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23/05/2023 | FRANCE | N°21/00825

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 23 mai 2023, 21/00825


23/05/2023



ARRÊT N°



N° RG 21/00825

N° Portalis DBVI-V-B7F-N7YS

SL / RC



Décision déférée du 06 Janvier 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (19/00414)

MME TAVERNIER

















SARL GB exerçant sous l'enseigne

«BOIS DESIGN »





C/



[E] [O]

[I] [D] épouse [O]





























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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



S.A.R.L GB

Exerçant sous l'enseigne 'BOIS DES...

23/05/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/00825

N° Portalis DBVI-V-B7F-N7YS

SL / RC

Décision déférée du 06 Janvier 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (19/00414)

MME TAVERNIER

SARL GB exerçant sous l'enseigne

«BOIS DESIGN »

C/

[E] [O]

[I] [D] épouse [O]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A.R.L GB

Exerçant sous l'enseigne 'BOIS DESIGN', immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés sous le numéro 518 542 279, prise en la personne de son Gérant en exercice, Monsieur [J] [V] domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [E] [O]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Julie SALESSE de la SCP D'AVOCATS SALESSE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [I] [D] épouse [O]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Julie SALESSE de la SCP D'AVOCATS SALESSE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

J.C GARRIGUES, président

A.M ROBERT, conseillère

S. LECLERCQ, conseillère

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par J.C GARRIGUES, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

Exposé des faits et de la procédure :

M. [E] [O] et Mme [I] [D], son épouse, ont confié à la Sarl GB, exerçant sous l'enseigne « Bois Design » la réalisation d'une terrasse en bois exotique de type cumaru sur le pourtour de leur piscine, suivant devis du 22 mai 2016 pour un montant de 23 250,52 euros TTC.

Un plan sommaire était annexé au devis.

M. et Mme [O] ont versé un premier acompte de 6.975 euros.

Les travaux, effectués entre le 6 août et le 21 septembre 2016, ont fait l'objet de deux factures, des 8 août 2016 de 10.020 euros TTC et 21 septembre 2016 de 6.255,52 euros TTC, lesquelles sont demeurées impayées.

Aucun procès-verbal de réception n'a été signé.

En cours de chantier, M. et Mme [O] se sont plaints de taches noirâtres sur le bois faisant évoquer la présence de champignons.

M. et Mme [O] ont confié une mission technique au cabinet d'expertises CEC qui a tenu une réunion le 15 novembre 2016.

La Sarl GB est intervenue le 4 janvier 2017 pour remplacer des lames de la terrasse.

Se plaignant de malfaçons, les époux [O] ont fait assigner en référé, par actes d'huissier du 13 janvier 2017, la société GB ainsi que son assureur, la société Smabtp, et la société Logis-bois, fournisseur du matériau, aux fins de désignation d'un expert.

Suivant ordonnance du 16 mars 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse a ordonné une expertise, et désigné M. [R] pour y procéder. Ce dernier a déposé son rapport le 27 octobre 2018 après avoir eu recours à deux sapiteurs, le cabinet ECBTI et le Bet Gardet.

Plusieurs accedits se sont tenus sur place afin de procéder notamment à des investigations techniques d'une part sur la qualité du bois, et d'autre part sur la structure de la terrasse, l'expert rappelant avoir, sur ce dernier point et à plusieurs reprises, vainement demandé à la Sarl GB de lui communiquer ses notes de calcul justificatives de l'ouvrage et des plans, notamment de récolement, exprimant en fin d'expertise un doute quant à leur existence même.

Il s'est avéré que le bois n'était pas atteint de champignons et était bien du cumaru.

M. [N] du cabinet Abarco a assisté aux deux réunions techniques organisées par M. [R] les 19 mai et 9 juin 2017.

Le cabinet ETIC BOIS est intervenu comme expert amiable à la demande de la Sarl GB et a établi une note de calcul le 11 septembre 2019.

M. [S] [H] du cabinet Abarco est intervenu comme expert amiable à la demande de la société GB et a établi un rapport le 15 mars 2021.

Le cabinet Ionis structures est intervenu comme expert amiable à la demande des époux [O] et a établi une note de calcul le 19 octobre 2021.

M. [E] [O] et Mme [I] [D], son épouse, ont fait assigner la Sarl GB exerçant sous l'enseigne 'Bois Design' devant le tribunal de grande instance de Toulouse, par acte d'huissier du 28 janvier 2019, aux fins d'indemnisation des préjudices subis.

Par jugement du 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- déclaré la Sarl GB responsable sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil,

- dit que le préjudice de M. et Mme [O] occasionné par les désordres dénoncés et portant les numéros 2 à 6,7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21, s'élève à la somme de 25 000 euros HT,

- condamné la Sarl GB à payer à M. et Mme [O] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 25 000 euros TTC,

- débouté M. et Mme [O] de leur demande d'indemnisation de leur préjudice de jouissance,

- dit que les sommes précitées seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 27 octobre 2018 jusqu'à la date du jugement,

- dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du jugement,

- condamné M. et Mme [O] à payer à la Sarl GB la somme de 16 275,52 euros au titre du solde du chantier tel que devisé le 22 mai 2016,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement, avec la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 ancien du code civil,

- ordonné la compensation entre ces sommes,

- condamné la Sarl GB aux dépens, en ce compris les frais d'expertise et les frais de la procédure de référé,

- condamné la Sarl GB à payer à M. et Mme [O] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Pour statuer ainsi, le tribunal a estimé que les désordres dénoncés par M. et Mme [O], confirmés par l'expertise judiciaire, consistant en un défaut de qualité et un sous-dimensionnement du platelage, résultaient d'un défaut de conception et d'exécution de la Sarl GB, et engagaient sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil.

Il a chiffré le coût des travaux de reprise à 25.000 euros TTC.

Il a rejeté le préjudice de jouissance, car la terrasse était en place et fonctionnelle depuis l'origine.

Il a condamné M. et Mme [O] à payer le solde du prix tel que devisé le 22 mai 2016, estimant qu'il n'était pas démontré l'accord des maîtres d'ouvrage pour les travaux supplémentaires .

-:-:-:-:-

Par déclaration en date du 23 février 2021 la 'société Bois Design exerçant à l'enseigne GB' , a formé appel contre le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse rendu le 6 janvier 2021 en ce qu'il a :

- dit que le préjudice de M. [E] et Mme [I] [O] occasionné par les désordres dénoncés et portant les numéros 2 à 6, 7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21 s'élève à la somme de 25 000 euros HT ;

- condamné la Sarl GB à payer aux consorts [O] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 25 000 euros TTC ;

- dit que les sommes précitées seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 27 octobre 2018 jusqu'à la date du jugement ;

- dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la Sarl GB aux dépens, en ce compris les frais d'expertise et les frais de la procédure de référé ;

- condamné la Sarl GB à payer à [E] et [I] [O] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

-:-:-:-:-

L'Eurl 'Bois Design exerçant sous l'enseigne GB' a, par acte du 7 avril 2021, fait assigner M. [E] et Mme [I] [O] devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse statuant en référé sur le fondement des dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile pour demander l'arrêt de l'exécution provisoire, et subsidiairement être autorisée à consigner la somme de 25.036,77 euros.

Par ordonnance de référé du 26 mai 2021, le premier président de la cour d'appel de Toulouse a :

- débouté la société Bois Design exerçant sous l'enseigne "GB" de l'ensemble de ses demandes,

- s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de M. [E] [O] et Mme [I] [D] épouse [O] aux fins de radiation du rôle de l'appel interjeté par la société Bois Design exerçant sous l'enseigne "GB" devant la cour d'appel de Toulouse et enregistré sous le n° RG 21/00825,

- condamné la société Bois Design exerçant sous l'enseigne "GB" aux dépens de l'instance de référé,

- débouté M. [E] [O] et Mme [I] [D] épouse [O] de leur demande présentée au titre des dispositions de l'article 700 al. 1er 1° du code de procédure civile.

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Le 29 mars 2021, la société GB a saisi le magistrat de la mise en état d'un incident aux fins de voir ordonner un complément d'expertise au visa des articles 144 et 789 du code de procédure civile, confié soit à M. [X] [R], soit de préférence 'à tel expert qu'il plaira à la cour' spécialisé en matière de construction bois avec pour mission de vérifier, en lecture du rapport d'expertise déposé par M. [H] le 15 mars 2021, si les désordres retenus par le premier juge, à savoir « les désordres n° 2 à 6, 7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21 » sont bel et bien des désordres et dans l'affirmative, s'ils sont dus à des défauts d'exécution ou non conformités imputables aux travaux réalisés par la Sarl GB.

Le 13 avril 2021, les époux [O] ont saisi le magistrat de la mise en état d'un incident aux fins de radiation du rôle de l'affaire pour défaut d'exécution du jugement frappé d'appel.

Les deux incidents ont été joints.

Par ordonnance du 17 février 2022, le magistrat chargé de la mise en état de la cour d'appel de Toulouse a notamment :

- constaté que la demande de radiation de l'affaire n'a plus d'objet et n'est pas reprise dans les dernières conclusions des intimés,

- débouté la Sarl GB de sa demande de 'complément' d'expertise,

- condamné la Sarl GB aux dépens des incidents,

- débouté M. et Mme [O] de leurs demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a considéré que la société GB sollicitait en réalité une contre-expertise sous couvert d'une demande de complément d'expertise, et ne justifiait d'aucun élément nouveau propre à caractériser le bien fondé d'une demande de mesure d'instruction en phase de mise en état. Il a considéré qu'en l'absence d'élément nouveau il n'appartient pas au conseiller de la mise en état de se prononcer sur la validité ou la qualité de l'expertise déjà ordonnée alors qu'en l'espèce, les critiques apportées au travail de l'expert judiciaire ont déjà été débattues devant le premier juge statuant au fond et ne pourront être examinées que par la cour.

Prétentions des parties :

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 25 avril 2022, la Sarl GB, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1231-1 et 1789 du code civil, de :

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il :

* a dit que le préjudice de M. [E] et Mme [I] [O] occasionné par les désordres dénoncés et portant les numéros 2 à 6, 7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21 s'élève à la somme de 25 000 euros HT,

* l'a condamnée à payer aux consorts [O] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 25 000 euros TTC,

* a dit que les sommes précitées seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 27 octobre 2018 jusqu'à la date du jugement,

* a dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement,

* l'a condamnée aux dépens, en ce compris les frais d'expertise et les frais de la procédure de référé,

* l'a condamnée à payer à M. [E] et Mme [I] [O] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

- débouter M. et Mme [O] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,

- les condamner au paiement d'une somme de 18 434,72 euros au titre du solde restant dû à son égard, outre intérêts au taux légal à compter du 23 février 2017 et anatocisme par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- les condamner in solidum au paiement d'une juste somme de 6 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- laisser à la charge les entiers dépens de première instance, de référé, les honoraires de l'expertise judiciaire ainsi que les entiers dépens d'appel ont distraction au profit de Maître Nicolas Dalmayrac, avocat associé de la Scp [F] Avocats sur ses affirmations de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 9 mai 2022, M. [E] [O] et Mme [I] [D] épouse [O], intimés et appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 1103 et 1231-1 du code civil, de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il :

* a déclaré la Sarl GB responsable sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil,

* a dit que leur préjudice occasionné par les désordres dénoncés et portant les numéros 2 à 6,7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21, s'élève à la somme de 25 000 euros HT,

* a condamné la Sarl GB à leur payer au titre de la réparation de ces désordres la somme de 25 000 euros TTC,

* a dit que les sommes précitées seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 27 octobre 2018 jusqu'à la date du jugement,

* a dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement,

* les a condamnés à payer à la Sarl GB la somme de 16 275,52 euros au titre du solde du chantier tel que devisé le 22 mai 2016,

* a dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent jugement, avec la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 ancien du code civil,

* a ordonné la compensation entre ces sommes,

* a condamné la Sarl GB aux dépens, en ce compris les frais d'expertise et les frais de la procédure de référé,

* a condamné la Sarl GB à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* a ordonné l'exécution provisoire du jugement,

Par conséquent,

- rejeter l'intégralité des demandes formées par la société GB en cause d'appel,

A titre incident,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il les a déboutés de leur demande d'indemnisation de leur préjudice de jouissance,

Par conséquent,

- condamner la société GB à leur verser la somme de 100 euros par mois à compter de septembre 2016 jusqu'au complet règlement au titre du préjudice de jouissance, soit la somme de 6 700 euros au 30 avril 2022, somme à parfaire,

En tout état de cause,

- condamner la société GB à leur verser la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre la prise en charge des entiers dépens d'appel, en ce compris ceux des deux incidents.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 31 janvier 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 14 février 2023.

Motifs de la décision :

Sur la responsabilité :

En vertu de l'article 1147 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L'entrepreneur est tenu d'une obligation de résultat concernant l'ouvrage commandé.

En l'espèce, l'ouvrage est constitué d'une terrasse extérieure en bois exotique (platelage) couvrant une surface d'environ 142 m², située entre la maison d'habitation et la piscine.

Cette terrasse repose sur une structure composée globalement de :

- lambourdes sur lesquelles sont fixées par vissage les lames de bois exotiques ;

- solives sur lesquelles s'appuient les lambourdes ;

- profilés métalliques sur lesquels s'appuient les solives ;

- les profilés métalliques reposent soit sur des puits en béton ancrés dans le sol soit sur des poutres en bois fixées à la structure de la villa ou de la piscine (muraillères).

Le devis initial prévoyait des poutres en lamellé-collé pour soutenir la structure, l'expert indique que ces poutres ne sont pas apparentes, et ont été remplacées par des profilés métalliques.

Cette structure porteuse fait que la terrasse se situe finalement à environ 60 cm au-dessus du sol.

L'expert judiciaire indique que la structure est isostatique. Les solives sont en appui simple sur les profilés métalliques, sans équerres ni ancrage.

La société GB est intervenue comme concepteur et réalisateur du platelage litigieux.

Il n'y a pas eu de réception.

L'expert a eu recours à deux sapiteurs, le cabinet ECBTI, spécialisé en structures et ossatures bois, et le Bet Gardet pour vérifier par calcul le profilé métallique.

Le cabinet ECBTI a fait un premier rapport le 22 novembre 2017 demandant une vérification générale de la structure. Après calculs de structure par le Bet Gardet qui a émis une note de calcul le 11 juillet 2018 sur le profilé métallique, le cabinet ECBTI a émis un second rapport du 24 juillet 2018.

L'expert judiciaire a conclu à l'absence de désordres apparents mais à la présence de diverses malfaçons entraînant un défaut de solidité de l'ouvrage et impropriété à usage, que l'expert impute à des défauts de conception et d'exécution, et à des défauts de qualité. Il indique que les éléments ne peuvent qu'évoluer avec le temps et conduire à des désordres, mais que dans le cas d'un usage paisible, l'évolution sera lente (plusieurs années).

- désordres n°2 à 6 et 15 : non-conformités et désaffleurements affectant 19 lames.

L'expert indique que ces lames doivent être changées.

M. [H] expert amiable soutient que les gerces sont un comportement normal du bois dès lors qu'il n'est pas protégé par un saturateur, que les fentes en extrémités de lames sont un processus normal. Il conteste la présence d'aubier sur certaines lames. Il conteste le tuilage.

Ces remarques n'ont pas fait l'objet de dire à expert alors que M. [N] du même cabinet que M. [H] était présent aux réunions d'expertise. Au contraire, dans son dire n°1, Me [F] indique que sa cliente ne conteste pas que 19 lames ne respectent pas les tolérances, et doivent être changées. Ce point sera donc retenu.

- désordre n°7 : fissures dans lambourdes au niveau des fixations.

M. [H] indique que les fissures dans les lambourdes au niveau des fixations sont normales, au moment du vissage, car si les lames doivent être pré-percées, il n'en est pas de même pour les lambourdes. Il dit que la présence de ces fentes, inhérente à la pose vissée, n'obère en rien la capacité des lambourdes à reprendre les charges en flexion auxquelles elles sont soumises.

Néanmoins, ceci est un manquement à l'obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vices. Ce point sera retenu.

- désordre n°13 : profilé métallique rouillé :

Il y a une amorce de corrosion sur le profilé métallique. C'est un manquement à l'obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vice. Ce point sera retenu.

- désordres n° 9 à 12, n°14, et 16 à 18 tenant à un défaut de dimensionnement et d'exécution :

L'expert judiciaire indique, dans les parties en consoles, des appuis bois en contact avec le sol argileux.

Le plan n°2 'platelage réalisé' figurant au rapport d'expertise fait apparaître pour l'IPN n°1 d'une longueur de 12,3 m au total une portée de 4 m puis 4,3 m puis 4 m.

L'expert judiciaire a fait un relevé le 30 janvier 2018 avec le cabinet ECBTI.

Le plan annexé au rapport ECBTI n°2 du 24 juillet 2018 fait apparaître pour l'IPN n°1 une longueur de 12,3 m avec une portée de 3,15 m puis 5,75 m puis 3,40 m.

Le DTU 51.4 sur les platelages extérieurs en bois s'applique. Il indique que la détermination des charges d'exploitation dépend du type d'ouvrage auquel le platelage est associé. Ces charges d'exploitation sont pour les balcons de 350 kg/m².

L'expert indique que les calculs ont confirmé que le dimensionnement de l'ouvrage était insuffisant vis-à-vis des surcharges réglementaires. Selon lui, il y a défaut de solidité de l'ouvrage et impropriété à usage. Un usage familial et paisible est possible à l'exclusion des événements exceptionnels (réunion entre amis, soirée dansante, jeux de balle etc...) ceux-ci pouvant générer des surcharges statiques ou dynamiques importantes.

L'expert indique qu'il ressort de la note de calcul Gardet que la poutre métallique n'est pas correctement dimensionnée et que pour la rendre conforme, il faut non seulement que le système solives/profilés/appuis soit liaisonné mais également rajouter des bracons anti-déversement au droit des appuis.

A la demande de la société GB, le cabinet ETIC BOIS a fait une note de calcul le 11 septembre 2019. Cependant, il se base sur une portée de l'IPN n°1 de 4 m, 4 m et 4 m et non 3,15 m puis 5,75 m puis 3,40 m. Il se base sur des solives avec un entraxe de 0,40 m, ce qui ne correspond pas au constat d'huissier du 29 juin 2017 qui indique un entraxe de 0,50 m. Il se base sur une longueur d'appui des solives de 50 mm. Il se base sur des charges d'exploitation de 250 kg/m².

A la demande de la société GB, M. [H] de la société Abarco expertises a analysé le rapport d'expertise judiciaire le 15 mars 2021 au vu du rapport du cabinet ETIC BOIS. Cependant, les hypothèses prises par ETIC BOIS sont erronées.

A la demande des époux [O], le cabinet Ionis structures a critiqué le 19 octobre 2021 l'étude faite par le cabinet ETIC BOIS, comme faite à partir de dimensions erronées.

Au total, il apparaît que les calculs faites par la société ETIC BOIS sur lesquels s'appuie M. [H] pour critiquer le rapport d'expertise judiciaire reposent sur des bases erronées.

Dès lors, le rapport d'expertise judiciaire sera retenu pour établir le sous-dimensionnement de la terrasse.

- désordre n°21 : respect des postes du devis : L'expert judiciaire a constaté le défaut. Au lieu d'une surface de platelage de 132,83 m², c'est une surface de 142 m² qui a été effectivement posée.

Du fait des désordres n° 2 à 6,7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21, la société GB a manqué à son obligation de résultat de livrer un ouvrage conforme aux stipulations contractuelles et exempt de vices, et a engagé sa responsabilité contractuelle envers les époux [O].

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a déclaré la Sarl GB responsable sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, pour les désordres n° 2 à 6,7, 9 à 12, 13, 14, 15, 16 à 18 et 21.

Sur le coût des travaux de reprise :

Selon l'expert judiciaire, les travaux de reprise consistent en :

- le démontage complet d'une partie de la structure existante, soit environ la moitié de la surface couverte par l'ouvrage, et sa reconstruction avec dans cette partie, mise en place d'une poutre IPN renforcée ou remplacée, structure bois (solives, lambourdes) reconstruite, correctement dimensionnée, en réutilisant dans la mesure du possible des pièces démontées, le remplacement de la totalité des lames ;

- sur l'ensemble de l'ouvrage, opérations ponctuelles de renforcement, rigidification, désolidarisation ;

- dans la partie non démontée, les lames avec malfaçons seront changées ;

- la plage Nord sera démontée.

La durée des travaux est de 2 à 3 semaines.

L'expert judiciaire les a évalués, sur la base des seuls devis produits par M. et Mme [O], à une somme de l'ordre de 20.000 à 25.000 euros TTC, soit 25.000 à 30.000 euros TTC maîtrise d'oeuvre comprise, compte tenu du fait que les éléments peuvent être réutilisés.

La société GB ne fournit pas de devis contraire.

Le recours à un maître d'oeuvre n'apparaît pas justifié par ces travaux de reprise, le maître d'ouvrage n'y ayant au demeurant pas eu recours initialement.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a condamné la Sarl GB à payer aux époux [O] la somme de 25.000 euros TTC en réparation des désordres, avec actualisation en fonction de l'évolution de l'indice BT 01 depuis le 27 octobre 2018 jusqu'à la date du jugement, et intérêts au taux légal à compter du jugement.

Sur le préjudice de jouissance :

La terrasse peut être utilisée, mais l'expert judiciaire a préconisé un usage courant (familial) et paisible.

Le préjudice de jouissance compte tenu des restrictions d'usage notamment quant à l'impossibilité de faire des réunions amicales ou soirées dansantes peut être évalué à 800 euros au total à ce jour.

Infirmant le jugement dont appel, la société GB sera condamnée à payer à M. et Mme [O] la somme de 800 euros en réparation de leur préjudice de jouissance.

Sur l'apurement des comptes :

Suivant devis le prix était de 23.250,52 euros TTC. Le devis portait sur une surface de platelage de 132,83 m².

Un acompte de 6.975 euros a été payé. Deux factures de 10.020 euros TTC et 6.255,52 euros TTC sont restées impayées. Au total, la société GB a facturé 6.975 + 10.020 + 6.255,52 = 23.250,52 euros TTC pour les travaux.

Par rapport au devis, le solde dû est de 23.250,52 - 6.975 = 16.275,52 euros TTC.

La société GB soutient qu'elle a réalisé des travaux supplémentaires. Au lieu d'une surface de platelage de 132,83 m², c'est une surface de 142 m² qui a été effectivement posée. Le plan projet signé des époux [O] (plan n°1 du rapport d'expertise) ne prévoyait pas de plage Nord. Or, la plage Nord a été réalisée. L'expert judiciaire a évalué la valeur de l'ouvrage réalisé en suivant les prix unitaires du devis à 25.409,72 euros TTC. La société GB fait valoir que le solde restant dû est donc de 18.434,72 euros TTC.

Néanmoins, les travaux supplémentaires n'ont pas donné lieu à un devis signé du maître d'ouvrage quant à leur consistance, leur modalité et leur coût. Il n'est pas démontré qu'ils ont été acceptés sans équivoque. Ils ne sont donc pas dus.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a condamné les époux [O] à payer à la société GB la somme de 16.275,52 euros TTC au titre du solde du chantier, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 ancien du code civil.

Sur la compensation :

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a ordonné la compensation entre les sommes dues par la société GB aux époux [O] et les sommes dues par les époux [O] à la société GB.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

La société GB, partie perdante, doit supporter les dépens de première instance, ainsi que décidé par le premier juge, et les dépens d'appel.

Elle se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, que le premier juge a justement estimée au titre de la procédure de première instance, et dans les conditions définies par le dispositif du présent arrêt au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel.

Elle sera déboutée de sa demande sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 6 janvier 2021, sauf en ce qu'il a débouté M. [E] [O] et Mme [I] [D], son épouse, de leur demande d'indemnisation de leur préjudice de jouissance ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé, et y ajoutant,

Condamne la société GB à payer à M. [E] [O] et Mme [I] [D], son épouse, la somme de 800 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;

Condamne la société GB aux dépens d'appel ;

La condamne à payer à M. [E] [O] et Mme [I] [D], son épouse, la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

La déboute de sa demande sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY J.C GARRIGUES


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/00825
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;21.00825 ?
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