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25/11/2022 | FRANCE | N°20/03304

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 25 novembre 2022, 20/03304


25/11/2022





ARRÊT N°329/2022



N° RG 20/03304 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N2UN



MS/KB



Décision déférée du 22 Octobre 2020

Pole social du TJ TOULOUSE



18/11185



[Y] [C]























[J] [V]





C/



[H] [M]



CPAM HAUTE GARONNE



S.A. MAAF ASSURANCES

























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CONFIRMATION PARTIELLE







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***





APPELANT



Monsieur [J] [V]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]



représenté par Me As...

25/11/2022

ARRÊT N°329/2022

N° RG 20/03304 - N° Portalis DBVI-V-B7E-N2UN

MS/KB

Décision déférée du 22 Octobre 2020

Pole social du TJ TOULOUSE

18/11185

[Y] [C]

[J] [V]

C/

[H] [M]

CPAM HAUTE GARONNE

S.A. MAAF ASSURANCES

CONFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [J] [V]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

représenté par Me Assia DERBALI, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555.2021.012068 du 17/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIME

Monsieur [H] [M]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 3]

représenté par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE substitué par Me Marion BOUILLAUD-JUANCHICH, avocat au barreau de TOULOUSE

PARTIES INTERVENANTES

S.A. MAAF ASSURANCES

SERVICE JURIDIQUE

[Localité 6]

[Localité 4]

représentée par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE substitué par Me Marion BOUILLAUD-JUANCHICH, avocat au barreau de TOULOUSE

CPAM HAUTE GARONNE

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Mme [K] [B] (Membre de l'organisme) en vertu d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, devant Mme M.SEVILLA,conseillère chargée d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de président

M. SEVILLA, conseillère

A.MAFFRE, conseillère

Greffier, lors des débats : A. ASDRUBAL

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par N. ASSELAIN, président, et par A. ASDRUBAL, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE:

Monsieur [H] [M] assuré aupres de la Compagnie

d'assurances MAAF ASSURANCES S.A, a employé Monsieur [J] [V] en qualité d'ouvrier du bâtiment, le 30 décembre 2014.

Monsieur [J] [V] a été victime d'un accident du travail le jour même et a chuté d'une hauteur de 4 mètres.

Il a été consolidé le 1er mai 2017 et un taux d'IPP de 35 %lui a été notifié.

Le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale a reconnu la faute inexcusable de l'employeur par jugement en date du 8 juin 2018.

L'employeur n'a pas relevé appel de ce jugement qui est à ce jour définitif.

Monsieur [V] a sollicité une provision ainsi qu'une expertise médicale et le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a ordonné une expertise médicale à cet effet par ordonnance en date du 8 juin 2018.

Le Docteur [G] a été désigné comme Expert et a déposé son rapport.

Par un jugement en date du 22 octobre 2020, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Haute-Garonne évaluait le préjudice de Monsieur [V] à la somme de 78 952 euros, déduction faite de la provision de 5000 euros précédemment allouée.

Monsieur [V] interjetait appel de ce jugement le 26 novembre 2020.

Dans ses dernières conclusions écrites, reprises oralement à l'audience et auxquelles il sera renvoyé pour complet exposé, il demande:

-d'INFIRMER la décision du 22 octobre 2020 rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale ;

En conséquence,

- Homologuer le rapport d'expertise du Dr [G] ;

- En lecture de rapport, CONDAMNER l'employeur au paiement des sommes correspondant aux préjudices personnels de la victime, soit un total de 214 512, 50 euros

- DIRE que la CPAM fera l'avance de ces sommes à l'égard du concluant ainsi que des frais d'expertise.

- CONDAMNER l'employeur au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

***********************

Dans ses dernières écritures auxquelles il convient de renvoyer pour complet exposé et à l'audience, Monsieur [H] [M] et la MAAF demandent de:

- DEBOUTER Mr [J] [V] de l'intégralité de ses demandes et de son appel ;

Et ce faisant,

- CONFIRMER le jugement du Pole Social du Tribunal judiciaire de Toulouse du 22 Octobre 2020 sauf concernant les frais d'aménagement du véhicule

-Dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Haute-Garonne

devra verser directement le montant de ces indemnites a Mr [V]

[V], deduction faite de la provision a hauteur de la somme de

5 000€ deja payee;

- REFORMER le jugement du Pôle Social du Tribunal judiciaire de Toulousedu 22 Octobre 2020 pour le surplus,

Et ce faisant,

- DEBOUTER Mr [V] de sa demande de Frais amenagement du vehicule ;

- DEBOUTER Mr [V] de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

- STATUER ce que de droit concernant Ies dépens.

****************************

Dans ses dernières conclusions reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de renvoyer, la CPAM de Haute Garonne sollicite:

-la confirmation du premier jugement,

-de constater qu'elle a réglé la somme de 78.952 euros

-de déduire cette somme du montant de l'indemnisation fixée par la cour,

-de rappeler que la CPAM récupérera directement et immédiatement auprès de l'employeur le montant des sommes allouées au titre de la majoration de rente de 17% calculée sur la base du taux d'IPP initial de 35% opposable à l'employeur

Les débats se sont déroulés à l'audience du 22 septembre 2022. La décision a été mise en délibéré au 25 novembre 2022.

MOTIFS:

L'expert mentionne dans son rapport que Monsieur [V], 37 ans, a été victime d'une chute d'un lieu élevé entraînant une fracture complexe de la vertèbre L1, responsable d'un syndrome de la queue de cheval avec des troubles moteurs modérés des membres inferieurs et des troubles sphinctériens majeurs avec incontinence fécale et urinaire.

Son état a été consolidé au 1er mai 2017. Les troubles sphninctériens et anaux ont persisté ainsi qu'une incapacité totale à la réalisation de l'acte sexuel. Il se déplace actuellement avec une canne anglaise avec un périmètre de marche de 300 à 400 mètres.

Sur les souffrances endurées:

L'expert les a évalué à 4,5/7 en retenant le traumatisme initial, les deux interventions chirurgicales, les hospitalisations, la réeducation et les troubles anxiodepressifs documentés.

Le Tribunal a alloué la somme de 17.000 euros de ce chef.

Monsieur [V] sollicite la somme de 30.000 euros.

L'évaluation du Tribunal est en deça des indemnisations usuellement allouées en la matière.

Il convient donc d'infirmer la décision du Tribunal de ce chef et d'allouer la somme de 20.000 euros en réparation de ce préjudice.

Sur le préjudice d'agrément:

Le préjudice d'agrément vise exclusivement à réparer le préjudice « lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs ».

Ce préjudice concerne donc les activités sportives, ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l'accident.

L'expert a retenu une incapacité définitive de faire du football.

Le Tribunal a alloué à la victime âgée de 37 ans au moment de l'accident, une somme de 2.000 euros en réparation de ce préjudice.

Cette évaluation est justement appréciée et sera confirmée.

Sur l'assistance tierce personne:

L'expert a retenu la necessité d'une heure et demi par jour de tierce personne non spécialisée jusqu'à consolidation soit du 30 décembre 2014 au 1er mai 2017.

L'appelant a limité sa demande à une indemnisation sur 70 semaines alors qu'entre l'accident et la consolidation se sont écoulées 122 semaines.

L'appréciation du Tribunal consistant à allouer la somme hebdomadaire de 100 euros pour 10 h30 de tierce personne hebdomadaire n'est manifestement pas suffisante dans la mesure où le taux horaire de la tierce personne est indemnisé en moyenne entre 16 et 25 euros.

Il sera fait droit de ce chef à la demande de l'apellant et la somme de 18.375 euros à ce titre sera allouée, la cour ne pouvant statuer ultra petita.

Sur le préjudice esthétique

L'indemnité retenue par le Tribunal suffit amplement à réparer le préjudice esthétique léger retenu par l'expert judiciaire à hauteur de 2,5/7.

La somme de 8.000 euros allouée pour l'ensemble du préjudice esthétique sera donc confirmée.

Sur le déficit fonctionnel temporaire:

Cela correspond au préjudice résultant de la gêne dans les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant la maladie traumatique (séparation familiale pendant l'hospitalisation et privation temporaire de qualité de vie) jusqu'à la consolidation.

En retenant une indemnisation de 24 euros par jour de déficit total, le Tribunal a justement fixé l'indemnisation à 12.192 euros correspondant à:

- un déficit total du 30 décembre 2014 au 27 avril 2015 et la journée du 1er février 2016 plus la période du 30 mars au 2 avril 2016 soit 123 jours=2.952 euros

-un déficit partiel classe 3 du 28 avril 2015 au 27 avril 2016 et la période du 30 mars au 2 avril 2016 et du 9 juillet 2016 au 1er mai 2017 soit 662 jours(662X24X50%)=7944 euros

-un déficit partiel classe 4 du 28 avril au 8 juillet 2016= 72jours soit (72X24X75%) soit 1296 euros.

La décision sera confirmée sur ce point.

Sur le préjudice sexuel:

Ce préjudice recouvre trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : l'aspect morphologique lié à l'atteinte aux organes sexuels, le préjudice lié à l'acte sexuel (libido, perte de capacité physique, frigidité), et la fertilité

(fonction de reproduction). (Civ. 2, 17 juin 2010, n° 09-15.842).

L'évaluation de ce préjudice doit être modulée en fonction du retentissement subjectif de la fonction sexuelle selon l'âge et la situation familiale de la victime.

Son indemnisation peut atteindre 50 000 à 80 000 euros pour un préjudice affectant totalement et définitivement les trois aspects de la fonction sexuelle chez une jeune personne.

En l'espèce, l'expert relève une incapacité définitive à tout rapport sexuel depuis l'accident.

Monsieur [V] était âgé de 37 ans au jour de l'accident.

Compte tenu de ces éléments, de l'atteinte définitive aux trois aspects du préjudice sexuel et de l'âge de la victime le jour de l'accident, il y a lieu d'infirmer la décision du Tribunal de ce chef et d'allouer à Monsieur [V] la somme de 45.00 euros en réparation de ce préjudice.

Sur les frais d'aménagement du véhicule:

Le juge ne peut refuser d'évaluer le montant d'un dommage dont il constate l'existence en son principe en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties.

Ainsi, la réparation s'impose même si la victime ne fournit pas tous les éléments pour évaluer un chef de préjudice dont l'existence est avérée.

En l'espèce, l'expert a retenu la necessité d'un véhicule adapté à embrayage automatique. Il n'est pas contesté que Monsieur [V] était titulaire d'un permis de conduire italien valable jusqu'en 2021. L'absence d'élément de preuve concernant la validité actuelle du permis de conduire ne saurait priver la victime de son droit à indemnisation.

Pour chiffrer ce préjudice, la cour doit diviser le surcoût total de l'acquisition d'un véhicule automatique par le nombre d'années entre deux renouvellements.

Deux périodes doivent ensuite être distinguées. Entre le jour de la consolidation et le jour du jugement, il convient de calculer le surcout année par année.

A compter du jour de la décision, il convient de capitaliser le surcout annuel selon l'euro de rente viagère retenu en fonction de l'âge et du sexe de la victime.

Le Tribunal a alloué 4.000 euros de ce chef.

Or la différence de prix entre l'acquisistion d'un véhicule automatique et d'un véhicule à boîte de vitesse manuelle peut être évaluée à 2.500 euros tous les 5 ans soit 500 euros par an.

L'indemnisation due à ce titre entre la date de consolidation et celle du jugement est donc de 2.500 euros.

A compter de la date de jugement, en retenant un euro de rente à 32,112 compte tenu de l'âge de la victime à ce jour, et en le multipliant avec le surcout annuel (32,112X500) l'indemnisation s'élève à 16.056 euros.

La décision du Tribunal sera infirmée de ce chef et la somme de 18.556 euros( 2.500 + 16.056 euros) sera allouée en réparation de ce préjudice.

Sur les autres demandes:

La demande de la CPAM tendant à rappeler qu'elle pourra récupérer directement et immédiatement auprès de l'employeur le montant des sommes allouées au titre de la majoration de rente de 17% calculée sur la base du taux d'IPP initial de 35% opposable à l'employeur sera accueillie.

La décision des premiers juges sera confirmée pour le surplus.

Monsieur [M] et son assureur seront condamnés aux dépens et au paiement de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement rendu le 22 octobre 2020, en ce qu'il a a fixé à 2.000 euros la réparation du préjudice d'agrément, à 8.000 euros la réparation du préjudice esthétique, à 12.212 euros le déficit fonctionnel temporaire résultant de l'accident du 30 décembre 2014;

L'infirme pour le surplus;

Statuant à nouveau sur ces chef de décision infirmé et y ajoutant,

Fixe à 20.000 euros l'indemnité réparant les souffrances endurées;

Fixe à 45.000 euros l'indemnité réparant le préjudice sexuel,

Fixe à 18.375 euros l'indemnité réparant l'aide à tierce personne,

Fixe à 18.556 euros l'indemnité réparant les frais d'aménagement du véhicule,

Rapelle que la CPAM pourra récupérer directement et immédiatement auprès de l'employeur le montant des sommes allouées au titre de la majoration de rente de 17% calculée sur la base du taux d'IPP initial de 35% opposable à l'employeur.

Dit que Monsieur [M] et son assureur la MAAF devront payer à Monsieur [V] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que Monsieur [M] et son assureur la MAAF doivent conserver la charge des dépens d'appel.

Rejette les autres demandes.

Le présent arrêt a été signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par A.ASDRUBAL, greffier de chambre.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

A.ASDRUBAL N.ASSELAIN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 3
Numéro d'arrêt : 20/03304
Date de la décision : 25/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-25;20.03304 ?
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