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20/01/2023 | FRANCE | N°20/02946

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 20 janvier 2023, 20/02946


20/01/2023



ARRÊT N°2023/23



N° RG 20/02946 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NZHF

CP/KS



Décision déférée du 07 Octobre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ALBI

( 19/00049)

SECTION ACTIVITES DIVERSES



[B] [T]

















Société CADUCEE 81





C/



[V] [S]





































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INFIRMATION PARTIELLE





Grosses délivrées

le 20/01/2023

à

Me Philippe REYNAUD

Me Marie BELLEN-ROTGER



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le 20/01/2023

à

Me Philippe REYNAUD

Me Marie BELLEN-ROTGER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT D...

20/01/2023

ARRÊT N°2023/23

N° RG 20/02946 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NZHF

CP/KS

Décision déférée du 07 Octobre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ALBI

( 19/00049)

SECTION ACTIVITES DIVERSES

[B] [T]

Société CADUCEE 81

C/

[V] [S]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosses délivrées

le 20/01/2023

à

Me Philippe REYNAUD

Me Marie BELLEN-ROTGER

ccc

le 20/01/2023

à

Me Philippe REYNAUD

Me Marie BELLEN-ROTGER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Société CADUCEE 81

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe REYNAUD de la SCP PALAZY-BRU ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ALBI

INTIMÉE

Madame [V] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie BELLEN-ROTGER de la SCP PAMPONNEAU TERRIE PERROUIN BELLEN-ROTGER, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant , S.BLUME et C.PARANT chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par S. BLUME, président, et par C. DELVER, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [V] [S] a été embauchée le 1er février 2000 par la société de fait [S] & [I] en qualité de secrétaire médicale, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel.

Le 30 septembre 2016, la société de fait [S] & [I] a été dissoute en raison du départ à la retraite du Dr [S], et le contrat de travail de Madame [S] a été transféré à la société Caducée 81, constituée des docteurs [I] et [L] [X], suivant avenant du 29 septembre 2016.

Madame [S] présente un polyhandicap, connu de ses deux employeurs successifs. Elle est reconnue travailleuse handicapée depuis le 20 janvier 2010.

Elle a fait l'objet d'une surveillance médicale renforcée par le médecin du travail et son poste a fait l'objet d'aménagements.

Par lettre recommandée du 26 décembre 2017, Madame [S] a alerté son employeur sur une dégradation croissante de ses conditions de travail. La société Caducée 81 a répondu par courrier du 29 décembre suivant.

En réponse, la société Caducée 31 a sollicité l'intervention du médecin du travail qui a proposé une réunion de médiation.

Madame [S] a été placée en arrêt de travail à compter du 19 janvier 2018, arrêt prolongé jusqu'au 31 juillet 2018.

Le 13 février 2018, lors d'une visite de pré-reprise, le médecin du travail a constaté une dégradation de l'état de santé de Mme [S] avec la mise en place d'un traitement anti-dépresseur.

Le 1er mars suivant, une réunion s'est tenue en présence des parties, du médecin du travail et du coordinateur de la SAMETH du Tarn, M. [J], qui a constaté l'échec de cette mesure de médiation, indiquant qu'une reprise du travail dans ce cabinet médical serait dommageable pour Mme [S] compte tenu de la situation dégradée avec ses employeurs.

A l'occasion de la visite médicale de reprise le 1er août 2018, Madame [S] a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail sans proposition d'aménagement de poste ou de reclassement et sans contre-indication pour occuper un poste similaire dans un autre secteur.

Sur demande de la société Caducée 81, le médecin du travail a répondu le 9 août 2018 que l'état de santé de Mme [S] et sa connaissance de l'entreprise ne lui permettaient pas d'émettre quelque préconisation que ce soit en terme d'aménagements de poste ou de reclassement, y compris après formation ou modification d'horaires.

Après avoir été convoquée par courrier du 16 août 2018 à un entretien préalable au licenciement fixé au 27 août 2018, Mme [S] a été licenciée par lettre du 31 août 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Mme [S] a saisi le conseil de prud'hommes d'Albi le 6 mai 2019 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Par jugement du 7 octobre 2020, le conseil de prud'hommes d'Albi a :

- dit qu'il y avait un lien direct entre les conditions de travail de Madame [S] et l'avis d'inaptitude médicale,

- dit qu'il n'y a pas lieu de retenir la nullité du licenciement,

- dit que l'inopposabilité du plafonnement des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas retenue,

- dit que le licenciement pour inaptitude de Mme [S] par la société Caducée 81 en date du 31 août 2018 est requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné en conséquence la société Caducée 81 à payer à Madame [S] les sommes suivantes:

* 15 124,95 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 086,20 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 208,62 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à compter de sa date de notification,

- condamné la société Caducée 81 aux entiers dépens

Par déclaration du 2 novembre 2020, la société Caducée 81 a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 13 octobre 2020, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 16 novembre 2020, auxquelles il est expressément fait référence la société Caducée 81 demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il retenu un lien de causalité entre les conditions de travail de la salariée et sa déclaration d'inaptitude,

- réformer le jugement en ce qu'il retenu que la société Caducée 81 devait être déclarée responsable de la dégradation des conditions de travail à l'origine de la déclaration d'inaptitude,

- réformer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse,

- débouter Madame [S] de ses demandes indemnitaires tant au titre du licenciement, qu'au titre de l'indemnité de préavis, des congés payés sur préavis et de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger que la réformation emporte de plein droit l'obligation pour Madame [S] de procéder au remboursement des sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution provisoire ordonnée,

- condamner Madame [S] au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 12 février 2021, auxquelles il est expressément fait référence,

Madame [S] demande à la cour de :

- accueillir son appel incident,

- infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a condamné la société Caducée 81 à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Sur le manquement à l'obligation de sécurité :

- déclarer qu'il existe un lien direct entre ses conditions de travail et l'avis d'inaptitude médicale,

- déclarer que la société Caducée 81 a manqué à son obligation d'assurer sa santé et sa sécurité,

Sur le licenciement,

A titre principal :

- juger que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul,

- condamner la société Caducée 81 au paiement des sommes suivantes :

* 12 517,20 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination,

* 2 086,20 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 208.62 € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

* 25 034,40 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire :

- dire que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Caducée 81 au paiement de la somme de 2 086,20 € à titre d''indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 208.62 € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

- dire que doit être écarté le montant maximal d'indemnisation prévu par l'article L.1235-3 du code du travail,

- condamner en conséquence la société Caducée 81 à lui verser la somme de

25 034,40 € en réparation de l'ensemble des préjudices professionnels, financiers et moraux subis dans le cadre de son licenciement,

A titre infiniment subsidiaire, si la cour ne retenait pas l'inopposabilité du plafonnement :

- dire que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Caducée 81 au paiement des sommes suivantes :

* 2 086.20 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 208.62 € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

* 15 124.95 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause :

- condamner la société Caducée 81 au paiement de la somme supplémentaire

de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de la procédure d'appel, outre les entiers dépens de l'instance.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 4 novembre 2022.

MOTIFS

Sur le prétendu manquement de la société Caducée 81 à son obligation de sécurité

En vertu de l'article L 4121-1 du code du travail, dans sa version applicable à la cause,

l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Il appartient à la société Caducée 81, tenue à l'exécution de cette obligation de moyen renforcée d'établir qu'elle a mis en oeuvre au sein du cabinet médical les mesures nécessaires permettant d'assurer la sécurité et de protéger la santé de Mme [S].

La société Caducée 81 conteste formellement le prétendu manquement à son obligation de sécurité ; elle soutient avoir poursuivi les aménagements de poste en vigueur avant septembre 2017 et continué à faciliter l'exécution par Mme [S] de son travail de secrétaire en dépit des difficultés de cette dernière dans l'exécution de ses

tâches ayant entraîné le mécontentement de très nombreux patients du cabinet médical. Elle a obtenu l'accord verbal de sa salariée à la modification de la répartition de l'horaire de travail à effet au 1er septembre 2017 après entretien avec la mère de la salariée aux fins de conserver la liberté du jeudi et conteste la réalité d'autres modifications horaires et de la prétendue réduction envisagée. Elle a répondu immédiatement à la lettre de doléances de Mme [S] et proposé une réunion de médiation qui n'a pas abouti. Elle rappelle que Mme [S] a bénéficié d'un suivi médical régulier, le dernier rapport d'aptitude avec aménagement remontant à novembre 2016. Elle conteste la prétendue augmentation de la charge de travail de Mme [S] et le lien prétendu entre l'inaptitude et la dégradation de ses conditions de travail et reconnaît la réalité d'entretiens informels tenus avec la salariée destinés à faire le point sur ses conditions de travail en tentant d'éviter le conflit en dépit des difficultés récurrentes de Mme [S] à renseigner les rendez-vous sur les plannings et à donner des informations aux patients.

Mme [S] prétend que les relations de travail se sont dégradées à compter de la modification de la personne de ses employeurs intervenue le 30 septembre 2016, date de la prise d'effet de la retraite du Dr [S], son père, associé du Dr [I], laquelle est demeurée son employeur aux côtés du Dr [L] [X].

Elle dénonce une dégradation progressive de ses conditions de travail s'étant manifestée par la modification successive de ses horaires de travail sans avenant, alors qu'elle bénéficiait depuis 2003 d'une surveillance renforcée par le médecin du travail et la SAMETH du Tarn en raison de son handicap cognitif et visuel.

Elle soutient que le Dr [L] [X] avait émis l'hypothèse de réduire ses horaires de travail de 19 h à 15 h et qu'elle a subi, fin août 2017 et le 8 décembre suivant, deux entretiens inopinés et officieux avec ses employeurs qui l'ont accablée de reproches.

Elle prétend également que son employeur a volontairement complexifié ses conditions de travail aux fins de la déstabiliser et s'offusque de l'utilisation par son employeur de trop nombreuses attestations de clients du cabinet.

C'est dans ces conditions qu'elle a notifié à son employeur une lettre recommandée dénonçant ses changements d'horaires et ces entretiens de reproches qui l'ont fortement déstabilisée, sollicitant le retour de conditions de travail sereines, le respect des horaires de travail effectués depuis le 1er septembre 2017 ainsi que des conditions d'aménagement de son poste de travail et des contraintes liées à son handicap et expose que son employeur a reconnu, dans sa lettre en réponse du 29 décembre 2017, la modification des horaires et la réalité des entretiens. Elle fait valoir son placement en arrêt de travail pour maladie à compter du 19 janvier 2018, l'échec de la mesure de médiation tentée le 1er mars 2018, la poursuite de son arrêt de travail et la dégradation de son état de santé avec instauration d'un traitement anti-dépresseur en raison des difficultés professionnelles constatées par ses médecins et le médecin du travail et soutient que la dégradation de son état de santé a été causée par le manquement de son employeur à son obligation de sécurité jusqu'à sa déclaration d'inaptitude par le médecin du travail.

Il résulte des pièces versées aux débats que Mme [S], embauchée en 2000 en qualité de secrétaire dans le cabinet médical composé de son père, le Dr [S], et de son associée le Dr [I], qui présente un poly-handicap cognitif et visuel, a bénéficié d'un suivi médical renforcé à compter de 2003 , étant déclarée à plusieurs reprises apte à l'exercice de son emploi de secrétaire sous réserve d'aménagements notamment sur son environnement de travail (nécessité de repose pied, présence de placards destinés au rangement et au maniement de plus de 5 000 dossiers) ; la dernière fiche d'aptitude au poste avec aménagement date du 28 juillet 2016. Mme [S] a fait l'objet d'une reconnaissance du statut de travailleur handicapé en 2010, statut renouvelé en 2015 pour 5 ans et de plusieurs suivis de sa situation dans le cadre de demandes de reconnaissance ' lourdeur du handicap ' en 2011 et 2016 qui permettent de déterminer la nature du handicap de Mme [S], ses difficultés dans l'organisation de ses tâches détaillées par le médecin du travail, notamment ses difficultés à mémoriser, organiser, anticiper et hiérarchiser son travail, la lenteur dans l'exécution de ses tâches entraînant une perte de productivité d'environ 60 % et l'impossibilité de gérer les tâches de comptabilité.

Il est établi que la société Caducée 81 a modifié à compter du 1er septembre 2017, non pas l'horaire de travail à temps partiel de Mme [S] fixé à 19 h depuis l'avenant du 1er janvier 2005, mais la répartition de cet horaire de travail pendant les jours de la semaine, telle qu'elle avait été fixée en 2011 par la SDF [S] et [I], sans avenant et sans intervention, à l'époque, du médecin du travail.

Il est constant qu'aucun avenant n'a effectivement été conclu entre les parties sur la répartition des horaires de travail entre les jours de la semaine alors que cette répartition aurait dû être notifiée par écrit en application de l'article L. 3123-11 du code du travail et la société Caducée 81 soutient, dans sa lettre du 29 décembre, que cette répartition a été précédée d'un entretien au cours duquel Mme [S] a demandé à ne pas travailler le jeudi, requête à laquelle il a été fait droit.

En revanche, aucune pièce ne vient confirmer la thèse de Mme [S] selon laquelle plusieurs modifications de l'horaire de travail seraient intervenues depuis le changement d'associé ou qu'elle aurait subi des demandes de réduction de la durée du travail.

La cour constate que, dans sa lettre du 26 décembre 2017, Mme [S] demande à son employeur de respecter les horaires effectués depuis septembre 2017, ce qui permet d'en conclure que cette nouvelle répartition des horaires qu'elle reproche à son employeur de lui avoir imposée lui convient, étant précisé qu'elle ne décrit dans ce courrier aucune difficulté résultant pour elle de l'exécution de cette nouvelle répartition d'horaires dans la semaine.

Le contenu des deux entretiens qualifiés d'inopinés par l'intimée qui seraient survenus fin août et le 8 décembre 2017 entre Mme [S] et son employeur au cours desquels Mme [S] aurait subi des reproches sur la qualité de son travail et des propos selon lesquels elle ne convenait plus pour le poste, entretiens qui ont, selon ses termes, choqué cette dernière, est formellement contesté par la société Caducée 81 dans ses conclusions et aucune attestation de témoin n'est produite pour confirmer la teneur des propos attribués à l'employeur par Mme [S], l'attestation de Mme [C] ne faisant que rapporter des propos tenus par Mme [S].

La société Caducée 81 explique, dans sa lettre en réponse du 29 décembre 2017, que lors de l'entretien de décembre 2017, elle a effectivement fait des remarques à Mme [S] qu'elle qualifie non pas de reproches mais de constats et elle a proposé de solliciter l'avis du médecin du travail aux fins d'harmoniser le bon fonctionnement du cabinet médical et le handicap de Mme [S].

Mme [S] a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 18 janvier 2018, arrêt de travail ininterrompu jusqu'à sa déclaration d'inaptitude du 1er août 2018 ; le médecin du travail a organisé une rencontre de médiation entre Mme [S], son employeur et le représentant de la SAMETH qui, sur demande de Mme [S], a indiqué dans un courriel du 20 août 2018, que les intervenants avaient rapidement constaté que la situation était plus complexe que prévue, rappelant les interventions conjuguées de la SAMEH et du médecin du travail pour aménager son poste de travail et son accompagnement sur une reconversion professionnelle, terminant en indiquant qu'une reprise au sein du cabinet médical semblait dommageable pour Mme [S] à long terme compte tenu de la situation trop dégradée avec ses employeurs.

Le dossier de la médecine du travail communiqué par Mme [S] fait état des nombreuses visites de Mme [S] auprès du médecin du travail entre 2011 et 2018 ; le médecin du travail reprend les demandes du médecin de Mme [S] qui se plaignait, en décembre 2017, de l'alourdissement de ses tâches et de la dégradation de la relation avec ses employeurs ; le médecin du travail mentionne, le 18 janvier 2018, son entretien avec Mme [S] et son constat de l'apparition de signes d'anxiété avec manifestations d'angoisse indiquant qu'elle se plaignait du mépris de son employeur en lien avec l'arrivée d'un nouvel associé, sa déstabilisation créée par les multiples changements d'horaire et la tentative du médecin du travail d'objectiver les difficultés pour sortir du conflit ; le 2 février 2018, Mme [S] fait connaître au médecin du travail son accord pour participer à un entretien et sa demande de visite de pré-reprise qui aura lieu le 13 février 2018, le médecin notant des signes d'aggravation de l'état de santé de Mme [S] avec instauration d'un traitement anti-dépresseur et faisant part de réflexions sur l'aménagement du poste de travail, ajoutant que le pronostic du maintien de l'aptitude médicale de Mme [S] était clairement engagé. Dans la suite du dossier, le médecin du travail relate ses démarches aux fins de reconnaissance de l'invalidité de Mme [S], son étude de poste réalisée le 12 juillet avec échange avec l'employeur et le représentant du SAMETH et de Mme [S], la visite de Mme [S] du 19 juillet, le médecin du travail actant la nécessité de la déclaration d'inaptitude et la déclaration d'inaptitude elle-même du 1er août 2018.

Mme [S] verse encore aux débats le protocole de soins pour dépression grave du 30 mars 2018, des ordonnances d'anti-dépresseurs de juin à décembre 2018, les certificats médicaux de suivi de la consultation de diabétologie de l'hôpital [4] et plusieurs attestations de patients et de membres de profession médicale faisant état de la bonne qualité du travail de Mme [S] au sein du cabinet médical.

Le fait que la société Caducée 81 ait fait des remarques à Mme [S] sur les conditions dans lesquelles elle exécutait son travail ne peut constituer, en soi, un manquement à l'obligation de sécurité alors que la société appelante justifie par de très nombreuses attestations de patients et quelques attestations de membres du personnel médical d'une attitude agressive de Mme [S] envers les patients et de difficultés répétées dans l'accueil téléphonique et physique de ces derniers par Mme [S]. Cette dernière n'établit nullement que les remarques de son employeur auraient été faites dans des conditions non admissibles par la salariée alors que nombre de patients font état dans leurs attestations de l'attitude particulièrement clémente du Dr [I] face aux insuffisances de Mme [S] et que la seule attestation non circonstanciée de Mme [U] produite par l'intimée selon laquelle les employeurs de Mme [S] 'lui parlaient mal de manière autoritaire et sèche sans lui laisser le temps de répondre' ne peut faire cette preuve.

Le dossier de la médecine du travail permet de démontrer que le médecin du travail n'a pas jugé utile d'alerter la société Caducée 81 sur d'éventuels manquements commis par elle mais a participé à une tentative de médiation entre la salariée et l'employeur et aidé Mme [S] à préparer un placement en invalidité.

La cour estime que la société Caducée 81 établit qu'elle a mis en place les moyens permettant de préserver la santé et la sécurité de sa salariée en répondant à son courrier du 26 décembre 2017 en lui certifiant que la répartition de l'horaire de travail ne serait plus modifiée, en participant aux entretiens organisés par le médecin du travail , en adoptant, pendant plusieurs années, une attitude clémente à son égard en dépit des nombreuses carences relevées par les patients dans l'organisation de son travail et dans son relationnel difficile avec ces derniers.

En conséquence la cour estime non établi le manquement prétendu de l'employeur à son obligation d'assurer la sécurité de Mme [S] et de protéger sa santé physique et mentale.

Sur le licenciement

Il résulte des développements qui précèdent qu'en l'absence de manquement

établide la société Caducée 81 à son obligation de sécurité, Mme [S] échoue à faire la preuve que la déclaration d'inaptitude du 1er juillet 2018 établie par le médecin du travail ait été la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Mme [S] soutient que son licenciement doit être annulé en raison de son caractère discriminatoire, l'employeur ayant décidé de la licencier en raison de son état de santé et de son handicap.

La cour constate que ses conclusions qui contiennent des motifs développés sur plus de 20 pages sur le manquement de la société Caducée 81 à son obligation de sécurité se contentent d'affirmer que son licenciement est nul comme fondé sur un motif discriminatoire, en l'espèce le handicap ; elles ne développent aucun autre moyen que celui tiré du manquement de la société Caducée 81 à son obligation de sécurité et de la situation d'handicapée de Mme [S] et aucune pièce ne fait état d'une quelconque attitude discriminatoire de la société Caducée 81 que ce soit en raison de l'état de santé de Mme [S] ou de son handicap.

La cour estime que Mme [S] ne présente pas, conformément à l'article L. 1134-1 du code du travail, de faits qui, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence de la discrimination alléguée au sens de l'article L.1132-1 du code du travail.

Elle confirmera le jugement entrepris qui a rejeté les demandes de Mme [S] fondées sur la nullité de son licenciement pour discrimination.

La lettre de licenciement du 16 août 2018 qui fixe les limites du litige indique que Mme [S] est licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Il a été indiqué dans l'exposé du litige que Mme [S] a été déclarée, suivant avis du médecin du travail du 1er août 2018, inapte à son poste par le médecin du travail sans proposition d'aménagement de poste ou de reclassement et sans contre-indication pour occuper un poste similaire dans un autre secteur.

Sur demande de la société Caducée 81, le médecin du travail a répondu le 9 août 2018 que l'état de santé de Mme [S] et sa connaissance de l'entreprise ne lui permettaient pas d'émettre quelque préconisation que ce soit en terme d'aménagements de poste ou de reclassement, y compris après formation ou modification d'horaires.

En l'absence de tout manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, la cour estime que l'inaptitude de Mme [S] n'est pas imputable à l'employeur et que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est motivé par une cause réelle et sérieuse de sorte qu'elle déboutera Mme [S] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de sa demande en paiement d'une indemnité de préavis et des congés payés y afférents, Mme [S] étant dans l'impossibilité d'exécuter son préavis.

Le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et sur les condamnations à paiement de la société Caducée 81 fondées sur l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur le surplus des demandes

Le présent arrêt constitue le titre permettant à la société Caducée 81 de recouvrer les sommes payées en exécution du jugement entrepris de sorte que la demande de remboursement de ces sommes sera rejetée.

Mme [S] qui perd le procès sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, sans qu'il soit justifié de faire application, en cause d'appel, de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement entrepris étant infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris, à l'exception de sa disposition selon laquelle il n'y a pas lieu de retenir la nullité du licenciement,

statuant à nouveau des chefs infirmés, et, y ajoutant,

Dit que le licenciement de Mme [V] [S] est justifié par une cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme [S] de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis et de l'indemnité de congés payés y afférente,

Rejette la demande de remboursement des sommes payées par la société Caducée 81 en exécution du jugement entrepris,

Dit n'y avoir lieu à faire application, en cause d'appel, de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [S] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER S.BLUMÉ

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/02946
Date de la décision : 20/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-20;20.02946 ?
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