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14/02/2023 | FRANCE | N°20/01299

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 14 février 2023, 20/01299


14/02/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/01299

N° Portalis DBVI-V-B7E-NSG6

MD/NO



Décision déférée du 05 Mai 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBI - 19/00862



Mme [B]

















[D] [N]

[K] [T]





C/



S.A.R.L. BENAC IMMOBILIER













































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTS



Madame [D] [N]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Anita BUZONIE, avocat au barreau de TOULOUSE
...

14/02/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/01299

N° Portalis DBVI-V-B7E-NSG6

MD/NO

Décision déférée du 05 Mai 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBI - 19/00862

Mme [B]

[D] [N]

[K] [T]

C/

S.A.R.L. BENAC IMMOBILIER

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTS

Madame [D] [N]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Anita BUZONIE, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [K] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Anita BUZONIE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A.R.L. BENAC IMMOBILIER

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe REYNAUD de la SCP PALAZY-BRU ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 10 Mai 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

J.C. GARRIGUES, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Dans le cadre d'un projet d'achat immobilier, M. [K] [T] et Mme [D] [N] ont visité, le 4 décembre 2018 par l'intermédiaire de l'agence immobilière Benac immobilier, un bien situé [Adresse 1] à [Localité 6] (81) appartenant aux époux [J].

Le 10 décembre 2018, ils ont régularisé une offre d'achat, laquelle était acceptée par les vendeurs.

Le 18 janvier 2019, Mme [N] et M. [T] ont signé, en l'étude de Maître [Y] notaire à [Localité 6], un compromis de vente sous diverses conditions suspensives moyennant un prix de 595 000 euros.

Les honoraires de l'agence Benac immobilier étaient fixés à 30 000 euros et mis à la charge des vendeurs.

L'acte prévoyait une faculté de dédit par exercice de son droit à rétractation dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la notification du compromis par courrier recommandé, ainsi qu'une clause pénale de 10 % du prix de vente en cas de défaillance de l'acquéreur passé ce délai.

L'acte authentique réitérant les termes du compromis devait intervenir au plus tard le 30 avril 2019.

Par lettre recommandée du 26 janvier 2019, le compromis de vente était notifié aux acquéreurs qui ne faisaient pas valoir leur droit à rétractation. Ces derniers vendaient par ailleurs leur domicile et obtenaient une offre de prêt.

L'ensemble des conditions suspensives étaient levées.

Les consorts [N] - [T] signaient un contrat d'architecte avec l'Eurl Laure Blanco Architecte, laquelle élaborait des études préliminaires en date du 22 mars 2019.

Deux jours avant la réitération de la vente, les acquéreurs annulaient la signature et acceptaient de signer des conventions d'annulations les 3 et 7 mai 2019, prévoyant le versement d'une indemnisation au profit des vendeurs à hauteur de 56 500 euros, dont ils s'acquittaient.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 7 mai 2019, la société Benac immobilier réclamait aux consorts [N] [T] le versement de sa commission, soit la somme de 30 000 euros.

Compte tenu du refus des potentiels acquéreurs, l'agence immobilière, par acte d'huissier en date du 29 mai 2019, les assignait devant le tribunal judicaire d'Albi au visa de l'article 1240 du code civil.

Par jugement contradictoire du 5 mai 2020, le tribunal judiciaire d'Albi a :

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation,

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] à payer à la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice, assortie des intérêts légaux à compter de la présente décision.

- débouté Mme [D] [N] et M. [K] [T] de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts,

- débouté Mme [D] [N] et M. [K] [T] de leur demande d'annulation ou de réduction de la commission de la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier,

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] à payer à la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] aux entiers dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré, qu'il « appartenait aux consorts [N] [T] qui ont parfaitement été informés par le Notaire dans le cadre de la signature du compromis des conséquences de la non réitération de l'acte de vérifier l'adéquation de leur projet avant la signature ou au moins de le mentionner à titre de condition suspensive. Ainsi, n'est-il pas démontré que le projet de réalisation de chambres d'hôtes était une condition déterminante du consentement des consorts [N] [T]. En agissant ainsi, ils ont pris un risque qui ne saurait être supporté par l'agence immobilière, dont la faute n'est ainsi pas établie ».

En outre, la demande reconventionnelle des défendeurs est rejetée au motif qu'en l'absence de faute contractuelle de la part de l'agence Benac Immobilier, sa responsabilité délictuelle ne pouvait être engagée.

***

Par déclaration en date du 5 juin 2020, Mme [D] [N] et M. [K] [T] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] à payer à la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier la somme de 30.000 euros en réparation de son préjudice, assortie des intérêts légaux à compter de la présente décision.

- débouté Mme [D] [N] et M. [K] [T] de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts,

- débouté Mme [D] [N] et M. [K] [T] de leur demande d'annulation ou de réduction de la commission de la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier,

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] à payer à la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] aux entiers dépens de l'instance.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 septembre 2020, Mme [D] [N] et M. [K] [T], appelants, demandent à la cour de :

- rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou mal fondées ;

- réformer la décision dont appel dans toutes ses dispositions ;

- dire qu'ils n'étaient liés par aucun contrat avec la Sarl Benac immobilier,

- dire qu'ils n'ont commis aucune faute de quelque nature que ce soit ;

En conséquence,

- dire qu'ils n'ont pas engagé leur responsabilité délictuelle à l'égard de la Sarl Benac immobilier;

- dire que la faute commise par l'agence Benac immobilier est privative de toute rémunération;

Ce faisant,

- condamner la société Benac immobilier au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner la société Benac immobilier au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avocat soussigné.

À l'appui de leurs prétentions, les appelants exposent ne pas avoir commis de faute à l'encontre de la société Benac immobilier et ne pas avoir entendu lui nuire. Ils expliquent que l'application de la clause pénale n'était que la conséquence contractuelle de la non-réitération de la vente et non la reconnaissance d'une faute de leur part. Ils affirment que le préjudice de l'agent immobilier ne consiste qu'en une perte de chance et allèguent également que la société Benac immobilier n'a pas subi de préjudice ayant sans doute déjà contribué à la vente de l'immeuble et ayant perçu la commission.

À titre reconventionnel, ils soutiennent que la société Benac immobilier a commis une faute en ne prenant pas en compte leur projet consistant à réaliser des chambres d'hôtes dans le bien et en s'empressant fautivement à les engager sans leur laisser un temps suffisant pour effectuer des vérification, devis ou montage financier.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 10 septembre 2020, la Sarl à associé unique Benac immobilier, intimée, demande à la cour, au visa de l'article 1240 du code civil, de :

- confirmer le jugement dont appel,

- condamner conjointement et solidairement Mme [D] [N] et M. [K] [T] à lui payer la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts,

- 'dire et juger' que cette somme sera sortie des intérêts légaux à compter de la signification du jugement de première instance,

Vu l'absence de faute commise par l'agent immobilier,

- débouter Mme [D] [N] et M. [K] [T] de leur demande en paiement de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

- condamner conjointement et solidairement Mme [D] [N] et M. [K] [T] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

- les condamner aux entiers dépens.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée se prévaut du manquement contractuel des acquéreurs consistant en la non-réitération de la vente en la forme authentique, alors que toutes les conditions suspensives ont été réalisées. Ils exposent que les acquéreurs étaient parfaitement informés de l'existence et de l'entendue des conséquences de leur comportement fautif. Elle soutient qu'il en est résulté pour elle un préjudice certain et non pas une simple perte de chance, l'immeuble ayant été finalement vendu ultérieurement par une agence concurrente.

Sur la demande reconventionnelle des appelants, la société Benac immobilier explique qu'il leur était possible de se rétracter sans faute de leur part pendant le délai de dix jours après signature du compromis qui n'est intervenu que quatorze jours après la première visite et alors que l'empressement était du fait de Mme [N]. Enfin, la seule destination de l'immeuble ayant été mentionnée dans le compromis est l'habitation. De surcroît, une activité de chambres d'hôtes était possible dans les lieux en l'état.

***

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 avril 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 10 mai 2022.

MOTIVATION :

Sur la demande de dommages et intérêts de la Sasu Benac immobilier :

Aux termes des articles 1199, alinéa 1er et 1200 du code civil, « Le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties. » et « Les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat. »

L'affirmation du principe de l'effet relatif du contrat emporte pour conséquences que les contrats sont opposables aux tiers et ne peuvent, cependant, leur nuire.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

En application de ces textes, il est constant que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. Dès lors, le tiers au contrat qui établit un lien de causalité entre un manquement contractuel et le dommage qu'il subit n'est pas tenu de démontrer une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement.

Autrement dit, l'identité des fautes contractuelle et délictuelle conduit à réputer établie la seconde à partir de la première, sans qu'il soit besoin pour le tiers de rapporter la preuve d'une intention malveillante du contractant défaillant. Ce dernier est donc tenu de réparer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, les préjudices causés aux tiers au contrat qu'il savait susceptibles de résulter de son manquement à ses obligations contractuelles.

En l'espèce, la non-réitération de la vente en la forme authentique par M. [T] et Mme [N] a été expliquée par ces derniers par des motifs personnels, sans autre précision, ainsi que cela ressort de la convention d'annulation. Il s'ensuit que la clause pénale stipulée au compromis a été mise en 'uvre, sans qu'il soit soutenu que la renonciation à l'achat soit intervenue pour l'un des motifs légitimes prévus, à savoir la force majeure, la non réalisation des conditions suspensives ou la prorogation des délais acceptée par les parties. Au contraire, la convention d'annulation expose expressément que les conditions suspensives ont été réalisées. Dans ces circonstances, la mise en 'uvre de la clause pénale a vocation à réparer les conséquences dommageables d'un manquement contractuel.

Ainsi, la vente n'a pas été réitérée en la forme authentique de la seule volonté de M. [T] et Mme [N], en contradiction avec les obligations qu'ils avaient souscrites envers le vendeur, ce qui constitue une faute contractuelle. La méconnaissance par M. [T] et Mme [N] de leurs engagements constitue objectivement une faute contractuelle dont peut se prévaloir la société Benac immobilier dans le cadre de son action en responsabilité délictuelle, sans avoir besoin d'établir une quelconque intention de lui nuire de la part des acquéreurs défaillants.

En conséquence de la défaillance de M. [T] et Mme [N], la société Benac immobilier sollicite la condamnation de ces derniers au paiement de dommages et intérêts réparant le préjudice consistant en la perte de la commission convenue avec le vendeur et qu'elle considère être la cause du comportement de M. [T] et Mme [N].

Aux termes de l'article 6 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 « aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif d'honoraires, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes indiquées à l'article 1er ou ne peut être exigé ou accepté par elles, avant qu'une des opérations visées audit article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties. »

L'acte écrit contenant l'engagement des parties, auquel l'article précité subordonne la rémunération de l'agent immobilier par l'intermédiaire duquel l'opération a été conclue, n'est pas nécessairement un acte authentique.

En l'espèce, le compromis signé entre M. [T] et Mme [N] et le vendeur contenait l'engagement des parties d'acquérir sous conditions suspensives. Il ressort suffisamment de l'acte d'annulation que l'ensemble de ces conditions ont été considérées par les parties comme remplies. Le compromis constitue alors l'acte écrit contenant l'engagement des parties constant l'opération pour laquelle la société Benac immobilier a été sollicitée. À la suite de l'annulation de la vente par l'acquéreur, la société Benac immobilier n'a pu obtenir du vendeur la commission prévue au contrat les liant.

La convention d'annulation contient en ce sens une information complète à l'égard de M. [T] et Mme [N] qui ont été informés du montant des honoraires dus à l'agent immobilier et de la possibilité de voir leur responsabilité délictuelle engagée à ce titre. Malgré tout, la convention d'annulation expose : « Cependant, vendeurs et acquéreurs déclarent expressément ne pas avoir trouvé d'accord s'agissant des honoraires de l'agence Benac immobilier (notamment M. [T] et Mme [N] n'étant pas prêts à acquitter des dommages et intérêts envers l'agence à hauteur de 30 000,00 euros) et en conséquence ne pas vouloir intégrer un quelconque accord avec l'agence Benac dans la présente transaction, requérant Me [Y] de l'établir immédiatement sans l'intervention de l'agence. »

Il ressort également du compromis de vente que les parties étaient antérieurement informées des honoraires dus à la société Benac immobilier pour l'opération envisagée.

En conséquence, le lien de causalité entre la renonciation fautive à la vente par M. [T] et Mme [N] et la perte par la société Benac immobilier de sa commission contractuellement prévue se trouve établi.

Concernant l'évaluation du préjudice, l'intimée soutient avoir droit à l'indemnisation à hauteur de la commission perdue, alors que les appelants exposent que le préjudice ne peut être que de la perte d'une chance.

Il résulte du texte précité que tant que les conditions nécessaires à la perfection de l'opération envisagée ne sont pas remplies, le droit à rémunération de l'agent immobilier n'est pas acquis, de sorte que le préjudice qui résulterait du non versement de sa commission constitue une perte de chance, étant rappelé que la perte de chance indemnisable se caractérise par la disparition certaine d'une éventualité favorable.

Il ressort des pièces et attestations produites par la société Benac immobilier et non utilement contredites par les appelants, que postérieurement à la convention d'annulation du 3 mai 2019, deux autres mandats ont été signés entre le vendeur et l'agent immobilier, sans qu'une vente n'intervienne. Le bien aura été finalement vendu par un concurrent de l'intimée dans le courant de l'année 2020, de sorte qu'il est établi que la société Benac immobilier a été privée définitivement de l'intégralité de la rémunération à laquelle elle pouvait prétendre

La perte de la commission stipulée au profit de la société Benac immobilier est intervenue après la survenue de l'évènement générateur de son droit à rémunération et elle rapporte la preuve du caractère définitif de cette perte. Son préjudice n'est donc pas de la perte d'une éventualité favorable, mais bien d'un droit à rémunération acquis. M. [T] et Mme [N] ont donc, par leur renonciation fautive à l'opération, causé un préjudice à la société Benac immobilier à laquelle ils doivent réparation à hauteur de la commission stipulée entre cette dernière et le vendeur.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [T] et Mme [N] :

15. Aux termes de l'article 1999 du code civil, « Le mandant doit rembourser au mandataire les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution du mandat, et lui payer ses salaires lorsqu'il en a été promis.

S'il n'y a aucune faute imputable au mandataire, le mandant ne peut se dispenser de faire ces remboursements et paiement, lors même que l'affaire n'aurait pas réussi, ni faire réduire le montant des frais et avances sous le prétexte qu'ils pouvaient être moindres. »

En application de ce texte, l'ouverture du droit à rémunération de l'agent immobilier, dans les conditions impératives applicables à la profession, ne fait pas obstacle au pouvoir que le juge tient de réduire, voire supprimer cette rémunération, en considération des fautes que l'intermédiaire a commises dans l'exécution de sa mission.

En l'espèce, les appelants invoquent des manquements qu'ils imputent à la société Benac immobilier, à savoir une absence de prise en compte de leur projet consistant à réaliser des chambres d'hôtes dans le bien et un empressement fautif à les engager.

S'agissant de la destination du bien, il n'est pas établi que la société Benac immobilier ait eu connaissance du projet de chambres d'hôtes de M. [T] et Mme [N]. L'annonce fait mention d'une possibilité d'activité de chambre d'hôtes dans l'habitation et les plans produits aux débats illustrent cette possibilité. Les courriers échangés avec l'architecte chargée de l'étude de projet n'établissent pas cette volonté car les travaux envisagés ne concernaient que la création d'une suite parentale, l'indépendance des deux chambres entre elles et avec la suite parentale. En tout état de cause, ce courrier n'établit pas que l'agent immobilier a bien eu connaissance de ce projet. De plus, le compromis de vente fait état de la destination convenue de l'immeuble et mentionne à ce titre un usage d'habitation.

Il s'ensuit que l'argument pris de l'absence fautive de prise en compte par la société Benac immobilier du projet de M. [T] et Mme [N] manque en fait.

19. M. [T] et Mme [N] allèguent encore l'empressement fautif de la société Benac immobilier à les faire signer, sans rapporter la preuve de l'imputabilité de cet empressement à l'agent immobilier. En effet, la seule chronologie des visites et des offres est insuffisante à caractériser une quelconque précipitation.

De surcroit, le seul document enjoignant un réalisation rapide de l'opération émane de Mme [N] qui invite, dans son offre d'achat, l'agent immobilier à « transmettre aux vendeurs cette offre afin de procéder dans les meilleurs délais à un compromis de vente ».

20. De ce qui précède, il ressort que la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [T] et Mme [N] est mal fondée. C'est justement que la décision dont appel les a déboutés de leur demande d'annulation ou de réduction de la commission de la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier et que c'est à bon droit que le jugement entrepris a condamné in solidum Mme [D] [N] et M. [K] [T] à payer à la société par actions simplifiées à associé unique Benac immobilier la somme de 30.000 euros en réparation de son préjudice, assortie des intérêts légaux à compter de la présente décision ; il sera confirmé de ce chef.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

21. M. [T] et Mme [N], parties perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, seront condamnés au paiement des dépens d'appel

22. Le jugement rendu le 5 mai 2020 par le tribunal judiciaire d'Albi sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [T] et Mme [N] aux dépens et à payer à la Sasu Benac immobilier la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

23. La Sasu Benac immobilier est en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. M. [T] et Mme [N] seront condamnés à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [T] et Mme [N], parties tenues aux dépens, ne peuvent bénéficier d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 5 mai 2020 par le tribunal judiciaire d'Albi.

Y ajoutant,

Condamne M. [K] [T] et Mme [D] [N] aux dépens d'appel.

Condamne M. [K] [T] et Mme [D] [N] à payer à la Sasu Benac immobilier la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Déboute M. [K] [T] et Mme [D] [N] de leur propre demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffe Le Président

N. DIABY M.DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01299
Date de la décision : 14/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-14;20.01299 ?
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