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16/05/2023 | FRANCE | N°20/02111

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 16 mai 2023, 20/02111


16/05/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/02111

N° Portalis DBVI-V-B7E-NVEZ

MD/RC



Décision déférée du 28 Mai 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE 15/01478

(Mme. [D])

















[I] [L]

[W] [Z] épouse [L]





C/



S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE


























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INFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTS



Monsieur [I] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2...

16/05/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/02111

N° Portalis DBVI-V-B7E-NVEZ

MD/RC

Décision déférée du 28 Mai 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE 15/01478

(Mme. [D])

[I] [L]

[W] [Z] épouse [L]

C/

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTS

Monsieur [I] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Olivier BONHOURE, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [W] [Z] épouse [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Olivier BONHOURE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES prise en la personne de son Président du Directoire domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jean COURRECH de la SCP COURRECH ET ASSOCIES AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Catherine BENOIDT-VERLINDE de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Sous l'impulsion du Conseil général de l'Ariège, le groupe Simbiosis, promoteur immobilier spécialisé dans la réalisation de résidences de tourisme, a été sollicité pour engager plusieurs opérations immobilières censées redynamiser l'activité touristique.

Le groupe Simbiosis, par ses filiales sous formes de sociétés civiles immobilières, s'est engagé dans la construction et la réhabilitation de plusieurs bâtiments sur la station de [6], la réalisation d'un ensemble pavillonnaire sur la commune de Carla bayle, et la construction d'un ensemble immobilier à [Localité 5].

La Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, ayant pour associés la Sas Simbiosis properties et la Sarl Eurodome et étant gérée par la Sas Simbiosis properties, a développé un programme de construction à Guzet relativement à plusieurs immeubles : Bethmale, Le Valier, Papallau, Roc Blanc, Club House, Merens I et Merens II.

L'ensemble du programme immobilier a fait l'objet de ventes en l'état futur d'achèvement par l'intermédiaire de prescripteurs.

Ces ventes sont intervenues par lots, portant sur un appartement ou un studio, ainsi qu'un parking extérieur, placés sous le régime de la copropriété.

Elles devaient permettre aux acquéreurs de bénéficier du régime fiscal instauré par la loi de finances rectificative pour 1998 (n° 98-1267 du 30 décembre 1998), dite « Demessine », destinée à favoriser l'investissement locatif dans des résidences de tourisme situées dans les zones rurales à « revitaliser ».

En contrepartie d'une réduction d'impôt répartie sur un nombre d'années maximum, chaque candidat à la défiscalisation devait s'engager à louer nus le ou les logements acquis pendant une durée au moins égale à neuf ans dans le cadre d'un bail commercial ne pouvant être consenti qu'à un exploitant unique de la future résidence de tourisme tenu de régler les loyers commerciaux convenus avec les copropriétaires-bailleurs : la Sarl de gestion Résidence du Haut Couserans.

Aux termes d'un acte reçu par Maître [A], notaire, le 20 avril 2004, la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans a acquis plusieurs lots dans un ensemble immobilier situé à Ustou, dénommé Guzet 1300, lieudit « [Adresse 7] ».

Elle a entrepris de construire sur ce terrain 3 bâtiments dénommés Merens I, Merens II et Bethmale comprenant 69 appartements, 75 caves, 75 parkings et 3 locaux commerciaux.

Un permis de construire a été accordé à la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans le 3 octobre 2003 par la commune d'Ustou (09140).

Le 28 juin 2006, la société anonyme (Sa) Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées a consenti par acte sous-seing privé à la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, une garantie d'achèvement extrinsèque sous la forme d'un cautionnement, en contrepartie d'une rémunération forfaitaire de l'établissement financier.

La Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans a chargé la Scp [A] de la rédaction des différents actes de vente en l'état futur d'achèvement des lots de copropriété laquelle s'est échelonnée pour l'ensemble du programme de 2006 à 2008.

Suivant acte notarié du 24 août 2006, et après conclusion d'un contrat de réservation le 3 mai 2005, M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L] ont acquis en l'état futur d'achèvement, un appartement de type t1, une cave et un parking au sein du bâtiment Merens 1, moyennant le versement du prix de 141 586,91 euros.

La livraison devait initialement intervenir au quatrième trimestre de l'année 2007.

M. et Mme [L] ont financé cette acquisition au moyen d'un prêt d'un montant de 142 546 euros consenti par le Crédit foncier de France.

Le 8 décembre 2006, M. [BK] [R], architecte, maître d''uvre du programme, a établi une attestation d'achèvement des fondations de l'immeuble.

Le 5 juin 2008, Mme [K] [V] a établi une attestation d'achèvement du premier plancher bas.

Le 3 juillet 2008, Mme [K] [V] a établi une attestation d'achèvement du troisième plancher bas.

Le 12 septembre 2008, lors de la visite par la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées des programmes dont elle est chargée de garantir l'achèvement dans le cadre de ce projet d'ensemble du groupe Simbiosis, celle-ci a relevé que l'état d'avancement pour les programmes :

- [E] à[Localité 5]s était de 33%,

- Le Valier était de 80 %,

- Merens I était de 16% et Merens II de 7%,

- Bethmale était de 22%.

-:-:-:-

Par actes d'huissier délivrés les 3 et 11 août 2009, vingt-sept acquéreurs, ont fait assigner la Scp [A] et la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans aux fins de voir notamment :

- prononcer la résolution des ventes conclues ainsi que celles des contrats accessoires à ces ventes,

- ordonner la restitution des fonds versés,

- condamner la Scp [A] à garantir la restitution de ces fonds,

- condamner in solidum la Scp [A] à et la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans à les indemniser de leurs préjudices.

M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L] sont intervenus volontairement à cette instance.

-:-:-:-

Par jugement du tribunal de commerce de Foix du 1er décembre 2008 la Sarl de gestion Résidence du Haut Couserans a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de grande instance de Foix du 25 novembre 2009, la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans a été placée en redressement judiciaire.

Par jugement du tribunal de grande instance de Foix du 3 février 2010, la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 15 mars 2010, la Sarl Eurodome a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 19 avril 2010, la Sas Simbiosis properties a été placée en liquidation judiciaire.

Par arrêt du 8 novembre 2011, la cour d'appel de Toulouse a annulé le jugement du 25 novembre 2009 prononçant le redressement judiciaire du promoteur.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 3 septembre 2012, la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 26 juin 2014, la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de cette société a été prononcée pour insuffisance d'actif.

Le mandataire liquidateur commun désigné était Maître [F].

-:-:-:-

Par actes d'huissier délivrés entre les 7 juin et 12 juillet 2010, la Scp [A] a fait assigner en intervention forcée la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées, garant d'achèvement, l'architecte maître d'oeuvre M. [R] et l'architecte assistant du maître d'ouvrage, Mme [K] [V], la Sa Banque Fortis, dépositaire d'un compte courant de la Sci Guzet 2002, les prescripteurs, dont la Sarl Eurodome, ainsi qu'un de leurs assureurs, la Sa Thelem assurances, outre les banques prêteuses de fonds des acquéreurs, aux fins notamment de les voir condamnés à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre dans le cadre de l'instance introduite par les acquéreurs.

L'ensemble des procédures a été joint.

Suivant ordonnance du 24 décembre 2010, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'instruction en désignant en qualité d'experts M. [T] [P] et M. [H] [C].

Par acte d'huissier délivré le 25 janvier 2011, la société Thelem assurances, assureur de la Sarl Just a lau, prescripteur, a fait assigner la Sa Allianz iard, assureur responsabilité professionnelle de la Sarl Just a lau, outre la Sa Mutuelles des architectes français (la MAF), assureur de la Sarl Agence d'architecture [R] et de l'Eurl [V], aux fins d'être garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

Le 16 janvier 2015, les experts judiciaires ont déposé leur rapport d'expertise.

Suivant ordonnance du 4 juin 2015, le juge de la mise en état a procédé à une disjonction de la procédure, la scindant du chef de chaque acquéreur et leur attribuant individuellement un numéro au répertoire général civil.

Par ordonnance du 20 septembre 2019, sur demande des acquéreurs, le président du tribunal de grande instance d'Evry a désigné Maître [G] en qualité de mandataire ad hoc de la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, remplacé par Maître [Y] par ordonnance du 29 octobre 2019.

Par jugement du 28 mai 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- déclaré la présente décision commune à Maître [Y], mandataire ad hoc à la liquidation judiciaire de la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans,

- prononcé la résolution de la vente intervenue le 24 août 2006 entre la Sci Guzet 2002 résidence du haut Couserans et M. et Mme [L] portant sur un appartement, une cave et un parking constituant les lots n° 414, 436 et 464, au sein du bâtiment D - le Merens 1, à [Localité 8], cadastré section [Cadastre 4] lieu-dit [Adresse 7] d'une contenance de 2 ha, 35 a et 9 ca,

- ordonné en conséquence la restitution des droits immobiliers,

- constaté qu'aucune demande en restitution n'est formée contre la liquidation judiciaire de la Sci Guzet 2002 résidence du haut Couserans,

- ordonné la résolution de l'acte de prêt souscrit par M. et Mme [L] auprès du Crédit foncier de France,

- condamné en conséquence M. et Mme [L] à payer au Crédit foncier de France après compensation des créances réciproques la différence entre le montant des fonds débloqués arrêté à la somme de 50 514,42 euros et le montant de toutes les sommes payées par eux au titre du capital amorti, des intérêts sur la part du prêt débloquée, des frais de dossier, du coût de prise de sûretés et des primes d'assurances groupe,

- débouté M. et Mme [L] de leurs demandes à l'encontre du Crédit foncier de France,

- débouté M. et Mme [L] de leurs demandes formées à l'encontre de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées,

- débouté le Crédit foncier de France de ses demandes indemnitaires,

- rejeté l'ensemble des plus amples demandes,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit que les dépens et le coût de la publication du présent jugement seront supportés par la liquidation judiciaire de la Sci Guzet 2002 résidence du haut Couserans.

Le tribunal a considéré que les acquéreurs avaient sollicité la résolution de la vente sans avoir préalablement mis en demeure le garant d'achèvement de fournir sa garantie, et qu'il ne pouvait être reproché au garant d'achèvement d'avoir délibérément fait obstacle à la mise en 'uvre de sa garantie en laissant prescrire le permis de construire puisque les acquéreurs ont choisi en avril 2009 avant la péremption du permis, de solliciter la résolution de la vente.

Il a estimé qu'il n'était pas établi en l'espèce que le garant d'achèvement, susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle à l'égard des acquéreurs, ait eu connaissance de signes non équivoques d'un échec du programme en lien avec la déconfiture du promoteur, et se serait délibérément abstenu de prendre les mesures propres à limiter le préjudice des acquéreurs.

À ce titre, le premier juge a retenu que sa connaissance de la situation financière obérée du groupe Simbiosis n'était pas établie, que le garant d'achèvement n'a pas l'obligation de surveiller l'avancement des travaux pour le compte des acquéreurs, et que le compte centralisateur n'est pas géré dans l'intérêt des acquéreurs, mais du garant.

Il a, enfin, considéré que le garant d'achèvement n'avait pas soutenu abusivement l'activité du promoteur.

S'agissant de la responsabilité du Crédit foncier de France, le tribunal a estimé qu'il appartenait à la banque prêteuse de s'assurer des conditions de déblocage des fonds mais que ce manquement ne présentait pas de lien causal avec les préjudices allégués par les acquéreurs.

-:-:-:-

Par déclaration du 31 juillet 2020, M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L] ont relevé appel du jugement en ce qu'il  :

- les a déboutés de leurs demandes formées à l'encontre du Crédit foncier de France,

- les a déboutés de leurs demandes formées à l'encontre de la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées,

- a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 6 octobre 2022, M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L], appelants, demandent à la cour, au visa de l'article 1605 du code civil, de :

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il déboute M. et Mme [L] de leur demande indemnitaire formée à l'encontre du Crédit foncier de France et de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées,

Considérant que le Crédit foncier de France a engagé sa responsabilité civile vis-à-vis de M. et Mme [L] en adressant directement le second règlement d'un montant de 14 158,69 euros le 9 janvier 2007, correspondant à 10% du prix de vente, à la Sci Guzet 2002 alors qu'il lui appartenait de le porter au crédit du compte centralisateur ouvert dans les livres de la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées,

- condamner le Crédit foncier de France à verser à M. et Mme [L] la somme de 14 158,69 euros à titre de dommages et intérêts,

Considérant que la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées a engagé sa responsabilité civile vis-à-vis de M. et Mme [L] en s'abstenant de mettre en 'uvre la garantie d'achèvement qu'elle avait contractée,

- condamner la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à payer à M. et Mme [L] les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :

*49 555,42 euros au titre du montant global des paiements effectués,

*959 euros au titre des frais supportés à l'occasion de l'opération de financement,

*15 000 euros au titre du préjudice lié à la perte de chance de réaliser un gain fiscal,

*5 000 euros au titre du préjudice lié aux tracas consécutifs à l'abandon de l'opération immobilière,

- condamner la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à relever et garantir M. et Mme [L] des condamnations pécuniaires qui pourraient être mises à leur charge par le tribunal,

- la condamner aux entiers dépens ainsi qu'à verser à M. et Mme [L] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de leurs prétentions, les appelants soutiennent que :

S'agissant de l'action dirigée contre le Crédit foncier de France :

- le Crédit foncier de France était tenu d'effectuer les paiements sur le compte centralisateur, or la somme de 14 158,69 euros a été directement payée le 9 janvier 2007 par le prêteur au promoteur,

- le versement des fonds sur le compte centralisateur aurait permis au garant d'achèvement de contrôler l'utilisation des fonds par le promoteur,

- le manquement du prêteur a contribué à l'échec de l'opération immobilière,

- la prescription de l'action en responsabilité a commencé à courir lors de la communication du rapport d'expertise judiciaire aux parties le 13 janvier 2015 en ce qu'il a révélé aux acquéreurs la faute commise par le prêteur,

S'agissant de l'action dirigée contre la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées :

- l'octroi de la garantie d'achèvement par la Caisse d'épargne a été déterminante de leur consentement, ainsi que la prérogative de contrôle conférée par la convention de cautionnement,

- la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées a été défaillante dans la surveillance du financement des opérations de construction, et compte tenu du montant du programme, elle aurait dû s'apercevoir de l'interruption des versements dès le premier trimestre 2007,

- elle aurait dû s'abstenir de laisser périmer le permis de construire et prévenir le notaire du risque que le chantier ne se poursuive pas,

- le permis de construire n'était pas périmé en décembre 2007 comme l'a retenu le tribunal,

- les acquéreurs n'ont pas présenté de demande de résolution du contrat de vente lorsqu'ils se sont joints à la procédure judiciaire, ce sont les conclusions des experts judiciaires qui les y ont conduit.

Dans ses dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 22 décembre 2020, la Sa Crédit foncier de France, intimée formant appel incident, demande à la cour de :

Sur les demandes indemnitaires présentées par M. et Mme [L] à son encontre :

- constater que le tribunal a omis de statuer sur les moyens de prescription tirés de l'article L. 110-4 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008,

- ce faisant, rejeter comme irrecevables les réclamations indemnitaires formulées à l'encontre du Crédit foncier de France,

- subsidiairement, réformer la décision de première instance en ce qu'elle a retenu que le Crédit foncier de France avait commis une faute en procédant au règlement de l'appel de fonds du 8 décembre 2006 directement auprès du vendeur,

- plus subsidiairement encore, si la cour devait retenir le principe d'une faute imputable au Crédit foncier de France, confirmer le jugement du 28 mai 2020 en ce qu'il a jugé que les conditions dans lesquelles l'appel de fonds du 8 décembre 2006 a été réglé ne présentent aucun lien de causalité avec le préjudice invoqué par M. et Mme [L] et rejeter la demande de dommages et intérêts,

À titre d'appel incident, et pour le cas où la cour retiendrait, comme le demandent M. et Mme [L], la responsabilité du garant d'achèvement, dont les manquements seraient à l'origine de la résolution des contrats :

- réformer le jugement du 28 mai 2020 et condamner la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées à réparer l'entier préjudice subi par le Crédit foncier de France, par application des dispositions de l'article 1165 et 1382 du code civil et à lui payer à titre de dommages et intérêts le montant des intérêts, des frais et cotisations d'assurance jusqu'à la date de la résolution, ainsi qu'une somme équivalente à l'indemnité de remboursement anticipée fixée par le contrat à 3% du capital dû, les comptes étant à faire au jour de la décision,

- « dire » que les condamnations ci-dessus produiront intérêts au taux légal à compter de la décision jusqu'au jour du règlement définitif,

En tout état de cause,

- condamner tout succombant à payer au Crédit foncier de France une indemnité de 3 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tout succombant aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la société Cabinet Mercie, avocat constitué, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- l'action est prescrite, le point de départ étant fixé à la date de chaque versement et les acquéreurs n'ayant pas formulé de demande à son encontre dans leur conclusions d'intervention volontaire du 23 janvier 2012, mais seulement dans celles du 22 octobre 2019,

- le point de départ du délai de prescription ne peut être reporté à la date du dépôt du rapport d'expertise le 13 janvier 2015, puisqu'ils avaient connaissance des modalités de déblocage des fonds dès lors que c'est à leur demande expresse que le prêteur a tiré un chèque à l'ordre de la Sci Guzet 2002 en janvier 2007,

- le prêteur était tenu en vertu de l'offre de crédit et de l'acte de vente en page 27 de verser les fonds au promoteur,

- le prêteur n'était pas informé des exigences du garant d'achèvement en l'espèce, et est un tiers aux engagements souscrits par ses clients au profit du garant d'achèvement,

- les préjudices allégués n'ont pas de lien avec le prétendu manquement, le fonctionnement du compte centralisateur n'ayant eu aucune incidence sur la situation des acquéreurs, en outre, si les fonds avaient été placés sur le compte centralisateur ils auraient été appréhendés par les sociétés du groupe Simbiosis,

- le prêteur subit un dommage en étant privé de la rémunération attendue du crédit, et doit être indemnisé par le garant d'achèvement si la cour estime que la responsabilité de ce dernier a été justement mise en cause par M. et Mme [L].

Dans ses dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 17 décembre 2020, la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées, intimée, demande à la cour, au visa de l'article 1231-1 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- condamner les appelants au paiement de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

À l'appui de ses prétentions, l'intimé soutient que :

- les acquéreurs ont souhaité sortir de la vente et ne pas poursuivre l'achèvement de la construction,

- le garant d'achèvement n'est pas tenu de terminer unilatéralement le projet lorsque les acquéreurs ne le lui demandent pas,

- la Caisse d'épargne n'avait pas connaissance de la date prévue pour l'achèvement des travaux et donc aucune visibilité sur les délais de livraison et l'état d'avancement du chantier,

- le suivi qu'elle s'est réservé la possibilité d'exercer a pour objet exclusif de la sécuriser et non pas d'informer les acquéreurs,

- les autres programmes évoluaient de manière globalement normale,

- le peu de paiement de travaux à partir du compte centralisateur n'était pas de nature à alerter la Caisse d'épargne puisque le promoteur pouvait disposer d'autres moyens de financement,

- le virement de fonds sur le compte Fortis manifestait une violation par le promoteur de ses engagements contractuels mais n'induisait pas un abandon du chantier ou une déconfiture du promoteur,

- les préjudices allégués par les acquéreurs ne découlent pas des fautes qui sont reprochées à la Caisse d'épargne.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2022 et l'affaire a été entendue à l'audience du 25 octobre 2022.

MOTIVATION

- Sur l'action en responsabilité dirigée à l'encontre du Crédit foncier de France :

1. Selon l'article L.110-4 du code de commerce en sa rédaction applicable à la date de l'acte de prêt : « I.-Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes ». Selon l'article 2270-1 du code civil en sa rédaction applicable à la date de l'acte de prêt et permettant de déterminer le point de départ du délai de prescription : « les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par 10 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ». L'article 2224 du code civil, en vigueur à compter de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile dispose désormais que 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'. La loi du 17 juin 2008 précitée n'a pas eu pour effet de modifier le point de départ du délai de la prescription extinctive ayant commencé à courir antérieurement à son entrée en vigueur (Civ. 3e, 16 sept. 2021, n° 20-17.625).

La prescription d'une action en responsabilité ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il s'est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas connaissance.

M. et Mme [L] soutiennent que le Crédit foncier de France a manqué à ses obligations contractuelles telles que découlant de la page 15 de l'acte authentique de vente en payant la somme de 14 158,69 euros le 9 janvier 2007 directement à la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans.

Dans le cas d'un tel manquement, le point de départ du délai de prescription est, en principe, le jour où le risque s'est réalisé, c'est-à-dire le jour où les appels de fonds communiqués par l'emprunteur au prêteur ont été payés par le prêteur au promoteur hors du compte centralisateur, puisque c'est à ce jour que le dommage se manifeste.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par les parties que le Crédit foncier de France a débloqué les fonds suivants :

- 35 396,73 euros le 24 août 2006 au profit de l'étude notariale,

- 14 158,69 euros le 9 janvier 2007 réglés directement au promoteur au moyen d'une lettre chèque,

M. et Mme [L] ont reçu un courrier du 8 décembre 2006 de la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans leur demandant de régler la somme de 14 158,69 euros au titre de l'achèvement des fondations à l'ordre de la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans.

Par courrier du 9 janvier 2007, le Crédit foncier de France a informé les acquéreurs du versement de ladite somme à la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans « en conformité avec le paragraphe « Versement des fonds » de votre contrat ».

C'est donc à cette date que le potentiel préjudice de M. et Mme [L] s'est réalisé.

Cependant comme le soutiennent M. et Mme [L], s'ils ont su que le Crédit foncier de France avait versé les fonds demandés au promoteur le 9 janvier 2007, ce n'est que lors du dépôt de leur rapport par les experts judiciaires le 13 janvier 2015 que le préjudice s'est manifesté à eux, ce préjudice découlant de manière indissociable du paiement des fonds directement au promoteur et leur détournement par ce dernier, ayant conduit l'opération de construction à stagner à 16% d'avancement.

C'est donc au 13 janvier 2015 que la prescription de l'action en responsabilité dirigée contre le prêteur de deniers commençait à courir.

Il est établi en l'espèce que M. et Mme [L] ont agi en responsabilité contre leur prêteur de deniers par leurs dernières écritures notifiées devant le tribunal judiciaire le 21 octobre 2019.

Leur action n'est donc pas prescrite.

2. Le prêteur de deniers, partie à l'acte de vente, est tenu, avant tout déblocage des fonds de s'assurer du destinataire des fonds et pour ce faire, doit, s'il a été représenté lors de la signature de l'acte authentique de vente, se procurer ledit acte avant de verser les fonds.

Il est dans ce cas, indifférent que l'acquéreur ait demandé au prêteur de payer directement au vendeur, dès lors que le banquier, professionnel, est mieux informé et plus compétent que l'acheteur-emprunteur profane pour identifier le destinataire des fonds, dès lors qu'il n'est pas fait la preuve que M. et Mme [L] aient été aguerris aux acquisitions par le biais de contrats de vente en l'état futur d'achèvement.

Dans l'acte notarié conclu le 24 août 2006, trois parties sont indiquées : M. et Mme [L], la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans et le Crédit foncier de France, ce dernier étant représenté par Mme [X], clerc de notaire.

En p. 15 et 16, il est indiqué dans la clause intitulé « Lieu du paiement ' compte financier centralisateur » que : « afin d'assurer la centralisation et le contrôle du financement des travaux, le paiement de l'intégralité du prix, pour être libératoire, devra être effectué sur le compte suivant n° 08.6865477.37 ouvert au nom de la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans à la Caisse d'épargne ('). Ils pourront également être remis entre les mains du notaire rédacteur de l'acte de vente qui aura pour mission d'en opérer le versement au compte du vendeur indiqué ci-dessus ».

Il est également indiqué dans la clause suivante intitulée « engagement de l'acquéreur » que « toutes les sommes dues par l'acquéreur au titre du présent contrat devront, pour être libératoires, impérativement être versées sur le compte d'opération ouvert par le vendeur dans les livres de la Caisse d'épargne par virement ou chèque adressé et libellé à l'ordre de la banque sur le compte ci-dessus référencé ».

À réception d'une demande de paiement direct du promoteur formulé par l'emprunteur, qui ne fait alors que faire suivre les courriers reçus du promoteur, le prêteur est tenu de s'assurer auprès de l'emprunteur qu'il entend bien payer directement le promoteur en contravention de l'obligation que lui fait l'acte authentique de vente, et qui s'applique tant à l'acquéreur qu'au prêteur partie à l'acte et chargé de régler les appels de fonds.

Le Crédit foncier de France se prévaut de la clause intitulée « versement des fonds » qui stipule, en p. 27 de l'acte notarié de vente : « acquisition : versement des fonds au notaire, ou par chèque ou virement sur le compte bancaire du vendeur maître d'ouvrage, au fur et à mesure de l'avancement des travaux, sur appels de fonds du promoteur visés par l'emprunteur, après versement intégral de l'apport personnel ».

Cette clause n'entre pas en contradiction avec la clause qui vise le compte centralisateur comme lieu de paiement des appels de fonds, qui vient la préciser en indiquant le compte du promoteur destiné à recevoir les paiements.

La banque a donc fait preuve d'une légèreté blâmable en payant directement les fonds au promoteur, sans s'enquérir de la volonté de l'emprunteur de violer l'engagement contractuel.

La banque soutient que M. et Mme [L] étaient tenus de s'assurer de l'état d'avancement des travaux, sans pour autant établir l'existence de cette obligation à son encontre.

En outre, l'acquéreur qui sollicite auprès de son prêteur de deniers le paiement des appels de fonds reçus du promoteur et qui s'accompagnent d'attestations éditées ou semblant avoir été éditées par les architectes du programme et qui sont considérés comme des éléments suffisants, n'a pas à vérifier la réalité de l'avancement des travaux, quand bien même, le délai de livraison des biens contractuellement défini serait dépassé.

M. et Mme [L] soutiennent que ce manquement a entraîné l'échec de l'opération immobilière et n'a pas permis au garant d'achèvement de contrôler l'utilisation des fonds par le promoteur.

Ils réclament le paiement d'une somme équivalente au déblocage fautif à titre de dommages et intérêts.

La Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées reconnaît dans ses écritures avoir prévu, et tel que cela résulte également de l'acte notarié de vente, le versement de l'intégralité des fonds dus par les acquéreurs au promoteur immobilier par l'ouverture d'un compte centralisateur dans les livres de la Caisse d'épargne au nom de la Sci Guzet 2002 Résidence du haut Couserans.

En se dotant, sans y être obligé, d'un outil de centralisation financière du programme de construction envisagé, le garant d'achèvement s'est mis en mesure de contrôler le financement de l'opération de construction et de s'assurer que les fonds versés par les acquéreurs au promoteur immobilier sont bien utilisés pour le programme immobilier visé dans l'acte de cautionnement, aux fins d'assurer sa sécurité et d'éviter ou limiter la mise en jeu de son engagement de caution.

Cet outil, auquel il est fait référence dans le contrat de vente en l'état futur d'achèvement de M. et Mme [L] en page 15, oblige le garant d'achèvement à une surveillance du compte unique et au contrôle de l'intégration des appels de fonds à ce compte.

Le garant d'achèvement s'est ainsi rendu débiteur à l'égard des acquéreurs d'une obligation de diligence et de vigilance de l'opération de construction et des mouvements de fonds sur le compte centralisateur.

Si la banque et les acquéreurs, mis en garde, avaient versé les fonds sur le compte centralisateur au lieu de les verser au promoteur, et compte tenu de l'obligation de vigilance du garant d'achèvement suscitée, il convient de considérer que les fonds auraient ainsi pu être utilisés pour les besoins de la construction et non pas détournés, cependant, il ne peut s'agir que d'une perte de chance eu égard aux agissements du promoteur.

Il y a donc lieu de considérer que la négligence du Crédit foncier de France est à l'origine d'un préjudice de perte de chance évaluée à 50% de ne pas exposer la somme de 14 158,69 euros au détournement du promoteur.

Le Crédit foncier de France sera en conséquence condamné à leur payer la somme de 7.079,35 euros.

- Sur la responsabilité de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées :

3. Le vendeur d'immeuble en l'état futur d'achèvement dans le secteur protégé (locaux à usage d'habitation ou à usage mixte professionnel et d'habitation) doit souscrire, avant la vente, soit une garantie financière d'achèvement de l'immeuble, soit une garantie de remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement.

La garantie d'achèvement donnée par les établissements financiers prend la forme soit d'une ouverture de crédit, soit d'une convention de cautionnement aux termes de laquelle la caution s'oblige envers l'acquéreur, au vendeur ou à payer pour son compte, les sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble.

Le 28 juin 2006, la Sa Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées a consenti à la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans une garantie d'achèvement sous la forme d'un cautionnement.

M. et Mme [L] demandent à la cour de retenir la responsabilité civile du garant d'achèvement à leur égard en raison de plusieurs fautes qui ont conduit à l'impossibilité d'achèvement des travaux : relativement au permis de construire qu'il a laissé périmer, à la surveillance du financement des opérations de construction et à l'absence d'information du notaire dès connaissance de la défaillance du vendeur.

Sur la péremption du permis de construire :

4. Le garant d'achèvement peut engager sa responsabilité civile à l'égard des acquéreurs lorsqu'il est démontré qu'il avait connaissance de la défaillance financière du vendeur avant la péremption du permis de construire, et n'a pas été diligent pour mettre en 'uvre sa garantie ce qui le rendrait responsable du défaut d'achèvement des travaux (Civ.3, 15 juin 2017, n°15-26790) ainsi que lorsqu'il a man'uvré pour tenir l'acquéreur dans l'ignorance de ses droits (Civ. 3, 16 juin 2016, n°14-29748) et délibérément laissé périmer le permis de construire pour tenter de se soustraire à son obligation d'achever l'immeuble (Civ.3, 26 novembre 2013, n°13-25534).

Il n'est pas établi par les acquéreurs, alors que la charge de la preuve des manquements contractuels pèse sur eux, que la convention de garantie d'achèvement de travaux conclue le 28 juin 2006 obligeait la Caisse d'épargne à se substituer au vendeur défaillant.

La seule obligation admise par le garant est qu'il était tenu, en cas de défaillance financière constatée de la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, au paiement des sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble visé, au cas où il serait appelé en sa qualité de caution par les acquéreurs.

En vertu de l'article R.421-32 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au cas d'espèce, « le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».

Le point de départ du délai de péremption du permis de construire se situe à la date à laquelle plus aucun travail n'est effectué sur le ou les immeubles objet(s) du permis de construire.

En l'espèce, il n'est pas discuté que dans le rapport d'expertise judiciaire relatif au programme Merens et édité le 13 janvier 2015, débattu en première instance, que M. [C] et M. [P], experts judiciaires, ont relevé que seule l'attestation de M. [R] éditée le 8 décembre 2006, qui atteste de l'achèvement des fondations, est le reflet de la réalité des travaux exécutés tandis que les attestations de Mme [V] sont erronées, ce qui signifie que ni le premier plancher bas ni le troisième plancher bas n'ont été achevés. En effet, au cours de leur visite du 13 juillet 2011, les experts ont constaté : mur de soutènement le long de Merens I et II ; fondations réalisées ; radier brut, armatures en attente, dallage non terminé, le chantier est ouvert, sans gardiennage ni protection.

En outre, dans le rapport d'expertise (p.53), les experts judiciaires ont indiqué que le notaire a visité le chantier Merens I et II le 25 juin 2008 et qu'il a pris des photos à cette occasion qui montrent que les chantiers de Merens ne présentent aucune activité et un stade d'avancement des travaux limités aux fondations.

Les parties ne produisent pas aux débats d'éléments permettant de déterminer la date de péremption du permis de construire, mais en tout état de cause, il convient de se placer à la date à laquelle la Caisse d'épargne a eu connaissance de l'arrêt significatif du chantier, connaissance qui fait naître à sa charge une obligation d'information au profit des acquéreurs.

Il convient de déterminer si la Caisse d'épargne a commis une faute dans la survenance de la péremption du permis de construire.

La Caisse d'épargne a eu une connaissance certaine de l'arrêt du chantier Merens I lors de la visite des programmes réalisée le 12 septembre 2008.

Si les acquéreurs se rapprochent du garant d'achèvement, il ne doit pas se maintenir dans un silence destiné à obtenir la péremption du permis de construire pour ne pas devoir sa garantie.

Or, il n'est pas démontré que les acquéreurs aient contacté la Caisse d'épargne ni que celle-ci ait laissé, sciemment le permis de construire devenir caduc aux fins d'éviter de devoir sa garantie alors que les acquéreurs l'auraient contacté.

Ayant constaté le 12 septembre 2008 que l'état d'avancement du chantier Merens I était de 16%, la Caisse d'épargne ne pouvait ignorer que la validité du permis de construire était menacée par l'arrêt du chantier.

Par conséquent, elle se devait d'informer les acquéreurs afin de les mettre en mesure d'exercer leurs droits et le cas échéant, s'ils optaient pour cette voie, de mettre en 'uvre la garantie d'achèvement.

La charge de la preuve de l'exécution d'une obligation d'information pèse sur le débiteur.

Or, la Caisse d'épargne ne démontre pas avoir informé les acquéreurs de l'arrêt manifeste du chantier Merens I, établi avec certitude le 12 septembre 2008 lors de la visite des chantiers.

M. et Mme [L] n'ont pas fait partie des acquéreurs qui ont fait assigner le notaire et le promoteur par actes de 3 et 11 août 2009 mais sont intervenus volontairement à l'instance postérieurement.

En ne les informant pas du risque de péremption, la Caisse d'épargne a commis une faute qui pourrait avoir fait perdre à M. et Mme [L] la chance de mettre en 'uvre la garantie d'achèvement et d'être livré de leurs biens.

Les préjudices susceptibles de découler d'une telle faute s'analysent en une perte de chance de voir se réaliser un évènement favorable, en l'espèce l'achèvement de l'immeuble et les conséquences financières qui en seraient résulté, à savoir le fait d'être propriétaire de l'immeuble et de ne pas avoir, payé en vain les travaux, paiement dont il n'ont pu obtenir restitution en raison de la procédure collective ouverte contre le promoteur et dans le cadre de laquelle il n'a obtenu aucune somme, ainsi que de ne pas avoir perçu de loyers, ni pu défiscaliser.

Tant la perception de loyers que la défiscalisation sont cependant soumises à des aléas qui résultent du risque de non-location du bien et s'agissant du montant du loyer, l'incertitude qui entoure le montant du loyer qui aurait pu être perçu, ainsi que la durée de cette perception. M. et Mme [L] n'allèguent pas de préjudice relatif à la perte de chance de pouvoir louer le bien et prétendent seulement qu'il aurait pu défiscaliser à hauteur de 15 000 euros, sans pour autant le démontrer. Ils seront donc déboutés de leur demande présentée à ce titre.

S'agissant des sommes engagées dans l'opération immobilière en vain, il convient de rappeler que M. et Mme [L] ont débloqué sur un prix de vente, acte en mains, de 141 586,91 euros, les sommes de 35 396,73 euros à la signature de l'acte puis 14 158,69 euros le 9 janvier 2007, soit un total de 49 555,42 euros, représentant 35% du prix total.

S'ils avaient sollicité l'achèvement de l'immeuble, ils auraient dû payer au garant d'achèvement la somme de 95 031,49 euros, sans pouvoir prétendre récupérer les fonds déjà versées, et aurait, en outre, dû régler les intérêts, frais et assurances du prêt jusqu'à complet remboursement.

De sorte qu'aucun préjudice ne saurait être retenu s'agissant des fonds débloqués et des frais supportés dans le cadre du crédit eu égard à la perte de chance de solliciter l'achèvement de l'immeuble.

Outre qu'il ne peut être considéré avec certitude qu'ils auraient sollicité ledit achèvement alors que le bâtiment était à un stade d'avancement de seulement 16%.

M. et Mme [L] seront donc déboutés de leur demande d'engagement de la responsabilité civile du garant d'achèvement au titre de la péremption du permis de construire.

- S'agissant de la gestion du compte centralisateur et des difficultés financières du groupe Simbiosis :

5. Par la convention de cautionnement consentie le 28 juin 2006, la Sa Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées s'est obligée envers les acquéreurs à payer les sommes nécessaires à l'achèvement de l'ensemble immobilier désigné dans le contrat.

En l'espèce, il n'est pas demandé à la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées d'exécuter son engagement de garant d'achèvement, le juge de première instance ayant, sur demande des acquéreurs, prononcé la résolution des contrats de vente et de crédit immobilier y afférent, résolution dont la cour n'est pas saisie et qui est donc définitive à ce jour.

Il est demandé à la cour de retenir la responsabilité du garant d'achèvement à l'encontre des acquéreurs pour des fautes qui ne consistent pas en l'inexécution de son engagement de caution, mais d'une obligation de vigilance et d'information dont est débiteur le garant d'achèvement envers les acquéreurs et qui est de nature à assurer l'efficacité et l'effectivité de sa garantie au profit des acquéreurs que le législateur a entendu protéger en les faisant bénéficier d'un cautionnement bancaire.

La charge de la preuve de la faute du garant d'achèvement pèse sur ceux qui s'en prétendent victimes.

Compte tenu de son rôle dans le mécanisme de protection mis en 'uvre par le législateur en matière de vente d'immeubles à construire, le garant d'achèvement est particulièrement bien placé pour connaître la défaillance financière du vendeur, et incontestablement mieux que l'acquéreur.

Si son engagement n'est que financier de sorte que le garant a la seule obligation de verser les fonds nécessaires à l'achèvement de l'immeuble et n'a pas à se substituer au maître de l'ouvrage défaillant, il doit assurer l'efficacité et l'effectivité de sa garantie et doit, à ce titre, se tenir informé du déroulement des travaux afin de remplir ses obligations d'effectuer toutes diligences dès la constatation de la défaillance du promoteur pour mettre en 'uvre sa garantie (3e Civ., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-19.536).

Ainsi, le garant doit agir dès qu'il a connaissance de la défaillance du vendeur et alors même qu'il n'aurait pas été mis en demeure de le faire.

La Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a constaté, lors de sa visite des programmes le 12 septembre 2008, que 16% seulement des travaux avaient été effectués.

C'est à cette date qu'elle prétend avoir eu la certitude des difficultés affectant le programme immobilier relatif à l'immeuble Merens I.

Cependant, il convient de déterminer si la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées aurait dû avoir connaissance des difficultés affectant le programme immobilier avant le 12 septembre 2008.

M. et Mme [L] affirment sans le démontrer que la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a eu connaissance des dates d'achèvement du programme immobilier par la communication des actes de vente par le notaire.

Avant le décret n° 2010-128 du 27 septembre 2010, ayant créé l'article R.261-18-1 du Code de la construction et de l'habitation, qui disposait in fine que : « Les sommes payées par l'acquéreur ne peuvent être versées que sur le compte prévu à l'article R. 261-18 ouvert auprès d'un établissement de crédit », cette centralisation existait en pratique pour la mise en 'uvre des garanties extrinsèques, à l'initiative des banques, comme tel était le cas en l'espèce.

En effet, en raison de la convention de cautionnement portant garantie d'achèvement conclue avec la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées le 28 juin 2006 au profit de la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, l'intégralité des prix de vente devait être versée sur un compte centralisateur.

En se dotant, sans y être obligé, d'un outil de centralisation financière du programme de construction envisagé, le garant d'achèvement s'est mis en mesure de contrôler le financement de l'opération de construction et de s'assurer que les fonds versés par les acquéreurs au promoteur immobilier sont bien utilisés pour le programme immobilier visé dans l'acte de cautionnement, aux fins d'assurer sa sécurité et d'éviter ou limiter la mise en jeu de son engagement de caution.

Dans l'acte de vente en l'état futur d'achèvement conclu par les acquéreurs et la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans, il est stipulé que le paiement de l'intégralité du prix, pour être libératoire, devra être effectué sur le « compte centralisateur ouvert au nom de la Sci Guzet 2002 Résidence du Haut Couserans à la Caisse d'épargne (') par chèque barré à l'ordre de la banque avec indication du programme ou du numéro de compte. Ils pourront également être remis entre les mains du notaire rédacteur de l'acte de vente qui aura pour mission d'en opérer le versement au compte du vendeur. (') Toutes les sommes dues par l'acquéreur au titre du présent contrat devront, pour être libératoires, impérativement être versées sur le compte d'opération ouvert par le vendeur dans les livres de la Caisse d'épargne par virement bancaire ou chèque adressé et libellé à l'ordre de la banque sur le compte ci-dessus référencé ».

Cet outil, auquel il est fait référence dans le contrat de vente en l'état futur d'achèvement de M. et Mme [L], oblige le garant d'achèvement à une surveillance du compte unique et au contrôle de l'intégration des appels de fonds à ce compte.

Le garant d'achèvement s'est rendu débiteur à l'égard des acquéreurs d'une obligation de diligence et de vigilance de l'opération de construction et des mouvements de fonds sur le compte centralisateur.

Ainsi mis en mesure d'exercer un contrôle des mouvements de fonds sur le compte centralisateur, le garant d'achèvement devait être alerté du comportement potentiellement frauduleux du promoteur en présence de débits sans aucun lien avec l'opération de construction.

Il ne peut être reproché au garant d'achèvement de ne pas avoir été alerté par le débit depuis le compte centralisateur afférent au programme de l'immeuble Merens I de sommes correspondant aux frais de commercialisation facturés par la Sarl Eurodome, aux frais de gestion administrative et technique facturés par la Sas Simbiosis Properties dans la mesure où ces dépenses, certes étrangères à l'exécution des travaux de construction, se rapportent à des éléments du prix de revient du programme et étant précisé que tel que cela résulte des stipulations de la convention de cautionnement et du bilan prévisionnel, seule la moitié des fonds à recevoir allaient être utilisés pour construire l'immeuble à proprement parler.

En revanche, la rémunération de la Sarl de gestion de l'immeuble, ainsi que de la Sarl de gestion du bar-restaurant, alors que l'immeuble n'est pas encore achevé ne correspondent pas à un élément relatif au programme, commercialisation, gestion de la construction, ou construction elle-même mais concernent des activités postérieures. Elles ne constituent pas « un élément du prix de revient du programme de construction » tel que visé par l'article 2 de la convention de cautionnement, et n'auraient donc pas dû être payées depuis le compte centralisateur.

Ces paiements auraient donc dû alerter la Caisse d'épargne, sans qu'elle puisse refuser le débit compte tenu des règles applicables aux comptes de dépôt et de la libre disposition des fonds par le déposant, le garant d'achèvement n'exerçant qu'une surveillance de l'affectation des fonds, sans pouvoir de contrainte.

Alertée, la Caisse d'épargne aurait dû accroître sa vigilance et informer l'acquéreur de mouvements de fonds douteux.

En outre, tel que cela résulte du rapport d'expertise judiciaire, le contrat de cautionnement indique que « toutes les sommes à provenir des ventes seront donc portées au crédit du compte courant (') ouvert dans les livres de la Caisse d'épargne au nom de la partie cautionnée ».

Les experts judiciaires ont relevé que les premiers versements réalisés à la signature de l'acte pour 43 acquéreurs des appartements Merens I et II ont été correctement crédités sur le compte centralisateur pour un total de 2 007 444 euros par la Scp notariale, puis 42 502,66 euros par M. et Mme [M], et 39 426 euros par M. et Mme [U], 18 485,49 euros par M. et Mme [B], et 944 927,66 euros pour le bâtiment Bethmale, soit un total de 3 052 786,21 euros pour les trois bâtiments.

Or, la Caisse d'épargne ne pouvait ignorer avoir perçu seulement une fraction minime du prix de vente de chaque appartement et comme l'ont relevé les experts judiciaires, compte tenu du montant du programme la Caisse d'épargne aurait dû s'apercevoir de l'interruption des versements sur le compte centralisateur.

En outre, comme cela a été relevé par les experts judiciaires, sur la somme totale versée sur le compte centralisateur, à hauteur de 3 052 786,21 euros, la Caisse d'épargne a réglé :

- 1 653 872,73 euros au profit de la société Eurodome, au titre des honoraires de commercialisation des lots,

- 719 697,50 euros au profit de la Sarl de gestion Résidence du Haut Couserans,

- 70 657 euros au profit de la Sarl de gestion du bar restaurant Le Papallau, suivant convention de prestation de services relatives à la phase 4 de l'opération,

- 46 452,64 euros au profit de la société Simbiosis properties, suivant convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, l'administration, la gestion et la direction des travaux et services clients

- 13 156 euros au profit de la société Domus Aurea,

- 217 933,59 euros au profit de Nbcr,

- 116 789,40 euros au profit de [O],

- 15 530,06 euros au profit de Veritas,

- 7 439,12 euros au profit de [J],

- 24 448,07 au profit de [N],

- 64 000 euros au profit de la Caisse d'épargne au titre de sa garantie,

- 100 168,38 euros divers.

Les experts ont relevé que seuls 462 000 euros ont été versés à des sociétés spécialisées en bâtiment et travaux publics.

M. et Mme [L] indiquent également que la Caisse d'épargne avait connaissance d'avis à tiers détenteur en 2008 et que M. [S] avait reporté des rendez-vous et admis avoir ouvert un compte auprès d'une autre banque, ce que la Caisse d'épargne ne conteste nullement.

Ces comportements et évènements sont effectivement de nature à alerter le garant d'achèvement et le conduire à accroître sa vigilance. Il en découle alors une obligation d'information des acquéreurs.

Cependant, faute pour les appelants d'établir les dates de ces évènements et comportements, la cour ne peut retenir que la date du 12 septembre 2008 comme significative pour la Caisse d'épargne et générant cette obligation d'information des acquéreurs, éventuellement par le biais du notaire, sur les difficultés rencontrées par le chantier, obligation que la Caisse d'épargne n'établit pas avoir accompli.

6. Le seul préjudice qui découle de ces fautes, consiste dans le fait d'avoir versé des fonds au promoteur immobilier après la date à laquelle la Caisse d'épargne aurait dû mettre en garde les acquéreurs, par le biais du notaire des agissements potentiellement frauduleux du promoteur. Ce préjudice consiste, s'agissant du manquement à une obligation d'information, en une perte de chance de ne pas s'exposer aux conséquences de la défaillance du promoteur immobilier et plus précisément, au détournement des fonds dont ils ont été victimes et à leur perte définitive compte tenu de la liquidation judiciaire de la Sci Résidence du Grand hôtel.

M. et Mme [L] demandent l'indemnisation des préjudices suivants :

- 49 555,42 euros au titre des fonds débloqués dans le cadre de leur prêt bancaire,

- 959 euros au titre des frais de l'opération de financement,

- 15 000 euros au titre de la perte de chance de ne pas avoir pu défiscaliser,

- 5 000 euros au titre du préjudice moral,

En l'espèce, selon les pièces du dossiers, M. et Mme [L] n'ont versé aucune somme au promoteur après le 12 septembre 2008, de sorte qu'ils ne justifient d'aucun préjudice indemnisable à ce titre.

En conséquence, le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse sera confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [L] de leur demande en indemnisation au titre du préjudice découlant des fonds débloqués dans le cadre de leur prêt bancaire.

M. et Mme [L] sollicitent le paiement d'une somme au titre de la perte de chance de ne pas avoir pu défiscaliser. Cependant, cette perte de chance ne résulte pas de la faute de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées mais du détournement des fonds par le promoteur immobilier et de sa défaillance financière, ainsi que de la décision de M. et Mme [L] de demander la résolution de la vente plutôt que de solliciter l'achèvement du programme immobilier. Il convient donc de rejeter la demande de M. et Mme [L] présentée à ce titre.

Enfin, ils demandent à la cour d'indemniser le préjudice moral qu'ils prétendent avoir subi. Cependant, ce préjudice résultant potentiellement du manquement de la Caisse d'épargne à son devoir de vigilance et d'information, ce dernier ne peut être constitué faute de préjudice matériel, le préjudice moral allégué par les acquéreurs étant intrinsèquement lié à une perte de confiance dans le garant d'achèvement dont ils auraient eu à supporter des conséquences patrimoniales.

M. et Mme [L] ont demandé à la cour de condamner la Caisse d'épargne à les relever et garantir des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement. Cependant, la Caisse d'épargne n'est pas responsable de leur condamnation prononcée par le tribunal judiciaire et qui consiste à restituer au Crédit foncier de France les fonds prêtés aux emprunteurs compte tenu de la résolution du contrat de prêt consécutive à la résolution de la vente.

- Sur le recours du Crédit foncier de France contre la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées :

7. Le Crédit foncier de France forme appel à titre d'appel incident, et pour le cas où la cour retiendrait, comme le demandent M. et Mme [L], la responsabilité du garant d'achèvement, dont les manquements seraient à l'origine de la résolution des contrats et demande à la cour de condamner la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées à réparer l'entier préjudice subi par le Crédit foncier de France, par application des dispositions de l'article 1165 et 1382 du code civil et à lui payer à titre de dommages et intérêts le montant des intérêts, des frais et cotisations d'assurance jusqu'à la date de la résolution, ainsi qu'une somme équivalente à l'indemnité de remboursement anticipée.

La responsabilité de la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées n'étant pas retenue par la cour, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande du Crédit foncier de France.

- Sur les dépens et frais irrépétibles :

8. Il n'a pas été fait appel des dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles exposés en première instance.

M. et Mme [L] ne formulent de demande qu'à l'encontre de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées en ce qui concerne les dépens d'appel et les frais irrépétibles exposés en appel.

La Caisse d'épargne Midi-Pyrénées demande à la cour de condamner l'appelant au paiement de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Le Crédit foncier de France demande à la cour de condamner tout succombant à payer au Crédit foncier de France une indemnité de 3 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner tout succombant aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la société Cabinet Mercie, avocat constitué, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Crédit foncier de France partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux dépens d'appel, sauf ceux relatifs à l'action dirigée contre la Caisse d'épargne qui resteront à la charge de M. et Mme [L].

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties qui les ont exposés, les frais non compris dans les dépens.

Elles seront déboutées de leur demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse seulement en ce qu'il a débouté M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L] de leur action en indemnisation dirigée contre la Sa Crédit Foncier de France.

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant, 

Déclare recevable l'action en indemnisation dirigée contre la Sa Crédit foncier de France.

Condamne la Sa Crédit foncier de France à payer à M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L] la somme de 7 079,35 euros au titre de leur préjudice financier.

Condamne la Sa Crédit foncier de France aux dépens d'appel, exception faite de ceux relatifs à la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées qui sont à la charge de M. [I] [L] et Mme [W] [Z] épouse [L].

Rejette les demandes présentées au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/02111
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;20.02111 ?
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