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24/01/2023 | FRANCE | N°20/03358

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 24 janvier 2023, 20/03358


24/01/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/03358

N° Portalis DBVI-V-B7E-N23J

SL / RC



Décision déférée du 10 Novembre 2020

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (18/01869)

MME [H]

















[V] [J]





C/



[M] [R] [O]

[P] [A]





























































INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



Madame [V] [J]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentée par Me Jannick CHEZE de la SCP VINCENT-CHEZE, avoca...

24/01/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/03358

N° Portalis DBVI-V-B7E-N23J

SL / RC

Décision déférée du 10 Novembre 2020

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (18/01869)

MME [H]

[V] [J]

C/

[M] [R] [O]

[P] [A]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [V] [J]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentée par Me Jannick CHEZE de la SCP VINCENT-CHEZE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [M] [R] [O]

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représenté par Me Rachel LAHANA, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [P] [A]

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représenté par Me Rachel LAHANA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Les propriétés de M. [M] [O] et Mme [P] [A], d'une part, et celle de Mme [V] [J], d'autre part, situées dans le [Adresse 9] à [Localité 10] (31) sont voisines et mitoyennes.

Mme [J] est propriétaire des parcelles cadastrées section AY n°[Cadastre 1]-[Cadastre 2]-[Cadastre 3] et [Cadastre 4].

M. [M] [O] et Mme [P] [A] sont propriétaires de la parcelle cadastrée section AY n°[Cadastre 7] sur laquelle se trouvait une maison et qu'ils ont acquise de la société Ascor le 2 juin 2016. La société Ascor avait déposé une déclaration préalable de travaux le 25 novembre 2015. La mairie n'a pas fait opposition suivant décision du 9 décembre 2015. M. [O] et Mme [A] sont devenus bénéficiaires de la déclaration préalable de travaux. Ils envisageaient une démolition partielle en vue de la rénovation de la maison.

La maison comportait un mur mitoyen avec le fonds de Mme [J]. Ce mur servait d'appui pour un garage de Mme [J]. Les travaux initialement envisagés ne comportaient pas la démolition du mur mitoyen.

M. [O] a obtenu un permis de construire, daté du 20 juin 2016, pour la rénovation partielle de la maison existante.

Alors que cela n'était pas prévu dans le cadre de ce permis, le mur mitoyen a été détruit au mois d'octobre 2016.

M. [O] a déposé une nouvelle demande de permis de construire valant permis de démolir en date du 29 mai 2017. Le permis a été accordé selon arrêté en date du 26 juillet 2017.

En date du 20 septembre 2017, Mme [J] a engagé un recours gracieux contre l'arrêté de permis de construire délivré le 26 juillet 2017 à M. [O].

Ce recours a été rejeté le 9 novembre 2017 et n'a pas été suivi d'un recours contentieux devant le tribunal administratif. A ce jour, le permis est définitif.

Mme [J], estimant que la démolition du mur mitoyen était à l'origine des sinistres affectant sa propriété et que les règles de construction n'avaient pas été respectées, a assigné, par acte d'huissier du 31 mai 2018, M. [O] devant le tribunal de grande instance, puis a appelé dans la cause Mme [A] par acte du 9 mai 2019. Les procédures ont été jointes, le 27 mai 2019.

Par un jugement du 10 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [M] [O] et Mme [P] [A] ;

- ordonné l'obturation par M. [M] [O] et Mme [P] [A] de la fenêtre de leur immeuble posée en violation des règles du code civil en matière de vue ;

- assorti cette obligation d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du présent jugement ;

- rejeté l'ensemble des autres demandes de Mme [V] [J] ;

- débouté M. [M] [O] et Mme [P] [A] de leur demande de dommages et intérêts ;

- dit que chaque partie conserve ses propres dépens ;

- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné I'exécution provisoire du jugement.

Le tribunal a considéré, pour rejeter la fin de non recevoir, que Mme [J] n'avait pas pour obligation de mettre en cause les entreprises à l'origine des travaux effectués sur sa propriété.

Sur le fond, le tribunal a estimé que Mme [J] ne pouvait légitimement invoquer à l'encontre de ses voisins le fait qu'étant responsables de la démolition du mur mitoyen ayant entraîné des dégradations sur son propre bien, ils lui devaient réparation pour les travaux nécessaires à la remise en état de ce bien, alors qu'elle même avait accepté la démolition du mur litigieux puis les travaux, qu'elle ne contestait pas avoir payés. Il a donc rejeté ses demandes relatives à la remise en état du garage et de sa propriété et celles fondées sur un préjudice de jouissance.

Concernant l'empiétement de la nouvelle construction, le tribunal a rejeté les demandes de Mme [J] à ce sujet, celle-ci ne prouvant pas que le mur de la nouvelle construction empiétait sur sa propriété.

Il a dit que la fenêtre en vis-à-vis de la propriété de Mme [J] devait être obturée comme cela était prévu dans le permis de démolir délivré le 26 juillet 2017.

Il a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour le préjudice lié au fait que les travaux n'ont pu reprendre depuis les recours exercés par Mme [J], estimant que M. [O] et Mme [A] ne démontraient pas en quoi Mme [J] avait abusé de son droit d'agir en justice, d'autant plus qu'à partir du moment où son recours gracieux devant le maire n'avait pas abouti et que le permis de construire était devenu définitif, ils étaient en droit d'engager leurs travaux, sans que le recours judiciaire ne les en empêche ; qu'ils ne démontraient pas une faute de Mme [J].

Par déclaration en date du 30 novembre 2020, Mme [V] [J] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté les demandes suivantes qu'elle avait formées, à savoir :

- condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au remboursement des frais relatifs aux travaux payés par Mme [J] pour la remise en état de son garage d'un montant de 3.724,92 euros,

- condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 4.920 euros correspondant aux frais de remise en état de l'ensemble de la propriété de Mme [J],

- condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 1.500 euros correspondant au préjudice de jouissance subi par Mme [J] en raison de la démolition partielle de son mur mitoyen,

- ordonner la démolition de la portion du mur bâtie en empiétement sur la propriété de Mme [J] ainsi que la reprise du débord du toit appartenant à M. [M] [O] et Mme [P] [A],

- assortir ces obligations d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à venir,

- condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Prétentions et moyens des parties :

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 septembre 2022, Mme [V] [J], appelante, demande à la cour, au visa des articles 544, 545, 552,655, 679 et 680 du code civil, de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* ordonné l'obturation de l'ouverture pratiquée sur l'immeuble de M. [O] et Mme [A] en contravention des règles posées par le code civil en matière de vues ;

* assorti cette obligation d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du présent jugement ;

- réformer le jugement dont appel pour le surplus et :

* condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au remboursement des frais relatifs aux travaux qu'elle a payé pour la remise en état de son garage d'un montant de 3 724,92 euros,

* condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 4 920 euros correspondant aux frais de remise en état de l'ensemble de sa propriété,

* condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 1 500 euros correspondant au préjudice de jouissance qu'elle a subi en raison de la démolition partielle de son mur mitoyen,

* ordonner la démolition de la portion du mur bâti en empiétement sur sa propriété entre les points les points E5 et F du plan établi par le géomètre, M. [C] ou entre les points 3 et 12 matérialisés sur le plan dessiné par le géomètre, M. [Y],

* ordonner la reprise du débord du toit appartenant à M. [O] et Mme [A], * assortir cette obligation de faire d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à venir,

* condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] à reconstruire en remplacement du mur de leur maison un nouveau mur mitoyen, lequel devra servir de mur de séparation et d'appui à la construction lui appartenant et lui tenant lieu de garage, en lieu et place des plaques de bois qui ont été posées par la société Ventura,

* assortir cette obligation de faire d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à venir.

Subsidiairement, sur la démolition du mur bâti en empiétement sur sa propriété et la reprise du débord de toit, si la Cour devait considérer qu'une expertise judiciaire est nécessaire :

- nommer tel expert qu'il plaira à la Cour ayant pour mission de déterminer la limite de propriété entre les deux terrains ainsi que l'existence ou l'absence d'empiétement du fait de la construction litigieuse.

En tout état de cause,

- condamner M. [M] [O] et Mme [P] [A] solidairement au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance,

- débouter M. [M] [O] et Mme [P] [A] de l'intégralité de leurs demandes.

Elle soutient que la destruction du mur mitoyen est intervenue à la seule initiative de ses voisins ; qu'elle a été contrainte de régler des travaux non satisfaisants puisque le mur en pierres détruit a finalement été remplacé par de simples plaques d'OSB ; qu'elle est en droit de réclamer le remboursement de cette facture, outre les frais de réparation de l'atelier et du garage. Elle conteste avoir signé le devis et se tient à disposition de la cour afin qu'il soit procédé à une vérification d'écriture si nécessaire. Elle dit qu'elle n'a eu d'autre choix que d'accepter la démolition sous la pression de l'entrepreneur qui prédisait un effondrement imminent, et qu'elle n'a eu d'autre solution que d'accepter de régler la facture pour la mise hors d'eau et hors d'air de son garage.

Elle soutient que le mur de la maison voisine qui a été reconstruit empiète sur son terrain. Elle dit que le mur mitoyen ancien était placé sur la limite entre les deux propriétés. Elle soutient que le mur de la nouvelle construction a été construit sur sa propriété. Elle estime qu'un rapport non contradictoire a force probante dès lors qu'il est versé régulièrement aux débats et soumis à la discussion contradictoire. Elle fait valoir que le rapport de M. [Y] est concordant avec le rapport de M. [C]. Elle indique que M. [O] et Mme [A] admettent que le nouveau mur a été rebâti à la place de l'ancien, lequel avait un caractère mitoyen. Elle estime que le nouveau mur empiète sur la limite divisoire entre les deux fonds, relevant que M. [O] et Mme [A] reconnaissent qu'ils ont construit à cheval sur la limite séparative. A titre subsidiaire, elle sollicite une expertise judiciaire.

Elle soutient que la toiture de la nouvelle maison dépasse la limite séparative de propriété et empiète au-dessus de son fonds.

Elle estime n'avoir pas commis de faute dans ses actions en justice.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 mars 2022, M. [M] [O] et Mme [P] [A] , intimés et appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 544, 545, 552, 655, 679, 680 et 1240 du code civil, de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- ordonné l'obturation par M. [M] [O] et Mme [P] [A] de la fenêtre de leur immeuble posée en violation des règles du code civil en matière de vue ;

- rejeté l'ensemble des autres demandes de Mme [V] [J] ;

En conséquence,

- débouter Mme [J] de sa demande en condamnation solidaire formée à leur encontre en remboursement des frais relatifs aux travaux qu'elle a payé pour la remise en état de son garage pour la somme de 3.724,92 euros,

- débouter Mme [J] de sa demande en condamnation solidaire formée à leur encontre relative au paiement de la somme de 4.920 euros correspondant aux frais de remise en état de l'ensemble de sa propriété,

- débouter Mme [J] de sa demande en condamnation solidaire formée à leur encontre relative au paiement de la somme de 1.500 euros correspondant au préjudice de jouissance qu'elle aurait subi en raison de la démolition partielle de son mur mitoyen,

- débouter Mme [J] de sa demande en démolition de la portion du mur bâti en empiétement sur sa propriété ainsi que tendant à la reprise du débord du toit leur appartenant,

Ordonner, au besoin, une mesure d'instruction aux frais avancés de Mme [J],

Vu le permis de construire valant permis de démolir accordé selon arrêté en date du 26.07.2017,

- constater que les travaux envisagés (suspendus du fait de Mme [J]) prévoient la suppression du débord de toit par la réalisation d'une toiture plate et d'un patio, ainsi que la suppression de la fenêtre générant une vue sur le fonds de Mme [J],

- faire droit à leur appel incident ,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il les a débouté de leur demande de dommages et intérêts,

En conséquence,

- condamner Mme [J] au versement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des préjudices matériels et immatériels qu'ils ont subi depuis l'été 2017,

- condamner Mme [J] au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [J] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ils soutiennent que le mur mitoyen ancien a été démoli à la demande de Mme [J], avec l'accord de M. [O]. Ils soutiennent que Mme [J] ne justifie pas qu'elle n'aurait pas signé le devis, d'autant qu'elle a réglé la facture, et que les travaux ont été commandés par les deux voisins en accord. Ils estiment que le devis de remise en état ne les concerne pas, mais que le grief ne peut être adressé qu'à l'entreprise mandatée par Mme [J].

S'agissant de leur construction nouvelle, ils estiment que les conclusions des deux géomètres mandatés par Mme [J] ne leur sont pas opposables ; que le nouveau mur a été implanté au même endroit que l'ancien mur mitoyen et ne dépasse pas l'assiette initiale du mur d'origine. Ils estiment qu'une mesure d'expertise judiciaire ne doit pas pallier la carence de Mme [J] dans l'administration de la preuve.

S'agissant du débord de toit, ils indiquent qu'ils ne savent pas s'il y a empiétement, mais que le débord de toit sera supprimé à la réalisation des travaux, travaux qui ont été suspendus du fait des actions en justice de Mme [J].

Ils demandent des dommages et intérêts pour la faute de Mme [J] qui persiste à contester leur construction.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 octobre 2022.

L'affaire a été examinée à l'audience du 18 octobre 2022.

Motifs de la décision :

Sur la saisine de la cour :

L'appel ne porte pas sur les dispositions du jugement dont appel ayant rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [O] et Mme [A], et ayant ordonné l'obturation par M. [O] et Mme [A] de la fenêtre de leur immeuble posée en violation des règles du code civil en matière de vue, sous astreinte.

Il en résulte que la cour n'est pas saisie de ces dispositions.

Sur la destruction du mur mitoyen entre les deux fonds :

Des travaux sur le mur mitoyen ont été faits par M. [O] et Mme [A], suivant devis de la société V2M d'un montant de 2.620,80 euros TTC signé par M. [O] le 6 octobre 2016 portant notamment sur la déconstruction du mur extérieur sur la limite Nord, déconstruction partielle (3.20 ml) sur la limite Est à la pelle mécanique.

Il est produit un devis du 6 octobre 2016 de la société V2M à 'Mme [D]' de 3.954,25 euros TTC pour des travaux sur le garage qui concernent notamment :

- fourniture et mise en place de panne bois et OSB pour mise en protection permettant la démolition du mur sur propriété voisine ;

- fourniture et mise en place de panneau OSB pour mise en protection permettant la démolition du mur sur propriété voisine ;

- fourniture et mise en place d'un pare pluie pour protection de l'OSB y compris contre-liteau ;

- démolition toiture et plancher existant ;

- fourniture et mise en place de panneaux isolés de 40 mm imitation tuile.

Mme [J] conteste avoir signé ce devis.

Cependant, la facture de la société Ventura du 25 octobre 2016 qui reprend ces postes pour 3 724,92 euros TTC a été payée par Mme [J], cette dernière ayant d'ailleurs demandé que la facture soit mise à son nom et non pas au nom de 'Mme [D]'. Mme [J] a donc bien entériné les travaux de protection du garage, qui ont été rendus nécessaires par la destruction du mur mitoyen.

Selon l'attestation de M. [D], ami de Mme [J], cette dernière a donné son accord pour la démolition du mur mitoyen. Selon M. [D], Mme [J] a accepté la démolition du mur mitoyen, car l'entrepreneur a dit que le mur ancien était 'pourri', humide et que le garage allait s'effondrer.

Mme [J] qui a accepté le devis visant à protéger son garage pour permettre la démolition du mur mitoyen a ainsi validé le principe même de la démolition du mur mitoyen. Dès lors, elle ne peut pas demander le remboursement des frais relatifs aux travaux qu'elle a payés pour la remise en état de son garage, ni le paiement d'un devis de travaux pour remettre en état l'atelier et le garage, ni des dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance allégué en raison de la démolition partielle de son mur mitoyen.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [J] de ses demandes relatives aux travaux de remise en état du garage et de l'ensemble de sa propriété, et de celle fondée sur le préjudice de jouissance.

Sur l'empiétement par le mur reconstruit :

En vertu de l'article 545 du code civil, nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnisation.

En vertu de l'article 653 du code civil dans les villes et les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, est présumé mitoyen s'il n'y a titre ou marque du contraire.

M. [O] et Mme [A] ont reconstruit un mur à la place du mur mitoyen qui a été démoli. Ce mur supporte l'habitation de M. [O] et Mme [A] et la sépare du garage de Mme [J] et de son jardin.

Mme [J] produit un plan d'état des lieux réalisé non contradictoirement par M. [Z] [C], géomètre le 2 février 2017, et un rapport de M. [S] [Y], géomètre-expert établi le 19 juillet 2021, également non contradictoire.

En vertu de l'article 16 du code de procédure civile, le fait qu'un rapport d'expertise ait été établi unilatéralement à la demande d'une partie ne saurait le priver de tout effet probant, dès lors qu'il est régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire, et corroboré par d'autres éléments de preuve.

M. [C] a remis en place sur l'état des lieux les limites définies par plan de bornage de M. [X] [N], géomètre-expert à [Localité 10]. Ce procès-verbal de bornage avait été signé le 28 septembre 2011 par les propriétaires de l'époque, Mme [L] [G] et Mme [V] [J]. Selon M. [C], entre E3 et E4 l'ancien mur mitoyen a été démoli et non reconstruit. Entre E4 et E5, l'ancien mur mitoyen a été démoli et reconstruit en retrait dans la propriété [Adresse 8]. Entre les points E5 et F du plan établi par M. [C], ce dernier indique que l'ancien mur mitoyen a été démoli et reconstruit en empiétement sans reconstitution de l'appui du bâtiment 1. M. [C] indique que l'épaisseur de l'ancien mur mitoyen avant démolition était de 45 cm, et que l'épaisseur du nouveau mur porteur est de 20 cm. Il estime que l'empiétement est de 0,82 m² si l'on considère que le nouveau mur est mitoyen, et de 1,67 m² si l'on considère que le nouveau mur est privatif. Entre F et G l'ancien mur mitoyen a été démoli et reconstruit à l'identique. Entre G et H le mur privatif a été démoli et reconstruit en retrait de 0,14 m dans la propriété [Adresse 8].

M. [S] [Y], géomètre-expert dit que selon le plan annexe n°3, dans la zone centrale, le mur reconstruit est moins large que le mur mitoyen défini par M. [N]. Si ce mur est mitoyen il n'empiète pas sur la propriété [J]. Il dit que dans la zone à l'Ouest de la dépendance [J], entre les points 3, 4, 5, 6, 7 et 3 le mur édifié sur 2,58 m de long dépasse de la limite de propriété d'une distance variant de 0 m à 0,13 m. Il considère que ce mur n'est pas mitoyen car il n'a pas d'utilité pour Mme [J]. Dans la zone à l'Est de la dépendance [J], M. [Y] considère que le mur n'est pas mitoyen car il n'a pas d'utilité pour Mme[J]. L'empiétement est sur 24 cm de long avec un empiétement maximum de 8 cm.

Se pose la question du caractère mitoyen ou non du mur reconstruit. M. [Y] a raisonné en estimant qu'à l'Ouest et à l'Est de la dépendance [J] le mur n'était pas mitoyen.

Cependant, il dit que le mur ancien avant le litige, était défini et accepté par les parties comme étant mitoyen. Cet état de fait a été validé par le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limite établi par M. [N] en 2011. Selon M. [Y], M. [O] et Mme [A] ont démoli l'ancien mur et reconstruit le mur avec une largeur différente. Le mur présentait une largeur de 0,45 m. En reconstruisant un mur de 0,20 m de largeur M. [O] et Mme [A] ont donc pu bénéficier d'une augmentation de surface habitable de 0,2 m supplémentaire sur environ 11 ml de longueur.

Seul M. [Y] a relevé un empiétement dans la zone à l'Ouest de la dépendance [J] et dans la zone à l'Est, mais c'était en estimant que le mur n'était pas mitoyen.

Or, le mur reconstruit entre les points E5 et G du plan [C] est toujours mitoyen puisqu'il sépare les propriétés (garage et jardin [J] d'une part, habitation et jardin [O] - [A] d'autre part).

Dès lors que le mur est mitoyen, le rapport de M. [Y] ne met pas en évidence un empiétement. Seul M. [C] a relevé un empiétement de 0,82 m² entre les points E5 et F. Les deux rapports non contradictoires ne se corroborent donc pas.

La preuve de l'empiétement n'est donc pas rapportée.

Mme [J] sollicite une expertise judiciaire :

- pour établir la limite entre les deux fonds ;

- pour vérifier s'il y a empiétement du fait de la construction litigieuse.

Cependant, la limite entre les deux fonds résulte du procès-verbal de bornage qui avait été signé le 28 septembre 2011 par les propriétaires de l'époque, Mme [L] [G] et Mme [V] [J]. Il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise judiciaire pour établir cette limite. S'agissant de savoir s'il y a un empiétement, en vertu de l'article 146 du code de procédure civile, l'expertise ne doit pas suppléer à la carence d'une partie dans l'administration de la preuve. Le seul fait que M. [C] ait relevé un empiétement entre les points E5 et F, n'est pas un élément suffisant pour ordonner une expertise judiciaire, puisque ceci est non corroboré par M. [Y] qui dit que dans la zone centrale, le mur reconstruit est moins large que le mur mitoyen défini par M. [N], et que si ce mur est mitoyen (ce qui est le cas), il n'empiète pas sur la propriété [J].

La demande d'expertise judiciaire sera donc rejetée.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce que Mme [J] a été déboutée de sa demande au titre de l'empiétement par le mur reconstruit.

Sur l'empiétement par le débord de toiture :

S'agissant du débord de toiture, il ressort du rapport de M. [C] que la toiture de la nouvelle maison dépasse la limite séparative de propriété avec aggravation de 0,30 m de la servitude de surplomb (ancienne avancée de toit : 0,27 m ; nouvelle avancée de toit 0,57 m par rapport à la limite de propriété).

M. [Y] parle lui aussi d'un surplomb complémentaire de 0,30 m sur 2,79 m de long.

Les deux rapports non contradictoires se corroborent. L'empiétement de 30 cm sur 2,79 m de long par le débord de toiture est donc démontré.

M. [O] et Mme [A] précisent qu'ils prévoient la suppression du débord de toit par le remplacement de la toiture en tuiles par la réalisation d'une toiture plate et d'un patio. Ils disent que ces travaux sont suspendus depuis le recours de Mme [J] à l'encontre du permis de construire valant permis de démolir délivré le 26 juillet 2017 et l'action de Mme [J] sollicitant une démolition. Cependant, rien ne leur interdit de supprimer le débord de toit dès maintenant.

Il y a lieu d'ordonner à M. [O] et Mme [A] de supprimer l'empiétement de 30 cm sur 2,79 m de long créé par le débord du toit leur appartenant, sous astreinte de 50 euros par jour de retard qui courra à compter de la signification de l'arrêt à venir, et ce pendant une durée de 3 mois, à l'issue de laquelle une astreinte définitive pourra être prononcée.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. [O] et Mme [A] :

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts, compte tenu du fait qu'ils ont été condamnés à supprimer une vue, et qu'ils sont condamnés à supprimer un débord de toit, et qu'ils ne démontrent donc pas de faute de Mme [J] dans ses actions en justice.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

M. [O] et Mme [A], qui succombent, seront condamnés aux dépens de première instance, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point, et aux dépens d'appel.

Ils seront condamnés à payer à Mme [J] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et non compris dans les dépens, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point, et pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Ils seront déboutés de leur demande sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Dit que le mur reconstruit entre les points E5 et G du plan [C] est toujours mitoyen ;

Rejette la demande d'expertise judiciaire de Mme [V] [J] ;

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 10 novembre 2020, sauf :

- en ce qu'il a débouté Mme [J] de ses demandes relatives aux travaux de remise en état du garage et de l'ensemble de sa propriété, et de celle fondée sur le préjudice de jouissance,

- en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'empiétement par le mur reconstruit ;

- en ce qu'il a débouté M. [M] [O] et Mme [P] [A] de leur demande de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,

Ordonne à M. [O] et Mme [A] de supprimer de supprimer l'empiétement de 30 cm sur 2,79 m de long créé par le débord du toit leur appartenant, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, qui courra à compter de la signification de l'arrêt à venir, et ce pendant une durée de 3 mois, à l'issue de laquelle une astreinte définitive pourra être prononcée ;

Condamne M. [O] et Mme [A] aux dépens de première instance et d'appel ;

Les condamne à payer à Mme [J] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel et non compris dans les dépens ;

Les déboute de leur demande sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03358
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;20.03358 ?
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