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24/01/2023 | FRANCE | N°20/02728

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 24 janvier 2023, 20/02728


24/01/2023



ARRÊT N°



N° RG 20/02728

N° Portalis DBVI-V-B7E-NYDE

SL / RC



Décision déférée du 21 Septembre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (19/00891)

MME TAVERNIER

















SAS JOHNSON CONTROLS INDUSTRIE





C/



S.A.S.U. MCI

S.A.R.L. BETTY

S.C.I. JBSS































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***



APPELANTE



SAS JOHNSON CONTROLS INDUSTRIES

Exerçant sous l'enseig...

24/01/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/02728

N° Portalis DBVI-V-B7E-NYDE

SL / RC

Décision déférée du 21 Septembre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de TOULOUSE (19/00891)

MME TAVERNIER

SAS JOHNSON CONTROLS INDUSTRIE

C/

S.A.S.U. MCI

S.A.R.L. BETTY

S.C.I. JBSS

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

SAS JOHNSON CONTROLS INDUSTRIES

Exerçant sous l'enseigne YORK, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités au dit siège social

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant, au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Rémi KLEIMAN et Me Romain MASSOBRE, avocats plaidants, au barreau D'EVERSHEDS SUTHERLAND (FRANCE) LLP

INTIMEES

S.A.S.U. MCI

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Gennevilliers sous le numéro 632 017 257, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Nadia ZANIER de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. BETTY

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 417 914 827, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.C.I. JBSS

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro 404 840 258, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. LECLERCQ, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : R. CHRISTINE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre

******

Exposé des faits et procédure :

La Sci Jbss a fait édifier sur la commune de Saint-Jean (31240) un immeuble à usage industriel et commercial et a consenti à la Sarl Betty, maître affineur, un bail commercial comprenant des locaux de vente, différentes surfaces de stockage et en sous-sol des locaux d'affinage de fromages.

Dans le cadre de cette opération de construction, la société Johnson Controls services et solutions France, devenue la Sasu Mci, a été chargée par la société Jbss des lots 'automatisation froid des appareillages' et 'plomberie', en exécution de deux actes d'engagement des 21 juin 2011 et 30 novembre 2011.

La société Mci s'est approvisionnée auprès de la société Johnson contrôles industries, fabricant, exerçant à l'enseigne York.

Les factures émises entre novembre 2011 et décembre 2012 par la société Mci ont été réglées par la Sarl Betty dans le cadre de ses rapports contractuels avec la Sci Jbss.

Les équipements frigorifiques ont fait l'objet d'une réception avec réserves le 5 décembre 2012 entre la Sci Jbss et la société Mci. Les réserves ont été levées au terme d'un constat contradictoire du 24 mai 2013.

Par la suite, des désordres sont apparus s'agissant en particulier de fuites du liquide frigorigène équipant les deux équipements condenseurs situés à l'extérieur du bâtiment.

Suite à une assignation en référé devant le tribunal de grande instance de Toulouse du 7 juillet 2017, une expertise judiciaire portant sur les condenseurs mis en place sur le site a été ordonnée par décision du 19 octobre 2017 au contradictoire des sociétés Betty et Jbss et de la société Mci. Par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 21 juin 2018, l'expertise a été déclarée opposable à la Sa Axa France iard, assureur de la société Mci.

Par ordonnance de référé du 21 juin 2018, suite à une assignation du 29 mai 2018, l'expertise a été étendue à la société Johnson Controls industrie, fabricant des condenseurs litigieux.

Le rapport d'expertise de M. [E] a été clôturé le 11 décembre 2018.

Par acte d'huissier du 20 mars 2019 et après y avoir été autorisée par ordonnance en date du 12 mars 2019, la Sarl Betty a fait assigner la Sasu Mci, à jour fixe, devant le tribunal judiciaire de Toulouse, en responsabilité pour vice caché.

Par acte d'huissier en date du 13 juin 2019 et après y avoir été autorisée par ordonnance en date du 20 mai 2019, la Sasu Mci a fait assigner la société Johnson Controls industrie exerçant à l'enseigne York, venant aux droits de la société York systems, aux fins de la voir condamnée à la relever et garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

Les procédures ont été jointes par ordonnance du 20 janvier 2020.

La société Jbss est intervenue volontairement à la procédure par conclusions du 20 mars 2020, ainsi que relevé par le premier juge.

Par un jugement du 21 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- condamné la Sasu Mci à payer à la Sci Jbss la somme de 54 500 euros HT outre indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction entre le jour du dépôt du rapport d'expertise [E] et le jour du jugement à intervenir et intérêts au taux égal au-delà, au titre des travaux de remplacement de l'installation litigieuse,

- débouté la Sarl Betty de ses demandes à l'encontre de la Sasu Mci,

- condamné la Sa Mci à payer à la Sci Jbss la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la Sasu Mci aux dépens qui comprendront les dépens de la procédure de référé-

expertise, de la procédure d'appel ainsi que le coût de l'expertise,

- rejeté la demande de la Sci Jbss tenant à la condamnation de la société Mci à supporter les sommes découlant de l'application de l'article A 444-32 du code de commerce dans l'hypothèse d'un recours à l'exécution forcée de la décision à intervenir,

- condamné la Sa Johnson Controls industrie à relever et garantir la Sa Mci de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

- condamné la Sa Johnson Controls industrie à payer la somme de 5.000 euros à la Sasu Mci en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le premier juge a considéré que l'action en garantie des vices cachés engagée par la Sci Jbss à l'encontre de la Sasu Mci, installateur et revendeur de l'installation frigorifique litigieuse était recevable ; sur le fond, que les condenseurs fabriqués par la société Johnson controls industrie et installés par la société Mci étaient affectés d'un vice caché, et qu'au vu du rapport de l'expert, la société Mci devait donc être condamnée à supporter le prix des travaux de reprise, chiffrés à la somme de 54.500 euros Ht.

S'agissant de l'action engagée par la Sasu Mci à l'encontre de la société Johnson controls industrie, le tribunal, après avoir considéré que la prescription n'était pas acquise, a condamné la Sa Johnson controls industrie à relever et garantir la Sasu Mci de cette condamnation.

Enfin, il a relevé que la société Betty fondait son action à l'encontre de la société Mci sur l'article 1240 du code civil en l'absence de lien contractuel ; que la responsabilité quasi-délictuelle du vendeur non fabricant ne pouvait être présumée à l'égard des tiers du seul fait que le matériau vendu était défectueux. Il a relevé que l'expert ne caractérisait aucune faute d'exécution à l'encontre de la société Mci dans la pose des condenseurs ; qu'en conséquence, en l'absence de faute commise par la société Mci, il convenait de débouter la Sarl Betty de ses demandes à son encontre.

Par déclaration en date du 9 octobre 2020, la Sas Johnson Controls industrie a relevé appel de ce jugement, intimant la Sasu Mci France, la Sci Jbss et la Sarl Betty, en ce qu'il a :

- condamné la Sasu Mci à payer à la Sci Jbss la somme de 54 500 euros HT outre indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction entre le jour du dépôt du rapport d'expertise [E] et le jour du jugement à intervenir et intérêts au taux égal au-delà, au titre des travaux de remplacement de l'installation litigieuse,

- condamné la Sasu Mci à payer à la Sci Jbss la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la Sasu Mci aux dépens,

- condamné la Sa Johnson Controls industrie à relever et garantir la Sa Mci de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

- condamné la Sa Johnson Controls industrie à payer la somme de 5000 euros à la Sa Mci en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prétentions des parties :

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 octobre 2022, la Sas Johnson Controls industrie, appelante, demande à la cour, au visa des articles 1641 et 1648 du code civil, et de l'article L. 110-4 du code de commerce, de :

A titre liminaire,

- révoquer la clôture de l'instruction ;

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré non prescrites l'action de la société 'Mci' à l'encontre de la société Mci et l'action des sociétés Jbss et Betty à l'encontre de la société Mci,

En conséquence :

- déclarer irrecevable comme étant prescrite, et à tout le moins sans objet, l'action de la société Mci France à son encontre,

A titre principal,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a déclaré tenue à la garantie des vices cachés au bénéfice de la société Mci,

En conséquence :

- débouter la société Mci de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a évalué le préjudice indemnisable de la société Jbss à la somme de 54.500 euros HT et lui a accordé une indemnité de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Betty de ses demandes ;

En conséquence :

- évaluer le préjudice subi par la société Jbss à la somme de 23.606 euros HT.

- évaluer à une juste proportion l'indemnité allouée à la société Jbss au titre de l'article 700 du code de Procédure Civile.

En tout état de cause :

- condamner la société Mci à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner la société Mci en tous les dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 octobre 2022, la Sasu Mci France, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1604, 1641 et suivants du code civil, et de l'article L. 110-4 du code de commerce, de :

- constater que son action récursoire au préjudice de la société Johnson Controls industrie est :

* recevable comme non prescrite, tant sur le fondement des dispositions de l'article L110-4 du Code de commerce que 1648 du Code civil,

* bien fondée,

En conséquence,

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société Johnson Controls industrie à la relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

A défaut, et pour le cas où la Cour considérerait que son action récursoire au préjudice de la société Johnson Controls industrie serait prescrite,

- déclarer irrecevable et rejeter l'action des sociétés Jbss et Betty formulée à son préjudice, comme atteinte par la forclusion,

- débouter la société Johnson Controls industrie, les sociétés Jbss et Betty de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires,

En toutes hypothèses,

Constatant l'absence de toute faute de la société Mci à l'origine du sinistre,

- confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,

- débouter la société Betty de ses demandes de condamnation aux sommes suivantes :

* 57 332,85 euros au titre des frais de location provisoire exposés par la société Betty du mois de décembre 2018 au mois de septembre 2021 inclus,

* 58,66 euros à titre d'indemnité journalière à compter du 1er avril 2021, jusqu'au jour du parfait paiement de l'intégralité des condamnations prononcées, que la société Betty ne sollicite, d'ailleurs, plus dans le dispositif de ses dernières conclusions,

* 5.678,84 euros à titre de dommages et intérêts au titre des interventions de SAV supportées à fonds perdus par la société Betty,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

'faute pour celles-ci d'être justifiée tant dans leur principe que dans leur quantum

- débouter la société Johnson Controls industrie, les Sci Jbss et Betty de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires,

Y ajoutant,

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Johnson Controls industrie à lui verser la somme de 5 000 euros à titre d'indemnisation des frais de justice qu'elle s'est trouvée contrainte d'engager dans le cadre du présent appel, outre aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 11 juillet 2022, la Sci Jbss et la Sarl Betty, intimées et appelantes incidentes, demandent à la cour, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, et de l'article L. 110-4 du code de commerce, de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Mci à régler à la Sci Jbss les sommes suivantes:

* 54 500 euros HT au titre des travaux de reprise, avec indexation selon l'indice BT01 depuis le dépôt du rapport d'expertise de M. [E],

* 8 000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Betty de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Mci à régler à la société Betty les sommes suivantes:

* 57.332,82 euros HT au titre des frais de location provisoire exposés par la société Betty du mois de décembre 2018 au mois de septembre 2021 inclus et 5.678,84 € à titre de dommages et intérêts au titre des interventions de SAV supportées à fonds perdus par la société Betty,

* 5.000,00 euros pour résistance abusive.

Y ajoutant,

- condamner la société Mci au paiement d'une somme de 8.000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à leurs bénéfices,

- la condamner aux entiers dépens de la présente instance en ce compris les dépens de référé expertise, d'appel sur référé expertise, et d'expertise judiciaire, ces derniers ayant été taxés à la somme de: 5 996,52 euros,

- condamner la société Mci à supporter les sommes découlant de l'application de l'article A 444- 32 du code de commerce dans l'hypothèse d'un recours à l'exécution forcée de la décision à intervenir.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2022.

L'affaire a été examinée à l'audience du 18 octobre 2022.

Motifs de la décision :

Sur les données de l'expertise judiciaire :

L'expert judiciaire indique que les deux condenseurs extérieurs sont affectés de désordres qui génèrent des fuites de liquide frigorigène. Les fuites sur ces condenseurs sont généralisées et réparties sur la surface d'échange des deux appareils. Il indique que cette situation perdure depuis 2015. Le phénomène est apparu deux ans après la réception de l'installation. Certains éléments lui font penser que le processus de dégradation avait commencé plus tôt, notamment des taches de graisse.

Il indique que la société Mci n'a fait que poser un produit fini et l'expert n'a pas observé d'erreur dans la pose des groupes.

Selon l'expert, l'utilisation de l'équipement ne peut être en cause. L'accès à l'échangeur est protégé d'une part et les surfaces concernées sont assez inaccessibles d'autre part. Un défaut de maintenance est aussi à exclure. Le nombre d'interventions de la société Mci et autres entreprises de 2014 à 2017 est très important et dépasse largement le rythme d'intervention par rapport à un entretien dit 'normal'.

L'expert retient un défaut de porosité des canaux des échangeurs (ailettes) étant rappelé que le défaut d'étanchéité est apparu simultanément sur les deux appareils distants. Il estime que les appareils eux-mêmes sont défectueux.

Il indique que les appareils ne sont pas réparables. Les appareils ne sont plus fabriqués aujourd'hui. Les travaux de remise en état consistent en le remplacement des condensateurs défaillants. La possibilité de réparation du dispositif de refroidissement, du fait de sa forme complexe et de la non-qualité des matériaux, n'est pas envisageable.

Il retient le coût des travaux suivant :

- location d'une installation provisoire : 8.569,39 euros HT ;

- mise en place d'un groupe froid de remplacement : 42.500 euros HT ;

- mission de contrôle : 12.000 euros HT.

Sur l'action en garantie des vices cachés de la Sci Jbss contre la société Mci :

Sur la recevabilité de l'action en garantie des vices cachés de la Sci Jbss contre la société Mci :

En vertu de l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

En vertu de l'article L 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Il est constant que l'action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans le délai de deux ans de la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de prescription de l'article L 110-4 du code de commerce.

En l'espèce, la date de réception des travaux de la société Mci est le 5 décembre 2012. La date de la dernière facture de la société Mci est le 19 décembre 2012.

Or, l'instance en référé a été intentée par assignation du 7 juillet 2017, soit dans le délai de 5 ans. Puis l'ordonnance de référé du 19 octobre 2017 a fait courir un nouveau délai de 5 ans. Or, les conclusions d'intervention volontaire de la société Jbss sont du 20 mars 2020.

La prescription tirée des dispositions précitées de l'article L 110-4 précité ne peut donc pas être opposée à la Sci Jbss.

L'action en garantie suite à vice caché est également enfermée dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice.

Par courrier du 7 décembre 2016, le conseil des sociétés Jbss et Betty écrivait au conseil des sociétés Mci et Aig que sa cliente avait été amenée à déplorer l'apparition de nombreuses fuites de fréon sur les condenseurs installés par la société Mci.

Un rapport d'expertise judiciaire dans une instance distincte a été clôturé par M. [E] le 25 juillet 2016 suite à une ordonnance de référé du 19 mars 2015 dans le cadre de phénomène de condensation importante affectant les circulations du sous-sol du bâtiment. Il porte sur la régulation de l'hygrométrie des chambres froides. Ceci est sans rapport avec le présent litige.

Le délai de 2 ans à compter de la découverte du vice court à compter du dépôt du rapport d'expertise de M. [E] du 11 décembre 2018, car l'expert s'est prononcé sur l'origine des fuites, estimant qu'elles étaient dues à un défaut de fabrication des condenseurs, et à la porosité des produits utilisés pour la fabrication, caractérisant un vice caché. La connaissance du vice remonte au 11 décembre 2018.

En conséquence, l'intervention volontaire de la société Jbss étant du 20 mars 2020, la prescription biennale ne peut être opposée à la société Jbss.

La société Jbbs n'est donc pas prescrite en son action en garantie des vices cachés contre la société Mci.

Sur le vice caché :

L'expert judiciaire indique que les deux condenseurs extérieurs sont affectés de désordres qui génèrent des fuites de liquide frigorigène. Les fuites sur ces condenseurs sont généralisées et réparties sur la surface d'échange des deux appareils. Ceci n'est dû ni à un défaut d'entretien, ni à l'utilisation de l'équipement. L'expert retient un défaut de porosité des canaux des échangeurs (ailettes) étant rappelé que le défaut d'étanchéité est apparu simultanément sur les deux appareils distants. Il estime que les appareils eux-mêmes sont défectueux.

Ainsi, la cause des fuites est déterminée.

Elles sont dues à un défaut intrinsèque du produit.

Le vice caché est donc démontré.

Sur le montant du préjudice :

L'installation n'était plus vendue lorsque l'expert est intervenu (suite à une évolution réglementaire sur les fluides, les condenseurs York ne sont plus produits et distribués en France).

L'expert indique que toutes les entreprises intervenues en réparation ont conclu à la nécessité de remplacer les condenseurs, faute de pouvoir les réparer. L'expert a estimé que la possibilité de réparation du dispositif de refroidissement, du fait de sa forme complexe et de la non-qualité des matériaux, n'était pas envisageable.

L'installation neuve coûte 42.500 euros HT.

L'étude par un bureau spécialisé et le suivi des travaux par un bureau de contrôle représente 12.000 euros HT.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a condamné la Sasu Mci à payer à la Sci Jbss la somme de 54 500 euros HT outre indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction entre le jour du dépôt du rapport d'expertise [E] et le jour du jugement à intervenir et intérêts au taux égal au-delà, au titre des travaux de remplacement de l'installation litigieuse.

Sur l'action en responsabilité délictuelle de la société Betty contre la société Mci :

Il est constant qu'un tiers au contrat est fondé à agir en responsabilité quasi-délictuelle dès lors qu'un manquement contractuel lui a causé un préjudice.

En l'espèce, la société Betty agit sur le fondement quasi-délictuel contre la société Mci.

Elle fait valoir que la société Mci a commis un manquement dans son obligation contractuelle de livrer à la société Jbss un produit exempt de vice. Elle soutient que le vice caché peut être invoqué contre la société Mci car la société Mci certes n'a pas commis de faute d'exécution, mais la société Mci est un vendeur professionnel qui est présumé connaître le vice.

Cependant, l'action en garantie des vices cachés fondée sur l'article 1641 du code civil est une action en garantie, et non une action en responsabilité fondée sur une faute. Il n'est donc pas démontré une faute contractuelle de la société Mci envers la société Jbbs constituant une faute délictuelle de la société Mci envers la société Betty.

Seule une action de la société Betty directement contre le fabricant permettrait de faire application de la jurisprudence aux termes de laquelle le seul fait de commercialiser un produit affecté d'un vice, constitue une faute délictuelle qui engage la responsabilité du fabricant envers les tiers.

Par ailleurs, la défense à une action en justice constitue un droit et ne dégénère en faute pouvant donner naissance à dommages-intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, la résistance abusive de la société Mci n'est pas démontrée.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Betty de ses demandes contre la société Mci.

Sur l'action récursoire de la société Mci contre la société Johnson controls industrie :

Sur la recevabilité de l'action récursoire de la société Mci contre la société Johnson controls industrie :

Sur le délai de prescription de 2 ans de la garantie des vices cachés :

Selon l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Toutefois, l'action récursoire fondée sur la garantie de tels vices, exercée par le vendeur intermédiaire ou l'entrepreneur à l'encontre de son fournisseur, ne court à pas à compter du jour de cette révélation, mais à compter de la date à laquelle l'intermédiaire ou l'entrepreneur est lui-même assigné.

L'action récursoire de la société Mci contre la société Johnson controls industrie a été faite par acte du 13 juin 2019, soit dans le délai de 2 ans de l'assignation de la société Mci par la société Betty qui est du 20 mars 2019.

Sur le délai de prescription de 5 ans du code de commerce :

En présence d'une vente commerciale, le point de départ du délai de prescription de l'article L 110-4 code de commerce est le jour de la naissance de l'obligation.

Certes, la mise en cause de la société Johnson controls industrie en référé le 29 mai 2018 en expertise commune et au fond le 13 juin 2019 est postérieure de 5 ans à la fourniture de l'installation le 29 juillet 2011. Toutefois, en raison de la suspension de la prescription commerciale jusqu'à la date de l'assignation de la société Mci en référé le 7 juillet 2017 aux fins d'expertise et au fond le 20 mars 2019 par la société Jbss, le délai de 5 ans initialement couru à compter du 29 juillet 2011 était suspendu jusqu'au 20 mars 2019 de sorte que sauf à porter une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge en privant de fait le revendeur du pouvoir d'exercer une action récursoire, la prescription tirée des dispositions précitées de l'article L 110-4 précité ne peut être valablement opposée à la société Mci.

L'action récursoire de la société Mci contre la société Johnson controls industrie n'est donc pas prescrite.

Sur le fond :

La société Mci n'a pas commis d'erreur d'exécution.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Johnson controls industrie, fabricant du matériel qui comporte un vice intrinsèque, à garantir la société Mci de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Le jugement dont appel sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Jbss tendant à la condamnation de la société Mci à supporter les sommes découlant de l'application de l'article A 444-32 du code de commerce en cas de recours à l'exécution forcée de la décision. En effet, la société Mci se trouvant débitrice de la société Jbss, les frais de l'exécution forcée éventuelle de la décision sont par principe à sa charge en application de l'article L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution dans les strictes limites d'ordre public prévues par ce texte, de sorte que les frais laissés par les textes réglementaires à la charge du créancier de l'exécution qui ne sont pas des dépens et ne revêtent pas le caractère d'un dommage ne sauraient être mis à la charge du débiteur de l'exécution autrement que dans le cadre des prévisions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Johnson controls industrie, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

La société Mci sera condamnée à payer à la Sci Jbbs et à la société Betty la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

La société Johnson controls industrie devra relever et garantir la société Mci de cette condamnation.

La société Johnson controls industrie sera condamnée à payer à la société Mci la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sera déboutée de sa demande sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Johnson controls industrie aux dépens d'appel ;

Condamne la société Mci à payer à la Sci Jbbs et à la société Betty la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Condamne la société Johnson controls industrie relever et garantir la société Mci de cette condamnation ;

Condamne la société Johnson controls industrie à payer à la société Mci la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société Johnson controls industrie de sa demande sur le même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/02728
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;20.02728 ?
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