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06/06/2023 | FRANCE | N°21/03269

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 06 juin 2023, 21/03269


06/06/2023



ARRÊT N°



N° RG 21/03269

N° Portalis DBVI-V-B7F-OJLC

CR / RC



Décision déférée du 25 Juin 2021

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE 19/02420

MME [G]

















E.U.R.L. NRGEO





C/



SCCV CARLE VERNON





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SIX JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



E.U.R.L. NRGÉO

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 515 221 521, prise en la...

06/06/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/03269

N° Portalis DBVI-V-B7F-OJLC

CR / RC

Décision déférée du 25 Juin 2021

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE 19/02420

MME [G]

E.U.R.L. NRGEO

C/

SCCV CARLE VERNON

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SIX JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

E.U.R.L. NRGÉO

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 515 221 521, prise en la personne de son gétant en exercice Monsieur [W] [S]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Edouard JUNG, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.C.C.V CARLE VERNON

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 822 793 444, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

Représentée par Maître Jean-Manuel SERDAN, avocat de la SELARL Cabinet JM SERDAN, avocat au barreau de Toulouse

Avocat au Barreau de TOULOUSE,

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par R. CHRISTINE, faisant fonction de greffier de chambre.

OBJET DU LITIGE ET PROCÉDURE

La Sccv Carle Vernon a entrepris l'édification d'un programme immobilier dénommé [Adresse 5] (31). La maîtrise d''uvre était assurée par la Sarl Sequences.

Suivant acte d'engagement du 18 août 2017, la Sccv Carle Vernon a confié à I'Eurl Nrgéo le lot N°8 Cvc/ Plomberie, pour un montant global et forfaitaire de 480.000 euros TTC.

Les délais d'exécution étaient fixés selon un planning expressément joint à cet acte.

La réception est intervenue suivant procès-verbal du 1er février 2019, avec réserves.

Les logements constituant la résidence ont été commercialisés par la Sccv Carle Vernon.

Un différend financier est né quant aux comptes du marché de I'Eurl Nrgéo, cette dernière réclamant à la Sccv Carle Vernon le paiement de factures, tandis que le maître d'ouvrage lui réclamait le paiement de pénalités de retard.

Par acte d'huissier du 22 juillet 2019, I'Eurl Nrgéo a fait assigner la Sccv Carle Vernon devant le tribunal judiciaire de Toulouse afin d'obtenir le paiement de la somme principale de 51.415,91 € outre 15.000 € à titre de dommages et intérêts complémentaires.

Par jugement contradictoire du 25 juin 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- condamné la Sccv Carle Vernon à payer à I'Eurl Nrgéo la somme de 23.151 ,53 euros Ttc au titre de sa créance actualisée au 21 février 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019 ;

- débouté I'Eurl Nrgéo de sa demande de dommages et intérêts complémentaire ;

- condamné I'Eurl Nrgéo à payer à la Sccv Carle Vernon les sommes de :

* 31.289,03 euros Ttc au titre des pénalités de retard,

* 8.206,77 euros au titre des pénalités versées aux acquéreurs en raison du retard imputable à I'Eurl Nrgéo ;

- condamné I'Eurl Nrgéo aux dépens de l'instance ;

- condamné I'Eurl Nrgéo à payer à la Sccv Carle Vernon la somme de 3.000 euros au titre de I'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour statuer ainsi, le premier juge, s'agissant de la demande principale en paiement, a retenu que le marché forfaitaire de l'Eurl Nrgéo avait été porté par avenants à 401.141,3 € Ht soit 481.369,63 € Ttc et que restaient impayées la situation n° 14 du 24 janvier 2019 référencée 2593 pour 15.940,75 € Ttc et la situation n° 15 du 21 février 2019 référencée 2610 pour 7.210,78 € correspondant à l'état d'avancement des travaux conformément au marché. Pour le surplus, il a retenu que les 3 factures n°s 2642, 2643 et 2644 établies les 16 et 17 mars 2019 pour un total de 2.988 € TTC concernant des prestations de débouchage et curage de canalisations ainsi que de carottages n'étaient accompagnées ni de devis ni d'ordre de service signé du maître de l'ouvrage ou de l'un de ses mandataires et ne pouvaient caractériser une créance. Il a estimé qu'il n'était pas justifié par l'Eurl Nrgéo d'un préjudice distinct du retard de paiement justifiant des dommages et intérêts complémentaires en sus des intérêts moratoires alloués.

Concernant les demandes reconventionnelles de la Sccv Carle Vernon, au vu du planning général accepté portant le tampon de l'Eurl Nrgéo et retenant un retard d'exécution incombant à cette dernière sur 13 jours du 18 janvier 2019, date à laquelle la réception des travaux a été refusée, au 1er février 2019, date à laquelle la réception de nombreux logements avait été encore différée en raison de l'absence d'éléments déterminants de l'habitabilité, notamment de l'installation du chauffage, il a estimé conforme à l'article 30 du cahier des clauses administratives générales la somme réclamée par la Sccv à titre de pénalités de retard. Il a en outre retenu que la Sccv était fondée à solliciter des dommages et intérêts au titre des indemnités versées aux acquéreurs de lots au prorata du retard d'exécution imputable à l'Eurl Nrgéo

Par déclaration du 20 juillet 2021, l'Eurl Nrgéo a relevé appel de l'intégralité des dispositions de ce jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 26 janvier 2023, l'Eurl Nrgéo, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1104, 1231-2, 1353 du code civil, du Cctp et du marché 08, de :

- réformer la décision entreprise,

- dire n'y avoir lieu à sa charge l'imputation d'aucune pénalité de retard,

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la Sccv Carle Vernon la somme de 31.229,03 euros au titre des pénalités de retard et la somme de 8.206,77 euros au titre des pénalités versées aux acquéreurs,

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamnée au paiement de la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la Sccv Carle Vernon à lui payer

la somme de 23 151,53 euros au titre de situations dues,

Y rajoutant,

- condamner la Sccv Carle Vernon à lui payer la somme de 51.415,91 euros TTC correspondant à sa créance globale au titre du marché considéré avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019,

- débouter intégralement la Sccv Carle Vernon de ses demandes au titre des pénalités de retard et au remboursement de sommes versées à des acquéreurs dont elle n'est en rien responsable,

En tout état de cause,

- réduire à une somme nulle le montant de la clause pénale qui lui a été appliquée ,

Vu l'extraordinaire mauvaise foi de la Sccv Carle Vernon,

- condamner la Sccv Carle Vernon à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires,

Infiniment subsidiairement,

Vu les dispositions des articles 1101 et suivants du code civil, 9.5 de la norme Afnor NF

P03-001,

Vu l'absence de clause exclusive des dispositions applicables en vertu de cette norme,

- limiter en tout état de cause à 5% du montant du marché le montant des pénalités qui lui sont applicables soit la somme de 20 .036,58 euros,

- condamner la Sccv Carle Vernon au paiement de la somme de 5.000,00 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 20 février 2023, la Sccv Carle Vernon, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1351 et 1793 du code civil, et de l'acte d'engagement et de l'article 30 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes, ou en tous cas mal fondées,

A titre principal,

- débouter la société Nrgéo de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, en ce compris la demande de dommages et intérêts particulièrement infondée,

- confirmer en conséquence la décision entreprise, et notamment en ce qu'elle a condamné la société Nrgéo à lui verser la somme de 31.289, 03 euros TTC au titre des pénalités de retard, et de 8.206, 77 euros TTC au titre des sommes versées aux acquéreurs à la suite de l'impossibilité de livrer les lots dans les délais convenus, du fait de la société Nrgéo,

Y ajoutant,

- condamner la société Nrgéo à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Sorel, avocat sur son affirmation de droit.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 février 2023.

L'affaire a été examinée à l'audience du 13 mars 2023.

SUR CE, LA COUR :

1°/ Sur le solde du marché de travaux de la société Nrgéo

Selon les dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Selon celles de l'article 1793 du même code, lorsqu'un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut être demandé une augmentation de prix, ni sous prétexte de l'augmentation de la main-d'oeuvre ou des matériaux, ni sous celui de changements ou d'augmentation faits sur ce plan, si ces changements ou augmentations n'ont pas été autorisés par écrit et le prix convenu avec le propriétaire.

En l'espèce, selon acte d'engagement signé le 18 août 2017, la Sccv Carle Vernon a confié à la société Nrgéo l'exécution des travaux du lot n° 08 Cvc/Plomberie dans le cadre de la réalisation de bâtiments de logements situés [Adresse 6] (31) pour un montant global, forfaitaire, non révisable de 400.000 € HT, soit 480.000 € Ttc , prix forfaitaire s'entendant pour une réalisation conforme en tous points du cahier des clauses techniques particulières du dossier marché.

Le cahier des clauses administratives générales, document contractuel intégré au marché de travaux, précise en son article 9 que le prix global, forfaitaire, ferme, définitif, non révisable et non actualisable comprend notamment tous les travaux décrits ou non, nécessaires au complet et parfait achèvement ainsi qu'au bon fonctionnement des ouvrages et à leur conformité avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, compris toutes sujétions, finitions, raccords et nettoyages, les dépenses de toutes natures, quelle qu'en soient la dénomination, nécessaires à la réalisation de l'ouvrage et permettant la livraison des locaux dans des conditions normales d'habitabilité. L'article 9.3 précise qu'aucun travail supplémentaire ne pourra être réglé sans une demande et un accord écrit préalable du maître de l'ouvrage et sa matérialisation impérative par la signature d'un avenant. L'article 26 définit les modalités d'établissement et de présentation mensuelle des situations de travaux, précisant le pourcentage de la retenue de garantie ainsi que l'application d'une déduction supplémentaire de 5% pour la remise des DOE, du DGD, l'obtention du quitus de levée des réserves et du quitus du compte prorata. L'article 27 définit les modalités de paiement des travaux, par situation, après réception par le maître de l'ouvrage du certificat de paiement établi par le maître d'oeuvre, précisant que les paiements à effectuer seront liquidés sur la base des situations vérifiées, diminuées des règlements déjà effectués, de la retenue de garantie, des pénalités et de toutes sommes à la charge de l'entreprise. L'article 28 définit quant à lui les modalités du règlement définitif des comptes après réception, d'établissement, de notification et d'arrêté du décompte général définitif, précisant que le solde du paiement ne pourra être délivré qu'après vérification de la levée de toutes les réserves et une fois obtenu le rapport final du bureau de contrôle.

Les pièces produites au débat établissent que quatre avenants ont été signés postérieurement au marché initial entre la société Nrgéo et le maître de l'ouvrage à savoir :

- un avenant n°1 signé le 15 mai 2018 suite à devis du 6 avril 2018 concernant le remplacement de la baignoire par un receveur dans quatre logements pour un coût supplémentaire de 878,11 € Ttc (731,76 € Ht)

- un avenant n° 2 signé le 7 août 2018 suite à divers devis de juillet 2018, comportant des plus values et moins values, pour 329,50 € Ht, soit 395,40 € Ttc,

- un avenant n° 3 signé le 25 août 2018 suite à devis du 17 septembre 2018 relatif à une moins value de 176,15 € Ht soit 211,38 € Ttc

- un avenant n°4 signé le 7 novembre 2018 suite à devis du 26 septembre 2018 relatif à une plus value de 256,25 € Ht, soit 307,50 € Ttc.

Compte tenu de ces divers avenants le marché était porté au 7 novembre 2018 à 401.141,36 € Ht, soit 481.369,63 € Ttc.

La société Nrgéo a adressé mensuellement plusieurs situations de travaux au fur et à mesure de l'avancement des travaux (pièce 15) :

- situation n° 1 du 20/11/2017 pour 10.525,89 € HT, soit 12.631,07 € Ttc ayant donné lieu à certificat de paiement signé par le maître d'oeuvre de l'opération, la Scp d'architecture Séquences le 27 novembre 2017,

- situation n°2 du 19 janvier 2018 pour 7.886,37 € Ht, soit 9.463,64 € Ttc ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 24 janvier 2018,

- situation n° 3 du 20 février 2018 pour 16.917,39 € Ht soit 20.300,87 € Ttc ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 27 février 2018,

- situation n° 4 du 22/03/2018 pour 18.136,40 € Ht soit 21.763,68 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 3 avril 2018,

- situation n°5 du 18/04/2018 pour 15.618,17 € Ht soit 18.741,80 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 27 avril 2018,

- situation n° 6 du 22/05/2018 pour 29.825,95 € Ht soit 35.791,14 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 29/05/2018,

- situation de travaux n°7 du 21/06/2018 pour 28.586,64 € Ht soit 34.303,97 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 27/06/2018,

- situation de travaux n°8 du 20 juillet 2018 pour 26.799,39 € Ht soit 32.159,27 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 3/08/2018,

- situation de travaux n° 9 du 25/08/2018 pour 24.771,45 € Ht soit 29.725,74 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 10/09/2018,

- situation n°10 du 25/09/2018 pour 70.787,59 € Ht, soit 84.945,11 € Ttc, intégrant les avenants n°1 et 2, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 2/10/2018,

- situation n° 11 du 25/10/2018 pour 42.274,24 € Ht soit 50.729,09 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 7/11/2018,

- situation n°12 du 26/11/2018 pour 33.832,97 € Ht soit 40.599,56 € Ttc, intégrant les avenants n°s 3 et 4, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 4/12/2018,

- situation de travaux n°13 du 13 décembre 2018 pour 34.833,50 € Ht soit 41.800,20 € Ttc, ayant donné lieu à certificat de paiement dudit maître d'oeuvre du 18/12/2018.

Au 18/12/2018 avaient donc été exécutés et validés un total de travaux pour 360.795,95 € Ht sur un montant du marché, y compris avenants acceptés, de 401.141,36 € Ht, sur lesquels avaient été effectivement réglés les certificats de paiement 1 à 12 soit 334.417,30 € Ht et restait à régler effectivement le certificat de paiement 13 validé par le maître d'oeuvre pour 34.833,50 € HT.

Le 24 janvier 2019 l'Eurl Nrgéo a établi une situation de travaux n°14 pour 13.283,96 € Ht soit 15.940,75 € Ttc, laquelle a donné lieu à un certificat de paiement du maître d'oeuvre pour son montant intégral le 20 février 2019 ainsi qu'il en est justifié en pièces 15 de l'appelante. Le montant total des travaux cumulés réalisés s'établissait à 374.079,91 € Ht sur un marché global de 401.141,36 € Ht, sur lequel avaient d'ores et déjà été réglés les certificats de paiement 1 à 13 inclus représentant un total de 360.795,95 € Ht. Il restait donc dû sur les travaux effectivement réalisés au 24/01/2019, vérifiés par le maître d'oeuvre, la somme de 13.283,96 € Ht ou 15.940,75 € Ttc. Néanmoins, le 1er/03/2019, le maître d'oeuvre établissait un certificat de paiement négatif de -15.348,28 Ttc, retenant à la charge de l'entreprise des pénalités de retard provisoires du 18/01 au 31/01/2019, soit sur 13 jours, représentant un total de 26.074,19 Ht soit 31.289,03 Ttc, dont le bien fondé sera examiné ci-dessous, et comptabilisant de manière erronée le montant Ttc du certificat de paiement n°11 dans la colonne réservée aux paiements Ht réalisés(50.729,09). L'absence de paiement du certificat de paiement n° 14 est confirmée par le mél du maître d'ouvrage du 3 avril 2019 estimant qu'au regard de l'application de pénalités de retard provisoires rien n'était dû au titre de la situation n° 14.

Le 21 février 2019 la société Nrgéo établissait une situation de travaux n°15 portant le montant des travaux effectivement réalisés à 380.088,89 € Ht. La réalisation de ces travaux a effectivement été vérifiée par le maître d'oeuvre selon le certificat de paiement du 28 mars 2019 produit en pièce 11 par la Sccv .Néanmoins ce certificat de paiement a fait ressortir un solde négatif, compte tenu des pénalités de retard imputées à l'entreprise pour 26.074,19 € Ht et d'une retenue pour prestations non réalisées sur l'avenant n° 4 d'un montant de 256,25 € Ht, le montant Ht des règlements réalisés suite aux certificats de paiement n°s 1 à 13 ressortant de manière exacte à 360.795,95 Ht.

Une réception avec réserves était intervenue contradictoirement entre les parties le 1er février 2019, dont l'original est produit en pièce 4 par l'appelante, intervenue avec réserves, le procès-verbal signé portant mention, s'agissant du lot chauffage incombant à la société Nrgéo, de 18 logements non livrables pour absence de chauffage, identifiés par leur numéros de lot et de bâtiment.

Le document intitulé « Annexe 2 -état des réserves des communs et des extérieurs » produit en pièce 4 par l'appelante ne peut manifestement pas constituer un état détaillé des réserves contradictoire. Il n'est en effet pas signé, le procès-verbal de réception, signé, comportant quant à lui uniquement deux pages numérotées 1 à 2 sans renvoyer à des annexes, et il fait référence à des dates de visites du 20 février 2019, soit postérieures à l'établissement du procès-verbal de réception contradictoire signé. S'il n'est pas justifié d'un procès-verbal contradictoire de levée de réserves, il résulte néanmoins des protocoles d'accord passés par la Sccv avec différents acquéreurs n'ayant pu prendre livraison de leurs appartements au 23 janvier 2019, notamment avec les acquéreurs des lots C21, A15, B42, B51, B25,A31, A35,A05,B02 mentionnés au procès-verbal contradictoire de réception du 1er février 2019 comme dépourvus de chauffage, que la Sccv s'est engagée à livrer lesdits appartements au plus tard le 22 février 2019 et a indemnisé les acquéreurs concernés pour la période d'absence de livraison. Il n'est justifié d'aucun défaut de livraison au delà du 22 février 2019 de sorte qu'il y a lieu de considérer que l'unique réserve concernant le fonctionnement du chauffage incombant à la société Nrgéo a nécessairement été levée dans l'intervalle.

Il ressort du tout que les travaux prévus au marché signé entre les parties ont été exécutés au 21 février 2019 par la société Nrgéo pour un total vérifié de 380.088,89 € Ht et que sur ce total la Sccv a effectivement réglé au vu des certificats de paiement 1 à 13 validés par le maître d'oeuvre d'exécution la somme totale de 360.795,95 Ht, soit un solde restant dû sur le montant des travaux effectivement réalisés de 19.292,94 € Ht représentant, Tva 20% en sus, une somme de 23.151,53 € Ttc telle que retenue par le premier juge, montant que la Sccv ne conteste pas.

Les factures de mai 2019 émises par la société Nrgéo concernant des interventions dites forfaitaires de débouchage-curage de canalisations et de carottage avec bouchon de tringlage sur le réseau d'assainissement qui n'ont fait l'objet d'aucune commande par devis préalable accepté et relèvent des sujétions du marché à forfait liant les parties ne peuvent justifier des sommes complémentaires.

Aucun décompte général et définitif établi dans les formes et délais prévus par le cahier des charges des clauses générales faisant la loi des parties n'étant justifié, celui produit en pièce 12 par l'appelante comme daté du 16/10/2019, date à laquelle l'assignation en paiement avait d'ores et déjà été délivrée, n'étant signé ni du maître de l'ouvrage, ni du directeur de travaux, le premier juge a donc justement retenu que la Sccv restait redevable au titre du marché ayant lié les parties envers la société Nrgéo d'une somme de 23.151,53 € Ttc au titre de la créance actualisée au 21 février 2019 outre intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019 date de l'assignation en paiement valant mise en demeure de payer, le surplus des demandes de l'Eurl Nrgéo devant être rejeté.

2°/ Sur les pénalités de retard

Selon l'article 15.2 du cahier des clauses administratives générales intégré au marché comme faisant la loi des parties :

- le délai contractuel d'exécution des travaux est défini comme celui à l'expiration duquel les travaux doivent être achevés et réceptionnés, comprenant les périodes de reprise des imperfections signalées lors de pré-réceptions,

- le marché doit prévoir un calendrier général définissant les dates de début et de fin de l'intervention de chaque corps d'état, la date de début de la période de préparation et la date d'achèvement des travaux ,

- au plus tard deux mois après la signature du marché un calendrier détaillé doit être établi, signé par tous les intervenants du chantier, prévoyant outre les interventions des divers corps d'état, pour chacun d'eux, le détail des diverses étapes de leur intervention, calendrier général et calendrier détaillé formant un ensemble indissociable constituant le planning d'exécution des travaux ayant valeur contractuelle que chaque entreprise doit respecter scrupuleusement.

Il précise que le délai contractuel prendra effet à dater de la notification faite à l'entreprise, par ordre de service, de commencer les travaux et qu'il sera défini par le planning d'exécution dont les modalités ont été définies ci-dessus.

Il ajoute que tout retard constaté, soit pour le délai général, soit pour chaque délai partiel, soit pour une tâche donnée, donne lieu de plein droit,si bon semble au maître de l'ouvrage, par la seule échéance de chaque terme et sans mise en demeure, à une pénalité prévue par l'article « pénalités dommages et intérêts » du cahier des clauses administratives générales. Il précise aussi que le constat d'éventuels retards par rapport au planning des travaux sera effectué par le maître d'oeuvre lors des réunions de chantier dans les comptes-rendus, constat qui sera réputé contradictoire même en cas d'absence de représentant de l'entreprise.

L'article 30 concernant les pénalités et dommages et intérêts, qui détaille et récapitule les diverses pénalités encourues par jour calendaire, précise que le maître d'oeuvre pourra établir chaque mois le décompte des pénalités, sous sa responsabilité, à partir du procès-verbal de chantier ayant constaté le retard, lesquelles seront systématiquement retenues sur les situations de travaux présentées par l'entreprise mais qu'il pourra aussi imputer pour la première fois des pénalités sur le solde du marché lors de l'établissement du décompte général définitif dit « DGD » même s'il n'a auparavant opéré aucune déduction pour pénalités sur les situations présentées par l'entreprise si du retard a été constaté au cours du chantier.

En l'espèce, la Sccv Carle Vernon produit en pièce 21 un calendrier de travaux dit « général » lequel n'intègre par le lot 8 chauffage/plomberie/sanitaire, de sorte que le tampon et la signature qui y figurent émanant de la seule société Nrgéo ne peuvent suffire à identifier quel était son calendrier prévisionnel d'intervention en fonction des autres lots. Il n'est nullement justifié du calendrier détaillé signé par tous les intervenants du chantier, prévoyant outre les interventions des divers corps d'état, pour chacun d'eux, le détail des diverses étapes de leur intervention tel qu'imposé par le cahier des clauses générales sus examiné. Le maître d'oeuvre a semble-t-il adressé aux diverses entreprises par mél du 11 septembre 2018 (pièce 39 de l'intimée) un planning de l'opération recalé suite à différents dérapages non précisés, mais le document joint à ce mél n'est pas produit par la Sccv. L'appelante produit quant à elle des planning d'avancement datés du 31/10/2018 (pièce 9) dont aucun ne fait mention du lot n°8. Il n'est par ailleurs produit aucun compte rendu de chantier relevant un retard imputable à la société Nrgéo constaté par le maître d'oeuvre. De fait, après avoir signé le certificat de paiement du 20 février 2019 relatif à la situation n°14 de la société Nrgéo susvisée, ce n'est que le 1er mars 2019 que le maître d'oeuvre a remis en cause ce certificat de paiement, l'annulant par imputation de pénalités de retard du 18/01 au 31/01/2019 manifestement sur initiative du maître d'ouvrage, sans procès-verbal de chantier à l'appui, et rétroactivement après que la réception contradictoire des travaux soit intervenue le 1er février 2019 avec réserves concernant l'absence de chauffage en fonctionnement dans certains appartements.

Les seuls documents relatifs à un retard de chantier imputé par le maître d'oeuvre à l'Eurl Nrgéo sont les deux courriers recommandés des 18 juillet et 27 juillet 2018 concernant notamment la pose de colonnes montantes (pièces 2 et 3 de l'intimée), par lesquels il l'informait qu'en l'absence de démarche positive à brève échéance il interviendrait auprès du maître d'ouvrage pour appliquer des pénalités de retard conformément au cahier des clauses administratives du marché. Néanmoins, aucun des certificats de paiement émis par le maître d'oeuvre entre le 3/08 et le 18/12/2018 n'a imputé de pénalités de retard à l'Eurl Nrgéo sur ses situations de paiement émises postérieurement à ces courriers , les pénalités n'ayant été appliquées, sur initiative du maître de l'ouvrage, que sur le certificat de paiement rectifié de la situation n° 14 établi le 1er/03/2019 et exclusivement pour la période du 18/01 au 31/01/2019.

Or il ne peut qu'être relevé que des réserves ont été formulées au procès verbal de réception du 1er février 2019 concernant d'autre lots que le lot de l'Eurl Nrgéo (absence de garde-corps et absence de vitrages notamment dans les appartements B33 et C51 concernés aussi par l'absence de chauffage) et surtout que les pénalités de retard ont été unilatéralement imputées par le maître de l'ouvrage à compter du 18/01/2019, date du procès-verbal d'huissier auquel elle avait fait procéder pour constater l'impossibilité d'intervention de la réception des travaux suite à divers retards de travaux.

Ce procès-verbal établit que les divers bâtiments n'étaient en toute hypothèse pas livrables en l'absence d'achèvement tant des parties communes que des parties privatives concernant des lots étrangers à celui de l'Eurl Nrgéo : absence de télécommande des stores voire de pose de volets roulants, absence de clôture, de grille et des contrôles d'accès, absence des plans d'évacuation, non fonctionnement de l'installation de défense incendie, habillages et finitions de façades non terminés avec présence d'échafaudages, absence de garde-corps, absence d'éléments de menuiserie, terrasses non achevées et séparations de balcons non réalisées, absence de descentes d'eau pluviale, absence de pose de vitrages, non réalisation de la pompe de relevage, absence de raccordement du réseau des eaux pluviales, absence d'éléments de menuiseries.

Le chantier n'était donc manifestement pas achevé dans son ensemble au 18/01/2019, indépendamment du non fonctionnement du chauffage, seul poste réservé concernant la société Nrgéo au procès-verbal de réception contradictoire du 1er février suivant. Au surplus, aucun décompte général et définitif établi par le maître d'oeuvre dans les conditions prévues au cahier des clauses administratives générales n'est justifié, pas plus que l'établissement d'un compte-prorata inter-entreprises, de sorte que, ainsi que soutenu par l'appelante,en l'absence de démonstration par la Sccv de la façon dont le décompte global du programme a été réalisé et les retards du chantier imputés aux différentes entreprises concernées, les pénalités de retard imputées à la seule Eurl Nrgéo pour la période du 18/01 au 31/01/2019 ne sont pas justifiées.

Il résulte du tout que le retard imputé par la Sccv Carle Vernon à l'Eurl Nrgéo du 18/01 au 31/01/2019 n'est pas objectivement caractérisé et que les pénalités de retard revendiquées n'ont pas été appliquées conformément aux règles contractuelles liant les parties, de sorte que, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, aucune pénalité contractuelle de retard ne peut être mise à la charge de la société Nrgéo, pas plus que ne peuvent lui être imputées les indemnisations consenties par la Sccv à divers acquéreurs pour la période du 23 janvier au 22 février 2019 au titre d'un retard de livraison de certains lots privatifs.

En conséquence, infirmant sur ce point le jugement entrepris, la Sccv doit être déboutée de ses demandes à ce titre.

3°/ Sur la demande de dommages et intérêts complémentaires de l'Eurl Nrgéo

En application des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, l'Eurl Nrgéo ne justifiant pas d'un préjudice financier distinct du retard de paiement qui ne soit pas compensé par les intérêts moratoires alloués au titre du solde de sa créance, le premier juge l'a justement déboutée de sa demande de dommages et intérêts complémentaires à hauteur de 15.000 €.

4°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Chacune des parties succombant pour partie de ses prétentions, les dépens de première instance ainsi que ceux d'appel doivent être supportés par moitié par chacune d'elles, la décision du premier juge ayant condamné la seule Eurl Nrgéo aux dépens de première instance devant être infirmée.

Au regard de cette situation, l'équité ne commande pas que soit mise à la charge de l'une ou l'autre des parties une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ni au titre de la procédure de première instance, contrairement à ce qu'a décidé le premier juge, ni au titre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris uniquement en ce que le premier juge a condamné la Sccv Carle Vernon à payer à l'Eurl Nrgéo la somme de 23.151,53 € Ttc au titre du solde du marché de travaux actualisé au 21 février 2019 outre intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019 et en ce qu'il a débouté l'Eurl Nrgéo de sa demande de dommages et intérêts complémentaires à hauteur de 15.000 €

L'infirme pour le surplus de ses dispositions

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la Sccv Carle Vernon de ses demandes au titre des pénalités de retard et des indemnités versées par elle aux acquéreurs pour retard de livraison

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties, avec autorisation de recouvrement direct au profit de l'avocat constitué pour la société Carle Vernon, pour la part le concernant au titre des dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

Déboute les parties de leurs demandes respectives d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première instance que de celle d'appel.

Le Greffier Le Président

R. CHRISTINE M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/03269
Date de la décision : 06/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-06;21.03269 ?
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