant du taux de change EUR-CHF puisque déterminé selon le Libor trois mois franc suisse a été connu de M. [J], non pas lors de la conclusion du contrat de prêt qui ne l'informe pas de ces risques, mais lors de la première variation significative du taux d'intérêt, à la hausse ou à la baisse, telle que communiquée par la banque par courrier du 6 novembre 2009, l'échéance mensuelle passant à 211,67 CHF au lieu de 717 CHF.

4.2 Il résulte du tout, qu'au plus tard le 6 novembre 2009, le dommage invoqué par M. [J] s'est manifesté, dans sa globalité, sur la base des faits qui le conduisent à rechercher aujourd'hui la responsabilité de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne pour manquement à son obligation d'information et de conseil de sorte que le délai pour agir en responsabilité résultant des dispositions de l'article 2224 du code civil susvisé expirait consécutivement au plus tard le 6 novembre 2014, de sorte qu'à la date de l'assignation délivrée le 23 décembre 2014 à l'encontre du prêteur de deniers, son action en responsabilité délictuelle était prescrite, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.

- Sur les dépens et frais irrépétibles :

5. Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a mis les dépens de première instance à la charge de M. [J] et rejeté les demandes présentées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

6. M. [J], partie principalement perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamné aux dépens d'appel.

7. Il sera, en outre, condamné à verser la somme de 1 000 euros à la Sasu Tagerim promotion en qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues ainsi que la somme de 1 000 euros à la Saccv Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Tenu aux dépens, M. [J] ne peut qu'être débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Toulouse seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable pour cause de prescription l'action introduite par M. [J] fondée sur l'existence d'un manquement à une obligation d'information, de conseil ou de mise en garde de la Sarl Cabinet optimum et de la Sasu Tagerim promotion en qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues.

Le confirme pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable l'action en responsabilité fondée sur l'existence d'un manquement à une obligation d'information, de conseil ou de mise en garde de la Sarl Cabinet optimum et de la Sasu Tagerim promotion en qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues.

Au fond, la rejette.

Condamne M. [L] [J] aux dépens d'appel.

Condamne M. [L] [J] à payer la somme de 1 000 euros à la Sasu Tagerim promotion en qualité d'associé et de mandataire ad hoc de la Sccv Les coteaux d'Entraygues ainsi que la somme de 1 000 euros à la Saccv Banque populaire Alsace Lorraine Champagne venant aux droits de la Banque populaire d'Alsace sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Rejette la demande formée par M. [L] [J] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/01912
Date de la décision : 13/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-13;21.01912 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award