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13/12/2022 | FRANCE | N°22/00594

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 13 décembre 2022, 22/00594


13/12/2022



ARRÊT N°



N° RG 22/00594

N° Portalis DBVI-V-B7G-OTKZ

MD/RC



Décision déférée du 26 Novembre 2021

Juge de la mise en état d'ALBI ( 20/01186)

MME [U]

















[N] [S]





C/



[M] [Z]

[W] [F]

[E] [P]

S.A.R.L. [P] & FILS

COMPAGNIE D'ASSURANCES MAAF ASSURANCES





























































CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [N] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Nico...

13/12/2022

ARRÊT N°

N° RG 22/00594

N° Portalis DBVI-V-B7G-OTKZ

MD/RC

Décision déférée du 26 Novembre 2021

Juge de la mise en état d'ALBI ( 20/01186)

MME [U]

[N] [S]

C/

[M] [Z]

[W] [F]

[E] [P]

S.A.R.L. [P] & FILS

COMPAGNIE D'ASSURANCES MAAF ASSURANCES

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [N] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [M] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [W] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [E] [P]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Sans avocat constitué

S.A.R.L. [P] & FILS

Prise en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social de la société.

[Adresse 6]

[Localité 5]

Sans avocat constitué

COMPAGNIE D'ASSURANCE MAAF ASSURANCES

CHABAN

[Localité 3]

Représentée par Me Angéline BINEL de la SCP ALBAREDE ET ASSOCIES, avocat au barreau de CASTRES

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- PAR DÉFAUT

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre

******

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte authentique du 7 juillet 2012, reçu par Maître [C] [G], notaire salariée au sein de l'office notarial dont est titulaire Maître [N] [S] à [Adresse 8], M. [E] [P] a vendu à M. [M] [Z] et Mme [W] [F], une maison à usage d'habitation sise sur la commune de [Adresse 9] et cadastrée Section [Cadastre 7], pour un prix de 130 000 euros.

Le vendeur déclarait au paragraphe « Dispositions relatives à la construction » que « le bien présentement vendu, a fait l'objet, savoir :

- d'un permis de construire délivré le 24 avril 2009, sous le numéro PC 081 145 09 E1001,

- d'un arrêté de transfert du permis de construire délivré le 4 mars 2011,

- d'une déclaration attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux déposée le 12 janvier 2012,

- d'une attestation de non-opposition à la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux en date du 8 juin 2012 ».

S'agissant des entreprises ayant effectué les travaux de construction, le vendeur indiquait qu'ils avaient été réalisés par la Sarl [P] pour les lots « maçonnerie, charpente, toiture, plomberie, sanitaire et électricité », laquelle avait souscrit auprès de la Maaf une assurance décennale couvrant la période du 23 avril 2011 au 31 décembre 2012, dont copie de l'attestation était également annexée à l'acte authentique.

Au paragraphe « Assainissement », il était expressément stipulé « le vendeur déclare sous sa seule responsabilité que l'immeuble vendu est raccordé au réseau d'assainissement, mais ne garantit aucunement la conformité des installations aux normes actuellement en vigueur ».

À la suite de plusieurs inondations entre le 31 mai 2013 et le 17 avril 2015, M. [Z] et Mme [F] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d'Albi d'une demande d'expertise judiciaire en présence de leur vendeur, ainsi que de la Maaf, assureur décennal de la Sarl [P].

Par ordonnance du 14 avril 2017, il a été fait droit à la demande d'expertise, M. [A] étant désigné en qualité d'expert judiciaire.

Ce dernier a déposé son rapport final le 26 juin 2020, au terme duquel il indique que l'immeuble acquis par les consorts [Z]-[F] a été construit au point le plus bas d'une zone pour laquelle le permis de construire demandait un raccordement des eaux de ruissellement sur le réseau pluvial existant. Toute solution d'infiltration par puisard étant proscrite.

L'expert a précisé que la cause de cette situation est formellement identifiée comme étant la solution technique retenue pour l'évacuation des eaux de pluie par infiltration dans le sol par puisard et que cette situation constituait « un vice grave apte à rendre impropre à son usage la maison d'habitation ».

En lecture du rapport d'expertise, par acte d'huissier du 9 septembre 2020, les consorts [Z]-[F] ont fait assigner leur vendeur M. [E] [P], la Sarl [P] & Fils prise en la personne de son liquidateur, la Maaf et Maître [N] [S] devant le tribunal judiciaire d'Albi afin d'obtenir la condamnation in solidum de ces derniers à réparer l'ensemble de leur préjudice.

Par conclusions d'incident du 9 février 2021, Maître [S] a soulevé un incident de procédure pour voir déclarer les demandes formulées à son encontre irrecevables comme prescrites.

Par conclusions d'incident du 10 mai 2021, M. [Z] et Mme [F] ont demandé au juge de la mise en état de déclarer non prescrite et recevable l'action en responsabilité engagée à l'encontre du notaire.

Par ordonnance du 26 novembre 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Albi a :

- dit que l'action engagée à l'encontre de Maître [S] n'est pas prescrite,

- réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Maître [S] aux dépens de l'incident,

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du 12 janvier 2022 avec injonction de conclure au fond pour la Sarl [P] et M. [E] [P], pour Maître [S] à l'exception de la Maaf qui a d'ores et déjà conclu au fond.

Pour statuer ainsi et retenir comme point de départ du délai de prescription de l'action des consorts [Z]-[F], le dépôt du rapport de l'expert judiciaire, le premier juge a considéré qu' « à la seule lecture de l'acte notarié, du permis de construire, de l'attestation de conformité qui n'a pas fait l'objet d'opposition, [les consorts [Z]-[F]] pouvaient donc légitimement croire que la maison bénéficiait d'un raccordement au réseau pluvial et ce d'autant que le puisard implanté n'est pas sur leur propriété.

Le rapport d'expertise amiable du BPCE suite à un sinistre de 2015 fait mention une inondation du garage suite à un épisode pluvieux important, l'évacuation des eaux de pluie présente une insuffisance et un défaut de réalisation sans plus de précision.

C'est donc bien le rapport d'expertise du 26 juin 2020 qui a permis de révéler les faits dommageables dans toutes leur ampleur et leurs conséquences. »

***

Par déclaration du 9 novembre 2021, M. [S] a relevé appel de cette ordonnance, en ce qu'elle a :

- dit que l'action engagée à l'encontre de Maître [S] n'est pas prescrite,

- réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Maître [S] aux dépens de l'incident,

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du 12 janvier 2022 avec injonction de conclure au fond pour Maître Gardelle.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 28 avril 2022, Maître Jean-François Gardelle, appelant, demande à la cour, au visa de l'article 2224 du code civil et 700 du code de procédure civile de :

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance dont appel,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

- déclarer irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité engagée par les consorts [Z]-[F] à son encontre,

- les condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

À l'appui de ses prétentions, Maitre [S] soutient que le point de départ de l'action des consorts [Z]-[F] doit être fixé au jour de la connaissance du dommage, c'est-à-dire lors de la communication du rapport d'expertise réalisé à la demande de l'assureur à la suite des deux visites des 12 et 25 juin 2015. Il explique que cette date est antérieure à la date d'impression mentionnée au bas du document produit et qu'il s'agit d'un rapport rectificatif et que le premier n'a pas été versé aux débats. Ce faisant les intimés n'ont pas rapporté la preuve de leur méconnaissance antérieure de leur dommage, de sorte que le point de départ de la prescription ne peut être reporté au-delà du 8 septembre 2015 et que, de ce fait, leur action dirigée contre lui se trouve prescrite.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 1er juillet 2022, M. [M] [Z] et Mme [W] [F], intimés, demandent à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel,

- au fond, le déclarer infondé,

En conséquence,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance dont appel,

- condamner Maître [N] [S] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître [X], sur ses affirmations de droit.

À l'appui de leurs prétentions, les consorts [Z]-[F] exposent ignorer la cause des désordres au jour de la signature de l'acte de vente de l'immeuble, au jour du premier dégâts des eaux, ainsi qu'au jour du sinistre survenu en 2015. Ils soutiennent simplement ne pas avoir eu connaissance de la responsabilité de maître [S] avant le 19 janvier 2016, ce qui rend leur action à son encontre recevable.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 11 avril 2022, la compagnie d'assurance Maaf Assurances, intimée, demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur l'appel de l'ordonnance dont appel,

- condamner tout succombant au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [E] [P], assigné par acte d'huissier du 23 février 2022 signifié en l'étude, n'a pas constitué avocat.

La Sarl [P] & Fils, assignée par acte d'huissier du 25 février 2022 suivant procès-verbal de recherches infructueuses, n'a pas constitué avocat.

***

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 septembre 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 27 septembre 2022.

MOTIVATION :

Sur la prescription de l'action :

1. Aux termes de l'article 2224 du code civil, « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »

Il est de principe qu'en matière d'action en responsabilité délictuelle sur le fondement de laquelle M. [Z] et Mme [F] agissent contre le notaire, la prescription ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

En l'espèce, les consorts [Z]-[F] soutiennent n'avoir pas eu connaissance de leur dommage avant que l'expert judiciaire ne rende son rapport le 26 juin 2020, alors que Maître [S] expose que la non-conformité alléguée était connue d'eux depuis l'expertise amiable consécutive aux sinistres survenus en 2015, de sorte que leur action était prescrite au jour de l'assignation du 9 septembre 2020.

2. L'existence du dommage est un fait constant entre les parties dans la mesure où il n'est pas contesté que les consorts [Z]-[F] ont subi à sept reprises l'inondation de leur habitation entre 2013 et 2017.

Si le premier sinistre survenu en 2013 n'avait pas eu de suite, l'expert n'ayant pas constaté de dégâts, il en est allé différemment pour celui survenu en avril 2015. Le 17 avril 2015, les consorts [Z]-[F] déclaraient le sinistre à leur assureur qui missionnait le cabinet Polyexpert pour procéder à une expertise. Cette expertise a été réalisée au cours de deux visites des 12 mai et 25 juin 2015, en présence de M. [E] [P] en sa qualité de constructeur.

Au terme des opérations d'expertise, le rapport faisait état d'un système d'évacuation des eaux pluviales non-conforme et concluait en indiquant que la responsabilité de la Sarl [P] devait être recherchée en raison « des malfaçons et de l'inefficacité de fonctionnement ».

3. Toutefois, ce n'est que le rapport d'expertise judiciaire qui fait état pour la première fois, de la construction du puisard hors des limites de la propriété des consorts [Z]-[F], qui a mis ces derniers en mesure de prendre connaissance de toute l'étendue des désordres à l'origine des inondations de leur habitation. Ce rapport est daté du 26 juin 2020, de sorte que le point de départ de l'action en responsabilité à l'encontre de Maître [S] doit être fixé à ce jour.

4. Introduite par assignation du 9 septembre 2020, l'action des consorts [Z]-[F] doit être jugée recevable à l'encontre de Me [S], par confirmation de l'ordonnance entreprise.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

5. Maître [N] [S], partie perdante, sera condamné au paiement des dépens d'appel, en faisant droit à la demande présentée par Maître [H] [X] en lui accordant le bénéfice du droit de recouvrement direct des dépens.

6. L'ordonnance rendue le 26 novembre 2021 par le tribunal judiciaire d'Albi sera confirmée en ce qu'elle a condamné Me [N] [S] aux dépens et en ce qu'elle a réservé les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

6.1 M. [M] [Z] et Mme [W] [F] sont en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel au titre de l'incident. Maître [N] [S] sera condamné à leur payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

6.2 La Sa Maaf Assurances est en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel au titre de l'incident. Maître [N] [S] sera condamné à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

6.3 Maître [N] [S], partie perdante, ne peut bénéficier d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans la limite de sa saisine, publiquement, par défaut et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue 21 novembre 2021 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Albi.

Y ajoutant,

Condamne Maître [N] [S] aux dépens d'appel,

Autorise Maître [H] [X] à recouvrer directement contre Maître [N] [S] les dépens dont il a eu à faire l'avance sans avoir reçu provision.

Condamne Maître [N] [S] à payer à M. [M] [Z] et Mme [W] [F] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Condamne Maître [N] [S] à payer à la Sa Maaf Assurances la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Déboute Maître [N] [S] de sa propre demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 22/00594
Date de la décision : 13/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-13;22.00594 ?
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