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28/11/2022 | FRANCE | N°20/02004

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 28 novembre 2022, 20/02004


28/11/2022



ARRÊT N°



N° RG 20/02004

N° Portalis DBVI-V-B7E-NU2W

MD / RC



Décision déférée du 16 Juin 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE (1119003119)

M. [V]

















SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBIL IER SIS [Adresse 4]





C/



[Y] [L]






































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER SIS [Adress...

28/11/2022

ARRÊT N°

N° RG 20/02004

N° Portalis DBVI-V-B7E-NU2W

MD / RC

Décision déférée du 16 Juin 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE (1119003119)

M. [V]

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBIL IER SIS [Adresse 4]

C/

[Y] [L]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER SIS [Adresse 4], pris en la personne de son Syndic, le Cabinet AUBUISSON IMMOBILIER situé [Adresse 1]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Catherine LAGRANGE de la SELARL D'AVOCATS LAGRANGE - COURDESSES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Madame [Y] [L]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Dominique JEAY de la SCP JEAY - MARTIN DE LA MOUTTE - JAMES-FOUCHER, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

J.C. GARRIGUES, conseiller

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [Y] [L] est propriétaire occupante d'une maison d'habitation sise [Adresse 3]

[Adresse 3] à [Localité 5] (31). Son fonds est contigu à un ensemble immobilier collectif soumis au statut de la copropriété sis au [Adresse 4] (31).

Sur la bande de terre qui borde les murs de Mme [L], le syndicat des copropriétaires avait planté des bambous et des lauriers.

En septembre 2017, le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] a fait couper les bambous et en août 2018, arraché les lauriers.

Par acte d'huissier du 11 juin 2018, Mme [L] a fait assigner le syndicat des copropriétaires en référé-expertise devant le tribunal de grande instance de Toulouse, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, en faisant valoir des troubles de jouissance dus aux plantations de bambous et de laurier à proximité du mur sur le fonds de la copropriété.

Par ordonnance du 17 juillet 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse a ordonné une expertise confiée à M. [N] ou, à défaut M. [S], aux fins notamment de constater les désordres, en rechercher les causes et leurs origines, décrire les remèdes à y apporter et décrire et chiffrer les travaux de remise en état.

L'expert judiciaire M. [S] a remis son rapport le 18 mars 2019.

-:-:-:-:-:-

Par acte d'huissier du 30 juillet 2019, Mme [Y] [L] a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 4], devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de voir cesser les troubles de voisinage résultant des plantations de bambous et de lauriers et d'obtenir réparation.

Par un jugement contradictoire du 16 juin 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier, à payer à Mme [L] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier à faire procéder, sous astreinte de 30 euros par jour de retard suivant un délai de 30 jours suivant la signification du jugement, à la recoupe et à la dévitalisation des bambous résiduels,

- rejeté les demandes de Mme [L] plus amples ou contraires,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier à payer à Mme [L] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier aux dépens, qui incluront le coût des dépens de l'instance de référé et les honoraires de l'expert [S],

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a considéré que les végétaux pourraient à nouveau produire des nuisances sonores par frottement contre le mur de l'habitation en cas de vent et encombrer le toit du fait des feuillages, compte tenu de leur plantation à une distance insuffisante par rapport à la limite de propriété.

-:-:-:-:-:-

Par déclaration du 24 juillet 2020, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier, a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 octobre 2020, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, la Sarl Aubuisson immobilier, appelant, demande à la cour de :

- réformer le jugement dont appel,

- 'dire et juger' que Mme [L] ne saurait prétendre à aucun dédommagement,

Subsidiairement,

- constater que Mme [L] ne rapporte nullement la preuve de l'existence d'un trouble anormal de voisinage,

Reconventionnellement,

- condamner Mme [L] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700,

- 'dire et juger' que Mme [L] assumera les dépens tant de première instance que devant la cour, en ce compris les frais d'expertise et coût des sondages préfinancés par ses soins.

À l'appui de ses prétentions, l'appelant soutient que :

- aucun désordre n'a été constaté par l'expert judiciaire,

- les feuilles sur le toit d'une maison ne peuvent être considérés comme un trouble anormal du voisinage,

- les bambous et les lauriers ont été arrachés,

- M. [L] ne produit aucune facture établissant l'entretien fréquent de sa toiture,

- le bruissement de feuilles ne constitue pas un trouble anormal de voisinage,

- l'expert judiciaire a retenu que Mme [L] est à l'origine de l'essentiel de la dégradation de son mur, et les résultats des sondages démontrent que les végétaux ne sont pas à l'origine du tassement du sol et de la déformation du carrelage, les frais d'expertise et de sondage doivent donc rester à la charge de Mme [L],

- les racines découvertes par l'expert s'orientent vers la copropriété et ne génèrent donc aucun désordre.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 31 décembre 2020, Mme [Y] [L], intimée, demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

Et y ajoutant,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], pris en la personne de son syndic, le cabinet Aubuisson immobilier à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 1 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens, distraction en étant prononcée au profit de Maître [X], avocat associé, sur son affirmation de droit.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- l'expertise judiciaire démontre que Mme [L] est victime de troubles anormaux du voisinage en raison de l'absence d'élagage régulier des végétaux plantés près de son mur d'habitation et dépassant le faîtage de son toit, la contraignant à entretenir fréquemment sa toiture,

- les végétaux produisent des nuisances sonores en raison du frottement des feuilles et tiges contre le mur de l'habitation,

- les bambous ont été coupés mais n'ont pas été retirés et dévitalisés rendant leur repousse inévitable et entraînant un risque de répétition des nuisances sonores et encombrement du toit,

- le frottement des branchages a pu dégrader le mur et les trous des fixations de fils de fer n'ont été rebouchés qu'en février 2020,

- le syndicat des copropriétaires ne s'est occupé de l'entretien et de la taille des végétaux que de manière irrégulière et sur demande de Mme [L].

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 avril 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 10 mai 2022.

MOTIVATION

- Sur les troubles anormaux du voisinage :

Les relations de voisinage génèrent nécessairement certains inconvénients que chacun doit endurer dès lors qu'ils ne dépassent pas les limites de ce qu'il est habituel de supporter entre voisins.

La mise en 'uvre de la responsabilité sur le fondement des troubles anormaux du voisinage nécessite la démonstration du caractère anormal du trouble invoqué, dont la charge incombe à celui qui s'en plaint.

L'anormalité du trouble s'apprécie in concreto dans sa réalité, sa nature et sa gravité en fonction des circonstances de temps et de lieu, notamment eu égard à ses conséquences dommageables pour les voisins le subissant et, en fonction des droits respectifs des parties, le juge devant opérer une balance des intérêts en présence. Le trouble peut ne pas être actuel si le risque futur est certain.

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire déposé par M. [S] le 18 mars 2019 et des photos produites aux débats que les bambous ont été plantés par le syndicat de copropriétaires du [Adresse 4] à quelques centimètres du mur de Mme [L].

L'expert judiciaire n'a pas constaté d'encombrement de la toiture et des descentes d'eaux pluviales par les feuilles de bambou ni de frottement des feuillages sur le mur de la maison puisque les végétaux ont été enlevés. Il a retenu que la dégradation du crépi ne pouvait être attribuée au seul frottement des végétaux dès lors que le crépi est ancien et dégradé, mais que ce fronttement, lorsqu'il existait était à attribuer à une carence d'entretien et de précaution de la copropriété voisine.

Il résulte des sondages effectués qu'aucun développement racinaire n'est à l'origine de la dégradation et de la déformation du carrelage.

L'expert judiciaire a relevé que les racines des bambous coupés en 2017 n'ont pas été retirées ni dévitalisées, et que « la repousse des bambous conduira inévitablement à la répétition des nuisances » d'encombrement de la toiture et de frottement des feuillages sur le mur.

L'expert a conclu que « l'entretien trop longtemps différé des végétaux plantés au voisinage du mur de la maison de Mme [L] a permis leur prolifération au-delà des normes admises (distance, hauteur, etc) ».

Le risque de trouble présenté par les bambous, plantés à une distance extrêmement proche du mur de Mme [L], en contravention de la réglementation légale, n'est pas actuel, les bambous n'étant pas à l'origine de la dégradation du carrelage et du mur, ni n'encombrent actuellement son toit ou ne génère des nuisances sonores.

Mais ils peuvent occasionner, dans le futur, un encombrement de la toiture et un frottement des feuillages sur ledit mur, ce qui constitue un risque certain de trouble dès lors que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] n'en assurait pas l'entretien régulier, comme l'a relevé l'expert judiciaire. Or, ce trouble excède les inconvénients normaux du voisinage compte tenu de la proximité immédiate des plantations par rapport au mur de séparation des deux fonds.

L'expert judiciaire préconise, pour remédier aux désordres, de supprimer le développement racinaire des bambous non dévitalisés et de reboucher les trous percés dans le crépi du mur litigieux lors de l'aménagement d'un support des végétaux.

Le 10 février 2020, les trous réalisés dans le mur de Mme [L] pour tenir les bambous ont été rebouchés par un entrepreneur mandaté par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4].

Il y a donc lieu de confirmer le jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6] à faire procéder, sous astreinte de 30 euros par jour de retard suivant un délai de 30 jours suivant la signification de la décision, à la recoupe et à la dévitalisation des bambous résiduels.

S'agissant de l'indemnisation du préjudice allégué par Mme [L], les investigations par sondages ayant coûté 780 euros toutes taxes comprises ont été réalisées par Mme [L] compte tenu de la proximité des végétaux plantés en contravention des règles légales applicables. Ces frais ne sauraient donc rester à sa charge.

Si, comme l'a relevé l'expert judiciaire, le préjudice tenant à l'entretien régulier de la toiture n'est pas établi faute pour Mme [L] de produire des factures, l'expert judiciaire a retenu que la proximité des végétaux et leur manque d'entretien avait encombré la toiture de Mme [L] et généré des nuisances sonores dues au frottement des végétaux sur le mur.

Le prejudice allégué par Mme [L], qui doit s'analyser en un prejudice moral est donc établi et résulte effectivement du trouble anormal de voisinage engendré par le manque d'entretien des végétaux litigieux par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4].

En consequence, il y a lieu de confirmer le jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6] à payer à Mme [L] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

- Sur les dépens et frais irrépétibles :

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamné aux dépens de l'instance d'appel, ainsi que ceux de première instance tels qu'appréciés par le premier juge, en faisant droit à la demande présentée par Maître [X] en lui accordant le bénéfice du droit de recouvrement direct des dépens.

Il sera également condamné à payer à Mme [L] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à ceux de première instance tels qu'appréciés par le tribunal de grande instance de Toulouse.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Toulouse.

Et y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice la Sarl Aubuisson immobilier, aux dépens de l'instance d'appel.

Autorise Maître [X] à recouvrer directement contre le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 4], les frais dont il a eu à faire l'avance sans avoir reçu provision.

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis à [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice la Sarl Aubuisson immobilier, à payer à Mme [Y] [L] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/02004
Date de la décision : 28/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-28;20.02004 ?
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