29/11/2022
ARRÊT N°
N° RG 21/00981
N° Portalis DBVI-V-B7F-OAIQ
MD / RC
Décision déférée du 04 Février 2021
Juge de la mise en état de TOULOUSE (20/00795)
Mme KRYGIEL
[S] [C]
C/
S.A.R.L. LSF GESTION PRIVEE
S.A. CNA INSURANCE COMPANY (EUROPE) VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE CNA INSURANCE LIMITED
S.A. MMA IARD
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANT
Monsieur [S] [C]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Sandrine NEFF, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
S.A.R.L. LSF GESTION PRIVEE
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'AUCH sous le numéro 539 843 805, prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Manuel BELLIER de la SELARL PGTA, avocat au barreau d'AUCH
S.A. CNA INSURANCE COMPANY (EUROPE)
Exerçant sous le nom commercial CNA HARDY, venant aux droits de la SA CNA INSURANCE COMPANY LIMITED, société de droit anglais, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 844 115030, prise en la personne de son représentant légal en France domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentée par Me Alexandra BOULOC, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Céline LEMOUX, avocat au barreau de PARIS
S.A. MMA IARD
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP DESSART-DEVIERS, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Arnaud PERICARD, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. DEFIX, président
J.C. GARRIGUES, conseiller
A.M. ROBERT, conseiller
Greffier, lors des débats : N. DIABY
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.
******
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
À la fin des années 2000, la société Aristophil a proposé à un réseau de courtiers en assurance et de conseillers en gestion de patrimoine de commercialiser un produit dénommé Aristophil permettant l'acquisition en pleine propriété ou en indivision de diverses collections de lettres et manuscrits anciens.
La distribution du produit Aristophil était principalement assurée par la société Art Courtage, laquelle a souscrit plusieurs partenariats afin d'organiser la commercialisation de ce produit, mission qu'elle a notamment confiée M. [J] [L].
Le 28 mars 2011, M. [S] [C] a acheté, par l'intermédiaire de M. [J] [L], cinq parts de 5 000 euros chacune dans une indivision composée d'un ensemble de lettres et manuscrits historiques dessins et objets, auprès de la Sas Aristophil.
Il a été convenu que l'acquéreur confiait pour cinq années à la Sas Aristophil, la garde, la conservation et les expositions de ses collections en application de leur convention.
En novembre 2014, à l'issue d'une enquête menée par la DGCCRF, les locaux de la Sas Aristophil ont été perquisitionnés et les collections conservées, dont celles acquises en indivision par l'appelant, ont été mises sous scellés.
Le 5 mars 2015, une information judiciaire a été ouverte à l'encontre de la Sas Aristophil, pour des faits d'escroquerie en bande organisée, de pratiques commerciales trompeuses et d'abus de confiance notamment.
Le 16 février 2015, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la Sas Aristophil, suivie de sa liquidation judiciaire, le 5 août 2015.
Le 23 décembre 2019, M. [C] a fait adresser à la Sarl LSF gestion privée un courrier recommandé avec avis de réception, sollicitant sur le fondement d'un manquement par ce dernier à son obligation d'information et de conseil, la présentation d'une proposition indemnitaire dans un délai de quinze jours à compter de la réception, outre la déclaration de son sinistre auprès de son assureur de responsabilité civile professionnelle.
Le même jour, il a également fait adresser à la Sa CNA Insurance company (Europe) un courrier recommandé avec avis de réception sollicitant l'enregistrement d'un sinistre au titre des polices d'assurance concernées et de lui proposer une proposition indemnitaire sous quinze jours.
Par actes d'huissier des 6, 12 et 14 février 2020, M. [C] a fait assigner la Sarl LSF gestion privée, la Sa MMA IARD et la Sa CNA Insurance company (Europe), devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins notamment de voir condamner la première à réparer son préjudice consistant en une perte de chance de ne pas souscrire les contrats litigieux et de faire fructifier le capital investi dans un produit d'épargne plus avantageux, outre son préjudice moral, et condamner les suivantes à la garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre.
Par ordonnance du 4 février 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse a :
- déclaré M. [S] [C] irrecevable en ses prétentions indemnitaires formulées à l'encontre de la Sarl LSF gestion privée et de la Sa MMA IARD, faute d'intérêt à agir ;
- déclaré M. [S] [C] irrecevable comme prescrit en ses prétentions indemnitaires fondées sur un manquement à l'obligation d'information et de conseil de M. [J] [L] ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sarl LSF gestion privée une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sa CNA Insurance company (Europe) une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sa MMA IARD une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] aux entiers dépens ;
- rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Pour statuer ainsi, le premier juge a considéré d'une part que la société LSF gestion privée dirigée par M. [L] a commencé son activité postérieurement à la souscription des contrats litigieux et que le demandeur « ne soutient en aucune façon que la Sarl LSF gestion privée puisse être tenue responsable au titre des engagements souscrits par Monsieur [J] [L] antérieurement à sa création ».
Il a d'autre part considéré que le demandeur « ne pouvait ignorer l'existence de son préjudice dès la fin de l'année 2014 alors que les principaux organes de presse à diffusion nationale (') faisaient état de la procédure pénale suivie à l'encontre de la Sas Aristophil (') ces éléments, associés à la production par la Sa CNA Insurance company (Europe) d'une lettre adressée par la Sas Aristophil à « tous [ses] clients et leurs conseillers » du 4 décembre 2014 ('), les informant de la mise sous scellés des collections, du blocage de ses comptes bancaires lui interdisant notamment « régler les options d'achats en cours, pour ceux [.:.1 qui avaient demandé la revente de leurs collections ou de leurs parts d'indivision », l'obligeant à « demander dans un premier temps le redressement judiciaire auprès du tribunal de commerce de Paris », sont autant d'indices précis et concordants caractérisant que dès la fin de l'année 2014, Monsieur [S] [C], sur lequel pèse la charge de la preuve visant à démontrer qu'il n'a pas eu connaissance de son dommage dès le moment de la conclusion du contrat, ne pouvait plus légitimement ignorer sa perte de chance de ne pas contracter, point de départ du délai de prescription de son action en indemnisation à l'encontre du conseiller en gestion de patrimoine. »
***
Par déclaration du 2 mars 2021, M. [S] [C] a relevé appel de cette ordonnance en ce qu'elle a :
- déclaré M. [S] [C] irrecevable en ses prétentions indemnitaires formulées à l'encontre de la Sarl LSF gestion privée et de la Sa MMA IARD, faute d'intérêt à agir ;
- déclaré M. [S] [C] irrecevable comme prescrit en ses prétentions indemnitaires fondées sur un manquement à l'obligation d'information et de conseil de M. [J] [L] ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sarl LSF gestion privée une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sa CNA Insurance company (Europe) une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] à verser à la Sa MMA IARD une indemnité de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [S] [C] aux entiers dépens.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 avril 2022, M. [S] [C], appelant, demande à la cour de :
- infirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état de Toulouse en date du 4 février 2021,
Et, statuant à nouveau,
- déclarer M. [C] recevable en son action dirigée contre la société Cna Insurance Company (Europe),
- condamner la société Cna Insurance Company (Europe) à verser à M. [C] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel sur la fin de non-recevoir,
- condamner la société Cna Insurance Company (Europe) aux dépens occasionnés par la fin de non- recevoir,
- débouter les sociétés Cna Insurance Company (Europe), LSF gestion privée et MMA IARD de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- inviter les parties à conclure sur la responsabilité de M. [J] [L] et sur l'action directe initiée à l'encontre de l'assureur Cna Insurance Company (Europe) afin de donner une solution définitive au litige.
À l'appui de ses prétentions, M. [C] soutient que le point de départ de la prescription de son action doit être reporté au jour où il a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer ses droits. Il explique que le montage réalisé par la société Aristophil s'apparentait à un système dit de Ponzi, consistant à rémunérer les investisseurs initiaux par les fonds apportés par les nouveaux entrants, la valeur alléguée des collections étant fantaisiste et largement surévaluée. Il allègue des pratiques commerciales trompeuses de la part du vendeur de nature à laisser croire à une obligation de rachat pesant sur la société Aristophil à l'issue d'un délai de cinq années.
Il reproche à M. [L] dont la responsabilité est recherchée, d'une part d'avoir manqué à son devoir de conseil en s'abstenant de lui fournir une information claire et circonstanciée sur le mécanisme complexe de l'opération et notamment sur l'absence d'obligation de rachat par Aristophil à l'issue d'une période de cinq années.
D'autre part, il reproche également à M. [L] de lui avoir assuré que l'évolution du marché était la seule cause de dévaluation possible de son investissement, alors que les biens acquis avait été surévalués, cette surévaluation ne lui étant apparue qu'au moment de la vente des collections de la société Aristophil, dans le cadre de la liquidation judiciaire de cette dernière.
Enfin, il explique que sa condamnation aux dépens exposés par les sociétés LSF gestion privée et MMA IARD serait inéquitable.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 décembre 2021, la Sa CNA Insurance company (Europe), intimée, demande à la cour, au visa de l'article 2224 du code civil, de :
- confirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse le 4 février 2021 (RG n°20/0795)
- juger l'action de M. [C] prescrite ;
- débouter M. [C] de toutes ses demandes ;
- condamner M. [C] à payer à la société CNA Insurance Company (Europe) la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
À l'appui de ses prétentions, la Sa CNA Insurance company (Europe) soutient à titre principal, que le point de départ de la prescription de l'action de l'appelant est au jour de la conclusion du contrat, la clarté de la convention lui permettant de savoir, dès ce moment, que la société Aristophil n'avait que la simple faculté d'acquérir les 'uvres objet de la promesse de vente. De même, elle affirme que l'appelant avait parfaitement connaissance de la fluctuation possible de la valeur de son investissement.
Subsidiairement, elle demande que le point de départ de la prescription soit reporté au jour de la divulgation publique de l'enquête préliminaire ouverte à l'encontre de la société Aristophil et de la mise sous séquestre des collections.
Encore, elle fait observer que M. [C] avait connaissance des déboires de la société Aristophil depuis bien longtemps ainsi que les échanges de courriers électroniques l'établissent.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 30 aout 2021, la Sarl LSF gestion privée, intimée, demande à la cour, au visa des articles 9, 30, 31, 122 et 700 du code de procédure civile et 2224 du code civil de :
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
- déclarer irrecevable l'action engagée par M. [C] ;
- condamner M. [C] aux entiers dépens ;
- condamner M. [C] à verser la somme de 3 000 euros à la société LSF gestion privée au titre des frais irrépétibles.
À l'appui de ses prétentions, la Sarl LSF gestion privée soutient avoir une personnalité juridique distincte de celle de M. [L] et ne pas avoir repris les actes de ce dernier, de sorte que M. [C] n'a pas d'intérêt à agir contre elle.
Par ailleurs, elle expose que le point de départ de l'action engagée par l'appelant à son encontre ainsi qu'à l'encontre de M. [L] courrait à compter de la conclusion du contrat de sorte que cette action est désormais prescrite.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 septembre 2022, la Sa MMA IARD, intimée, demande à la cour, au visa des articles 30, 31 et 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil de :
- confirmer l'ordonnance entreprise par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse du 4 février 2021 (RG n° 20/00795) en ce qu'elle a déclaré l'action de M. [C] irrecevable en raison du défaut de qualité à défendre des sociétés LSF gestion privee et MMA et de la prescription intervenue, et en ce qu'elle a condamné M. [C] à payer à MMA la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles,
- débouter en conséquence M. [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner M. [C] à la société MMA IARD la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
À l'appui de ses prétentions, la Sa MMA IARD soutient que l'action de M. [C] est irrecevable en ce qu'elle est dirigée contre la société LSF gestion privée en l'absence de tout lien contractuel. Elle expose que l'action directe à son encontre est impossible faute d'avoir démontré qu'elle était l'assureur de M. [L].
Elle soutient encore que l'action de l'appelant est prescrite, son point de départ devant être fixé au jour de la conclusion du contrat, sans possibilité de report de ce point de départ.
***
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 septembre 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 27 septembre 2022.
MOTIVATION :
- À titre liminaire, sur l'étendue de la saisine de la cour
1. M. [C] critique l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a « déclaré M. [S] [C] irrecevable en ses prétentions indemnitaires formulées à l'encontre de la Sarl LSF gestion privée et de la Sa MMA IARD, faute d'intérêt à agir »
2. Conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. »
3. M. [C], dans le dispositif de ses conclusions, ne soumet à l'examen de la cour aucune prétention dirigée contre les sociétés LSF gestion privée et MMA IARD.
4. Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance sur ce point.
- Sur la prescription de l'action directe dirigée contre la Sa CNA Insurance company (Europe)
5. Aux termes de l'article 2224 du code civil, « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »
En application de ce texte, si le dommage résultant d'un manquement à une obligation d'information de mise en garde ou de conseil consistant en la perte d'une chance de ne pas contracter ou de contracter dans de meilleures conditions se réalise lors de la conclusion du contrat, le délai de prescription de l'action engagée contre l'auteur de ce manquement ne court que du jour ou le dommage s'est révélé au contractant lorsque ce dernier établit qu'il n'en avait pas eu connaissance au jour du contrat.
6. Ainsi, indépendamment du bien-fondé des moyens invoqués au fond qu'il n'appartient pas à la cour, statuant avec les pouvoirs du juge de la mise en état, d'apprécier dans le cadre de la présente instance, il convient de retenir, que dès lors que les acquéreurs invoquent une tromperie, tant sur la valeur des biens que sur la portée du contrat les liant à la société Aristophil, le point de départ du délai de prescription ne peut être en l'espèce fixé à la date de la convention dès lors que les acquéreurs, eu égard à la nature des biens et prestations en cause, ne pouvaient avoir conscience, à cette date de la surévaluation qu'ils allèguent et que le préjudice né de l'impossibilité de mettre en 'uvre la clause de rachat demeurait purement hypothétique avant l'expiration d'un délai de cinq années après la conclusion du contrat compte tenu des stipulations contractuelles.
Aucun des éléments débattus ne permet d'affirmer que l'appelant a eu connaissance d'articles parus à la fin de l'année 2014 dans divers médias nationaux faisant état de l'ouverture d'une enquête préliminaire du chef d'escroquerie et il ne saurait être reproché à M. [C] de ne pas avoir pris connaissance des articles que la presse, fût-elle nationale, a consacré aux développements judiciaires intéressant la société Aristophil.
Ni l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, qui permettait l'adoption d'un plan de redressement, ni le courrier en date du 24 mars 2014 émanant de Me [V] désigné en qualité d'administrateur, par lequel les acquéreurs ont été avisés de cette procédure, n'ont révélé à l'appelant la surévaluation des biens et les pratiques commerciales qu'il estime trompeuses, et par conséquent les manquements qu'il impute désormais aux commercialisateurs.
7. Seule l'information pénale, ouverte par réquisitoire introductif du 5 mars 2015 visant des faits d'escroquerie en bande organisée, de pratiques commerciales trompeuses et d'abus de confiance, lui a permis de prendre connaissance des faits susceptibles de fonder une action en responsabilité à l'encontre des intermédiaires ayant procédé à la commercialisation des produits litigieux, même dans l'hypothèse où ces intermédiaires n'auraient pas fait l'objet d'une mise en cause sur le plan pénal.
Introduite par assignation des 6, 12 et 14 février 2020, soit moins de cinq ans après la date à partir de laquelle M. [C] peut être réputé avoir eu connaissance des faits lui permettant d'exercer ses droits, la présente action est manifestement recevable.
8. L'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle a jugé M. [C] irrecevable comme prescrit, en ses prétentions indemnitaires fondées sur un manquement à l'obligation d'information et de conseil de M. [J] [L].
Statuant à nouveau de ce chef, la cour déclare recevable l'action de M. [C] dirigée contre la société CNA Insurance company (Europe).
Sur la demande d'évocation de l'affaire par la cour
9. M. [C] sollicite de la cour qu'elle invite les parties à conclure sur l'entier litige pour y apporter une solution définitive.
10. Aux termes de l'article 568 du code de procédure civile, « lorsque la cour d'appel infirme ou annule un jugement qui a ordonné une mesure d'instruction, ou qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l'instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction. »
Le choix de la cour d'évoquer une affaire relève de son pouvoir discrétionnaire.
11. En l'espèce, il n'apparaît pas opportun d'évoquer l'affaire, afin de permettre la mise en 'uvre effective du double degré de juridiction au regard de la nature du litige.
Il n'y a donc pas lieu à évocation de l'affaire.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
12. La Sa CNA Insurance company (Europe), partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens exposés par M. [C].
M. [C], qui a attrait à l'instance d'appel les société LSF gestion privée et MMA IARD, sera condamné au paiement des dépens exposés par ces dernières.
13. L'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse le 4 février 2021 sera infirmée en ce qu'elle a condamné M. [C] aux dépens de première instance et à verser à la Sa CNA Insurance company (Europe) la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.
Elle sera confirmée en ce qu'elle a condamné M. [C] à verser à la Sarl LSF gestion privée et à la Sa MMA IARD une indemnité de 800 euros à chacune d'elle au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
14. M. [C] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. La Sa CNA Insurance company (Europe) sera condamnée à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La Sarl LSF gestion privée est en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. M. [C] sera condamné à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La Sa MMA IARD est en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. M. [C] sera condamné à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La Sa CNA Insurance company (Europe), partie tenue aux dépens, ne peut bénéficier d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse le 4 février 2021 sauf en ce qu'elle a déclaré M. [C] irrecevable en ses prétentions formulées à l'encontre de la Sarl LSF gestion privée et de la Sa MMA IARD et condamné M. [S] [C] à verser à la Sarl LSF gestion privée et à la Sa MMA IARD une indemnité de 800 euros à chacune d'elle au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare recevable l'action de M. [S] [C] dirigée contre la Sa CNA Insurance company (Europe).
Dit n'y avoir lieu à évocation de l'affaire.
Condamne la Sa CNA Insurance company (Europe) aux dépens exposés par M. [S] [C].
Condamne M. [S] [C] aux dépens exposés par la Sarl LSF gestion privée et la Sa MMA IARD.
Condamne la Sa CNA Insurance company (Europe) à payer à M. [S] [C] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel et en première instance.
Condamne M. [S] [C] à payer à la Sarl LSF gestion privée la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Condamne M. [S] [C] à payer à la Sa MMA IARD la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Déboute la Sa CNA Insurance company (Europe) de sa propre demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
N. DIABY M. DEFIX