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14/03/2023 | FRANCE | N°20/03523

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 14 mars 2023, 20/03523


14/03/2023





ARRÊT N°



N° RG 20/03523

N° Portalis DBVI-V-B7E-N3NT

A.M R / RC



Décision déférée du 19 Octobre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE - 18/03630

MME TAVERNIER

















S.A.S. IMMO'TEP





C/



[V] [U]












































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



S.A.S. IMMO'TEP

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuel HILAIRE, avocat au barreau de TOULOU...

14/03/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/03523

N° Portalis DBVI-V-B7E-N3NT

A.M R / RC

Décision déférée du 19 Octobre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE - 18/03630

MME TAVERNIER

S.A.S. IMMO'TEP

C/

[V] [U]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A.S. IMMO'TEP

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuel HILAIRE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [V] [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Carmen COUDRIER, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, devant Mesdames A.M ROBERT et C. ROUGER, magistrates chargées de rapporter l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS

Le 5 décembre 2015, M. [V] [U] et Mme [P] [W] épouse [U], aujourd'hui décédée, ont conclu avec la Sas Immo'Tep un mandat de vente non exclusif de leur immeuble situé à [Localité 5] (31) au prix de 389.000 euros, pour une durée de 24 mois à compter de la signature du mandat comprenant une période irrévocable de trois mois et moyennant rémunération de l'agent immobilier de 19.450 euros à la charge des vendeurs.

Par courrier du 28 janvier 2016, les époux [U] ont signifié à l'agent immobilier leur refus d'accepter l'offre d'achat présentée le 27 janvier de la même année par la Sas Lymo.

Postérieurement à la révocation du mandat à l'initiative des mandants, la Sas Immo'Tep a fait assigner ces derniers en référé afin d'obtenir paiement du montant de la clause pénale figurant au contrat.

Par ordonnance du 28 juillet 2016, la Sas Immo'Tep a été déboutée de ses demandes et condamnée à payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte d'huissier du 24 octobre 2018, la Sas Immo'Tep a fait assigner M. [V] [U] devant le tribunal de grande instance de Toulouse afin de le voir condamner au paiement du montant de la clause pénale.

Par jugement contradictoire du 19 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- déclaré abusive la clause pénale numérotée XVI du contrat de mandat du 5 décembre 2015 conclu entre M. [V] [U] et la Sas Immo'Tep,

- dit que ladite clause est réputée non écrite,

- débouté en conséquence la Sas Immo'Tep de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la Sas Immo'Tep, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens,

- condamné la Sas Immo'Tep, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. [V] [U] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que la clause pénale stipulée au contrat de mandat, rédigée en des termes généraux et imprécis, n'était, lors de la conclusion du contrat, ni claire ni compréhensible pour le mandant et était ainsi de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L 132-1 du code de la consommation qui sont d'ordre public.

Par déclaration du 11 décembre 2020, la Sas Immo'Tep a relevé appel de ce jugement, concernant l'ensemble de ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 janvier 2021, la Sas Immo'Tep, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1152 (anciens) du code civil et de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 dite loi 'Hoguet' et son décret modificatif n°2015-724 du 24 juin 2015, de :

- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement dont appel et statuant à nouveau :

- condamner M. [U] à lui verser une indemnité de 19 450 euros en application de la clause pénale prévue par le mandat de vente du 5 décembre 2015, majorée des intérêts au taux légal depuis l'assignation en référé du 15 juin 2016,

- condamner M. [U] au paiement d'une indemnité de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [U] aux entiers dépens, comprenant les dépens de la présente instance, les dépens de première instance et les dépens de l'instance de référé.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2021, M. [V] [U], intimé, demande à la cour, au visa des articles 1104, 1991 et suivants et 1217 du code civil, de l'article L.132-1 du code de la consommation et de l'article 6 alinéa 3 de la loi 70-9 du 2 janvier 1970, de :

- confirmer le jugement dont appel,

En toute hypothèse,

- débouter la société Immo' Tep de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société Immo' Tep au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de

l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 octobre 2022.

L'affaire a été examinée à l'audience du 24 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

En vertu des dispositions de l'article 1152 ancien du code civil applicable au présent litige au regard de la date du contrat, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Constitue une clause pénale au sens de cet article la clause par laquelle les parties évaluent forfaitairement et à l'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.

Aux termes de l'article 6, I, alinéa 5, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif de commissions, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes visées par le premier article de la loi ou ne peut être exigé ou accepté par elles avant qu'une des opérations visées à cet article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties.

Il résulte des dispositions de l'article 78 du décret du 20 juillet 1972 pris pour l'application de la loi du 02 janvier 1970 dite loi Hoguet, dans sa version applicable au litige, que lorsqu'un mandat est assorti d'une clause d'exclusivité ou d'une clause pénale, ou lorsqu'il comporte une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l'opération est conclue sans les soins de l'intermédiaire, cette clause ne peut recevoir application que si elle résulte d'une stipulation expresse d'un mandat dont un exemplaire a été remis au mandant. Cette clause doit être mentionnée en caractères très apparents.

Le mandat signé le 5 décembre 2015 est un mandat de vente non exclusif comportant une clause pénale en paragraphe XVI, mentionnée en caractères majuscules et en gras, ainsi rédigée :

«En cas de non respect de la clause ci-dessus, le mandant versera une indemnité compensatrice forfaitaire correspondant à la moitié des honoraires convenues. Par ailleurs, en cas de vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par l'intermédiaire de l'agence, ou de refus de vendre à un acquéreur qui aurait été présenté par l' agence, ou en cas d'infraction à une clause d'exclusivité, le mandant versera une indemnité compensatrice forfaitaire égale à la rémunération prévue au présent mandat.

En cas de présentation du bien à vendre à un prix différent, en contradiction avec le paragraphe X, et si cette présentation est faite à un prix inférieur à celui qui est prévu au présent mandat, le mandant versera une indemnité compensatrice forfaitaire correspondant à la moitié des honoraires convenues, le mandataire subissant un préjudice par la perte d' une chance de vendre le bien ».

La Sas Immo'Tep se prévaut du 1er alinéa de la clause estimant que le mandant a manqué à ses obligations en refusant de vendre à un acquéreur qui lui a été présenté par elle, manquant ainsi à l'obligation contractuelle mise à sa charge par l'article X du mandat stipulant que le mandant s'oblige, pendant la durée du mandat, « à ratifier la vente à tout acquéreur qui lui sera présenté par le mandataire acceptant les prix et conditions du mandat ».

L'article L.132-1 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Comme l'a relevé le premier juge, si le début du premier alinéa de la clause pénale renvoie « au non respect de la clause ci-dessus », soit la clause XV concernant la vente sans le concours du mandataire, la deuxième partie du texte est rédigée en termes très généraux, sans renvoi à la clause X s'agissant du refus de vendre et de la vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par l'agence et avec mention d'une infraction à la clause d'exclusivité non concernée par le mandat litigieux.

Elle ne renvoie pas non plus à la clause III du contrat, cochée par les mandants, et stipulant que les honoraires, dont le montant est précisé, seraient à leur charge et exigibles le jour où l'opération serait effectivement conclue.

Au demeurant, la clause X du mandat, stipulant que le mandant s'oblige, pendant la durée du mandat, « à ratifier la vente à tout acquéreur qui lui sera présenté par le mandataire acceptant les prix et conditions du mandat » est elle aussi particulièrement imprécise puisque le mandat ne comporte, à l'exception du montant du prix du bien vendu et des honoraires du mandataire à la charge du vendeur, aucune condition relative aux éléments de l'offre d'achat, aux modalités de conclusion du compromis de vente, aux garanties ou conditions suspensives. Cette imprécision conduit à sanctionner le refus de toute offre d'achat quelles que soient ses conditions, au mépris des dispositions d'ordre public de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970.

Il ressort du tout que la clause pénale litigieuse, rédigée en termes généraux et imprécis, n'apparaît ni claire ni compréhensible pour le mandant et que tant cette clause que la clause X du contrat de mandat créent, au détriment du mandant non-professionnel, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il déclaré abusive la clause pénale numérotée XVI du contrat de mandat du 05 décembre 2015 conclu entre M. [V] [U] et la SAS Immo'Tep, dit que ladite clause est réputée non écrite et débouté la Sas Immo'Tep de ses demandes.

Les demandes annexes

Confirmé en toutes ses dispositions principales le jugement entrepris doit aussi être confirmé quant à ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant en appel, la Sas Immo'Tep supportera les dépens d'appel et se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement rendu le 19 octobre 2020 le tribunal judiciaire de Toulouse ;

Y ajoutant,

- Condamne la Sas Immo'Tep aux dépens d'appel ;

- Condamne Sas Immo'Tep à payer à M. [V] [U] la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- Déboute la Sas Immo'Tep de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03523
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;20.03523 ?
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