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07/04/2023 | FRANCE | N°21/00614

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 07 avril 2023, 21/00614


07/04/2023





ARRÊT N° 198/2023



N° RG 21/00614 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N65B

MS/AR



Décision déférée du 14 Janvier 2021 - Pole social du TJ de FOIX 18/00186

BONZOM B.























S.C.E.A. DE [3]





C/



MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE MIDI-PYRENEES SUD








































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CONFIRMATION





grosse délivrée le 7 4 23

à Me Ludovic SEREE DE ROCH, et àMe Maud TRESPEUCH



CCC/LRAR à

-S.C.E.A. DE [3]

-MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE MIDI-PYRENEES SUD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU ...

07/04/2023

ARRÊT N° 198/2023

N° RG 21/00614 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N65B

MS/AR

Décision déférée du 14 Janvier 2021 - Pole social du TJ de FOIX 18/00186

BONZOM B.

S.C.E.A. DE [3]

C/

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE MIDI-PYRENEES SUD

CONFIRMATION

grosse délivrée le 7 4 23

à Me Ludovic SEREE DE ROCH, et àMe Maud TRESPEUCH

CCC/LRAR à

-S.C.E.A. DE [3]

-MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE MIDI-PYRENEES SUD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEPT AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.C.E.A. DE [3]

prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège sis [Adresse 2]

représentée par Me Ludovic SEREE DE ROCH, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE MIDI-PYRENEES SUD

prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège sis [Adresse 1]

représentée par Me Maud TRESPEUCH de la SELARL LESPRIT-TRESPEUCH, avocat au barreau D'ARIEGE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Février 2023, en audience publique, devant M.SEVILLA et M-P.BAGNERIS, conseillères, chargées d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :  

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

MP. BAGNERIS, conseillère

M. SEVILLA, conseillère

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente , et par A.RAVEANE, greffière de chambre.

La SCEA de [3] a pour activité la culture de fruits depuis le 1er janvier 2014.

Cette entreprise agricole qui exploite des vergers en Ariège, commercialise directement sa production sur les marchés de la région.

Un contrôle a été opéré par la mutualité sociale agricole (MSA) et par les services de l'Inspection du Travail de l'Ariège du 1er juillet 2016 au 9 octobre 2017.

Un procès verbal dressé le 10 avril 2017 a été transmis au Procureur de la République de Foix pour dénoncer des faits de travail dissimulé.

La MSA a transmis le 9 octobre 2017 une lettre d'observation à SCEA de [3] l'informant de son délai de 30 jours pour contester le redressement retenu au regard des heures de travail minorées des 8 salariés de la société.

La SCEA de [3] a adressé ses observations auxquelles la Msa a répondu le 21 novembre 2017.

La SCEA de [3] a saisi la commission de recours amiable de la Msa qui a rejeté ses demandes.

Le 15 novembre 2017, la Msa a adressé à SCEA de [3] une mise en demeure de payer la somme de 225.138,85 euros.

Par jugement définitif du 5 février 2019, le tribunal correctionnel de Foix a reconnu la société de [3] coupable de travail dissimulé pour la période du 1er janvier 2014 au 30 juin 2016.

Par jugement du 14 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Foix a rejeté le recours de la SCEA de [3] contre les cotisations réclamées par la MSA au titre de la mise en demeure du 15 novembre 2017 et l'a condamnée à payer 225.138,85 euros au titre des cotisations dues au titre d'un travail dissimulé pour la période du 1er juillet 2016 au 9 octobre 2017.

La SCEA de [3] a fait appel de la décision dans des conditions de délai et de forme non contestées.

Dans ses dernières écritures reprises oralement et auxquelles il convient de renvoyer pour complet exposé, elle demande d'infirmer la décision et de dire mal-fondée la MSA en ses demandes, et de la condamner à lui payer 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Au soutien de son appel, elle allègue que la Msa a soumis au tribunal correctionnel un chiffrage erroné et incohérent. Elle ajoute qu'en refusant la communication du procès-verbal transmis au procureur elle a violé le principe du contradictoire. Enfin, elle conteste le chiffrage de temps de travail retenu considérant que la caisse a surévalué les temps de travail des employés.

Dans ses dernières écritures, reprises oralement et auxquelles il convient de renvoyer pour complet exposé, la MSA sollicite la confirmation de la décision et la condamnation de la société de [3] à lui payer 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Au soutien de ses demandes elle rappelle que dans le cadre d'un travail dissimulé il appartient à l'employeur qui conteste les durées de travail retenues de démontrer la réalité de ces déclarations et ajoute qu'aucune pièce n'est produite en ce sens.

L'audience s'est déroulée le 9 février 2023. La décision a été mise en délibéré au 7 avril 2023.

Motifs:

Sur le respect du contradictoire et la régularité de la procédure:

La procédure applicable au contrôle des organismes sociaux dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé est dérogatoire. À ce titre, l'organisme n'est pas tenu à l'envoi d'un avis de contrôle préalable (code de la sécurité sociale art.'R.'243-59, al.'2).

Les infractions sont constatées au moyen de procès-verbaux.

Les procès-verbaux sont transmis directement au procureur de la République. Ils permettent au ministère public d'engager, s'il l'estime nécessaire, des poursuites pénales et de déclencher l'action publique. Ces procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire.

Aux termes de l'article D724-9 alinéa 1 du code rural et de la pêche maritime, à l'issue du contrôle , la caisse de mutualité sociale agricole adresse au moyen d'une lettre recommandée avec avis de réception aux personnes contrôlées un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle et, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements d'assiette et de taux envisagés, ou du montant des prestations à reverser, tels que connus à cette date.

Le cotisant dispose d'un délai de 30'jours pour répondre à la lettre d'observations. Ce délai peut être porté, à la demande de la personne contrôlée, à 60'jours. Lorsque la personne contrôlée répond dans ce délai, l'agent chargé du contrôle est lui-même tenu d'y répondre.

La Cour de cassation a déjà eu l'occasion de rappeler que le procès-verbal de constat de travail dissimulé n'a pas à être joint à la lettre d'observations (Cass. 2e civ., 28'mai 2020, n°'19-14.862 ).

En l'espèce, du 1er juillet 2016 au 9 octobre 2017, des contrôleurs de la Msa et un inspecteur du travail de l'Ariège ont procédé à des investigations tendant à démontrer l'existence d'un travail dissimulé, délit relevé par procès verbal du 10 avril 2017, transmis au procureur de la République.

La MSA a transmis le 9 octobre 2017 une lettre d'observation à la SCEA de [3] l'informant de son délai de 30 jours pour contester les éléments de redressement retenus au regard des heures de travail minorées des 8 salariés de la société.Ce document rappelle l'objet du contrôle et mentionne les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle ainsi que l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements envisagés.

La SCEA de [3] a adressé ses observations auxquelles la Msa a répondu le 21 novembre 2017.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la procédure est régulière et respecte parfaitement le principe du contradictoire.

En outre, la SCEA de [3] ne peut valablement reprocher à la Msa de ne pas lui avoir transmis le procès-verbal constatant le délit, une telle exigence n'étant pas imposée par la Cour de Cassation, et ce d'autant plus que dans le cas d'espèce, la société a bien eu accès à cette pièce dans le cadre de la procédure pénale.

Sur les modalités d'évaluation des cotisations à recouvrer:

La SCEA de [3] considère que le chiffrage retenu par la Msa est fantaisiste et disproportionné.

Toute personne condamnée pour recours au travail dissimulé est tenue au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires, ainsi que des pénalités et majorations de retard dues aux organismes de protection sociale. L'article L.'242-1-2 du Code de la sécurité sociale dispose qu'à défaut de preuve contraire en termes de durée effective d'emploi et de rémunération versée, pour le calcul des cotisations et contributions sociales, les rémunérations dues à un salarié en contrepartie d'un travail dissimulé sont évaluées forfaitairement à 25'% du plafond défini à l'article L.'241-3 du code précité en vigueur au moment du constat du délit de travail dissimulé et sont réputées avoir été versées au cours du mois où le délit de travail dissimulé est constaté. Par conséquent, les organismes n'ont plus à supporter la preuve du montant de la rémunération ni de la durée d'emploi du travailleur «'dissimulé'» lorsque ces éléments ne peuvent être déterminés a priori.

Le recours à l'évaluation forfaitaire spécifique des rémunérations dans le cadre d'une infraction en cas de travail dissimulé est légitime dès lors que l'employeur n'a pas produit, lors des opérations de contrôle, les éléments de preuve nécessaires à la détermination de l'assiette des cotisations.

Les organismes peuvent également procéder à une évaluation au réel du temps de travail effectif des salariés.

Pour contester l'évaluation de la rémunération servant de base au calcul du redressement, l'employeur doit apporter la preuve non seulement de la durée réelle d'emploi du travailleur dissimulé, mais encore du montant exact de la rémunération versée à ce dernier pendant cette période.

Or en l'espèce, c'est par de justes motifs que la Cour s'approprie que le Tribunal a écarté le moyen tiré de la différence de chiffrage des préjudices retenus par l'organisme social devant le pôle social et devant le juge pénal.

En effet, le chiffrage repris dans la procédure pénale ne concerne pas exclusivement le préjudice de la MSA mais également celui des services fiscaux.

En outre comme l'a justement retenu le Tribunal judiciaire de Foix, la Msa justifie parfaitement de son mode de calcul.

Ainsi, il ressort de la lettre d'observation adressée le 9 octobre 2017 que si le SCEA de [3] a procédé aux déclarations de l'ensemble des salariés, seuls trois d'entre eux sont déclarés à temps plein alors que les 5 autres disposent d'un contrat à temps partiel.

L'enquête qui a procédé notamment aux auditions des salariés, des commerçants et placiers, ainsi qu' à des investigations au sein du siège social de la société a conclu à d'importantes discordances entre les temps de travail déclarés et ceux réellement réalisés permettant de conclure à une dissimulation d'heures de travail comprise entre 100 et 130 heures par semaine.

La MSA détaille dans sa lettre d'observation, salarié par salarié, le temps de travail déclaré et le temps de travail évalué.

Pour chaque salarié redressé, la Msa a produit une comparaison du temps de travail déclaré et du temps de travail effectué après audition des salariés et des vendeurs des marchés. Elle a chiffré pour chacun d'entre eux les temps de déplacement, de chargement et de déchargement, de manière détaillée et précise, période par période. Elle a de surcroît pour chaque salarié reproduit les calculs de rappels dans un tableau individuel.

Ainsi pour Mme [S] qui est déclarée à hauteur de 13h23min par semaine, la Msa a relevé qu'elle participait à 6 marchés par semaine de 7h30 à 13H30, soit un total de 36h de travail sans prise en compte du temps de déplacement qui ramène le temps de travail à 45h par semaine.

La Msa a ensuite produit un tableau permettant de chiffrer les cotisations sociales dues au titre du temps de travail dissimulé de Mme [S].

Pour Mme [G] la Msa a retenu 5 heures de travail supplémentaires par semaine correspondant au temps de chargement et de déplacement et a redressé les cotisations salariales à cette hauteur.

Pour M. [W] [D] la Msa a chiffré des heures supplémentaires à 44h55min par semaine pour janvier 2014, 36h35 par semaine entre février 2014 et février 2016 puis à 27h20min à compter de mars 2016. La Msa a expliqué son calcul en retenant la présence du salarié sur les marchés, ses temps de chargement et déchargement, de déplacement entre les marchés et le siège social en Ariège.

M.[J] [D] a été contrôlé et son temps de travail hebdomadaire estimé à 46h35 par semaine au regard des déplacements entre le siège social et les différents marchés outre les majorations du dimanche.

M.[H] a été redressé à hauteur de 3h20 par semaine au titre du temps de chargement et déchargement outre le temps de déplacement.

M.[V] [D] a été contrôlé sur deux marchés et son temps de travail dissimulé évalué à 29h56 minutes par semaine du 21 mai 2014 au 31 décembre 2014 puis à hauteur de 38het 3 minutes entre le 1er janvier et le 29 février 2016 enfin à 26heures 25 minutes par semaine à compter du 1er mars 2016.

Pour Mme [Z], la reconstitution de son emploi du temps a justifié un redressement de 17h33 minutes par semaine.

A contrario, la SCEA de [3] se contente de procéder par affirmation alléguant que la Msa a surévalué les heures de travail effectuées. Elle ne produit toutefois aucun élément venant remettre en cause le résultat des investigations précises et étayées menées par les enquêteurs de la Msa et reprises dans la lettre d'observation.

Dans ces conditions, le jugement sera intégralement confirmé et le redressement validé.

Sur les autres demandes:

Succombant à l'instance la SCEA DE [3] sera condamnée à payer à la Msa Midi Pyrénées Sud la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ces motifs:

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire en dernier ressort:

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal judiciaire de Foix du 14 janvier 2021,

Y ajoutant,

Condamne la SCEA de [3] à payer à la MSA Midi Pyrénées Sud la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par A.RAVEANE, greffière de chambre.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

A.RAVEANE N.ASSELAIN .


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 21/00614
Date de la décision : 07/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-07;21.00614 ?
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