La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2023 | FRANCE | N°21/01013

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 23 mai 2023, 21/01013


23/05/2023



ARRÊT N°



N° RG 21/01013

N° Portalis DBVI-V-B7F-OALZ

SL / CD



Décision déférée du 11 Janvier 2021

TJ de TOULOUSE - 18/00679

Monsieur [N]

















S.E.L.A.R.L. [B]





C/



[M] [I]

[C] [T]





























































ANNULATION DU JUGEMENT







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



S.E.L.A.R.L. [B] représentée par Maître [Y] [O], en qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [W] [D]

[Adresse 3]

[Local...

23/05/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/01013

N° Portalis DBVI-V-B7F-OALZ

SL / CD

Décision déférée du 11 Janvier 2021

TJ de TOULOUSE - 18/00679

Monsieur [N]

S.E.L.A.R.L. [B]

C/

[M] [I]

[C] [T]

ANNULATION DU JUGEMENT

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.E.L.A.R.L. [B] représentée par Maître [Y] [O], en qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [W] [D]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Caroline PONS-DINNEWETH, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [M] [I]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [C] [T]

Vechtdijk

268 3563 ME ULTRECHT (Pays-bas)

Représenté par Me Marloes MOHR de la SELARL MOHR AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

JC. GARRIGUES, président

AM. ROBERT, conseillère

S. LECLERCQ, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par J.C GARRIGUES, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

Exposé des faits et de la procédure :

Par actes d'huissiers de justice des 14 et 29 décembre 2017, M. [I] a fait assigner M. [W] [D] et M. [C] [T] devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de voir à titre principal prononcer la vente d'un house boat pour dol, ordonner à M. [D] et M. [T] in solidum de restituer la somme de 46.000 euros, les condamner à verser la somme de 20.000 euros à M. [I] en réparation des préjudices subis. Il exposait que par l'entremise de M. [W] [D], M. [C] [T] lui avait vendu une péniche d'habitation les 25 septembre 2015 et 11 novembre 2015 pour la somme de 46 000 euros qu'il avait payée en plusieurs fois - en espèces pour 11 000 euros - et dont il avait pris livraison le 5 novembre 2015 ; qu'il avait pu faire immatriculer le véhicule en Hollande mais pas en France, en sorte qu'il ne pouvait pas utiliser le navire.

L'ordonnance de clôture a été prise le 28 mai 2020.

Par jugement du 20 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a ouvert la liquidation judiciaire de M. [W] [D], a fixé la cessation des paiements au 7 octobre 2020, et désigné en qualité de liquidateur Me [Y] [O] de la Selarl [B].

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 7 décembre 2020.

Par jugement contradictoire du 11 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse :

- a donné acte à M. [I] de son désistement d'action vis-à-vis de M. [T],

- a prononcé la nullité pour dol de la vente intervenue entre M. [I] et M. [D] et portant sur la péniche d'habitation dénommé De Luwte,

- a condamné M. [W] [D] à restituer le prix de 46 000 euros,

- a dit qu'après le paiement effectif, il devra reprendre le bien à ses frais qui comprendront les frais d'enlèvement et de gardiennage,

- a réservé les droits de M. [I] pour ces frais en cas de non reprise du bien par M. [D],

- a condamné en outre M. [W] [D] à payer la somme de 3 450 euros et celle de 3 000 euros à M. [I],

- l'a condamné à payer la somme de 3 000 euros à M. [C] [T],

- l'a condamné aux dépens et à payer à M. [M] [I] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamné à payer à M. [C] [T] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a ordonné l'exécution provisoire,

- a dit qu'une copie des présents sera adressée à Monsieur le Procureur de la République.

Pour statuer ainsi, le tribunal a estimé que le contrat de vente signé entre M. [I] et M. [T] était un faux. Il a relevé que M. [D] et Mme [P] avaient signé le 9 septembre 2015 un compromis de vente de navire avec M. [T] ; que le prix a été payé par virement de M. [I] ; que M. [D] ne pouvait ignorer que M. [I] était en réalité l'acheteur ; qu'il a manoeuvré pour mentir sur la réalité de l'identité du vendeur et sur son propre rôle dans la transaction, et ce pour encaisser une importante plus-value ; que ce dol a provoqué une erreur qui a déterminé le consentement tant quant à l'identité du vendeur que quant à la valeur du bien.

Il a estimé que le préjudice de jouissance n'étant pas constitué, à défaut de justifier de l'impossibilité d'user du navire.

Il a retenu un préjudice moral de M. [T] contre M. [D].

-:-:-:-:-

Par déclaration du 3 mars 2021, la Selarl [B] en qualité de mandataire liquidateur de M. [W] [D] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- prononcé la nullité pour dol de la vente de la péniche d'habitation dénommée De Luwte intervenue entre M. [I] et M. [D],

- condamné M. [W] [D] à restituer le prix de 46 000 euros,

- dit qu'il devra reprendre le bien à ses frais (notamment d'enlèvement et de gardiennage),

- réserve les droits de M. [I] pour ces frais en cas de non reprise du bien par M. [D],

- condamné M. [D] à payer 3 450 euros et 3 000 euros à M. [I],

- condamné M. [D] à payer 3 000 euros à M. [T],

- l'a condamné à payer 3 000 euros à M. [I] et 2 500 euros à M. [T] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Cette affaire a été enrôlée sous le numéro 21/1013.

La même déclaration d'appel a également été enrôlée sous le numéro 21/1014.

Par ordonnance du 12 mai 2021, le magistrat chargé de la mise en état de la cour d'appel de Toulouse a ordonné la jonction de ces procédures sous le numéro 21/1013.

Prétentions des parties :

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 8 décembre 2021, Me [Y] [O] de la Selarl [B], en qualité de mandataire liquidateur de M. [W] [D], appelante, demande à la cour, au visa des articles 122, 123 et 126, 369 et 372 du code de procédure civile et de l'article 1137 du code civil, de :

- réformer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

In limine litis,

- déclarer irrecevables les demandes présentées par MM. [I] et [T] à l'encontre de M. [D], pour défaut de qualité,

- déclarer nul et non avenu le jugement déféré, prononcé pendant l'interruption des poursuites,

A titre subsidiaire, au fond,

- constater l'absence de vice du consentement,

- constater l'absence de préjudice,

- en conséquence, dire et juger n'y avoir lieu ni à annulation de la vente, ni à restitution du prix, ni à paiement d'aucune somme à titre de réparation d'un quelconque préjudice,

En tout état de cause,

- condamner M. [I] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [I] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 1er septembre 2021, M. [M] [I], intimé, demande à la cour, au visa des articles 1217, 1130, 1131, 1137, 1138 du code civil et 700 du code de procédure civile, de :

Sur la demande in limine litis,

- débouter Maître [Y] [O] (Selarl [B]), en qualité de mandataire liquidateur de M. [W] [D] de sa demande d'irrecevabilité,

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en son intégralité,

A titre subsidiaire,

- inscrire au passif de M. [W] [D] représenté par Maître [Y] [O] (Selarl [B]), en qualité de mandataire liquidateur, la somme de 74 450 euros au titre de l'ensemble des préjudices subis :

* préjudice matériel pour la somme de 49 450 euros,

* préjudice de jouissance pour la somme de 10 000 euros,

* préjudice moral pour la somme de 15 000 euros,

En toutes hypothèses,

- inscrire au passif de M. [W] [D] représenté par Maître [Y] [O] (Selarl [B]), es qualité de mandataire liquidateur, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 29 avril 2022, M. [C] [T], intimé, demande à la cour, au visa des articles 1113 et suivants du code civil, 369 et 372 du code de procédure civile, de :

- constater qu'il a régulièrement cédé le house-boat dénommé « De Luwte » à M. [D] pour un prix de 15 000 euros,

- constater qu'il n'existe aucun lien contractuel entre M. [T] et M. [I],

En conséquence,

- prononcer sa mise hors de cause,

- débouter M. [I] de l'intégralité de ses demandes à son encontre,

Si par impossible, la Cour devait retenir sa responsabilité :

- « dire et juger » que la Selarl [B], mandataire liquidateur es qualité de M. [D] devra le relever et garantir indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

En tout état de cause,

- fixer sa créance à 5 500 euros, soit 3 000 euros au titre de son préjudice moral et 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 31 janvier 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 14 février 2023.

Motifs de la décision :

Sur la recevabilité des demandes de M. [I] et M. [T] contre M. [D] et sur la demande d'annulation du jugement :

Selon l'article L. 622-22 du code de commerce, les instances en cours sont interrompues par le jugement d'ouverture jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de ses créances. Elles sont reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan dûment appelés mais tendent uniquement à la constatation de la créance et à la fixation de son montant.

L'interruption des instances en cours est le corollaire du principe de l'arrêt des poursuites posé par l'article L. 622-21 du même code qui interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance tend à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent (sous réserve des créanciers postérieurs dont la créance répond aux conditions de l'article L. 622-17 du code de commerce).

Les articles L. 622-21 et L. 622-22 sont rendus applicables à la liquidation judiciaire

par le premier alinéa de l'article L. 641-3 du code de commerce.

L'interruption d'instance se produit de plein droit. Certes, le second alinéa de l'article L.622-22 du code de commerce prévoit que le débiteur informe le créancier poursuivant de l'ouverture de la procédure collective dans les dix jours de celle-ci, mais une absence d'information, qui peut entraîner à l'encontre du débiteur une sanction en application de l'article L.653-8 du même code, est sans effet sur l'interruption de l'instance.

Ces dispositions sont reprises, au niveau réglementaire, dans le code de procédure civile.

Selon son article 369, l'instance est ainsi interrompue par 'l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur'.

Selon l'article 371 du code de procédure civile, en aucun cas l'instance n'est interrompue si l'événement survient ou est notifié après l'ouverture des débats.

Et, aux termes de l'article 372, 'les actes accomplis et les jugements mêmes passés en force de chose jugée, obtenus après l'interruption de l'instance, sont réputés non avenus à moins qu'ils ne soient expressément ou tacitement confirmés par la partie au profit de laquelle l'interruption est prévue'.

En l'absence de confirmation, même tacite, par les organes de la procédure collective, le jugement rendu postérieurement à l'interruption d'instance est donc réputé non avenu.

En l'espèce, une instance tendant à titre principal au prononcé de la vente du house boat pour dol, et en conséquence au paiement de sommes d'argent (restitution du prix et dommages et intérêts) a été ouverte par actes des 14 et 29 décembre 2017 par M. [I]. L'ouverture des débats a eu lieu le 7 décembre 2020.

Entre-temps, par jugement du 20 novembre 2020 le tribunal judiciaire de Toulouse a ouvert la liquidation judiciaire de M. [W] [D], a fixé la cessation des paiements au 7 octobre 2020, et désigné en qualité de liquidateur Me [Y] [O] de la Selarl [B].

Il est indifférent que l'ordonnance de clôture ait été rendue le 28 mai 2020, antérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire.

Le prononcé de la liquidation judiciaire le 20 novembre 2020, avant l'ouverture des débats intervenue le 7 décembre 2020, a interrompu l'instance qui tendait au paiement de sommes d'argent. Il fallait pour reprendre l'instance appeler en cause le mandataire liquidateur. La révocation de l'ordonnance de clôture aurait alors pu être demandée.

Le jugement rendu après l'interruption de l'instance, sans que celle-ci ait été reprise régulièrement, est réputé non avenu.

Il résulte de l'article 372 du code de procédure civile qu'en principe, tout acte accompli après l'interruption de l'instance, tout jugement ou acte obtenu est non avenu, mais il peut être confirmé par la partie bénéficiaire de l'interruption. Ainsi, lorsque le débiteur est en liquidation judiciaire, c'est le mandataire liquidateur qui doit confirmer la décision intervenue irrégulièrement.

En l'espèce, le mandataire liquidateur n'a pas confirmé le jugement, puisqu'il a relevé appel de ce jugement.

L'interruption de l'instance ne dessaisissant pas le juge, le tribunal judiciaire de Toulouse est toujours saisi du litige.

M. [I] et M. [T] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel ;

Compte tenu de l'équité, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour,

Constate que le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 11 janvier 2021 est nul et non avenu et dit que ce tribunal reste saisi du litige ;

Condamne M. [I] et M. [T] aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le président Le greffier

J.C GARRIGUES N. DIABY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/01013
Date de la décision : 23/05/2023
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;21.01013 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award