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26/05/2023 | FRANCE | N°21/01536

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 26 mai 2023, 21/01536


26/05/2023





ARRÊT N°268/2023



N° RG 21/01536 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OCS7

N.A/LSLA



Décision déférée du 26 Février 2018 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de HAUTE GARONNE 21601782

C.MAUDUIT























[F]-[I] [C]





C/



Société URSSAF DE MIDI-PYRENEES


































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INFIRMATION PARTIELLE







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANT



Monsieur [F]-[I] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté ...

26/05/2023

ARRÊT N°268/2023

N° RG 21/01536 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OCS7

N.A/LSLA

Décision déférée du 26 Février 2018 - Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de HAUTE GARONNE 21601782

C.MAUDUIT

[F]-[I] [C]

C/

Société URSSAF DE MIDI-PYRENEES

INFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [F]-[I] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Priscilla HAMOU, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

URSSAF DE MIDI-PYRENEES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Robert RODRIGUEZ de la SCP BLANCHET-DELORD-RODRIGUEZ, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2023, en audience publique, devant , Mmes N.ASSELAIN et MP.BAGNERIS conseillères chargées d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

N. ASSELAIN,conseillère faisant fonction de présidente

MP. BAGNERIS, conseillère

M.SEVILLA, conseillère

Greffier, lors des débats : L. SAINT LOUIS AUGUSTIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN,conseillère faisant fonction de présidente, et par L. SAINT LOUIS AUGUSTIN, greffière de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

A l'issue d'un contrôle portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 mai 2015, l'URSSAF Midi-Pyrénées a notifié à M.[F] [I] [C], entrepreneur de maçonnerie, une lettre d'observations datée du 5 avril 2016, envisageant un redressement de cotisations d'un montant de 162.018 euros, outre 64.807 euros au titre de la majoration pour travail dissimulé.

Après échange d'observations, l'URSSAF Midi-Pyrénées a notifié le 11 juillet 2016 à M.[C] une mise en demeure de payer les sommes de 162.018 euros au titre des cotisations, de 25.722 euros euros au titre des majorations de retard, et 64.807 euros au titre de la majoration pour travail dissimulé, soit une somme totale de 252.547 euros.

M.[C] a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF Midi-Pyrénées, et en l'absence de réponse de cette commission, a porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, par requête du 4 novembre 2016.

En cours de procédure, la commission de recours amiable a explicitement confirmé son rejet de la contestation, par décision du 7 mars 2017.

Par jugement du 26 février 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne, a validé le redressement, et condamné M.[C] à payer à l'URSSAF Midi-Pyrénées la somme de 252.547 euros, outre les majorations de retard complémentaires et la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles.

M.[C] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 27 mars 2018.

Par arrêt du 28 juin 2019, la cour d'appel de Toulouse a ordonné la radiation de l'affaire du rôle.

L'affaire a été réinscrite au rôle à la demande de M.[C], le 15 mars 2021.

M.[C] demande l'infirmation du jugement, et à titre principal l'annulation du redressement du fait de l'irrégularité de la procédure. A titre subsidiaire, il demande l'annulation sur le fond des chefs de redressement n°1 (redressement forfaitaire pour un montant de 31.995 euros en principal et 12.748 euros de majoration pour travail dissimulé) et n°2 (taxation forfaitaire pour un montant de 130.023 euros en principal et 52.009 euros de majoration pour travail dissimulé). A titre plus subsidiaire encore, il demande l'annulation du chef de redressement n°1, en indiquant que l'URSSAF ne peut valablement appliquer simultanément le redressement forfaitaire et la taxation forfaitaire, et l'annulation du chef de redressement n°2 pour la période comprise entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2013 pour un montant en principal de 99.763 euros et de 39.905 euros correspondant à la majoration de 40%. Il demande en outre la radiation du privilège de l'URSSAF et paiement d'une indemnité de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

M.[C] expose que l'opération de contrôle a été diligentée par les services de gendarmerie, et soutient qu'en application de l'article R 133-8 du code de la sécurité sociale la lettre d'observations devait être signée par le directeur de l'URSSAF, et non par l'inspecteur de recouvrement. Il soutient par ailleurs que la lettre d'observations est imprécise quant aux faits ayant fondé la majoration de 40% et quant au choix d'appliquer cumulativement le redressement forfaitaire et la taxation forfaitaire, ce qui doit entraîner l'annulation du redressement. Il conteste par ailleurs la validité de la mise en demeure du 11 juillet 2016, faute d'avoir fait mention de l'article R 133-8 du code de la sécurité sociale. A titre subsidiaire, s'il était considéré que la procédure a été menée en application des articles L 234-7 et R 243-59 du code de la sécurité sociale, il soutient que la procédure est irrégulière faute pour la lettre d'observations d'être signée par l'ensemble des inspecteurs du recouvrement qui sont intervenus. Sur le fond, il demande l'annulation du chef de redressement n°1, en indiquant que l'URSSAF a les éléments lui permettant d'effectuer un chiffrage réel des rémunérations, et ne peut en toutes hypothèses procéder à la fois au redressement forfaitaire et à la taxation forfaitaire. Concernant le chef de redressement n°2, il soutient que l'URSSAF s'est fondée sur des chiffres d'affaires erronés pour estimer que l'entreprise aurait employé cinq personnes à temps plein, alors qu'avant 2014, il travaillait seul ou avec son frère. Il soutient également que l'URSSAF ne peut procéder à un redressement pour les années 2012 et 2013, alors que les constatations de l'enquête pénale débutent le 9 octobre 2014, et indique que pour la période du 1er novembre 2014 au 31 mai 2015, il n'a pas été alerté de l'irrégularité de sa situation, malgré le contrôle opéré par la gendarmerie en 2014. Il soutient enfin que la majoration de 40% n'est applicable qu'à compter du 1er janvier 2015, et que l'URSSAF ne peut pas l'appliquer de manière rétroactive depuis le 1er janvier 2012.

L'URSSAF Midi-Pyrénées demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, et de condamner M.[C] au paiement d'une indemnité de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle rappelle que M.[C] a été condamné pour travail dissimulé par jugement du tribunal correctionnel du 21 février 2017, pour l'emploi de six salariés sans déclaration préalable à l'embauche. Elle fait valoir que les constatations des faits caractérisant le travail dissimulé ont été réalisées par l'inspecteur du recouvrement de l'URSSAF, M.[U], de sorte que celui-ci est compétent pour signer la lettre d'observations. Elle produit en toutes hypothèses la délégation de signature souscrite par le directeur de l'URSSAF au profit de M.[U]. Elle conclut à la validité de la lettre d'observations comme de la mise en demeure, qui permettent à M.[C] de connaître le cause du redressement. Sur le fond, elle soutient que le redressement forfaitaire et la taxation forfaitaire, correspondant à deux postes distincts du redressement, n'ont pas été cumulativement appliqués mais alternativement appliqués, et que deux assiettes distinctes en ont été redressées en 2015. Concernant le premier poste du redressement elle fait valoir que la sanction forfaitaire prévue par l'article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale doit s'appliquer, faute pour M.[C] de prouver par des éléments extérieurs aux parties à la relation de travail la date réelle d'embauche et le montant exact des rémunérations versées. Concernant le deuxième poste de redressement, elle soutient que pour la période antérieure à celle visée par la prévention pénale, les faits de travail dissimulés sont établis par le procès-verbal de travail dissimulé et les constatations de l'inspecteur du recouvrement, et fait valoir que le redressement n'a pas été réalisé sur la base du chiffres d'affaires. Elle indique enfin que la majoration de 40% s'applique à tous les cas de travail dissimulé constatés postérieurement au 1er janvier 2015.

MOTIFS

* Sur la régularité de la procédure

- signataire de la lettre d'observations

M.[C] expose que l'opération de contrôle a été diligentée par les services de gendarmerie, et soutient qu'en application de l'article R 133-8 du code de la sécurité sociale la lettre d'observations devait être signée par le directeur de l'URSSAF, et non par l'inspecteur de recouvrement.

L'article R 133-8 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur du 1er janvier 2014 au 1er janvier 2020, prévoit que 'Lorsqu'il ne résulte pas d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 du présent code ou de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, tout redressement consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l'employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement, transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception'.

Cet article vise l'hypothèse où le redressement procède exclusivement de constatations faites par des services distincts de l'URSSAF, tels les services de police ou de gendarmerie ou l'inspection du travail. En revanche, quand l'inspecteur du recouvrement procède lui-même à la constatation d'infractions de travail dissimulé, il est habilité à signer la lettre d'observations comportant ses constatations à l'issue du contrôle, en application de l'article L 243-7 du code de la sécurité sociale. Les dispositions de l'article R 133-8 dispositions ne font pas obstacle à ce qu'un organisme de recouvrement procède, dans le cadre d'un contrôle de l'application de la législation de sécurité sociale par les employeurs prévu à l'article L. 243-7 dudit code, à la recherche des infractions de travail dissimulé aux seules fins de recouvrement des cotisations afférentes.

En l'espèce, les constatations de l'inspecteur du recouvrement visent la période du 1er janvier 2012 au 31 mai 2015, et ne se limitent pas à des faits exclusivement constatés par les services de gendarmerie lors de l'enquête préliminaire menée du 9 octobre 2014 au au 24 avril 2015, ou lors du contrôle de chantier du 9 juin 2015. La lettre d'observations du 5 avril 2016 indique que le contrôle du 9 juin 2015 a été effectué conjointement avec les services de gendarmerie, et mentionne expressément les constatations personnelles de l'inspecteur du recouvrement, quant à la présence de six ouvriers et d'une employée de nationalité roumaine. L'inspecteur du recouvrement était donc habilité à signer, en son nom, la lettre d'observations du 5 avril 2016.

Le fait que Mme [L], inspecteur du recouvrement de l'URSSAF, ait adressé aux services de gendarmerie une estimation du préjudice de l'URSSAF dans le cadre de la procédure pénale ne démontre pas qu'elle ait participé aux opérations de contrôle. La lettre d'observations est régulièrement signée par M.[U], seul inspecteur du recouvrement désigné par ce document comme ayant procédé à des constatations.

- imprécision de la lettre d'observations

M.[C] soutient par ailleurs que la lettre d'observations est imprécise quant aux faits ayant fondé la majoration de 40% et quant au choix d'appliquer cumulativement le redressement forfaitaire et la taxation forfaitaire, ce qui doit entraîner l'annulation du redressement.

Concernant la majoration de 40%, la lettre d'observations vise expressément 'la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé prévue par l'article L 243-7-7 du code de la sécurité sociale', et le fait que M.[C] employait plusieurs personnes sans déclaration préalable à l'embauche. Ces éléments de droit et de fait permettent à M.[C] de connaître la cause de la majoration appliquée.

Concernant l'application cumulative d'un redressement forfaitaire et d'une taxation forfaitaire, la lettre d'observations distingue clairement deux chefs de redressement, ayant donné lieu:

- à un redressement forfaitaire par application de l'article L 242-1-2, fondé sur les constatations effectuées le 9 juin 2015 de la présence de 7 personnes en action de travail sur le chantier;

- à une taxation forfaitaire par application de l'article R 242-5, fondée sur les investigations ayant démontré l'emploi de salariés non déclarés en 2012 et 2013, et le recours à une société roumaine pour le détachement de personnel en 2014 et pour le premier semestre 2015.

Les mentions de la lettre d'observations sont donc suffisamment précises pour permettre à M.[C] de comprendre le fondement des deux chefs de redressement, fondés sur des assiettes distinctes, sans préjudice de la faculté de contester, sur le fond, la pertinence de ces assiettes.

- validité de la mise en demeure

M.[C] conteste la validité de la mise en demeure du 11 juillet 2016, qui ne fait pas mention de l'article R 133-8 du code de la sécurité sociale.

La mise en demeure, qui vise la période redressée, les chefs de redressement notifiés le 5 avril 2016 et l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale, permet à M.[C] de connaître la cause et l'étendue de ses obligations. Elle est donc régulière. L'article R 133-8 du code de la sécurité sociale n'est en tout état de cause pas applicable en l'espèce.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu que la procédure de contrôle et de recouvrement était régulière, et écarté les exceptions de nullité soulevées.

* Sur le fond

- chef de redressement n°1: redressement forfaitaire

M.[C] demande l'annulation du chef de redressement n°1, en indiquant que l'URSSAF a les éléments lui permettant d'effectuer un chiffrage réel des rémunérations, et ne peut en toutes hypothèses procéder à la fois au redressement forfaitaire et à la taxation forfaitaire.

Il résulte de l'article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que pour le calcul des cotisations et contributions sociales, les rémunérations versées ou qui sont dues à un salarié en contrepartie d'un travail dissimulé sont, à défaut de preuve contraire, forfaitairement évaluées à six fois la rémunération mensuelle minimale. L'employeur ne peut prétendre à un calcul sur la base des rémunérations réellement versées qu'à la condition de prouver la durée effective d'emploi du travailleur dissimulé et la rémunération versée à ce dernier pendant cette période.

Aucun document comptable n'établit en l'espèce la durée réelle d'emploi et la rémunération exacte versée aux 7 salariés en action de travail sur le chantier le 9 juin 2015.

M.[C] se prévaut des mentions de la lettre d'observations selon lesquelles M.[E], responsable de la société roumaine [5] détachant son personnel sans déclaration de détachement, 'présente un listing retraçant l'intervention de ses ouvriers en France pour un prix journalier de 50 € par salarié'. M.[C] invoque également des documents annexés au procès-verbal d'enquête de gendarmerie, soit des documents comptables de l'année 2014 de l'entreprise [5], et des 'copies de déclarations de sécurité roumaines fournies par le responsable de la société roumaine [5], concernant ses ouvriers et pour le mois de mai 2015. Chacune de ces déclarations indiquant la date d'embauche, le nombre d'heures et le salaire'.

La liste visée par l'inspecteur du recouvrement ne permet pas en toutes hypothèses de retenir un salaire inférieur au minimum légal. Les documents invoqués par M.[C] ne suffisent pas d'autre part à établir la durée d'emploi des 7 salariés qui ont fait l'objet du contrôle du 9 juin 2015, alors que ces documents émanent de l'auteur du détachement illégal, et ne sont pas corroborés par des éléments de preuve externes et objectifs.

Il est cependant acquis que les mêmes faits ne peuvent donner lieu à double assujetissement, par un redressement forfaitaire et une taxation forfaitaire.

La circulaire interministérielle du 28 juillet 2008 relative au redressement d'assiette sur la base d'une rémunération forfaitaire institué par l'article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale, prévoit que 'Lorsqu'il a communication d'un procès-verbal de travail dissimulé, l'organisme de recouvrement compétent met en oeuvre le redressement forfaitaire chaque fois qu'il n'est possible de procéder ni à un chiffrage réel des sommes à recouvrer à partir d'éléments probants ni à une taxation forfaitaire en application de l'article R 242-5 du code de la sécurité sociale'.

En l'espèce, la lettre d'observations distingue deux chefs de redressement, ayant donné lieu:

- à un redressement forfaitaire par application de l'article L 242-1-2, fondé sur les constatations effectuées le 9 juin 2015 de la présence de 7 personnes en action de travail sur le chantier;

- à une taxation forfaitaire par application de l'article R 242-5, fondée sur les investigations ayant démontré l'emploi de salariés non déclarés en 2012 et 2013, et le recours à une société roumaine pour le détachement de personnel en 2014 et pour le premier semestre 2015.

Les personnes contrôlées en action de travail le 9 juin 2015 font partie du personnel irrégulièrement détaché par la société roumaine [5], comme le mentionne la lettre d'observations. La lettre d'observations ne permet pas par ailleurs de vérifier que les salaires versés aux personnes contrôlées le 9 juin 2015 dans les six mois précédents le contrôle ont été exclus de l'assiette de la taxation forfaitaire pratiquée en application de l'article R 242-5 du code de la sécurité sociale.

L'impossibilité d'un double assujettissement conduit par conséquent à annuler le premier chef de redressement.

Le jugement est infirmé sur ce point.

- chef de redressement n°2: taxation forfaitaire

M.[C] soutient que l'URSSAF Midi-Pyrénées ne peut pas procéder à un redressement pour les années 2012 et 2013, alors que les constatations de l'enquête pénale débutent le 9 octobre 2014, et que le jugement du tribunal correctionnel du 21 février 2017 retient sa culpabilité sur la période du 9 octobre 2014 au 9 juin 2015.

Les constatations de l'inspecteur du recouvrement, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, portent toutefois sur la période antérieure à celle visée par la prévention pénale. La lettre d'observations mentionne ainsi:

' Les investigations nous amènent à constater que M. [C] [F] [I] n'emploie officiellement aucun salarié ni aucune sous-traitance ou personnels intérimaires, de 2011 jusqu'au début de l'année 2014 (alors que cette activité nécessite absolument la force de travail de plusieurs personnes)'.

'Des auditions de la clientèle et de l'entreprise, il ressort que de 2011 à 2014, l'entreprise [6] a employé des salariés non déclarés, dont le nombre est, a minima, évalué à l'emploi de cinq salariés à temps plein, nombre correspondant d'ailleurs aux cinq salariés constatés, en 2011, en action de travail pour le compte de [6]'.

Dans le cadre de l'enquête pénale, l'audition de M.[C] porte également sur les années 2012 à 2014.

M.[C] soutient également que l'URSSAF s'est fondée sur des chiffres d'affaires erronés pour estimer que l'entreprise aurait employé cinq personnes à temps plein en 2012 et 2013. Il indique avoir réalisé:

- en 2012, un CA HT de 143.169 €, et non de 160.401,96 €

- en 2013, un CA HT de 259.103 €, et non de 291.211,82 €

- en 2014, un CA HT de 340.963 €, et non de 383.757,81 €

Mais le redressement de cotisations pratiqué pour les années 2012 et 2013 a pour assiette non pas le chiffre d'affaires, mais le SMIC mensuel pour cinq personnes employées et non déclarées. De même, le redressement de cotisations pratiqué pour les années 2014 et 2015 n'est pas assis sur le chiffre d'affaires, mais sur les sommes versées à la société [5] pour l'emploi de salariés prétendument détachés. Par ailleurs les chiffres d'affaires avancés par M.[C] lui-même, proches de ceux retenus par l'inspecteur du recouvrement, confirment le recours nécessaire à de la main d'oeuvre salariée.

Enfin, M.[C] invoque 'la croyance légitime d'une situation régulière'. La bonne foi de M.[C], serait-elle établie, est en toute hypothèse sans incidence sur la qualification de travail dissimulé, dûment retenue en l'état de la violation de l'ensemble des conditions d'un détachement intracommunautaire régulier.

La demande tendant à l'annulation du chef de redressement n°2 n'est donc pas fondée.

Le jugement est confirmé sur ce point.

- majoration de 40%

L'article L 243-7-7 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi du 22 décembre 2014, qui renvoie aux dispositions de l'article L 8224-2 du code du travail, s'applique aux opérations de contrôle engagées à compter du 1er janvier 2015.

La majoration du redressement, portée à 40% lorsque le travail dissimulé concerne plusieurs personnes, est une sanction civile, de sorte que le principe de non rétroactivité de la loi pénale n'est pas applicable.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu l'application de cette majoration, concernant le deuxième chef de redressement.

* Sur les demandes accessoires :

Il n'y pas lieu à radiation de l'inscription de privilège de l'URSSAF, qui demeure créancière.

Le tribunal a exactement statué sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

En cause d'appel, il n'y a pas lieu à indemnité au titre des frais irrépétibles au profit de l'une ou l'autre partie.

Les dépens d'appel sont à la charge de M.[C], qui demeure débiteur.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 26 février 2018 en ce qu'il a déclaré la procédure régulière et mis à la charge de M.[C] une indemnité de 1.500 euros au titre des frais irrépétbles;

L'infirme partiellement sur le fond, en ce qu'il a validé l'ensemble du redressement et condamné M.[C] à payer à l'URSSAF Midi-Pyrénées une somme de 252.547 euros, outre majorations de retard complémentaires;

Statuant à nouveau sur les chefs de décision infirmés et y ajoutant,

Annule le chef de redressement n°1 (redressement forfaitaire pour un montant de 31.995 euros en principal et 12.748 euros de majoration pour travail dissimulé);

Valide le chef de redressement n°2 (taxation forfaitaire pour un montant de 130.023 euros en principal et 52.009 euros de majoration pour travail dissimulé);

Dit que M.[C] doit payer à l'URSSAF Midi-Pyrénées la somme de 182.032 euros en principal et majoration pour travail dissimulé, outre les majorations de retard s'y rappportant;

Rejette la demande de radiation d'inscription de privilège;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

Dit que M.[C] doit supporter les dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et de L.SAINT-LOUIS-AUGUSTIN, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

L.SAINT-LOUIS-AUGUSTIN N.ASSELAIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 21/01536
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-26;21.01536 ?
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