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20/01/2023 | FRANCE | N°20/03309

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 20 janvier 2023, 20/03309


20/01/2023



ARRÊT N° 2023/25



N° RG 20/03309 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N2UZ

CP/KS



Décision déférée du 22 Octobre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE ( F18/01420)

SECTION COMMERCE CH 2



[L] [U]

















S.A. CREDIT LYONNAIS





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[P] [A]






































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INFIRMATION PARTIELLE





Grosses délivrées

le 20/01/2023

à

Me Ophélie BENOIT-DAIEF

par Me Stéphanie FONTAINE



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le 20/01/2023

à

Me Ophélie BENOIT-DAIEF

par Me Stéphanie FONTAINE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section...

20/01/2023

ARRÊT N° 2023/25

N° RG 20/03309 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N2UZ

CP/KS

Décision déférée du 22 Octobre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE ( F18/01420)

SECTION COMMERCE CH 2

[L] [U]

S.A. CREDIT LYONNAIS

C/

[P] [A]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosses délivrées

le 20/01/2023

à

Me Ophélie BENOIT-DAIEF

par Me Stéphanie FONTAINE

ccc

le 20/01/2023

à

Me Ophélie BENOIT-DAIEF

par Me Stéphanie FONTAINE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTES

S.A. CREDIT LYONNAIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Guillaume VERDIER de la SCP TUFFA-NERSON-DOUARRE, avocat au barreau de PARIS et par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL LEXAVOUE PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉ

Monsieur [P] [A]

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représenté par Me Stéphanie FONTAINE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mmes S.BLUME et C.PARANT chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] [A] a signé le 24 octobre 2000 avec la société Crédit Lyonnais un contrat de qualification, qui a pris effet le 2 novembre 2000 et avait pour terme

le 31 octobre 2002 en vue d'obtenir le brevet professionnel de banque.

Le 1er novembre 2002, la relation de travail s'est poursuivie sous forme d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, au poste d'opérateur de traitement d'après-vente, en qualité de technicien de banque de niveau D, selon la convention collective de la banque.

M. [P] [A] a, par la suite, exercé différentes fonctions : technicien après-vente, équipier volant, conseiller clientèle particuliers, conseiller financier professionnels, directeur d'agence.

En dernier état, et depuis le 15 mars 2015, [P] [A] exerçait les fonctions de directeur d'agence, puis de grappe d'agences, statut cadre, catégorie H.

Le salarié travaillait sous le régime du forfait en heures, à concurrence de 1.607 heures par an.

A l'occasion d'un séminaire de formation, Monsieur [A] aurait découvert qu'il percevait une rémunération inférieure à celle d'autres directeurs de grappe d'agence.

Par lettre recommandée du 7 juin 2016, Monsieur [A] a démissionné ; son contrat de travail a pris fin le 30 juin 2016.

M. [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse le 19 avril 2017 pour solliciter le paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de dommages et intérêts pour atteinte à l'égalité de traitement.

Après radiation, il a à nouveau saisi le conseil de prud'hommes le 7 septembre 2018.

Par jugement du 22 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Toulouse a :

- débouté Monsieur [A] de sa demande de production de diverses pièces,

- constaté que Monsieur [A] a effectué des heures de travail supplémentaires non rémunérées,

- dit constitué le délit de travail dissimulé,

- constaté la rupture d'égalité de traitement au préjudice de Monsieur [A]

- condamné la société Crédit Lyonnais à payer à Monsieur [A] les sommes

suivantes :

*12 552,76 € à titre de rappel de salaires, outre la somme de 1 255,28 € au titre des congés payés y afférents,

* 21 379,98 € au titre de l'indemnité de travail dissimulé,

*20 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice du fait de la rupture d'égalité de rémunération et de la perte de la prime d'intéressement et de participation,

- débouté Monsieur [A] et la société Crédit Lyonnais du surplus de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit,

- condamné la société Crédit Lyonnais aux dépens.

Par déclaration du 26 novembre 2020, la société Crédit Lyonnais a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 5 novembre 2020, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 9 juillet 2021, auxquelles il est expressément fait référence, la société Crédit Lyonnais demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* constaté que Monsieur [A] a effectué des heures de travail supplémentaires non rémunérées,

* dit constitué le délit de travail dissimulé,

* constaté la rupture d'égalité de traitement au préjudice de Monsieur [A],

* l'a condamnée au paiement de diverses sommes à Monsieur [A] et aux dépens,

* l'a déboutée du surplus de ses demandes,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [A] du surplus de ses demandes,

- déclarer Monsieur [A] irrecevable en ses demandes,

- débouter Monsieur [A] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Monsieur [A] à lui rembourser la somme de 9.573,74 € qui lui a été versée au titre de l'exécution provisoire du jugement entrepris,

- condamner Monsieur [A] à lui payer la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [A] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 12 septembre 2022, auxquelles il est expressément fait référence, Monsieur [A] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* constaté qu'il a effectué des heures de travail supplémentaires non rémunérées,

* dit constitué le délit de travail dissimulé,

* constaté la rupture d'égalité de traitement à son préjudice,

* condamné la société Crédit Lyonnais aux dépens,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

* débouté Monsieur [A] de sa demande de production de pièces,

* condamné la société Crédit Lyonnais à lui régler diverses sommes,

* débouté Monsieur [A] et la société Crédit Lyonnais du surplus de leurs demandes,

* dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

En tout état de cause :

- ordonner la production par la société Crédit Lyonnais des pièces suivantes :

* feuille d'émargement du stage « Tremplin DA (Prise de poste)» auquel Monsieur [A] a participé du 28/04/2015 au 30/04/2015,

* bulletins de salaires anonymisés de l'ensemble des directeurs de grappes d'agences (ou postes intitulés « directeurs d'agences : de 1 à 3 utp, 3 à 5 utp, et plus de 5 ; de responsables d'agences ; de directeurs d'agences multisites ») de la société Crédit Lyonnais du moins de juin 2013 au mois de juin 2016,

* contrats de travail et avenants anonymisés des directeurs de grappes d'agences (ou postes intitulés « directeurs d'agences : de 1 à 3 utp, 3 à 5 utp, et plus de 5 ; de responsables d'agences ; de directeurs d'agences multisites ») de la société Crédit Lyonnais signés entre le mois de juin 2013 et le mois de juin 2016,

* tableau indicateur des rémunérations des directeurs de grappes d'agences (ou postes intitulés « directeurs d'agences : de 1 à 3 utp, 3 à 5 utp, et plus de 5 ; de responsables d'agences ; de directeurs d'agences multisites ») de la société Crédit Lyonnais en fonction des dates d'embauche, des années 2013 à 2016,

- condamner la société Crédit Lyonnais à lui payer les sommes suivantes :

*14 155,32 € à titre de rappel de salaires sur les trois dernières années et 1 415,53 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

*29 465,07 € au titre de l'indemnité de travail dissimulé,

* 40 240 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture d'égalité de rémunération et de la perte de la prime d'intéressement et de participation,

*3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à venir,

- fixer le salaire moyen de référence à 4 910,84 €.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 4 novembre 2022.

MOTIFS

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

La société Crédit Lyonnais soulève, en premier lieu, la prescription triennale de la demande en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires et prétend qu'en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, la demande en paiement de salaires antérieurs au 19 avril 2014 est prescrite.

Selon l'art. L.3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

M. [P] [A] a démissionné à effet au 30 juin 2016.

En application de l'article précédent, la demande de rappel de salaire formée par M. [A] sur la période de trois ans précédant la rupture du contrat de travail

est recevable ; il sera ajouté au jugement déféré qui a rejeté dans ses motifs la fin de non recevoir tirée de la prescription sans le préciser dans son dispositif.

Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales.

Il résulte des pièces versées aux débats, et notamment des bulletins de paie de l'intimé, que Monsieur [A] était soumis à un forfait annuel en heures, de 1607 heures.

Pendant la période sollicitée ( juin 2013 à juin 2016), M. [A] a exercé les fonctions de directeur d'agence au sein de l'agence Toulouse [Adresse 4], puis, à compter du 15 mars 2015, de directeur de grappe d'agences [Adresse 5] à Toulouse cette grappe d'agences comprenant trois agences distinctes, celle de [Adresse 7], [Adresse 4] et [Adresse 5].

M. [A] soutient qu'en qualité de directeur d'agence, il devait être présent à l'agence avant les autres salariés et quitter celle-ci après la fermeture, étant chargé d'activer et de désactiver les systèmes d'alarme de 8h du matin jusqu'à 18h et d'assurer diverses tâches liées à ses fonctions de directeur.

Au soutien de sa réclamation, il produit :

- le tableau des horaires d'ouverture des agences, du mardi au vendredi,

de 8 heures 25 à 12h 25 et de 13h25 à 17 heures 35, ainsi que le samedi

de 8 heures 25 à 12h 25

- un tableau récapitulatif de ses heures de travail réalisées, mois par mois,

entre juin 2013 et juin 2016, comprenant un décompte annuel de ses heures supplémentaires et total de 523 heures supplémentaires,

- une attestation d'une ancienne salariée, Mme [V], qui certifie que, pendant la période où cette dernière travaillait en qualité de directrice adjointe au sein des agences [Adresse 7], [Adresse 4] et [Adresse 5], soit de mars à juin 2016, M. [A] [A] était présent quand elle arrivait à 8 heures et qu'ils étaient tous deux systématiquement présents après 18 heures,

- plusieurs courriels envoyés avant 8 h 25, après 17 h 35 et pendant l'heure de table,

- ses bulletins de paie qui permettent de constater que le paiement des heures supplémentaires était rare,

- des pièces relatives à des déplacements en formation,

- les documents dits 'Tremplin' qui dressent la liste des missions des responsables d'agence.

La cour estime que M. [A] verse ainsi aux débats des éléments précis sur les horaires de travail réalisés par lui de juin 2013 à juin 2016 quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir effectuées qui permettent à la société Crédit Lyonnais , qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société Crédit Lyonnais ne produit aucune pièce établissant qu'elle ait effectivement respecté son obligation de contrôle des heures de travail effectivement réalisées par M. [A].

Elle ne peut valablement se retrancher derrière le fait de ne pas avoir conservé les relevés automatisés d'ouverture et de fermeture des agences dirigées par l'intimé alors que ces pièces auraient permis de vérifier précisément les horaires d'entrée et de

départ du directeur de grappe d'agences pas plus que derrière le fait que deux salariés possédaient les clefs permettant d'ouvrir et de fermer les agences, étant rappelé qu'il lui appartenait de contrôler les heures de présence de ses cadres au sein de ses agences bancaires.

Elle ne saurait pas plus arguer valablement du fait que l'automatisation des accès à ses agences permettait d'exécuter en 5 minutes les tâches de préparation des agences, dont l'une d'entre elles était dotée d'une salle des coffres, que du fait que toutes les missions de M. [A] devaient être réalisées pendant les horaires d'ouverture de l'agence alors que la variété des missions de direction dévolues à M. [A] et le nombre des agences contrôlées par lui nécessitaient une présence effective du directeur avant l'arrivée des autres collaborateurs et après leur départ et la cour constate que la société Crédit Lyonnais ne produit aucune attestation qui contredit les horaires allégués par son ancien salarié.

Le fait que M. [A] ait utilisé un formulaire pour voir régler quelques heures supplémentaires ne fait nullement la preuve du fait prétendu par la société appelante selon laquelle il existait au sein du Crédit Lyonnais une procédure obligatoire de demande des heures supplémentaires et la production par elle de la pièce 10 très peu lisible intitulée 'extrait ABC rh les heures supplémentaires (39 h)' ne permet pas à la cour de déterminer la nature de ce document et son opposabilité au salarié.

La multiplicité des tâches dévolues à M. [A] et la satisfaction de son employeur relevée dans ses entretiens d'évaluation confirment que M. [A] a exécuté des heures supplémentaires avec l'accord implicite de son employeur qui ne peut se retrancher derrière le contenu de ces entretiens pour faire valoir que M. [A] n'a jamais sollicité lors de ses entretiens un examen de sa surcharge de travail ou de l'exécution d'heures supplémentaires, la cour estimant qu'il appartenait à l'employeur et non au salarié de contrôler pendant ces entretiens les conditions d'exécution de l'horaire de travail de son salarié évalué.

Il en résulte que la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a dit que M. [A] avait exécuté entre juin 2013 et juin 2016 de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées par la société Crédit Lyonnais.

Elle allouera à M. [A], après retranchement des heures supplémentaires sollicitées pour le 25 juillet 2013, les 23 et 24 décembre 2014 et le 17 mais 2016, par réformation du jugement déféré, la somme de 14 263,72 € à titre de rappel de salaire en paiement des 519 heures supplémentaires réalisées, outre 1 415,53 € au titre des congés payés y afférents, rappel sollicité devant la cour par M. [A].

Sur la demande en paiement d'une indemnité de travail dissimulé

L'article L. 8221-5 du code du travail, dans sa version en vigueur du 18 juin 2011

au 10 août 2016, disposait qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout

employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

En l'espèce, il résulte des déclarations concordantes des parties que, lors de l'entrée et du départ de M. [A] de l'agence automatisée [Adresse 5] qu'il dirigeait, il utilisait des clefs électroniques et que les alarmes étaient également activées et désactivées de façon électronique de sorte que le Crédit Lyonnais était, au moment de l'exercice de l'activité professionnelle de M. [A], informé des horaires d'entrée et de sortie du directeur de l'agence ou du responsable de l'agence auquel avaient été confiées les clefs de l'agence.

La cour estime que, dans ces conditions, la société employeur ne peut valablement contredire le fait qu'elle était en temps réel informée des horaires effectivement pratiqués par son salarié auquel étaient confiées des missions multiples et que c'est ainsi de façon intentionnelle qu'elle a commis le délit de travail dissimulé en mentionnant sur les bulletins de paie de M. [A] un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

La cour confirmera le jugement déféré qui a condamné la société Crédit Lyonnais à payer à M. [A] une indemnité de travail dissimulé, faisant application de l'article L. 8223-1 selon lequel : 'En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire'.

Elle réformera le montant de l'indemnité allouée à M. [A] en calculant cette indemnité sur la base du salaire perçu par le salarié au cours des 6 derniers mois de la relation de travail en y ajoutant le rappel de salaire pour heures supplémentaires afférent à cette période, soit au total la somme de 25 225,07 €.

Sur la demande fondée sur l'inégalité de traitement

Il résulte du principe 'à travail égal, salaire égal' dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22.9, L. 2271-1 8°et L. 3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale,

l'égalité des rémunérations entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

Lorsqu'un salarié invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement, il lui appartient de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement.

Il incombe alors à l'employeur d'établir que la disparité de traitement est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, M. [A] soutient qu'il a été moins bien rémunéré que ses autres collègues exerçant les mêmes fonctions de directeur de grappe d'agences et verse aux débats l'attestation d'une ancienne collègue de travail qui a initié également un contentieux contre la société Crédit Lyonnais, Mme [Z], qui atteste qu'elle percevait, en qualité de directrice de grappe d'agences, avec une ancienneté remontant à l'année 2000, une rémunération brute de 39 799 € par an pour une classification I.

Il soutient avoir découvert, lors d'une formation dite Tremplin, que, sur

les 12 participants à cette formation, 9 étaient des nouveaux embauchés qui percevaient une rémunération annuelle de 45 000 € alors qu'il touchait en qualité de cadre classé H une rémunération annuelle de 33 222 €, le Crédit Lyonnais expliquant cette différence par la loi du marché.

Il prétend qu'il aurait dû être classé en classe I en sa qualité de directeur

d'agence de plus de 7 UTP et faisait partie du 25 ème centile des cadres hommes niveau H ( 34 262 € ) et dans le 25 ème centile des 1 322 directeurs d'agence, son augmentation de salaire étant inférieure à la moyenne de l'augmentation des directeurs d'agence, et ce, malgré des évaluations favorables que confirment ses promotions successives.

Il verse aux débats un bulletin de salaire anonymisé d'un directeur d'agence 7 UTP et plus et les grilles comparatives de salaire figurant dans des publications du syndicat FO issues notamment des résultats des négociations annuelles obligatoires.

La cour estime que M. [A] soumet ainsi la cour des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, la cour ne retenant pas comme probants des pièces émanant de sites internet dans lesquels les informations sur les rémunérations des directeurs d'agence ont été obtenues en réponse à des questions émanant d'interlocuteurs inconnus de la part d'autres interlocuteurs, sans pièce confirmant les informations obtenues sur ces sites de sorte que la fiabilité de ces réponses n'est nullement démontrée.

La société Crédit Lyonnais verse aux débats la fiche express de Mme [Z] dont il résulte que cette dernière a un niveau BAC plus 2 ; elle est titulaire de 3 diplômes : un BTS de force de vente, un BTS banque particuliers et un BTS banque Pro alors que M. [A] n'est titulaire que d'un Brevet Professionnel Banque, diplôme de niveau inférieur, ce qui permet de démontrer que M. [A] n'était pas dans une situation identique à celle de Mme [Z] en dépit d'une ancienneté et d'un emploi comparables, ce qui objective la différence de classification, Mme [Z] étant classée cadre I de la convention collective alors que M. [A] était classé cadre H.

La société appelante démontre encore par la production des extraits des négociations annuelles obligatoires qu'en septembre 2015, sur 570 directeurs d'agence

de plus de 7 UTP, situation de M. [A] à la fin de l'exécution de son contrat de travail,

574 salariés étaient classé H et 139 classés I ; qu'en septembre 2016, 605 étaient classés H et 171 classés I ; que la rémunération moyenne annuelle de M. [A] payé

sur 13 mois était supérieure à celle de M. [Y], conseiller privé classé H de la convention collective. Pour l'année 2016, il était rémunéré 190 € de moins par mois que la moyenne des directeurs d'agence de sa catégorie.

La cour estime que la légère différence de traitement entre M. [A] et la moyenne des directeurs d'agence de sa catégorie s'explique par la catégorie de diplôme détenu par M. [A] et qu'il est démontré que l'intimé était classé dans la classification moyenne

des directeurs d'agence de sa catégorie, étant précisé qu'il ne forme pas de demande de reclassification conventionnelle.

De sorte que, sans qu'il soit nécessaire de faire droit à la demande de production de pièces formée par M. [A] dans ses conclusions, la cour infirmera le jugement entrepris sur la disparité de traitement et rejettera la demande de dommages et intérêts en l'absence de toute atteinte au principe d'égalité de traitement entre salariés placés dans une situation identique.

Sur le surplus des demandes

La demande d'exécution provisoire est sans objet devant la cour.

La société Crédit Lyonnais qui perd principalement le procès sera condamnée aux dépens et à payer à M. [A] la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré étant confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription des demandes de rappel de salaire,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [P] [A] de sa demande de production de diverses pièces,

- constaté que Monsieur [P] [A] a effectué des heures de travail supplémentaires non rémunérées,

- dit constitué le délit de travail dissimulé,

- condamné la société Crédit Lyonnais aux dépens et rejeté les demandes de remboursement des frais irrépétibles,

Le réforme sur les montants alloués à M. [A] à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et indemnité de travail dissimulé et l'infirme en ce qu'il a alloué

à M. [A] des dommages et intérêts en réparation du préjudice du fait de la rupture d'égalité de rémunération et de la perte de la prime d'intéressement et de participation,

statuant à nouveau des chefs infirmé et réformés, et, y ajoutant,

Condamne la société Crédit Lyonnais à payer à M. [P] [A] les sommes suivantes: - 14 155,32 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires effectuées de juin 2013 à juin 2016, et 1 415,53 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- 25 225, 07 € au titre de l'indemnité de travail dissimulé,

- 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [A] de sa demande de dommages et intérêts pour atteinte à l'égalité de traitement,

Condamne la société Crédit Lyonnais aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER S.BLUMÉ

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03309
Date de la décision : 20/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-20;20.03309 ?
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