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07/03/2023 | FRANCE | N°20/01383

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 2, 07 mars 2023, 20/01383


07/03/2023



ARRÊT N°23/111



N° RG 20/01383 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NSTK

SH/CD



Décision déférée du 13 Mars 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTAUBAN - 17/01015 AS.DERENS

+ 2 juin 2020















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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 2

***

ARRÊT DU SEPT MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



Madame [D] [C]

[Adresse 8]

[Localité 7]



Représentée par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI - EGEA - L...

07/03/2023

ARRÊT N°23/111

N° RG 20/01383 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NSTK

SH/CD

Décision déférée du 13 Mars 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTAUBAN - 17/01015 AS.DERENS

+ 2 juin 2020

[D] [C]

C/

[U] [N]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 2

***

ARRÊT DU SEPT MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [D] [C]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI - EGEA - LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

INTIMÉ

Monsieur [U] [N]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Sabine MOLINIERE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. DUCHAC, présidente

V. MICK, conseiller

M.C. CALVET, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. CENAC

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par C. DUCHAC, présidente, et par M. TACHON, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [D] [C] et M. [U] [N] se sont mariés le 14 mai 1994 à [Localité 7], après avoir établi un contrat de mariage le 29 mars 1994, devant Maître [K], notaire à [Localité 7].

Le 13 août 2013, M. [U] [N] a déposé une requête en divorce.

Par ordonnance de non conciliation en date du 25 novembre 2013, le juge aux affaires familiales de Montauban a notamment :

- attribué à Mme [D] [C] la jouissance du domicile conjugal à titre onéreux, à charge pour elle d'assurer les charges et les éventuels emprunt y afférents,

- dit que M. [U] [N] percevra les revenus locatifs et assumera les charges et emprunts afférent à l'immeuble indivis situé [Adresse 2],

- dit que M. [U] [N] percevra les revenus locatifs et assumera les charges et emprunts afférent à l'immeuble indivis situé [Adresse 3].

Par jugement en date du 5 mars 2015, le juge aux affaires familiales de Montauban a prononcé le divorce des époux M. [U] [N] / Mme [D] [C] en application de l'article 233 du code civil et notamment :

- dit que dans les rapports entre époux concernant leurs biens, les effets du divorce remonteront au 25 novembre 2013,

- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,

- débouté Mme [D] [C] de sa demande de prestation compensatoire.

Mme [D] [C] a relevé appel de cette décision et par arrêt du 12 avril 2016, la présente cour a confirmé le jugement sauf en ce qui concerne la participation de Mme [D] [C] aux frais de scolarité de l'enfant.

Par assignation en date du 21 juin 2017, M. [U] [N] a saisi le juge aux affaires familiales de Montauban en vue du règlement des intérêts patrimoniaux des époux.

Par jugement contradictoire rendu le 13 mars 2020, dont une erreur matérielle a été rectifiée le 2 juin 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Montauban a :

- dit que M. [N] et Mme [C] sont propriétaires indivis de la maison d'habitation située à [Adresse 10] à proportion de la moitié chacun ;

- fixé la valeur de cet immeuble à 226 000 euros ;

- constaté l'accord des parties concernant sa vente amiable ;

- dit que M. [N] est créancier à l'encontre de Mme [C] à hauteur de 130 500 euros au titre de l'acquisition des terrains sis [Adresse 3] ;

- dit que les droits des parties sont de 50% chacun sur les deux immeubles sis [Adresse 3] ;

- fixé à 172 500 euros la valeur de l'immeuble sis [Adresse 3] et à 173 500 euros la valeur de l'immeuble sis [Adresse 2] compris,

- débouté Mme [C] de sa demande d'attribution préférentielle sur les deux immeubles locatifs ;

- attribué l'immeuble sis [Adresse 2] à M. [N] à charge pour lui de solder le prêt y afférent ;

- attribué l'immeuble sis [Adresse 3] à Mme [C] à charge pour elle de rembourser le solde du prêt y afférent ;

- dit que Mme [C] est débitrice envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de 720 euros par mois du 23 novembre 2013 au 16 juillet 2016;

Avant dire droit,

- ordonné une mesure d'expertise et commis pour y procéder : Mme [B] [F], expert inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Toulouse, avec mission de :

- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils et recueillir leurs observations à I'occasion de I'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise,

- se faire remettre par les parties l'ensemble des documents utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- proposer une évaluation de la valeur des terrains nus sis [Adresse 3] et actualiser la créance de M. [N] évaluée à 130 500 euros ;

- proposer un compte de liquidation de l'indivision en donnant tout élément permettant de déterminer le cas échéant l'existence des créances et dettes des indivisaires vis à vis de l'indivision et entre eux ;

- réservé les autres demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire.

L'expert a déposé son rapport le 15 juillet 2022. Les parties l'ont produit au débat.

Par déclaration électronique en date du 15 juin 2020, Mme [D] [C] a interjeté appel de cette décision, qu'elle critique en ce qu'elle a :

- dit que M. [N] et Mme [C] sont propriétaires indivis de la maison d'habitation située à [Adresse 10] à proportion de la moitié chacun,

- dit que M. [N] est créancier à l'encontre de Mme [C] à hauteur de 130 500 euros au titre de l'acquisition des terrains sis [Adresse 3],

- débouté Mme [C] de sa demande d'attribution préférentielle sur les deux immeubles locatifs,

- attribué l'immeuble sis [Adresse 2] à M. [N] à charge pour lui de solder le prêt y afférent,

- dit que M. [N] est créancier à l'encontre de l'indivision à hauteur de 130 500 euros au titre de l'acquisition des terrains 168 et [Adresse 3].

En cours de procédure l'immeuble situé [Adresse 10] ayant été le domicile conjugal, a été vendu le 23 octobre 2020 au prix de 226 000 euros. Les fonds sont consignés chez le notaire.

Par ordonnance rendue le 6 mai 2021, le magistrat chargé de la mise en état a autorisé le notaire à remettre à M. [U] [N] la somme de 50.000 euros sur le prix de vente consigné chez lui suite à cette vente.

Suivant ses dernières conclusions d'appelante en date du 16 décembre 2022, Mme [D] [C] demande à la cour :

- d'écarter des débats les conclusions d'intimé remises le 15 décembre 2022, ainsi que les pièces 7/13/46/47/56/57/58/59

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

* dit que M. [N] et Mme [C] sont propriétaires indivis de la maison d'habitation située à [Adresse 10] à proportion de la moitié chacun,

* dit que M. [N] est créancier à l'encontre de Mme [C] à hauteur de 130 500 euros au titre de l'acquisition des terrains sis [Adresse 3],

* débouté Mme [C] de sa demande d'attribution préférentielle sur les deux immeubles locatifs,

* attribué l'immeuble sis [Adresse 2] à M. [N] à charge pour lui de solder le prêt y afférent,

statuant à nouveau,

- de juger que le prix de vente du domicile conjugal, [Adresse 10], sera réparti à hauteur de 70% pour Mme [D] [C] et 30% pour M. [U] [N],

- de juger que M. [U] [N], ne peut prétendre à aucune créance à l'encontre de l'indivision concernant le financement des terrains à bâtir situés [Adresse 3],

- de juger que la liquidation des immeubles et terrains 168 et [Adresse 3], interviendra à hauteur de 50% pour chacun des indivisaires,

- de confirmer le jugement concernant la valeur de ces immeubles, à savoir 173.500 € pour le bien situé [Adresse 3] et 173.500 € pour le bien situé [Adresse 2],

- d'attribuer les deux immeubles à Mme [D] [C] à charge pour elle de racheter sa part de 50% à M. [U] [N],

- de renvoyer les parties devant Maître [Y], notaire à [Localité 7], pour procéder aux opérations de liquidation conformément au dispositif de l'arrêt,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé à 720 € par mois l'indemnité d'occupation sur la période du 23 novembre 2013 au 16 juillet 2016,

- de juger que M. [U] [N] est débiteur envers Mme [D] [C] au titre des comptes d'indivision, de 26.475,30 € et 2.955,50€ selon le rapport de Mme [F] expert (p 117 et 118 du rapport),

- de juger que dans les rapports entre époux, le divorce prend effet en ce qui concerne leurs biens, au jour de l' ordonnance de non conciliation et que la date de jouissance divise est celle du jour du partage,

- de débouter M. [U] [N] de son appel incident et de sa demande de licitation des biens,

- de condamner M. [U] [N] à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile , outre les dépens de première instance et d'appel ainsi que les frais d'expertise.

Suivant ses dernières conclusions d'intimé, portant appel incident, en date du 15 décembre 2022, M. [U] [N] demande à la cour:

- de déclarer irrecevables comme nouvelles les prétentions de Mme [D] [C] au titre de:

* la désignation de Me [Y], notaire pour procéder aux opérations de liquidation

* des comptes d'indivision selon le rapport d'expertise de Mme [F]

* de la date des effets du divorce et de la jouissance divise,

- de débouter Mme [D] [C] de l'ensemble de ses demandes,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que M. [U] [N] et Mme [D] [C] sont propriétaires indivis de la maison d'habitation située à [Adresse 10], à proportion de moitié chacun,

- d'ordonner le partage du prix de vente de la dite maison, séquestré chez le notaire, à hauteur de moitié chacun,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que M. [U] [N] est créancier à l'encontre de l'indivision à hauteur de 130.500 € au titre de l'acquisition des terrains situés [Adresse 3],

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les droits des parties sont de 50% chacun sur ces deux immeubles,

Statuant à nouveau,

- de dire que les droits de M. [U] [N] sont respectivement de 72% sur la valeur de la construction des maisons locatives situées [Adresse 3],

- de dire que M. [U] [N] est créancier à l'encontre de l'indivision de la somme de 277.803,64 € x 72% = 200.018,62 € au titre du financement de la construction des deux maisons locatives, à parfaire au cours des opérations d'expertise,

- dire que M. [N] est créancier à l'encontre de l'indivision de la somme de 277.803,64 euros x 72% = 200.018,62 euros, au titre du financement de la construction des deux maisons locatives, à parfaire au cours des opérations d'expertise,

- de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a attribué le bien sis [Adresse 2] à M. [N] et a attribué le bien sis [Adresse 3] à Mme [C],

- à défaut de ces attributions, préalablement aux opérations de liquidation, ordonner la licitation des biens situés à Montauban (82) : 186 chemin des Caussades cadastré DT section n°[Cadastre 6] pour une contenance de 16a95ca et le bien sis [Adresse 2] cadastré DT section [Cadastre 5] pour une contenance de 15a30ca, sur le cahier des charges qui sera déposé par Maitre [J], avocat, au greffe du tribunal de grande instance de Montauban sur la mise à prix respective de 130.000 euros pour chacun des biens, avec faculté de baisse du quart, qu'il plaira au tribunal de fixer d'office,

- de confirmer le jugement pour le surplus,

- de condamner Mme [D] [C] à lui payer la somme de 3.000 €au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

La clôture est intervenue le 19 décembre 2022.

L'affaire a été retenue à l'audience du 10 janvier 2023.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur l'étendue de la saisine de la cour

L'appel principal formé par Mme [D] [C] porte sur les dispositions du jugement qui ont:

- dit que M. [N] et Mme [C] sont propriétaires indivis de la maison d'habitation située à [Adresse 10] à proportion de la moitié chacun,

- dit que M. [N] est créancier à l'encontre de Mme [C] à hauteur de 130 500 euros au titre de l'acquisition des terrains sis [Adresse 3],

- débouté Mme [C] de sa demande d'attribution préférentielle sur les deux immeubles locatifs,

- attribué l'immeuble sis [Adresse 2] à M. [N] à charge pour lui de solder le prêt y afférent,

L'appel incident formé par M. [U] [N] porte sur la disposition du jugement qui a dit que les droits des parties sont de 50% chacun sur les deux immeubles situés [Adresse 3].

Par conséquent, les dispositions suivantes du jugement, non soumises à la cour sont définitives:

- fixé la valeur de l' immeuble situé à [Adresse 10] à 226 000 euros ;

- constaté l'accord des parties concernant sa vente amiable ;

- fixé à 172 500 euros la valeur de l'immeuble sis [Adresse 3] et à 173 500 euros la valeur de l'immeuble sis [Adresse 2] compris,

- attribué l'immeuble sis [Adresse 3] à Mme [C] à charge pour elle de rembourser le solde du prêt y afférent ;

Sur les conclusions de M. [U] [N] remises le 15 décembre 2022

Mme [D] [C] demande à la cour d'écarter les conclusions de M. [U] [N] en date du 15 décembre 2022 ainsi que certaines pièces sur le fondement des articles 15 et 16 du code de procédure civile, en raison de leur trop grande proximité avec la date de clôture.

Les dernières écritures et 8 pièces de l'intimé viennent actualiser à la baisse ses demandes chiffrées et soulever l'irrecevabilité de demandes de Mme [D] [C] qualifiées de nouvelles. Remises le jeudi 15 décembre 2022 pour une clôture qui avait été annoncée le lundi 19 décembre, elles n'ont pas empêché l'appelante d'en prendre connaissance et elle a pu déposer un nouveau jeu de conclusion dés le lendemain.

Par conséquent, la cour retiendra ces écritures.

Sur les demandes nouvelles

M. [U] [N] demande à la cour d'écarter, comme étant nouvelles, les demandes de Mme [D] [C] relatives à :

* la désignation de Me [Y], notaire pour procéder aux opérations de liquidation

* des comptes d'indivision selon le rapport d'expertise de Mme [F]

* de la date des effets du divorce et de la jouissance divise,

La demande relative à la date des effets du divorce ne constitue pas une prétention puisque cette date a été définitivement fixée au 25 novembre 2013 par le jugement de divorce du 5 mars 2015 confirmé par la cour.

Sur la date de jouissance divise, Mme [D] [C] ne fait que reprendre les dispositions légales suivant lesquelles elle doit être fixée au plus proche du partage, mais elle ne propose pas une date précise. Il ne s'agit donc pas non plus d'une demande.

La désignation du notaire n'avait pas été demandée au premier juge ni évoquée dans les premières écritures d'appelante de Mme [D] [C]. Elle sera donc déclarée irrecevable comme nouvelle.

En ce qui concerne la demande au titre des comptes d'indivision (hors indemnité d'occupation), d'ailleurs non explicitée dans les moyens contenus dans le corps des écritures, il s'agit également d'une prétention nouvelle qui sera à ce titre déclarée irrecevable .

Observations liminaires

Les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens.

Ils ont acquis pendant le mariage, en indivision :

- une maison d'habitation située [Adresse 10], par acte en date du 25 juin 2996, au prix de 530.000 francs (dont 17.000 Francs s'appliquant aux meubles). Ce bien a été revendu le 23 octobre 2020. La somme de 182.007,86 € correspondant au solde du prix est consigné chez le notaire instrumentaire, sous réserve de la provision de 50.000 € accordée à M. [U] [N] par le magistrat de la mise en état (ordonnance du 6 mai 2021).

- deux terrains à bâtir, situés [Adresse 3], par actes en dates du 18 février 2011, au prix de 64.000 € par terrain soit au total 128.000 €. Sur chacun de ces terrains ils ont fait édifier une maison. Les époux admettent que le coût global terrain + construction, s'est élevé pour chacun des biens respectivement à 223.000 € et 211.000 €. Le projet avait une vocation d'investissement locatif.

Sur la portée du protocole d'accord du 11 avril 2013

Par cet acte sous seing privé, conservé chez le notaire, les parties avaient fixé la masse à partager, les droits de chacun sur l'actif net ainsi que les attributions.

M. [U] [N] soutient que cet acte est caduc faute de réalisation de la condition suspensive.

Mme [D] [C] répond que c'est M. [U] [N] qui n'a pas respecté son engagement.

Quoiqu'il en soit, Mme [D] [C] ne demande pas l'application de ce protocole, devenu en outre obsolète quant aux valeurs et du fait de la vente de l'un des biens. Dés lors, aucune conclusion ne pourra en être tirée par la cour.

Sur l'ancien domicile conjugal

[Adresse 10], vendu le 23 octobre 2020.

Mme [D] [C] critique la disposition du jugement qui a dit qu'elle-même et M. [U] [N] sont propriétaires indivis de la maison située à [Adresse 10], à proportion de moitié chacun.

Elle demande que le prix de vente soit réparti suivant des proportions de 70% pour elle et 30% pour M. [U] [N], correspondant aux proportions du financement du bien, ce que M. [U] [N] conteste.

Les époux qui achètent un bien en indivision en acquièrent la propriété, quelles que soient les modalités du financement. En conséquence, le partage du bien ainsi acquis intervient dans les proportions déterminées par le titre de propriété, sans égard à la façon dont cette acquisition a été financée.

L'époux qui justifie avoir financé le bien au delà de sa part indivise peut prétendre à une créance sur l'indivision en application des dispositions de l'article 815-13 du code civil, sous réserve de sa neutralisation au titre de la contribution aux charges du mariage.

Sauf convention matrimoniale contraire, l'apport en capital provenant de la

vente de biens personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial, ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage .

En l'espèce, l'acte d'acquisition de la maison qui fut le domicile conjugal mentionne qu'elle est acquise en pleine propriété par les époux, à concurrence de la moitié indivise chacun.

Le partage interviendra donc par moitié entre les parties, sous réserve d'une indemnité qui serait due à Mme [D] [C] en raison du financement dont elle fait état, étant précisé que le partage porte à présent sur le prix de vente de cet immeuble séquestré chez le notaire ayant passé l'acte.

Mme [D] [C] soutient avoir acquitté, en capital, au moment de l'acte d'achat intervenu deux ans seulement après le mariage, des fonds provenant de sa famille qu'elle avait placés sur des comptes épargne à son nom, à savoir :

- 188.560,71 Francs issus de comptes d'épargne personnels puis versés sur le compte CCP à son seul nom

- 49.298,46 Francs, issus de compte titre personnel versé sur le compte CCP.

Elle ajoute que M. [U] [N] quant à lui a versé en capital une somme de 60.000 Francs; que par la suite, elle a réglé seule les emprunts souscrits pour cette acquisition de mars 2002 à mars 2004, à hauteur de 59.477 Francs.

M. [U] [N] conteste que Mme [D] [C] ait apporté un capital de ses fonds propres.

L'acte d'achat en date du 25 juin 2016 ne mentionne pas le détail et l'origine des versements du prix. L'extrait de la comptabilité du notaire n'est pas produit au débat.

A l'appui de sa demande Mme [D] [C] verse seulement au débat le relevé de son compte CCP au 14 juin 1996, qui fait apparaître à cette date un solde de 188.560,71 Francs, ainsi que le relevé de son compte titre qui fait apparaître à cette même date une valorisation à hauteur de 49.298,46 Francs.

Ces seules pièces ne permettent pas de justifier que ces sommes ont été virées vers la comptabilité de l'étude notariale en vue de l'acquisition de l'immeuble le 25 juin 1996.

L'offre de prêt en date du 6 mai 1996 établie au nom des deux époux, mentionne un apport personnel de 299.150 Francs, sans préciser de qui il procède.

Par conséquent, Mme [D] [C] à qui incombe la charge de la preuve de son apport en capital au moment de l'acquisition du domicile conjugal, ne justifie pas avoir versé la somme alléguée de 240.000 francs issue de ses fonds personnels.

Elle ne peut donc prétendre à aucune créance de ce chef sur l'indivision.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les parties sont propriétaires indivis du bien situé [Adresse 10] à proportion de moitié chacun, sauf à y ajouter que:

- Mme [D] [C] ne peut prétendre à aucune indemnité au titre du capital personnel investi lors de l'acquisition,

- suite à la vente de ce bien, le solde du prix de vente lui est subrogé et tombe dans la masse indivise globale. Il ne pourra être réparti qu'avec le partage définitif.

Sur les immeubles à vocation locative

* Sur l'acquisition des terrains

Mme [D] [C] et M. [U] [N] ont acquis par acte en date du 20 janvier 2011 deux terrains constructibles au prix de 128.000 € (2 x 64.000 €), en vue de construire sur chacun d'eux une maison et de donner ces biens en location.

Les époux qui achètent un bien en indivision en acquièrent la propriété, quelles que soient les modalités du financement. En conséquence, le partage du bien ainsi acquis intervient dans les proportions déterminées par le titre de propriété, sans égard à la façon dont cette acquisition a été financée.

L'époux qui justifie avoir financé le bien au delà de sa part indivise peut prétendre à une créance sur l'indivision en application des dispositions de l'article 815-13 du code civil, étant précisé que le financement d'un investissement locatif ne peut pas être retenu comme une contribution aux charges du mariage au sens de l'article 214 du code civil, de sorte que l'époux qui a remboursé l'emprunt au-delà de sa part dans l'indivision pourra revendiquer une créance sur l'indivision sans que puisse lui

être opposé en défense son obligation contributive.

En l'espèce, l'acte d'acquisition des terrains à vocation locative mentionne qu'ils sont acquis en pleine propriété par les époux, à concurrence de la moitié indivise chacun.

Le partage interviendra donc par moitié entre les parties, sous réserve d'une indemnité qui serait due à M. [U] [N] par l'indivision, en raison du financement dont il fait état.

M. [U] [N] soutient avoir financé en totalité l'achat des terrains, au moyen de fonds provenant notamment de la vente des parts de la société qu'il dirigeait.

Mme [D] [C] rétorque qu'il s'agissait là d'une simple avance de trésorerie, puisque deux prêts de 110.000 € chacun sont venus prendre le relais et que M. [U] [N] s'est remboursé une somme de 70.000 €.

L'acte authentique d'acquisition des terrains à construire intervenu le 20 janvier 2011, mentionne en page 5, au titre du paiement du prix : ' il est ici précisé que le montant du prix et des frais versés l'a été par chacun des acquéreurs de la manière suivante : à concurrence de la MOITIE CHACUN'. Les parties ont donc reconnu devant le notaire un paiement du prix égalitaire, que M. [U] [N] n'est pas fondé à critiquer ultérieurement.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que M. [U] [N] est créancier à l'encontre de l'indivision à hauteur de 130.000 € au titre de l'acquisition des terrains 168 et 186 chemin des Caussades.

M. [U] [N] sera débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître une créance sur l'indivision relativement aux sommes qu'il dit avoir investies dans l'acquisition des terrains.

La cour confirmera le jugement en ce qu'il a dit que les droits de propriété de chacun sur ces immeubles sont de moitié chacun.

Sur la construction des immeubles

Le rapport d'expertise ordonné par le tribunal sur ce point a été déposé et produit au débat.

M. [U] [N] expose qu'il est créancier sur l'indivision de 72% de la valeur des constructions, soit 200.018,62 € pour les deux biens, tandis que Mme [D] [C] soutient que le financement est intervenu à parts égales entre les époux.

Les parties avaient souscrit deux crédits de 110.000 € pour la construction des immeubles, débloqués lors de leur livraison. Le premier (186 chemin des caussades) était débloqué en octobre 2011, le second (168 chemin des caussades) en février 2012.

Il résulte du rapport d'expertise produit au débat, qui n'est pas utilement contesté par les parties que :

- les échéances des emprunts ont été payées depuis le compte joint à la Caisse d' Epargne;

- les factures de travaux ont été réglées à partir des comptes joints à la Banque Postale et à la Caisse d' Epargne;

- le coût total des deux constructions s'élève à 295.996,42 €.

Suivant une première hypothèse de travail à partir de l'étude de l'alimentation des comptes d'où ont été réglées les factures de construction, l'expert en arrive à conclure que les comptes joints ont été alimentés à hauteur de 57,56% par Mme [D] [C] et de 42,54 % par M. [U] [N].

Suivant une seconde hypothèse de travail fondée sur le fonctionnement des comptes joints, l'expert après avoir relevé qu'ils servaient à d'autres dépenses que le seul paiement de la construction des immeubles, notamment aux dépenses courantes et relatives aux enfants, conclut qu'il en résulte une volonté des parties de mise en commun de leur ressources et de partage égalitaire des frais.

Cette volonté égalitaire correspond à la même démarche qu'au moment de l'acquisition des terrains où les parties ont attesté devant le notaire d'un paiement du prix par moitié.

Sur le coût de 295.996,42 € des travaux, 220.000 € ont été financés par les emprunts versés sur le compte joint Caisse d' Epargne et remboursés à égalité par les époux. Restent 75.996,42 € qui ont été financés par les revenus ou épargne des parties, dans une recherche d'égalité.

Par conséquent, au vu du financement égalitaire des constructions édifiées sur un terrain acquis en indivision pour moitié chacun, M. [U] [N] ne justifie d'aucune créance sur l'indivision .

Ajoutant à la décision déférée, M. [U] [N] sera débouté de ce chef de demande.

Sur les attributions

Il n'y a plus lieu d'attribuer la maison ayant constitué le domicile conjugal puisqu'elle a été vendue.

Les deux immeubles à vocation locative ne sont pas susceptibles de justifier l'attribution préférentielle, n'ayant été destinés ni à l'habitation familiale ni au travail de l'un des époux. L'attribution des biens ne peut donc se réaliser que suivant l'accord des copartageants.

L'attribution de l'immeuble situé [Adresse 3] à Mme [D] [C] à charge pour elle de solder le crédit y afférent n'est pas critiquée par les parties, ni au titre de l'appel principal, ni au titre de l'appel incident. La cour n'en est donc pas saisie .

Seule l'attribution du bien situé [Adresse 2] à M. [U] [N] est critiquée par Mme [D] [C] aux termes de sa déclaration d'appel .

A défaut d'accord des parties sur l'attribution de ce bien, la cour ordonnera sa licitation comme il sera dit au dispositif de l'arrêt, infirmant le jugement déféré.

Sur les dépens et les frais

Compte tenu de la nature du litige, chacune des partie conservera la charge des frais qu'elle a exposés.

Elles seront déboutées de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Dans la limite de sa saisine,

Déboute Mme [D] [C] de sa demande tendant à voir écarter les conclusions et pièces remises par M. [U] [N] le 15 décembre 2022,

Rappelle que la date des effets du divorce entre les parties relativement à leurs biens a été a été définitivement fixée au 25 novembre 2013 par le jugement de divorce du 5 mars 2015 confirmé par la cour,

Constate que Mme [D] [C] ne forme aucune demande précise au titre de la date de jouissance divise,

Déclare irrecevable comme nouvelle la demande de Mme [D] [C] tendant à la désignation d'un notaire,

Déclare irrecevable comme nouvelle la demande de Mme [D] [C] au titre des comptes d'indivision (hors indemnité d'occupation),

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que les parties sont propriétaires indivis du bien situé [Adresse 10] à proportion de moitié chacun,

Y ajoutant,

Déboute Mme [D] [C] de sa demande d'indemnité au titre du capital personnel investi lors de l'acquisition du domicile conjugal,

Dit que suite à la vente du bien situé à [Adresse 10], intervenue le 23 octobre 2020, le solde du prix de vente lui est subrogé, tombe dans la masse indivise globale et ne pourra être réparti qu'avec le partage définitif,

Confirme le jugement en ce qu'il a dit que les droits des parties sont de 50% chacune sur les deux immeubles situés [Adresse 3],

Infirme le jugement, en ce qu'il a dit que M. [U] [N] est créancier à l'encontre de l'indivision à hauteur de 130.000 € au titre de l'acquisition des terrains 168 et [Adresse 3],

Statuant à nouveau, déboute M. [U] [N] de sa demande tendant à se voir reconnaître une créance sur l'indivision relativement aux sommes qu'il dit avoir investies dans l'acquisition des terrains,

Ajoutant au jugement,

Déboute M. [U] [N] de sa demande tendant à se voir reconnaître une créance sur l'indivision au titre du financement des constructions sur les terrains situés [Adresse 3],

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [D] [C] de sa demande d'attribution préférentielle,

Ordonne, sauf meilleur accord des parties, la licitation du bien situé à [Adresse 9] cadastré DT section [Cadastre 5] pour une contenance de 15a30ca, sur le cahier des charges qui sera déposé par Maitre [J], avocat, au greffe du tribunal de grande instance de Montauban sur la mise à prix de 130.000 euros, avec faculté de baisse du quart,

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,

M.TACHON C.DUCHAC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 2
Numéro d'arrêt : 20/01383
Date de la décision : 07/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-07;20.01383 ?
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