La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2023 | FRANCE | N°20/01700

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 16 mai 2023, 20/01700


16/05/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/01700 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NT47

MD/NB



Décision déférée du 28 Mai 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE - 15/01476

(Mme. [U])

















[I] [D]





C/



S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES













































<

br>














CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANT



Monsieur [I] [D]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Jacques MONFERRAN ...

16/05/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/01700 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NT47

MD/NB

Décision déférée du 28 Mai 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE - 15/01476

(Mme. [U])

[I] [D]

C/

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [I] [D]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Jacques MONFERRAN de la SCP MONFERRAN-CARRIERE-ESPAGNO, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES représentée par son Président du Directoire demeurant en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean COURRECH de la SCP COURRECH ET ASSOCIES AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Sous l'impulsion du Conseil général de l'Ariège, le groupe Simbiosis, promoteur immobilier spécialisé dans la réalisation de résidences de tourisme, a été sollicité pour engager plusieurs opérations immobilières censées redynamiser l'activité touristique.

Le groupe Simbiosis, par ses filiales sous formes de sociétés civiles immobilières, s'est engagé dans la construction et la réhabilitation de plusieurs bâtiments sur la station de Guzet, la réalisation d'un ensemble pavillonnaire sur la commune de Carla bayle, et la construction d'un ensemble immobilier à [Localité 6].

La Sci [Adresse 8], ayant pour associés la Sas Simbiosis properties et la Sarl Eurodome et étant gérée par la Sas Simbiosis properties, a développé un programme de construction à Guzet relativement à plusieurs immeubles : Bethmale, Le Valier, Papallau, Roc Blanc, Club House, Merens I et Merens II.

L'ensemble du programme immobilier a fait l'objet de ventes en l'état futur d'achèvement par l'intermédiaire de prescripteurs.

Ces ventes sont intervenues par lots, portant sur un appartement ou un studio, ainsi qu'un parking extérieur, placés sous le régime de la copropriété.

Elles devaient permettre aux acquéreurs de bénéficier du régime fiscal instauré par la loi de finances rectificative pour 1998 (n° 98-1267 du 30 décembre 1998), dite « Demessine », destinée à favoriser l'investissement locatif dans des résidences de tourisme situées dans les zones rurales à « revitaliser ».

En contrepartie d'une réduction d'impôt répartie sur un nombre d'années maximum, chaque candidat à la défiscalisation devait s'engager à louer nus le ou les logements acquis pendant une durée au moins égale à neuf ans dans le cadre d'un bail commercial ne pouvant être consenti qu'à un exploitant unique de la future résidence de tourisme tenu de régler les loyers commerciaux convenus avec les copropriétaires-bailleurs : la Sarl de gestion [Adresse 8].

Aux termes d'un acte reçu par Maître [A], notaire, le 20 avril 2004, la Sci [Adresse 8] a acquis plusieurs lots dans un ensemble immobilier situé à Ustou, dénommé Guzet 1300, lieu dit « Guzet-Neige ».

Elle a entrepris de construire sur ce terrain 3 bâtiments dénommés Merens I, Merens II et Bethmale comprenant 69 appartements, 75 caves, 75 parkings et 3 locaux commerciaux.

Un permis de construire a été accordé à la Sci [Adresse 8] le 3 octobre 2003 par la commune d'Ustou (09140).

Le 28 juin 2006, la société anonyme (Sa) Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a consenti par acte sous-seing privé à la Sci [Adresse 8], une garantie d'achèvement extrinsèque sous la forme d'un cautionnement, en contrepartie d'une rémunération forfaitaire de l'établissement financier.

La convention précise que l'achèvement des travaux de construction est « prévu au 31 juillet 2007, date donnée à titre indicatif ».

La Sci [Adresse 8] a chargé la Scp [A] de la rédaction des différents actes de vente en l'état futur d'achèvement des lots de copropriété laquelle s'est échelonnée pour l'ensemble du programme de 2006 à 2008.

Suivant acte notarié du 31 août 2006, M. [I] [D] a acquis en l'état futur d'achèvement, un appartement de type T2, une cave et un parking au sein du bâtiment Merens 1, moyennant le versement du prix de 185 405,80 euros toutes taxes comprises.

La livraison devait initialement intervenir au quatrième trimestre de l'année 2007.

M. [D] a financé cette acquisition au moyen de deux prêts de 30 384 euros et 155 971 euros consentis par la Sa Crédit immobilier de France Midi-Pyrénées suivant offres acceptées le 23 décembre 2005.

Le 8 décembre 2006, M. [LK] [K], architecte, maître d''uvre du programme, a établi une attestation d'achèvement des fondations de l'immeuble.

Par courrier du 13 juillet 2007, la Sci [Adresse 8] a indiqué à M. [D] qu'un cas de force majeure était survenu dans la poursuite du chantier de construction en raison de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de l'entreprise de maçonnerie Carla Bayle Constructions et informait de la reprise prochaine de la construction à la suite de la conclusion d'un contrat de marché avec un nouveau contractant.

Par courrier du 23 novembre 2007, la Sci [Adresse 8] a informé M. [D] de la reprise du chantier et du report de la livraison des travaux au quatrième trimestre 2008.

Le 5 juin 2008, Mme [R] [J] a établi une attestation d'achèvement du premier plancher bas.

Le 3 juillet 2008, Mme [R] [J] a établi une attestation d'achèvement du troisième plancher bas.

Le 12 septembre 2008, lors de la visite par la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées des programmes dont elle est chargée de garantir l'achèvement dans le cadre de ce projet d'ensemble du groupe Simbiosis, celle-ci a relevé que l'état d'avancement pour les programmes :

- Isard à [Localité 6] était de 33%,

- Le Valier était de 80 %,

- Merens I était de 16% et Merens II de 7%,

- Bethmale était de 22%.

-:-:-:-

Par actes d'huissier délivrés les 3 et 11 août 2009, vingt-sept acquéreurs, ont fait assigner la Scp Malbosc-Dagot et la Sci [Adresse 8] aux fins de voir notamment :

- prononcer la résolution des ventes conclues ainsi que celles des contrats accessoires à ces ventes,

- ordonner la restitution des fonds versés,

- condamner la Scp [A] à garantir la restitution de ces fonds,

- condamner in solidum la Scp [A] à et la Sci [Adresse 8] à les indemniser de leurs préjudices.

M. [D] est intervenu volontairement à cette instance.

-:-:-:-

Par jugement du tribunal de commerce de Foix du 1er décembre 2008, la Sarl de gestion [Adresse 8] a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de grande instance de Foix du 25 novembre 2009, la Sci [Adresse 8] a été placée en redressement judiciaire.

Par jugement du tribunal de grande instance de Foix du 3 février 2010, la Sci [Adresse 8] a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 15 mars 2010, la Sarl Eurodome a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 19 avril 2010, la Sas Simbiosis properties a été placée en liquidation judiciaire.

Par arrêt du 8 novembre 2011, la cour d'appel de Toulouse a annulé le jugement du 25 novembre 2009 prononçant le redressement judiciaire du promoteur.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 3 septembre 2012, la Sci [Adresse 8] a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 26 juin 2014, la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de cette société a été prononcée pour insuffisance d'actif.

Le mandataire liquidateur commun désigné était Maître [H].

-:-:-:-

Par actes d'huissier délivrés entre les 7 juin et 12 juillet 2010, la Scp [A] a fait assigner en intervention forcée la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées, garant d'achèvement, l'architecte maître d'oeuvre M. [K] et l'architecte assistant du maître d'ouvrage, Mme [R] [J], la Sa Banque Fortis, dépositaire d'un compte courant de la Sci Guzet 2002, les prescripteurs, dont la Sarl Eurodome, ainsi qu'un de leurs assureurs, la Sa Thelem assurances, outre les banques prêteuses de fonds des acquéreurs, aux fins notamment de les voir condamner à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre dans le cadre de l'instance introduite par les acquéreurs.

L'ensemble des procédures a été joint.

Suivant ordonnance du 24 décembre 2010, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'instruction en désignant en qualité d'experts M. [L] [B] et M. [N] [M].

Par acte d'huissier délivré le 25 janvier 2011, la société Thelem assurances, assureur de la Sarl Just a lau, prescripteur, a fait assigner la Sa Allianz iard, assureur responsabilité professionnelle de la Sarl Just a lau, outre la Sa Mutuelles des architectes français (la Maf), assureur de la Sarl Agence d'architecture [K] et de l'Eurl [J], aux fins d'être garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

Le 16 janvier 2015, les experts judiciaires ont déposé leur rapport d'expertise.

Suivant ordonnance du 4 juin 2015, le juge de la mise en état a procédé à une disjonction de la procédure, la scindant du chef de chaque acquéreur et leur attribuant individuellement un numéro au répertoire général civil.

Fin 2018, M. [D] a été amené à régulariser un protocole d'accord transactionnel avec la Scp [A], aux termes duquel il a été indemnisé à hauteur de 40 000 euros.

Par ordonnance du 20 septembre 2019, sur demande des acquéreurs, le président du tribunal de grande instance d'Evry a désigné Maître [MC] en qualité de mandataire ad hoc de la Sci [Adresse 8], remplacé par Maître [T] par ordonnance du 29 octobre 2019.

Par jugement du 28 mai 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture du 25 octobre 2019 et accueilli l'ensemble des écritures signifiées après cette date,

- déclaré la présente décision commune à Maître [T], mandataire ad hoc à la liquidation judiciaire de la Sci [Adresse 8],

- constaté le désistement d'instance et d'action de M. [D] de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de la Scp Malbosc-Dagot,

- constaté la renonciation de la Scp [A] à toutes ses demandes reconventionnelles dirigées à l'encontre de M. [D],

- déclaré parfait le désistement d'instance et d'action de M. [D],

- constaté en conséquence le dessaisissement de la juridiction s'agissant du litige opposant la Scp [A] d'une part et M. [D] d'autre part,

- prononcé la résolution de la vente intervenue le 31 août 2006 entre la Sci [Adresse 8] et M. [D] portant sur un appartement de type t2, une cave et un parking constituant les lots n°403, 444, 453 au sein du [Adresse 7], à [Localité 10], cadastré section a n°[Cadastre 3] [Adresse 9],

- ordonné en conséquence la restitution des droits immobiliers,

- fixé la créance de M. [D] au passif de la liquidation judiciaire de la Sci [Adresse 8], représentée par Maître [T] à la somme de 43 361 euros,

- ordonné la résolution des actes de prêt souscrit par M. [D] auprès de la Sa Crédit immobilier de France développement,

- condamné en conséquence M. [D] à payer à la Sa Crédit immobilier de France développement la différence entre le montant des fonds débloqués arrêté à la somme de 64.856,03 euros et le montant de toutes les sommes payées au titre du capital amorti, des intérêts effectivement payés sur la part du prêt débloquée, des frais de dossiers, du coût de prise des sûretés et des primes d'assurances groupe,

- débouté M. [D] de ses demandes formées à l'encontre de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées, de l'Eurl [J], de la Maf et de la Sa Crédit immobilier de France développement,

- rejeté l'ensemble des plus amples demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit que les frais de publication du présent jugement sont à la charge de la liquidation judiciaire de la Sci [Adresse 8],

- dit que les dépens seront supportés par la liquidation judiciaire de la Sci [Adresse 8].

Le tribunal a considéré que l'acquéreur avait sollicité la résolution de la vente sans avoir préalablement mis en demeure le garant d'achèvement de fournir sa garantie, et qu'il ne pouvait être reproché au garant d'achèvement d'avoir délibérément fait obstacle à la mise en 'uvre de sa garantie en laissant prescrire le permis de construire puisque les acquéreurs ont choisi en avril 2009 avant la péremption du permis, de solliciter la résolution de la vente.

Il a estimé qu'il n'était pas établi en l'espèce que le garant d'achèvement, susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle à l'égard de l'acquéreur, ait eu connaissance de signes non équivoques d'un échec du programme en lien avec la déconfiture du promoteur, et se serait délibérément abstenu de prendre les mesures propres à limiter le préjudice des acquéreurs.

À ce titre, le premier juge a retenu que sa connaissance de la situation financière obérée du groupe Simbiosis n'était pas établie, que le garant d'achèvement n'a pas l'obligation de surveiller l'avancement des travaux pour le compte des acquéreurs, et que le compte centralisateur n'est pas géré dans l'intérêt des acquéreurs, mais du garant.

Il a, enfin, considéré que le garant d'achèvement n'avait pas soutenu abusivement l'activité du promoteur.

-:-:-:-

Par déclaration du 9 juillet 2020, M. [I] [D] a relevé appel du jugement en ce qu'il a :

- rejeté ses demandes formées à l'encontre de la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées de 81 925,57 euros à titre de dommages-intérêts, représentant ses entiers préjudices, somme à parfaire au jour du jugement à intervenir, outre les frais nécessaires à la publication du jugement à la conservation des hypothèques et à la levée des inscriptions hypothécaires prises en garantie du prêt accordé,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- n'a pas condamné la Sa Caisse d'épargne Midi-Pyrénées aux dépens.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 29 septembre 2022, M. [I] [D], appelant, demande à la cour, au visa des articles 1240 et 1242 du code civil, de :

- accueillir favorablement l'appel interjeté à l'encontre du jugement du 28 mai 2020, le déclarer recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement du 28 mai 2020 en ce qu'il :

* a rejeté ses demandes formées à l'encontre de la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées de 81 925,57 euros à titre de dommages-intérêts, représentant ses entiers préjudices, somme à parfaire au jour du jugement à intervenir, outre les frais nécessaires à la publication du jugement à la conservation des hypothèques et à la levée des inscriptions hypothécaires prises en garantie du prêt accordé,

* a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* n'a pas condamné la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées aux dépens,

Statuant à nouveau,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à avoir à lui verser la somme de 73 396,61 euros au titre de son préjudice bancaire, outre les intérêts au taux légal à compter du jugement sur la somme due par ses soins à la Sa Crédit immobilier de France développement (majoration en sus),

Subsidiairement,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à avoir à lui verser la somme de 66.056,95 euros au titre de sa perte de chance,

Très subsidiairement,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à avoir à lui verser la somme de 37.009,58 euros, au titre des fonds débloqués dans le cadre de son prêt bancaire, à compter de la fin de l'année 2006,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à avoir à lui verser la somme de 21.000 euros au titre de son préjudice moral,

En tout état de cause,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à avoir à verser à M. [D] la somme de 22 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées,

- condamner la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées aux dépens de première instance et d'appel, en ce inclus les frais nécessaires à la publication du jugement à la conservation des hypothèques et à la levée des inscriptions hypothécaires prises en garantie du prêt accordé et les frais relatifs à la désignation du mandataire ad hoc de la Sci [Adresse 8], dont distraction au profit de la Scp Monferran Carriere Espagno, avocats associés.

À l'appui de ses prétentions, l'appelant soutient que :

- le tribunal a commis une erreur sur la date à laquelle le permis de construire s'est périmé,

- la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées prétend que le chantier Bethmale s'est définitivement interrompu en juillet 2008 sans le démontrer,

- la prétendue interruption définitive du permis de construire au mois de juillet 2008 n'a pas été confirmée par les experts judiciaires,

- les attestations de Mme [J] des 5 juin et 3 juillet 2008 étaient erronées, ce qui prouve que l'interruption du chantier est antérieure,

- le rapport de visite de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées de septembre 2008 démontre que les chantiers étaient totalement abandonnés,

- en première instance la Caisse d'épargne a reconnu que le permis de construire était devenu caduc un an après l'interruption des travaux, soit vers décembre 2007,

- le chantier est interrompu depuis décembre 2006, le permis de construire est donc périmé depuis décembre 2007,

- les attestations de M. [K] et de Mme [J] sont espacées d'un an et demi ce qui témoigne de l'absence de travaux pendant cette période, de sorte que le permis de construire était périmé au plus tard au début de l'année 2008,

- il ne peut donc être reproché à l'acquéreur de ne pas avoir mobilisé la garantie bancaire de la Caisse d'épargne en avril 2009 lors de l'assignation,

- la Caisse d'épargne avait connaissance des délais de livraison des appartements,

- elle avait les moyens de connaître dès la fin de l'année 2006 que le chantier était abandonné,

- la Caisse d'épargne aurait dû s'apercevoir qu'aucune entreprise de travaux n'avait présenté de facture après septembre 2006,

- la Caisse d'épargne aurait dû s'apercevoir de l'interruption des versements sur le compte centralisateur,

- la Caisse d'épargne a commis une faute en octroyant un cautionnement à la Sci Guzet 2002 alors que les ressources financières du groupe étaient insuffisantes et l'opération vouée à l'échec,

- la Caisse d'épargne a autorisé des versements au profit d'entités n'ayant aucun lien avec l'opération,

- la Caisse d'épargne n'aurait pas dû prélever sa rémunération sur le compte centralisateur car la rémunération incombait au promoteur et non aux acquéreurs,

- la Caisse d'épargne aurait dû informer l'étude notariale qui disposait des coordonnées de l'acquéreur, pour lui éviter de régler des sommes au promoteur en l'absence d'avancement des travaux.

Dans ses dernières conclusions transmises à la cour par voie électronique le 20 septembre 2022, la Sa Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées, intimée, demande à la cour, au visa de l'article 1231-1 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- condamner l'appelant au paiement de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

À l'appui de ses prétentions, l'intimé soutient que :

- les chantiers de Merens et Bethmale relèvent du même permis, donc la péremption s'apprécie de manière globale,

- le permis de construire a périmé en 2009, des travaux s'étant poursuivis sur le bâtiment Bethmale jusqu'à l'été 2008, l'acquéreur pouvait donc encore actionner la garantie d'achèvement lorsqu'il a choisi de solliciter la résolution de la vente, en effet, les attestations de Mme [J] de juin et juillet 2008 sont conformes à l'avancement des travaux, c'est donc vers juillet 2008 que le chantier s'est interrompu et à l'été 2009 que le permis a périmé,

- l'acquéreur ne s'est pas comporté en bon père de famille dès lors qu'il ne s'est pas intéressé à l'état d'avancement du chantier,

- la Caisse d'épargne n'avait pas connaissance de la date prévue pour l'achèvement des travaux et n'avait donc aucune visibilité sur les délais de livraison et l'état d'avancement du chantier,

- le suivi qu'elle s'est réservé la possibilité d'exercer a pour objet exclusif de la sécuriser et non pas d'informer les acquéreurs,

- les autres programmes évoluaient de manière globalement normale,

- le peu de paiement de travaux à partir du compte centralisateur n'était pas de nature à alerter la Caisse d'épargne puisque le promoteur pouvait disposer d'autres moyens de financement,

- le virement de fonds sur le compte Fortis manifestait une violation par le promoteur de ses engagements contractuels mais n'induisait pas un abandon du chantier ou une déconfiture du promoteur,

- le compte centralisateur n'est pas obligatoire et est géré par le garant d'achèvement dans son seul intérêt,

- la Caisse d'épargne n'a compris que des versements étaient dirigés vers un autre compte qu'en 2008,

- la Caisse d'épargne n'avait pas connaissance des délais d'achèvement prévisionnels stipulés dans les actes de vente ni des bilans et comptabilité du promoteur,

- toutes les sommes payées depuis le compte centralisateur se rattachent à l'opération immobilière,

- les préjudices allégués par l'acquéreur ne découlent pas des fautes qui sont reprochées à la Caisse d'épargne.

MOTIVATION

- Sur la responsabilité de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées :

1. Le vendeur d'immeuble en l'état futur d'achèvement dans le secteur protégé (locaux à usage d'habitation ou à usage mixte professionnel et d'habitation) doit souscrire, avant la vente, soit une garantie financière d'achèvement de l'immeuble, soit une garantie de remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement.

La garantie d'achèvement donnée par les établissements financiers prend la forme soit d'une ouverture de crédit, soit d'une convention de cautionnement aux termes de laquelle la caution s'oblige envers l'acquéreur, le vendeur ou à payer pour son compte, les sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble.

Le 28 juin 2006, la Sa Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées a consenti à la Sci [Adresse 8] une garantie d'achèvement sous la forme d'un cautionnement.

M. [D] demande à la cour de retenir la responsabilité civile du garant d'achèvement à son égard en raison de plusieurs fautes : relativement au permis de construire, à la gestion du compte centralisateur et à la connaissance des difficultés du programme immobilier.

Sur la péremption du permis de construire :

2. Le garant d'achèvement peut engager sa responsabilité civile à l'égard des acquéreurs lorsqu'il est démontré qu'il avait connaissance de la défaillance financière du vendeur avant la péremption du permis de construire, et n'a pas été diligent pour mettre en 'uvre sa garantie ce qui le rendrait responsable du défaut d'achèvement des travaux (Civ.3, 15 juin 2017, n°15-26790) ainsi que lorsqu'il a man'uvré pour tenir l'acquéreur dans l'ignorance de ses droits (Civ. 3, 16 juin 2016, n°14-29748) et délibérément laissé périmer le permis de construire pour tenter de se soustraire à son obligation d'achever l'immeuble (Civ.3, 26 novembre 2013, n°13-25534).

La convention de garantie d'achèvement de travaux conclue le 28 juin 2006 n'obligeait pas la Caisse d'épargne à se substituer au vendeur défaillant, puisqu'il s'agissait là d'une simple faculté prévue à l'article 7, mais à fournir, en qualité de caution solidaire, les sommes nécessaires pour mener à bien l'achèvement de l'immeuble conformément aux dispositions de l'article R. 261-21 b) du code de la construction et de l'habitation.

La Caisse d'épargne était tenue, en cas de défaillance financière constatée de la Sci [Adresse 8], au paiement des sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble visé et ayant donné lieu à un permis de construire le 3 octobre 2003, au cas où elle serait « appelée en sa qualité de caution solidaire » (article 3), par les acquéreurs.

La convention de cautionnement portant garantie d'achèvement signée par la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées stipule aux termes de ses articles 1er et 14 que le cautionnement prend effet dès la conclusion des contrats de vente et jusqu'à l'achèvement des travaux ou, notamment, en cas de péremption du permis de construire.

En vertu de l'article R.421-32 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au cas d'espèce, « le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».

Le point de départ du délai de péremption du permis de construire se situe à la date à laquelle plus aucun travail n'est effectué sur le ou les immeubles objet(s) du permis de construire.

Les parties soutiennent toutes deux que le permis de construire concernait trois bâtiments : Merens I et II et Bethmale.

Dès lors que des travaux visés au permis de construire sont exécutés sur un des trois bâtiments, le délai de péremption du permis de construire ne peut avoir commencé à courir.

En l'espèce, dans le rapport d'expertise judiciaire relatif au programme Merens, M. [M] et M. [B], experts judiciaires, ont relevé que seule l'attestation de M. [K] éditée le 8 décembre 2006, qui atteste de l'achèvement des fondations, est le reflet de la réalité des travaux exécutés tandis que les attestations de Mme [J] sont erronées, ce qui signifie que ni le premier plancher bas ni le troisième plancher bas n'ont été achevés. En effet, au cours de leur visite du 13 juillet 2011, les experts ont constaté : mur de soutènement le long de Merens I et II ; fondations réalisées ; radier brut, armatures en attente, dallage non terminé, le chantier est ouvert, sans gardiennage ni protection.

En outre, dans le rapport d'expertise (p.53), les experts judiciaires ont indiqué que le notaire a visité le chantier Merens I et II le 25 juin 2008 et qu'il a pris des photos à cette occasion qui montrent que les chantiers de Merens ne présentent aucune activité et un stade d'avancement des travaux limités aux fondations.

Il peut donc en être déduit que les travaux relatifs aux bâtiments Merens sont interrompus depuis mi-décembre 2006.

Cependant, dans le rapport d'expertise relatif au bâtiment Bethmale, produit aux débats par l'intimé, les experts ont retenu que les attestations de Mme [J] relativement à l'achèvement du premier et troisième plancher bas sont conformes à l'avancement des travaux constatés par les experts. Il convient de considérer que les travaux se sont effectivement poursuivis jusqu'au 3 juillet 2008, le lendemain sera donc retenu comme point de départ du délai d'un an pour la péremption du permis de construire, périmé donc à compter du 4 juillet 2009.

S'agissant du bâtiment Merens 1, les acquéreurs ont choisi d'agir en justice contre le promoteur et le notaire par actes d'huissier du 3 et 11 août 2009, en sollicitant la résolution du contrat de vente. M. [D] est intervenu à l'instance par la suite.

Au jour de son action en justice, le permis de construire était donc périmé.

Il convient de déterminer si la Caisse d'épargne a commis une faute dans la survenance de la péremption du permis de construire.

La Caisse d'épargne a eu une connaissance certaine de l'arrêt du chantier Merens I lors de la visite des programmes réalisée le 12 septembre 2008.

Alors qu'elle a eu connaissance de l'arrêt du chantier avant la péremption du permis de construire, elle ne saurait pour autant être tenue d'accomplir des diligences pour éviter sa péremption alors même que l'acquéreur n'établit pas l'avoir contacté en vain, ou sollicité le jeu de la garantie d'achèvement.

Si les acquéreurs se rapprochent du garant d'achèvement, il ne doit pas se maintenir dans un silence destiné à obtenir la péremption du permis de construire pour ne pas devoir sa garantie.

Or, il n'est pas démontré que l'acquéreur ait contacté la Caisse d'épargne ni que celle-ci ait laissé, sciemment le permis de construire devenir caduc aux fins d'éviter de devoir sa garantie alors que l'acquéreur l'aurait contacté.

Cependant, ayant constaté le 12 septembre 2008 que l'état d'avancement du chantier Merens I était de 16%, et compte tenu du comportement douteux de M. [G], tel que rapporté par Mme [F], salariée de la Caisse d'épargne en charge de la promotion immobilière, la Caisse d'épargne ne pouvait ignorer que la validité du permis de construire était menacée par l'arrêt du chantier.

Par conséquent, elle se devait d'informer l'acquéreur afin de le mettre en mesure d'exercer ses droits et le cas échéant, s'il optait pour cette voie, de mettre en 'uvre la garantie d'achèvement.

La charge de la preuve de l'exécution d'une obligation d'information pèse sur le débiteur.

Or, la Caisse d'épargne ne démontre pas avoir informé l'acquéreur de l'arrêt manifeste du chantier Merens I, établi avec certitude le 12 septembre 2008 lors de la visite des chantiers.

Il n'est pas établi en l'espèce que l'acquéreur ait eu connaissance de l'état d'avancement des chantiers et du risque de péremption du permis de construire avant sa péremption puisque dans le courrier de 6 mars 2009 produit aux débats en pièce 4 par les appelants, par lequel Maître [S] a mis en demeure la Scp [A] d'indemniser les acquéreurs des préjudices résultant des manquements commis dans la rédaction des actes notariés et du devoir de conseil et d'information, après avoir indiqué que les « programmes immobiliers connaissent d'importantes difficultés puisque la majorité de mes clients ne sont toujours pas en possession de leurs biens, et ce alors même que la date d'achèvement des travaux prévue au sein de leurs actes notariés est largement dépassée aujourd'hui. Les venderesses sont totalement défaillantes sur le plan contractuel et certains bâtiments en sont à des stades d'avancement particulièrement limités », M. [D] n'est pas cité parmi les acquéreurs représentés par Maître [S] à cette date et dans le cadre de cette mise en demeure.

M. [D] n'a pas fait partie des acquéreurs qui ont fait assigner le notaire et le promoteur par actes de 3 et 11 août 2009 mais est intervenu volontairement à l'instance postérieurement. Dès lors, il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance du risque de péremption du permis de construire avant le 4 juillet 2009.

En ne l'informant pas de ce risque avant la péremption, la Caisse d'épargne a commis une faute qu'a pu faire perdre à M. [D] la chance de mettre en 'uvre la garantie d'achèvement et d'être livré de ses biens.

Les préjudices susceptibles de découler d'une telle faute s'analysent en une perte de chance de voir se réaliser un évènement favorable, en l'espèce l'achèvement de l'immeuble et les conséquences financières qui en seraient résultées, à savoir le fait d'être propriétaire de l'immeuble et de ne pas avoir, payé en vain les travaux, paiement dont il n'a pu obtenir restitution en raison de la procédure collective ouverte contre le promoteur et dans le cadre de laquelle il n'a obtenu aucune somme, ainsi que de ne pas avoir perçu de loyers, ni pu défiscaliser.

Tant la perception de loyers que la défiscalisation sont cependant soumises à des aléas qui résultent du risque de non-location du bien et s'agissant du montant du loyer, l'incertitude qui entoure le montant du loyer qui aurait pu être perçu, ainsi que la durée de cette perception. M. [D] n'allègue pas de préjudice relatif à la perte de chance de pouvoir louer le bien et prétend seulement qu'il aurait pu défiscaliser à hauteur de 10 000 euros, sans pour autant le démontrer. Il sera donc débouté de sa demande présentée à ce titre.

S'agissant des sommes engagées dans l'opération immobilière en vain, il convient de rappeler que M. [D] a débloqué sur un prix de vente, acte en mains, de 185 406 euros, les sommes de 46 351 euros à la signature de l'acte puis 18 505 euros le 26 décembre 2006, soit un total de 64 856 euros, représentant 35% du prix total.

S'il avait sollicité l'achèvement de l'immeuble, il aurait dû payer au garant d'achèvement la somme de 120 550 euros, sans pouvoir prétendre récupérer les fonds déjà versés, et aurait, en outre, dû régler les intérêts, frais et assurances du prêt jusqu'à complet remboursement.

De sorte qu'aucun préjudice ne saurait être retenu s'agissant des fonds débloqués dans le cadre du crédit eu égard à son obligation de remboursement des fonds prêtés qu'il fait, à tort, découler de la perte de chance de solliciter l'achèvement de l'immeuble.

Outre qu'il ne peut être considéré avec certitude qu'il aurait sollicité ledit achèvement alors que le bâtiment était à un stade d'avancement de seulement 16%.

Il sera donc débouté de sa demande d'engagement de la responsabilité civile du garant d'achèvement au titre de la péremption du permis de construire.

- S'agissant de la gestion du compte centralisateur et des difficultés financières du groupe Simbiosis :

3. Par l'article 1er de la convention de cautionnement consentie le 28 juin 2006, la Sa Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées « s'oblige envers les acquéreurs conventionnels en l'état futur d'achèvement, solidairement avec la partie cautionnée, à payer les sommes nécessaires à l'achèvement de l'ensemble immobilier sus désigné. L'acceptation de cet engagement par les acquéreurs résultera de leur contrat d'acquisition sans qu'il soit besoin de le notifier à la Caisse d'épargne ».

La Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a pris un engagement envers les acquéreurs, de paiement des travaux en cas de défaillance financière du cautionné, engagement qui ne peut être qualifié de stipulation pour autrui, un contrat étant né entre les parties.

En l'espèce, il n'est pas demandé à la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées d'exécuter son engagement de garant d'achèvement, le juge de première instance ayant, sur demande de l'acquéreur, prononcé la résolution des contrats de vente et de crédit immobilier y afférent, résolution dont la cour n'est pas saisie et qui est donc définitive à ce jour.

Il est demandé à la cour de retenir la responsabilité du garant d'achèvement à l'encontre de l'acquéreur pour des fautes qui ne consistent pas en l'inexécution de son engagement de caution, mais d'une obligation de vigilance et d'information dont est débiteur le garant d'achèvement envers les acquéreurs et qui est de nature à assurer l'efficacité et l'effectivité de sa garantie au profit des acquéreurs que le législateur a entendu protéger en les faisant bénéficier d'un cautionnement bancaire.

La charge de la preuve de la faute du garant d'achèvement pèse sur ceux qui s'en prétendent victimes.

Compte tenu de son rôle dans le mécanisme de protection mis en 'uvre par le législateur en matière de vente d'immeubles à construire, le garant d'achèvement est particulièrement bien placé pour connaître la défaillance financière du vendeur, et incontestablement mieux que l'acquéreur.

Si son engagement n'est que financier de sorte que le garant a la seule obligation de verser les fonds nécessaires à l'achèvement de l'immeuble et n'a pas à se substituer au maître de l'ouvrage défaillant, il doit assurer l'efficacité et l'effectivité de sa garantie et doit, à ce titre, se tenir informé du déroulement des travaux afin de remplir ses obligations d'effectuer toutes diligences dès la constatation de la défaillance du promoteur pour mettre en 'uvre sa garantie (3e Civ., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-19.536).

Ainsi, le garant doit agir dès qu'il a connaissance de la défaillance du vendeur et alors même qu'il n'aurait pas été mis en demeure de le faire.

La Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a constaté, lors de sa visite des programmes le 12 septembre 2008, que 16% seulement des travaux avaient été effectués.

C'est à cette date qu'elle prétend avoir eu la certitude des difficultés affectant le programme immobilier relatif à l'immeuble Merens I.

Cependant, il convient de déterminer si la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées aurait dû avoir connaissance des difficultés affectant le programme immobilier avant le 12 septembre 2008.

Si M. [D] affirme sans le démontrer que la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a eu connaissance des dates d'achèvement du programme immobilier par la communication des actes de vente par le notaire, il est en revanche précisé dans la convention de cautionnement que la date indicative d'achèvement des travaux est le 31 juillet 2007.

Cependant, l'absence d'achèvement des travaux à cette date n'est pas nécessairement de nature à alerter le garant d'achèvement dès lors qu'elle peut découler d'un simple retard des travaux. La seule interruption des travaux n'est en effet pas admissible comme date de référence pour apprécier les diligences du garant d'achèvement puisque cette interruption peut être causée par des motifs qui ne suffisent pas à démontrer la défaillance financière du vendeur ; par ailleurs, l'interruption peut se révéler momentanée si elle n'est pas due à l'impécuniosité de celui-ci.

Il faut donc que soit le retard dure dans le temps, soit que d'autres éléments soient de nature à alarmer le garant d'achèvement et lui faire soupçonner la défaillance du promoteur ou l'adoption d'un comportement frauduleux.

Avant le décret n° 2010-128 du 27 septembre 2010, ayant créé l'article R.261-18-1 du code de la construction et de l'habitation, qui disposait in fine que : « Les sommes payées par l'acquéreur ne peuvent être versées que sur le compte prévu à l'article R. 261-18 ouvert auprès d'un établissement de crédit », cette centralisation existait en pratique pour la mise en 'uvre des garanties extrinsèques, à l'initiative des banques, comme tel était le cas en l'espèce.

En effet, dans la « convention de cautionnement portant garantie d'achèvement d'immeuble à construire » conclue avec la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées le 28 juin 2006 au profit de la Sci [Adresse 8], l'article 6 stipule que « l'intégralité des prix de vente devra obligatoirement être versée à la caisse d'épargne ; ('). Toutes les sommes à provenir des ventes seront donc portées au crédit du compte courant n°086865477.37 ouvert dans les livres de la Caisse d'épargne au nom de la partie cautionnée ».

En se dotant, sans y être obligé, d'un outil de centralisation financière du programme de construction envisagé, le garant d'achèvement s'est mis en mesure de contrôler le financement de l'opération de construction et de s'assurer que les fonds versés par les acquéreurs au promoteur immobilier sont bien utilisés pour le programme immobilier visé dans l'acte de cautionnement, aux fins d'assurer sa sécurité et d'éviter ou limiter la mise en jeu de son engagement de caution.

Dans l'acte de vente en l'état futur d'achèvement conclu par M. [D] et la Sci [Adresse 8], il est stipulé (p.16) que le paiement de l'intégralité du prix, pour être libératoire, devra être effectué sur le « compte centralisateur (...) ouvert au nom de la Sci [Adresse 8] à la Caisse d'épargne par chèque barré à l'ordre de la banque avec indication du programme ou du numéro de compte. Ils pourront également être remis entre les mains du notaire rédacteur de l'acte de vente qui aura pour mission d'en opérer le versement au compte du vendeur. (') Toutes les sommes dues par l'acquéreur au titre du présent contrat devront, pour être libératoires, impérativement être versées sur le compte d'opération ouvert par le vendeur dans les livres de la Caisse d'épargne par virement bancaire ou chèque adressé et libellé à l'ordre de la banque sur le compte ci-dessus référencé ».

Cet outil, auquel il est fait référence dans le contrat de vente en l'état futur d'achèvement de M. [D], oblige le garant d'achèvement à une surveillance du compte unique et au contrôle de l'intégration des appels de fonds à ce compte.

Le garant d'achèvement s'est rendu débiteur à l'égard de l'acquéreur d'une obligation de diligence et de vigilance de l'opération de construction et des mouvements de fonds sur le compte centralisateur.

Ainsi mis en mesure d'exercer un contrôle des mouvements de fonds sur le compte centralisateur, le garant d'achèvement devait être alerté du comportement potentiellement frauduleux du promoteur en présence de débits sans aucun lien avec l'opération de construction.

L'article 5 de la convention de cautionnement prévoit que la rémunération de la Caisse d'épargne est de 64 000 euros et est due dès la signature de la convention de cautionnement, et le compte centralisateur est ouvert au nom du promoteur, de sorte que les fonds déposés dessus étaient la propriété de la Sci Guzet 2002 et pouvaient être utilisés pour payer le garant d'achèvement. Il ne saurait donc être reproché à faute à la Caisse d'épargne d'avoir débité cette somme du compte centralisateur.

Il ne peut être reproché au garant d'achèvement de ne pas avoir été alerté par le débit depuis le compte centralisateur afférent au programme de l'immeuble Merens I de sommes correspondant aux frais de commercialisation facturés par la Sarl Eurodome, aux frais de gestion administrative et technique facturés par la Sas Simbiosis Properties dans la mesure où ces dépenses, certes étrangères à l'exécution des travaux de construction, se rapportent à des éléments du prix de revient du programme et étant précisé que tel que cela résulte des stipulations de la convention de cautionnement et du bilan prévisionnel, seule la moitié des fonds à recevoir allaient être utilisés pour construire l'immeuble à proprement parler.

En revanche, la rémunération de la Sarl de gestion de l'immeuble, ainsi que de la Sarl de gestion du bar-restaurant, alors que l'immeuble n'est pas encore achevé ne correspondent pas à un élément relatif au programme, commercialisation, gestion de la construction, ou construction elle-même mais concernent des activités postérieures. Elles ne constituent pas « un élément du prix de revient du programme de construction » tel que visé par l'article 2 de la convention de cautionnement, et n'auraient donc pas dû être payées depuis le compte centralisateur.

Ces paiements auraient donc dû alerter la Caisse d'épargne, sans qu'elle puisse refuser le débit compte tenu des règles applicables aux comptes de dépôt et de la libre disposition des fonds par le déposant, le garant d'achèvement n'exerçant qu'une surveillance de l'affectation des fonds, sans pouvoir de contrainte.

Alertée, la Caisse d'épargne aurait dû accroître sa vigilance et informer l'acquéreur de mouvements de fonds douteux.

En outre, le contrat de cautionnement indique que les bâtiments Merens I et II et Bethmale sont composés de 69 appartements destinés à la vente et ainsi que l'article 6 l'indique : un tableau récapitule les prix de vente des lots, dont il est prévu que « l'intégralité des prix de vente devra obligatoirement être versée à la Caisse d'épargne ».

Si la Caisse d'épargne ne produit pas l'annexe à la convention de cautionnement qui précise les prix de vente minimum à respecter par le promoteur, les experts judiciaires ont relevé que les premiers versements réalisés à la signature de l'acte pour 43 acquéreurs des appartements Merens I et II ont été correctement crédités sur le compte centralisateur pour un total de 2 007 444 euros par la Scp notariale, puis 42 502,66 euros par M. et Mme [E], et 39 426 euros par M. et Mme [P], 18 485,49 euros par M. et Mme [C], et 944 927,66 euros pour le bâtiment Bethmale, soit un total de 3 052 786,21 euros pour les trois bâtiments alors que dans le bilan prévisionnel communiqué par la Caisse d'épargne, et qu'elle prétend avoir reçu du promoteur, il est indiqué que le total des réservations pour les trois bâtiments s'élève à la somme de 12 456 000 euros, qu'aucun crédit n'est souscrit et que la société apporte 1 500 000 euros ; que le prix de revient de l'opération de construction est de 11 444 000 euros comprenant en coût technique 6 680 000 euros (« fondations, vrd, elect+téléph+éclairage, construction, géomètre, architecte + bet, bureau de contrôle/sps, divers »).

La Caisse d'épargne ne pouvait donc ignorer avoir perçu seulement une fraction minime du prix de vente de chaque appartement.

Elle devait donc s'inquiéter à l'approche de la date indicative des travaux fixée contractuellement au 31 juillet 2007 de ne pas avoir reçu le reste du prix de vente des appartements par les acquéreurs.

Comme cela a été relevé par les experts judiciaires, sur la somme totale versée sur le compte centralisateur, à hauteur de 3 052 786,21 euros, la Caisse d'épargne a réglé :

- 1 653 872,73 euros au profit de la société Eurodome, au titre des honoraires de commercialisation des lots,

- 719 697,50 euros au profit de la Sarl de gestion [Adresse 8],

- 70 657 euros au profit de la Sarl de gestion du bar restaurant Le Papallau, suivant convention de prestation de services relatives à la phase 4 de l'opération,

- 46 452,64 euros au profit de la société Simbiosis properties, suivant convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, l'administration, la gestion et la direction des travaux et services clients,

- 13 156 euros au profit de la société Domus Aurea,

- 217 933,59 euros au profit de Nbcr,

- 116 789,40 euros au profit de [X],

- 15 530,06 euros au profit de Veritas,

- 7 439,12 euros au profit de [V],

- 24 448,07 euros au profit de [O],

- 64 000 euros au profit de la Caisse d'épargne au titre de sa garantie,

- 100 168,38 euros divers.

Les experts ont relevé que seuls 462 000 euros ont été versés à des sociétés spécialisées en bâtiment et travaux publics.

Dès lors que l'article 2 de la convention de cautionnement indique que « le montant des sommes nécessaires à la réalisation du programme de construction s'élève à 8 754 000 euros », la Caisse d'épargne devait donc s'alerter du paiement de la seule somme de 462 000 euros au titre des travaux et de l'utilisation des autres sommes pour payer d'autres professionnels à l'arrivée du terme de la date indicative d'achèvement du bâtiment fixée dans le contrat de cautionnement au 31 juillet 2007.

S'il est possible, comme l'affirme la Caisse d'épargne que la Sci [Adresse 8] ait eu d'autres modes de financement des travaux que le compte centralisateur, bien que cela ne soit nullement précisé dans le bilan prévisionnel que ladite Sci lui a communiqué, en revanche, la Caisse d'épargne aurait dû recevoir davantage de fonds de la part des acquéreurs que ce qu'il lui a effectivement été versé dès lors que le total des réservations s'élevait à plus de 12 000 000 d'euros et que la date prévisionnelle d'achèvement des travaux relatifs aux bâtiments Merens était prévue pour le 31 juillet 2007 dans la convention de cautionnement, ce qui aurait donc dû l'alarmer, indépendamment de la question du financement des travaux.

Or, elle a attendu septembre 2008 pour visiter le chantier, et ce, alors que dans le procès-verbal dressé par officier de police judiciaire et enregistrant les déclarations de Mme [F], directrice du centre d'affaires immobilier depuis janvier 2008 au sein de la Caisse d'épargne, celle-ci a reconnu avoir plusieurs fois contacté et tenté de rencontrer M. [G] en vain, entre mars et juin 2008 et constaté la carence de M. [G] (président de la Sas Simbiosis, dirigeante de la Sas Simbiosis properties elle-même dirigeante de la Sci [Adresse 8]) dès mars. Elle indique que « c'est en mai juin que j'ai réussi à lui faire reconnaître qu'il avait ouvert des comptes centralisateurs pour ses Sci à la Fortis en contradiction avec la convention de garantie d'achèvement ».

C'est donc à compter du mois de mars 2008, dès les premiers soupçons de la Caisse d'épargne à l'encontre de M. [G], soit huit mois après la date d'achèvement indicative des travaux visée dans la convention de cautionnement, que la Caisse d'épargne aurait dû contrôler l'état d'avancement du chantier, sans attendre le mois de septembre 2008.

M. [D] reproche donc avec justesse à la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées de ne pas avoir mis en 'uvre les moyens résultant de l'outils de suivi financier du programme immobilier dont elle s'est elle-même dotée.

Au regard des sommes en jeu et du délai indicatif de réalisation des travaux, il existait en effet plusieurs incohérences qui auraient dû conduire la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées à procéder à la vérification de l'état d'avancement des travaux, des appels de fonds réalisés ainsi que des paiements subséquents.

La Caisse d'épargne est donc fautive d'avoir attendu le 12 septembre 2008 pour visiter le chantier du bâtiment « Merens I ».

Elle aurait donc dû, dès le mois de mars 2008, aviser l'acquéreur, éventuellement par l'intermédiaire du notaire, du risque de défaillance présenté par la Sci [Adresse 8] dans la construction de l'immeuble visé.

Enfin, il convient de déterminer si la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées se devait d'être plus vigilante dans le cadre de l'opération de construction Merens compte tenu des difficultés rencontrées dans les autres programmes par des sociétés du groupe Simbiosis, dont elle s'est portée garant d'achèvement également.

Pour cela, il convient de déterminer si dans les autres programmes, la Caisse d'épargne a eu connaissance, avant mars 2008 de faits de nature à attirer son attention et accroître sa vigilance dans le cadre du programme Merens.

La Sci [Adresse 8] développait plusieurs programmes de construction à Guzet : Le Valier, Bethmale, Merens I et II, Papallau, Roc blanc et Club house.

Au présent dossier, M. [D] produit les rapports d'expertise relatifs aux programmes Le Valier et Bethmale.

Les experts judiciaires ont relevé que les comptes annuels de 2006 et 2007 de la Sci Guzet se soldaient par des résultats négligeables (46 000 euros et ' 11 000 euros), ce dont la Caisse d'épargne n'était pas nécessairement informée, puisque si elle avait consenti une garantie d'achèvement pour tous les bâtiments, une seule ouverture de crédit au bénéfice de la Sci Guzet 2002 pour 100 000 euros a été octroyée au titre des opérations Papallau et Roc Blanc en 2005.

Si la Caisse d'épargne avait les moyens de savoir dès le premier trimestre 2006 que la Sci [Adresse 8] ne respectait pas ses obligations contractuelles, dans le cadre du programme Le Valier, en recevant des fonds sur un autre compte bancaire ouvert auprès d'une autre banque, ce versement ne saurait être considéré, à lui seul, comme un élément suffisamment alarmant pour rendre la Caisse d'épargne vigilante et mettre en garde les acquéreurs, dans la mesure où les fonds ont été reversés sur le compte centralisateur.

En revanche, une fois dépassée la date indicative d'achèvement des travaux fixée au 30 septembre 2006, et après la conclusion du dernier acte de vente le 26 septembre 2006 et du reversement de l'acompte perçu par le notaire sur le compte centralisateur, la Caisse d'épargne devait s'inquiéter de ne plus avoir reçu aucuns fonds des acquéreurs ou du promoteur alors que la perception sur un autre compte des fonds des acquéreurs combiné à des débits sans lien avec l'opération de construction devaient alarmer le garant d'achèvement sur un risque de détournement de fonds par le promoteur ou de défaillance financière.

À ce titre, il convient de retenir le délai d'un an après le dernier versement de fonds sur le compte centralisateur des appels de fonds des acquéreurs, soit fin septembre 2007, et alors que la date indicative d'achèvement était dépassée de plusieurs mois, à l'issue duquel la Caisse épargne aurait dû vérifier l'état du chantier, contrôler les versements de fonds auprès des acquéreurs et les alerter des éléments soupçonneux dont elle avait connaissance.

En considération de l'ampleur de cette opération immobilière, des précédents dans la réalisation de certains programmes qu'elle ne pouvait ignorer dans le cadre des moyens de contrôle à sa disposition, la Caisse d'épargne aurait donc dû être particulièrement vigilante dans le cadre du programme immobilier « Merens », et ce, à compter de fin septembre 2007 compte tenu des irrégularités qu'elle aurait dû relever dans le cadre des autres programmes immobiliers garantis.

4. Le seul préjudice qui découle de ces fautes, consiste dans le fait d'avoir versé des fonds au promoteur immobilier après la date à laquelle la Caisse d'épargne aurait dû mettre en garde l'acquéreur, par le biais du notaire des agissements potentiellement frauduleux du promoteur. Ce préjudice consiste, s'agissant du manquement à une obligation d'information, en une perte de chance de ne pas s'exposer aux conséquences de la défaillance du promoteur immobilier et plus précisément, au détournement des fonds dont il a été victime et à leur perte définitive compte tenu de la liquidation judiciaire de la Sci [Adresse 8].

M. [D] demande l'indemnisation des préjudices suivants :

- 64 856,03 euros au titre des fonds débloqués dans le cadre de son prêt bancaire,

- 18 540,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation,

- 10 000 euros au titre de la perte de chance de ne pas avoir pu défiscaliser,

- 20 000 euros au titre du préjudice moral,

ce dont il déduit les 40 000 euros d'indemnité versés par le notaire, soit au total un préjudice à indemniser à hauteur de 73 396,61 euros.

Il est reproché à M. [D] de ne pas avoir payé tous les appels de fonds sur le compte centralisateur. Néanmoins, quand bien même il aurait versé les fonds sur le compte centralisateur, la négligence dont la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées a fait preuve dans la gestion de ce compte aurait conduit à la réalisation du préjudice résultant de la perte des sommes débloquées.

À cet égard, le garant d'achèvement est à l'origine d'une perte de chance évaluée par la cour à hauteur de 50% des fonds débloqués à compter de la fin d'octobre 2007 et non recouvrés par l'acquéreur, compte tenu de l'absence de fonds dans la procédure collective de la Sci [Adresse 8], tel que cela résulte du rapport d'expertise judiciaire ; et compte tenu du fait que la Caisse d'épargne aurait dû mettre en garde l'acquéreur, qui aurait été été plus vigilant dans le déblocage des fonds et le suivi du chantier.

Cependant, il ne saurait être considéré comme l'a soulevé l'acquéreur que le garant aurait dû refuser d'octroyer sa garantie d'achèvement conclue le 28 juin 2006 alors que c'est à partir de la fin septembre 2007 qu'elle aurait dû nourrir des soupçons à l'encontre des agissements du promoteur comme cela ressort de l'opération Le Valier. Ce sont donc les versements de fonds effectués à compter d'octobre 2007 qui sont susceptibles de constituer un préjudice indemnisable pour l'acquéreur.

En l'espèce, d'après le rapport d'expertise : M. [D] a versé 46 351 euros en guise de premier versement à l'étude le 31 août 2006, puis une somme de 18 505 euros au titre de l'achèvement des fondations le 26 décembre 2006. L'acquéreur n'a débloqué aucune somme après le mois de septembre 2007.

En conséquence, le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande en indemnisation au titre du préjudice découlant des fonds débloqués dans le cadre de son prêt bancaire.

M. [D] sollicite l'octroi de dommages et intérêts au titre de l'indemnité de résiliation du contrat de vente mais les fautes de la Caisse d'épargne ne sont pas à l'origine de la résiliation du contrat de vente, qui n'est due qu'au comportement frauduleux du promoteur et à ses difficultés financières. Le non-paiement de cette indemnité par le promoteur ne constitue donc pas un préjudice indemnisable. Il convient dès lors de rejeter la demande de M. [D] présentée à ce titre.

Il sollicite le paiement d'une somme au titre de la perte de chance de ne pas avoir pu défiscaliser. Cependant, cette perte de chance ne résulte pas de la faute de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées mais du détournement des fonds par le promoteur immobilier et de sa défaillance financière, ainsi que de la décision de M. [D] de demander la résolution de la vente plutôt que de solliciter l'achèvement du programme immobilier. Il convient donc de rejeter la demande de M. [D] présentée à ce titre.

Enfin, il demande à la cour d'indemniser le préjudice moral qu'il prétend avoir subi. M. [D] été indemnisé pour un préjudice moral par le tribunal correctionnel de Toulouse dans son jugement du 17 décembre 2014 dans le cadre de l'instance pénale dirigée contre M. [G], M. [Z], M. [W] [Y] et Mme [J] à hauteur de 5 000 euros.

S'il s'agit de préjudices moraux distincts, celui indemnisé par le tribunal correctionnel résultant de l'infraction retenue à l'encontre des prévenus, tandis que celui dont il est fait état devant la cour résultant potentiellement du manquement de la Caisse d'épargne à son devoir de vigilance et d'information, il n'est pas démontré en l'espèce l'existence d'un préjudice moral subi par l'acquéreur en lien avec des conséquences patrimoniales imputables au garant d'achèvement.

- Sur les dépens et frais irrépétibles :

5. M. [D], partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamné aux dépens d'appel.

Il convient d'infirmer le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu'il a passé en frais privilégiés de la liquidation de la Sci [Adresse 8], disposition contraire aux règles édictées par l'article 696 du code de procédure civile, la présente action engagée par M. [D] étant étrangère à la procédure collective affectant la Sci [Adresse 8], d'ailleurs à ce jour clôturée.

Toutefois, force est de constater que cette disposition relative aux dépens est attachée à l'intégralité de l'instance engagée devant le tribunal, de sorte que dans la limite de sa saisine, la cour infirmant partiellement le jugement sur ce point, condamnera M. [D] aux dépens strictement liés à l'appel en cause de la Sa Caisse d'épargne Midi-Pyrénées.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties qui les ont exposés, les frais non compris dans les dépens.

Elles seront déboutées de leur demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse sauf en ses dispositions relatives aux dépens.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant, 

Condamne M. [I] [D] aux dépens de première instance liés à l'appel en cause de la Sa Caisse d'épargne Midi-Pyrénées et aux dépens d'appel.

Rejette les demandes présentées au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le Greffier, Le Président,

N. DIABY M. DEFIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01700
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;20.01700 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award