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21/02/2023 | FRANCE | N°20/03451

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 21 février 2023, 20/03451


21/02/2023





ARRÊT N°



N° RG 20/03451

N° Portalis DBVI-V-B7E-N3FI

CR / RC



Décision déférée du 18 Novembre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de FOIX - 19/00629

M. ANIERE

















[G], [C], [FZ] [GR]

[TY], [Z], [JJ] [DY] épouse [GR]





C/



[L] [EP] décédée



[W] [HI] épouse [T]

[R] [HI]

[XI] [N] [HI]

[L] [HI]










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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTS


...

21/02/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/03451

N° Portalis DBVI-V-B7E-N3FI

CR / RC

Décision déférée du 18 Novembre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de FOIX - 19/00629

M. ANIERE

[G], [C], [FZ] [GR]

[TY], [Z], [JJ] [DY] épouse [GR]

C/

[L] [EP] décédée

[W] [HI] épouse [T]

[R] [HI]

[XI] [N] [HI]

[L] [HI]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTS

Monsieur [G], [C], [FZ] [GR]

[Adresse 15]

[Localité 34]

Représenté par Me Philippe SALVA de la SELARL PLAIS-THOMAS - SALVA, avocat au barreau D'ARIEGE

Madame [TY], [Z], [JJ] [DY] épouse [GR]

[Adresse 15]

[Localité 34]

Représentée par Me Philippe SALVA de la SELARL PLAIS-THOMAS- SALVA, avocat au barreau D'ARIEGE

INTIMEE

Madame [L] [EP]

Décédée le 2 février 2022

INTERVENANTS VOLONTAIRES

Madame [W] [HI] épouse [T]

Venant aux droits de Mme [L] [EP] décédée le 2 février 2022

[Adresse 30]

[Localité 1]

Représentée par Me Luc GOGUYER-LALANDE de la SCP SCP DEGIOANNI PONTACQ GUY-FAVIER, avocat au barreau d'ARIEGE

Madame [R] [HI]

Venant aux droits de Mme [L] [EP] décédée le 2 février 2022

[Adresse 33]

[Adresse 33]

[Localité 2]

Représentée par Me Luc GOGUYER-LALANDE de la SCP SCP DEGIOANNI PONTACQ GUY-FAVIER, avocat au barreau d'ARIEGE

Monsieur [XI] [N] [HI]

Venant aux droits de Mme [L] [EP] décédée le 2 février 2022

[Adresse 33]

[Adresse 33]

[Localité 2]

Représentée par Me Luc GOGUYER-LALANDE de la SCP SCP DEGIOANNI PONTACQ GUY-FAVIER, avocat au barreau d'ARIEGE

Madame [L] [HI]

Venant aux droits de Mme [L] [EP] décédée le 2 février 2022

[Adresse 28]

[Adresse 28]

[Localité 16]

Représentée par Me Luc GOGUYER-LALANDE de la SCP SCP DEGIOANNI PONTACQ GUY-FAVIER, avocat au barreau d'ARIEGE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, devant C. ROUGER et A.M ROBERT, magistrats chargés de rapporter l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

-:-:-:-:-:-

FAITS - PROCÉDURE ' PRÉTENTIONS

M. [XI] [HI], depuis décédé, et son épouse Mme [L] [EP] ont acquis suivant acte authentique en date du 17 mai 2002 des époux [S] diverses parcelles situées sur la commune de [Localité 34] (09), [Adresse 3] section AK n°s [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14]. Pour assurer la desserte et l'alimentation en diverses fournitures d'eau, de gaz, d'électricité et assainissement desdites parcelles, les vendeurs ont constitué sur la parcelle leur appartenant section AK n° [Cadastre 13], un droit de passage tous usages et un droit de passage de canalisation à titre réel et perpétuel de quatre mètres de large s'exerçant sur une bande de 4 m de large du sud-est au sud-ouest du fonds servant en limite séparative avec la construction édifiée sur la parcelle AK [Cadastre 13] de nature à permettre aux acquéreurs, en empruntant les parcelles voisines, d'accéder à la [Adresse 3].

La parcelle AK [Cadastre 13] avait été précédemment divisée par les vendeurs, constituant une parcelle AK [Cadastre 22] dont ils avaient consenti donation avec constitution d'un droit de retour à leur fille [R] [S] suivant acte en date du 30 août 1985, en conservant le surplus. [R] [S] épouse [KT] a quant à elle vendu la parcelle AK [Cadastre 22] à M. [G] [GR] et Mme [TY] [DY] épouse [GR] suivant acte en date du 13 avril 2018.

-:-:-:-:-:-

Estimant que les époux [GR] attentaient à l'exercice de leur servitude de passage en ayant édifié à l'entrée de leur propriété un portail et retiré la clôture grillagée bordant au nord les limites de l'assiette de la servitude destinée à la sécuriser compte tenu de la présence d'un gros chien, M. et Mme [HI] ont, après mises en demeure infructueuses, assigné les époux [GR] devant le tribunal de grande instance de Foix suivant acte d'huissier en date du 25 juin 2019.

M.[XI] [HI] est décédé le 21 juillet 2019. Sa veuve, Mme [L] [EP], bénéficiant d'une donation entre époux ayant opté pour l'intégralité de l'usufruit des biens dépendant de sa succession, a poursuivi la procédure.

Par jugement contradictoire du 18 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Foix, rejetant toutes conclusions contraires des parties, a :

- constaté que l'enclave est la cause déterminante de la servitude ayant bénéficié aux parcelles cadastrées C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] selon l'acte du 20 décembre 1967,

- débouté Mme [L] [EP] épouse [HI] de l'ensemble de ses demandes,

- rappelé l'interdiction aux époux [GR] de toute obstruction au passage et notamment de stationner tout véhicule à l'entrée du portail litigieux et le long de la servitude de passage,

- dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu un état d'enclave ancien dont l'assiette avait été déterminée par un acte du 20 décembre 1967 par lequel les époux [S] avaient acquis de [IS] [BJ] les parcelles C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] et avait été matérialisée par une clôture côté propriété [GR] aujourd'hui enlevée ; que cet état d'enclave perdurait lorsque les époux [HI] avaient acquis leur bien, et qu'en juillet 2018 les époux [GR] avaient remis en mains propres, le jour de l'installation du portail litigieux, à une personne se trouvant au domicile des époux [HI] une clé ; que l'installation du portail découlait du droit de se clore et que la remise de la clé permettait à Mme [HI] d'accéder en tout temps à sa propriété, ce qui ne portait pas atteinte au droit de passage ni ne le rendait plus incommode . Il a retenu que l'enlèvement de la clôture délimitant l'assiette de la servitude ne pouvait être critiqué, le propriétaire d'un fonds ayant aussi le droit de ne pas se clore, et qu'aucun abus de droit n'était caractérisé.

-:-:-:-:-:-

Par déclaration du 8 décembre 2020, M. et Mme [GR] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- rejeté toutes conclusions contraires des parties,

- constaté que l'enclave est la cause déterminante de la servitude ayant bénéficié aux parcelles cadastrées C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] selon l'acte du 20 décembre 1967,

- rappelé l'interdiction aux époux [GR] de toute obstruction au passage et notamment de stationner tout véhicule à l'entrée du portail litigieux et le long de la servitude de passage,

- dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

-:-:-:-:-:-

Mme [L] [EP] épouse [HI] est décédée le 2 février 2022, laissant à sa succession ses quatre enfants, Mme [W] [T] née [HI], Mme [R] [HI], M. [XI] [N] [HI], et Mme [L] [HI]. Ces derniers sont intervenus volontairement dans la procédure.

-:-:-:-:-:-

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 juin 2022, M. [G] [GR] et Mme [TY] [DY] épouse [GR], appelants, demandent à la cour, au visa des articles 544, 637, 639, 686 et 696 du code civil, de :

- rejeter toutes conclusions contraires comme étant injustes et, en tout cas, mal fondées,

- réformer le jugement dont appel et, statuant à nouveau,

- débouter les consorts [HI] de leur demande ayant pour objet de constater l'existence d'une servitude conventionnelle de passage grevant le fonds leur appartenant cadastré sur la commune de [Localité 34] section AK [Cadastre 22] au profit des fonds cadastrés même commune section AK n°[Cadastre 27],[Cadastre 29],[Cadastre 10] et [Cadastre 14] appartenant à Mmes [W] [HI], [R] [HI], [L] [HI] et M. [XI] [HI],

- faire interdiction à Mmes [W] [HI], [R] [HI], [L] [HI] et M. [XI] [HI] de passer sur la parcelle située commune de [Localité 34] section AK n°[Cadastre 22],

- débouter Mmes [W] [HI], [R] [HI], [L] [HI] et M. [XI] [HI] de leur appel incident ayant pour objet de les voir être condamnés à déposer le portail situé au confront des parcelles AK [Cadastre 22] et [Cadastre 23],

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Mmes [W] [HI], [R] [HI], [L] [HI] et M. [XI] [HI] à leur payer la somme de 4 500 euros,

Vu les articles 695, 696 et 699 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Mmes [W] [HI], [R] [HI], [L] [HI] et M. [XI] [HI] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 24 août 2022, Mme [W] [T] née [HI], Mme [R] [HI], M. [XI] [N] [HI] et Mme [L] [HI], intervenants volontaires à l'instance venant aux droits de Mme [L] [EP], appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 691, 701, 682, 692 du code civil et de la jurisprudence issue de l'article 647 du code civil, de :

- débouter les époux [GR] de leur appel principal,

- accueillir l'appel incident formé par Mme [HI],

- accueillir leur intervention volontaire,

- constater que le fonds des époux [GR] AK [Cadastre 22] est bien grevé d'une servitude conventionnelle au profit du fonds de Mme [HI], telle que figurant dans les actes des parties,

- constater surabondamment que la parcelle cadastrée [Cadastre 14] des consorts [HI] est toujours en état d'enclave et que le portail permettant d'accéder au garage constitue le signe d'une destination par père de famille,

- condamner les époux [GR] pour les raisons ci-dessus exposées à déposer le portail situé au confront des parcelles cadastrées AK [Cadastre 22] et [Cadastre 23], lieu-dit [Adresse 3] sur la commune de [Localité 34] dans le délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir sous astreinte financière de 100 euros par jour de retard,

- les condamner à mettre en place telles dispositions qui leur plaira de prendre pour ne pas laisser divaguer d'animal sur l'assiette de la servitude au besoin en replaçant une clôture qui en borde les limites au nord,

- les condamner au paiement d'une indemnité de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 octobre 2022.

L'affaire a été examinée à l'audience du 24 octobre 2022.

SUR CE, LA COUR :

1° / Sur la servitude de passage tous usages, conventionnelle ou par destination du père de famille, revendiquée sur le fonds désormais cadastré AK [Cadastre 22] (propriété [GR]) au profit des fonds désormais cadastrés AK [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14](propriété des consorts [HI])

Selon les dispositions de l'article 691 du code civil, les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes, telle une servitude de passage, ne peuvent s'établir que par titres. La possession même immémoriale ne suffit pas à les établir.

La création ou l'existence d'une servitude au profit d'un fonds dominant ne peut trouver son fondement que dans le titre du fonds servant.

Une servitude n'est opposable à l'acquéreur d'un l'immeuble grevé que si elle a été publiée, ou si son acte d'acquisition en fait mention, ou encore s'il en connaissait l'existence au moment de son acquisition.

Selon les dispositions de l'article 692 du même code, la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes continues et apparentes. S'agissant des servitudes discontinues, telles un droit de passage, et apparentes, les dispositions de l'article 694 du même code prévoient que si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné.

En l'espèce, M.[J] [S] et Mme [K] [P] son épouse, mariés sans contrat, avaient successivement procédé à plusieurs acquisitions au lieudit « Derrière Saint [N] » sur la commune de [Localité 34] (09).

Par acte notarié du 20 décembre 1967 publié le 19 février 1968 ils avaient acquis de Mme [IS] [BJ] épouse [PM] une maison d'habitation avec jardin attenant cadastrée C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] pour une superficie totale de 21 a 10 ca, avec toutes ses appartenances et dépendances servitude et mitoyenneté la désignation relative aux biens acquis précisant « ainsi qu'un droit de passage d'une largeur de quatre mètres pour faire communiquer les parcelles présentement vendues avec la [Adresse 35] et passant au nord de la parcelle section C n°[Cadastre 4] lieudit « [Adresse 32] » appartenant à Mme [X] [BJ] veuve [F] [U] demeurant à [Localité 31]. 2) Au Nord de la parcelle C [Cadastre 5] même lieudit appartenant à Mr [FH]. »

Mme [X] [BJ], alors propriétaire de la parcelle C [Cadastre 4], et M.[FH], alors propriétaire de la parcelle C [Cadastre 5], n'ont pas été parties à cet acte du 20 décembre 1967. L'acte constitutif de la servitude censée grever leurs fonds respectifs au nord jusqu'à l'ancienne [Adresse 35] pour desservir les parcelles C [Cadastre 18] et C [Cadastre 19] n'est pas mentionné à l'acte d'acquisition du 20 décembre 1967. Il n'est pas justifié qu'un tel acte existe.

La parcelle [FH]-[I] anciennement cadastrée C [Cadastre 5] a fait l'objet entre mai et août 1967, ainsi qu'il résulte des relevés de propriété produits au débat par les appelants (pièce 8), d'une division cadastrale pour devenir C [Cadastre 6] devenue AK [Cadastre 25] et C [Cadastre 7] devenue C [Cadastre 8] et C [Cadastre 9], aujourd'hui cadastrées AK [Cadastre 24] et AK [Cadastre 23]. Le fichier immobilier mentionne une formalité de servitude de passage réciproque uniquement entre les deux parcelles C [Cadastre 9] et [Cadastre 6], en date du 21 août 1967 volume 2405 n°27 selon acte de Me [H] du 11 juillet 1967.

Par acte notarié du 15 mai 1979 publié le 22 juin 1979 M.[J] [S] et Mme [K] [P] avaient par ailleurs acquis de Mme [X] [BJ] veuve [F] la parcelle C [Cadastre 4] d'une contenance de 34 a 69 ca en nature de terre et de jardin, acquise par la venderesse par legs de [IS] [BJ] séparée [Y] décédée le 7 mars 1943. Cet acte ne fait nulle mention d'une servitude de passage qu'aurait pu antérieurement consentir Mme [X] [BJ] ou son auteur sur ladite parcelle au profit des fonds cadastrés C [Cadastre 18] et C [Cadastre 19].

Enfin par acte notarié du 27 juin 1986 publié le 21 juillet 1986, non produit, M. [J] [S] et Mme [K] [P] avaient acquis de Mme [A] [UP] une parcelle aujourd'hui cadastrée AK [Cadastre 27].

Il résulte d'un plan de masse de permis de construire établi par M. [V], architecte, le 6/11/1979 que dans le prolongement d'une construction existante sur la parcelle [Cadastre 19] a été réalisé, en partie sur la parcelle C [Cadastre 4] récemment acquise par les époux [S] un garage de 8 mètres de long dont la porte ouvrait en façade Ouest sur la parcelle [Cadastre 4] sur une largeur de 3,60 m (pièce 11 des intimés).

Le 19 décembre 1984 M. [J] [S] a fait procéder selon document d'arpentage établi par M. [XI] [B], géomètre-expert, enregistré le 27 février 1985 sous le n° 6462T (pièce 5 des appelants) à une division cadastrale de la parcelle C [Cadastre 4] de 34 a 69 ca acquise de [X] [BJ] en 1979, en deux parcelles C [Cadastre 11] pour 16 a 02 ca et C [Cadastre 12] pour 18 a 67 ca.

Le 30 août 1985, M.[J] [S] et son épouse [P] [K] ont fait donation entre vifs en avancement d'hoirie à leur fille [R] [S] épouse [KT] de la parcelle C [Cadastre 12] nouvellement créée, les donateurs conservant la propriété de la parcelle C [Cadastre 11]. Ces deux parcelles sont devenues après remaniement cadastral du 30 novembre 1995 AK [Cadastre 21] pour la C [Cadastre 11] et AK [Cadastre 22] pour la C [Cadastre 12] objet de la donation.

Cet acte de donation comporte un intitulé libellé « Rappel de servitude », aux termes duquel les donateurs indiquent qu'ils ont acquis de [IS] [BJ] par acte du 20 décembre 1967 une maison d'habitation avec jardin cadastrés C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] et qu'aux termes dudit acte « il a été créé les servitudes ci-après littéralement rapportées : ainsi qu'un droit de passage d'une largeur de quatre mètres pour faire communiquer les parcelles présentement vendues avec la [Adresse 35] et passant au nord de la parcelle section C n°[Cadastre 4] lieudit « [Adresse 32] » appartenant à Mme [X] [BJ] veuve [F] [U].., 2) Au Nord de la parcelle C [Cadastre 5] même lieudit appartenant à Mr [FH] [M] ». Il mentionne ensuite au titre de l'origine de propriété l'acquisition faite le 15 mai 1979 de [X] [BJ].

Cet acte comporte deux inexactitudes. D'une part, ainsi que vu ci-dessus l'acte du 20 décembre 1967 ne portait pas création d'une servitude sur le fonds C [Cadastre 4] appartenant à l'époque à [X] [BJ] et sur le fonds C [Cadastre 5] appartenant à [FH] au profit des fonds [Cadastre 18] et [Cadastre 19] acquis par les époux [J] [S] et [P] [K], les propriétaires des fonds annoncés comme grevés n'y ayant pas été parties. D'autre part, l'ancienne parcelle C [Cadastre 5] appartenait aux époux [FH]-[I] et les servitudes réciproques consenties le 21 août 1967 au profit des fonds cadastrés C [Cadastre 9] et C [Cadastre 6] issus de la division de l'ancienne parcelle C [Cadastre 5] intervenue en juin 1966 (rectifiée le 17 avril 1967) et août 1967 sont intervenues entre les époux [FH]-[I] d'une part, et les époux [M]-[D] d'autre part au vu du fichier immobilier. L'acte notarié du 20 décembre 1967 ne fait nulle mention d'une parcelle C [Cadastre 5] appartenant à Mr [FH] [M].

Cet acte de donation entre les époux [J] [S] et leur fille [R] ne crée quant à lui aucune servitude sur le fonds donné C [Cadastre 12] au profit du fonds C [Cadastre 11] conservé par les donateurs, ni au profit des parcelles C [Cadastre 18] et [Cadastre 19] propriété des donateurs par ailleurs.

Après remaniement cadastral intervenu le 30 novembre 1995 les parcelles [Cadastre 18] et [Cadastre 19] de 1967 sont devenues AK [Cadastre 20], [Cadastre 10] et [Cadastre 29]. A cette date, M.[J] [S] et Mme [K] [P] étaient donc propriétaires des parcelles AK [Cadastre 20], [Cadastre 10], [Cadastre 29] et [Cadastre 21], cette dernière supportant en partie, avec la parcelle AK [Cadastre 29], leur garage édifié en 1979-1980 et ouvrant sur la parcelle AK [Cadastre 21].

Le 8 mars 2002, les époux [J] [S], sous la signature de M.et Mme [HI], futurs acquéreurs, ont fait procéder selon document d'arpentage établi par M.[WR] géomètre-expert n° 4459 H à la division cadastrale de la parcelle AK [Cadastre 21] en deux parcelles, AK [Cadastre 14] pour 07 ca, correspondant à la partie du garage édifiée sur la parcelle AK [Cadastre 21], et AK [Cadastre 13] dont la superficie était ainsi ramenée à 15 a 95 ca.

Par acte du 17 mai 2002 M.[J] [S] et Mme [K] [P] ont effectivement vendu à M.[XI] [HI] et Mme [L] [EP] les parcelles AK [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14] sises désormais [Adresse 3], les vendeurs restant propriétaires de la seule parcelle AK [Cadastre 13], leur fils étant mentionné à l'acte comme propriétaire de la parcelle AK [Cadastre 20]. Aux termes de cet acte, les vendeurs, aux fins de permettre la desserte et l'alimentation en diverses fournitures (eau, gaz, électricité, tout à l'égout) des parcelles vendues ont constitué expressément sur la parcelle AK [Cadastre 13] leur appartenant au profit des parcelles AK [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14] objets de la vente un droit de passage tous usages ainsi que de passage de toutes canalisations destinées à alimenter le bien vendu à titre de servitude réelle et perpétuelle,

précisant que ce droit de passage s'exercera sur une bande de 4 mètres du Sud-Est au Sud Ouest du fonds servant en limite séparative avec la construction édifiée sur la parcelle AK [Cadastre 13] et ajoutant qu'elle « permettra par la suite à l'acquéreur en empruntant les propriétés voisines d'accéder à la [Adresse 3] comme il sera dit ci-après. L'acte comporte un titre intitulé « Rappel de servitudes » ainsi libellé « Aux termes d'un acte reçu par Me [E] [O] le 20 décembre 1967 publié à [Localité 2] le 19 février 1968 volume n° 39 il a été relaté ce qui suit après le paragraphe désignation « ainsi qu'un droit de passage d'une largeur de quatre mètres pour faire communiquer les parcelles présentement vendues avec la [Adresse 35] n°13 et passant au nord de la parcelle section C n°[Cadastre 4] lieudit « [Adresse 32] » appartenant à Mme [X] [BJ] veuve [F] [U]..., 2) au nord de la parcelle C [Cadastre 5] même lieudit d'une superficie totale de appartenant à Madame [FH] [M] ; » Outre le fait, anecdotique mais révélateur d'un manque de rigueur, que le dénommé Mr [FH] propriétaire de la parcelle C [Cadastre 5] en 1967 est devenu dans l'acte notarié de donation de 1985 Mr [FH] [M], puis dans l'acte de vente de 2002 Mme [FH] [M], ce rappel des mentions portées à la seule désignation de l'immeuble vendu le 20 décembre 1967 aux époux [S] par Mme [IS] [BJ] ne comportant aucune création de servitude sur des fonds dont les propriétaires n'étaient pas parties à l'acte, sans référence à un titre créateur de servitude dûment publié dont rien n'établit qu'il ait existé, ne peut en lui-même être créateur d'une servitude conventionnelle sur des fonds étrangers à la vente. Au demeurant, la constitution expresse dans cet acte du 17 mai 2002 d'une servitude de passage tous usages sur la parcelle AK [Cadastre 13] issue de la division successive de l'ancienne parcelle C [Cadastre 4] au profit des fonds AK [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14] issus quant à eux de la division successive des anciennes parcelles [Cadastre 18] et [Cadastre 19] exclut elle-même l'existence d'une servitude conventionnelle antérieure.

Mme [R] [S], propriétaire par donation de la parcelle devenue AK [Cadastre 22] dans les conditions ci-dessus rappelées n'est pas intervenue à cet acte pour consentir elle-même sur son fonds, en prolongement de celle effectivement consentie par les époux [J] [S] sur leur fonds AK [Cadastre 13], une servitude de passage, de sorte que cet acte n'a pas davantage pu avoir pour effet de créer au profit des fonds acquis par les époux [HI] une servitude de passage sur le fonds AK [Cadastre 22] appartenant à Mme [R] [S] acquis par M. [G] [GR] et Mme [TY] [DY] son épouse par acte du 13 avril 2018.

Et le fait que l'acte d'acquisition des époux [GR] du 13 avril 2018 de la parcelle AK [Cadastre 22] rappelle au titre «Servitudes » la mention erronée figurant à l'acte de donation dont a bénéficié Mme [R] [S] selon laquelle il avait été créé par l'acte d'acquisition des donateurs du 20 décembre 1967 un droit de passage dans les termes ci-dessus analysés, n'est pas davantage créateur d'une servitude conventionnelle de passage sur la parcelle AK [Cadastre 22] acquise par les époux [GR] au profit des fonds AK [Cadastre 10], [Cadastre 29], [Cadastre 27] et [Cadastre 14] acquis par les époux [HI] anciennement [Cadastre 18] et [Cadastre 19]. Seules les canalisations de gaz installées dans le sous-sol de la parcelle AK [Cadastre 22] desservant les parcelles AK [Cadastre 29] et [Cadastre 27] et la canalisation d'eaux usées desservant les propriétés voisines et notamment la parcelle AK [Cadastre 13], sont de nature à caractériser à l'égard de la parcelle AK [Cadastre 22] une servitude par destination du père de famille dès lors que toutes ces parcelles ont appartenu, avec d'autres, à M. [J] [S] et Mme [K] [P], auteurs des divisions successives et auteurs communs des époux [HI] et des époux [GR].

La seule présence du garage sur la parcelle désormais AK [Cadastre 14] ouvrant sur la parcelle AK [Cadastre 13] restée propriété de Mme [K] [P] veuve [S], construction effectivement réalisée par les époux [S] alors qu'ils étaient devenus propriétaire des parcelles [Cadastre 18], [Cadastre 19] et [Cadastre 4], et ouvrant à l'époque de sa construction sur leur seule propriété, ne peut davantage caractériser au profit desdits fonds une servitude par destination du père de famille au Nord de tous les fonds se succédant d'Est en Ouest jusqu'à la voie publique devenue [Adresse 3], l'ouverture à ce niveau sur cette voie publique se trouvant à l'Ouest de la parcelle AK [Cadastre 23] sur les parcelles devenues AK [Cadastre 26] et [Cadastre 25], toutes parcelles issues de la division de l'ancienne C [Cadastre 5] ayant appartenu à M.[FH] et sur laquelle les propriétaires successifs des fonds anciennement [Cadastre 18] et [Cadastre 19], devenus AK [Cadastre 29], [Cadastre 10], [Cadastre 20], [Cadastre 27], [Cadastre 13] et [Cadastre 14] n'ont jamais eu de droit de propriété.

S'il est envisageable qu'il y ait eu à l'époque des acquisitions des fonds [Cadastre 18] et [Cadastre 19] puis [Cadastre 4], par les époux [J] [S] et [P] [K] une tolérance de passage à leur profit, y compris par véhicules, pour leur permettre d'Est en Ouest d'accéder à la voie publique anciennement dite [Adresse 35] dès lors qu'il résulte manifestement du plan cadastral ayant servi à la réalisation de la division cadastrale du 19 décembre 1984 qu'à l'époque, les parcelles C [Cadastre 18] et [Cadastre 18] n'avaient à l'Est aucune issue sur une voie publique, ces parcelles donnant sur une voie ferrée, pas plus qu'au Sud ou au Nord pour jouxter des propriétés privatives, une telle tolérance n'a pu être génératrice d'un droit réel de passage en l'absence de tout titre constitutif de servitude sur les parcelles C[Cadastre 4] et C [Cadastre 5] devenues [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] puis AK [Cadastre 22], [Cadastre 23], [Cadastre 24] et [Cadastre 25].

Il est désormais acquis que les parcelles AK [Cadastre 10], [Cadastre 29], [Cadastre 27] et [Cadastre 14] devenues propriété des consorts [HI] ne sont plus enclavées, ces parcelles disposant au [Adresse 3] les confrontant à l'Est d'une issue directe sur cette voie publique ainsi qu'il résulte des photographies produites au débat, les consorts [HI] étant devenus propriétaires, ce qu'ils ne contestent pas, d'une parcelle AK [Cadastre 17] longeant à l'Est les parcelles [Cadastre 29] et [Cadastre 10] et ouvrant directement sur cette voie publique par un grand portail dont le pilier, portant le n° 1, supporte la boîte aux lettres (pièce 10 des appelants). L'accès en véhicule jusqu'à leur garage sis sur la parcelle AK [Cadastre 14] depuis cette voie publique, par les parcelles AK [Cadastre 17], [Cadastre 29] et [Cadastre 10] leur appartenant est par ailleurs garanti par la servitude conventionnelle de passage qui a leur a été consentie dans leur acte d'acquisition du 17 mai 2002 sur le fonds AK [Cadastre 13], propriété de Mme veuve [S], au profit des fonds acquis AK [Cadastre 27], [Cadastre 29], [Cadastre 10] et [Cadastre 14].

Les consorts [HI] ne peuvent en conséquence qu'être déboutés de leurs demandes tendant à voir constater au profit de leur fonds notamment AK [Cadastre 14] une servitude de passage sur le fonds AK [Cadastre 22] devenu propriété des époux [GR], qu'elle soit conventionnelle ou par destination du père de famille, ou encore légale par état d'enclave, et le jugement entrepris doit être infirmé en ce que le premier juge a retenu qu'une servitude pour état d'enclave avait bénéficié aux parcelles C[Cadastre 18] et C [Cadastre 19] selon l'acte du 20 décembre 1967 et consécutivement fait interdiction aux époux [GR] de stationner tout véhicule à l'entrée du portail installé en limite des actuelles parcelles AK [Cadastre 22] et AK [Cadastre 23] ainsi que le long de ladite servitude de passage, inexistante. En revanche, le jugement entrepris doit être confirmé en ce que le premier juge a débouté Mme [L] [EP] veuve [HI], aux droits de laquelle viennent désormais ses héritiers les consorts [HI] sus-nommés, de ses demandes tendant à ce que soit ordonnée la dépose sous astreinte du portail installé en limite des parcelles AK [Cadastre 22] et AK [Cadastre 23] par les époux [GR], et à ce qu'il soit fait interdiction aux époux [GR] de laisser divaguer un animal sur l'assiette de la servitude au besoin en replaçant une clôture en bordant les limites au Nord ainsi qu'à l'octroi de dommages et intérêts.

2°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Les consorts [HI] succombant, ils doivent supporter les dépens de première instance ainsi que ceux d'appel et se trouvent redevables d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première instance que de celle d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir eux-mêmes prétendre à l'application de ce texte à leur profit.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Constate la reprise de l'instance par intervention volontaire en leur qualité d'héritiers de [L] [EP] veuve de [XI] [HI], demandeurs initiaux, respectivement décédés [XI] [HI], le 21 juillet 2019 et [L] [EP], le 2 février 2022, de Mmes [W] [HI] épouse [T], [R] [HI], [L] [HI] et de M.[XI] [N] [HI]

Les déclare recevable en leur intervention à l'instance d'appel

Infirme le jugement entrepris sauf en ce que le premier juge a débouté [L] [EP] Veuve [XI] [HI] de l'ensemble de ses demandes

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mmes [W] [HI] épouse [T], [R] [HI], et [L] [HI] et M.[XI] [N] [HI] de leur demande tendant à la reconnaissance d'une servitude de passage, quel qu'en soit le fondement, sur le fonds AK [Cadastre 22] commune de [Localité 34] (09) [Adresse 3] au profit des fonds cadastrés même commune [Adresse 3] AK [Cadastre 29], [Cadastre 10], [Cadastre 27] et [Cadastre 14]

Condamne Mmes [W] [HI] épouse [T], [R] [HI], et [L] [HI] et M.[XI] [N] [HI] pris ensemble aux dépens de première instance et d'appel

Condamne Mmes [W] [HI] épouse [T], [R] [HI], et [L] [HI] ainsi que M.[XI] [N] [HI] pris ensemble à payer à M. [G] [GR] et Mme [TY] [DY] épouse [GR] pris ensemble une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel

Déboute Mmes [W] [HI] épouse [T], [R] [HI], et [L] [HI] ainsi que M.[XI] [N] [HI] de leur demande d'indemnité sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03451
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;20.03451 ?
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