18/11/2022
ARRÊT N°467/2022
N° RG 21/01198 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OBFG
CB/AB
Décision déférée du 04 Février 2021 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/01672)
DAVID
[U] [B]
C/
S.A.S. PROS FRANCE
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 18 11 22
à Me Ophélie BENOIT-DAIEF
Me Emmanuelle DESSART
CCC à POLE EMPLOI
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANT
Monsieur [U] [B]
[Adresse 2]
Représenté par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant) et par Me Patricia GOMEZ-TALIMI de la SCP PDGB SOCIETE D AVOCATS, avocat au barreau de PARIS (plaidant)
INTIMEE
S.A.S. PROS FRANCE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 1]
Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP DESSART-DEVIERS, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant) et par Me Markus ASSHOFF de la SELAS SELAS VALSAMIDIS AMSALLEM JONATH FLAICHER et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS (plaidant)
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. Brisset, présidente et A. Pierre-Blanchard, conseillère, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. Brisset, présidente
A. Pierre-Blanchard, conseillere
F. Croisille-Cabrol, conseillère
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par C. Brisset, présidente, et par A. Ravéane, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [U] [B] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er octobre 2012 par la SAS Camelon Software devenue Pros France, qui a pour activité l'édition de logiciels de big data, en qualité d'ingénieur d'affaires, statut cadre.
La convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseil (dite Syntec) est applicable.
Il était stipulé une convention de forfait exprimée en jours à hauteur de 217 jours. M. [B] percevait une rémunération mensuelle brute de 6 257,44 euros au cours des 12 mois précédant la rupture.
Le 5 août 2018, la société Pros France a proposé à M. [B] une rupture conventionnelle de son contrat de travail avec une indemnité d'un montant de 70 000 euros. Le demandeur a informé son employeur qu'il n'entendait pas conclure une telle rupture.
Par courrier du 10 octobre 2018, contenant mise à pied à titre conservatoire, M. [B] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 23 octobre 2018.
Par acte du 16 octobre 2018, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de diverses sommes.
Par lettre en date du 16 novembre 2018, M. [B] a été licencié pour faute grave.
Par jugement du 4 février 2021, le conseil a :
- jugé que la résiliation judiciaire et la nullité du licenciement ne sont pas justifiées,
- jugé que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,
- condamné la SAS Pros France, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, à payer à M. [B] les sommes suivantes :
- 43 799 euros à titre de dommages et intérêts,
- 13 300 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 18 771 euros au titre du préavis,
- 1 877 euros au titre des congés payés sur préavis,
- 6 797,88 euros au titre de la mise à pied
- 679,78 euros au titre des congés payés y afférents,
- condamné la société Pros, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, à payer à M. [B] la somme de 1 500 euros sur le fondernent de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné à la société Pros, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, de refaire les bulletins de paye ainsi que l'attestation pôle emploi, le tout sans astreinte,
- ordonné l'exécution provisoire dans la limite de 9 mois, soit 61 020 euros plus les intérêts de droit,
- jugé qu'il n'y a pas lieu de transmettre au procureur de la République le présent jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné la société Pros, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités aux entiers dépens.
Le 15 mars 2021, M. [B] a interjeté appel du jugement, énonçant dans sa déclaration les chefs critiqués du jugement.
Dans ses dernières écritures en date du 20 septembre 2022, auxquelles il est fait expressément référence, M. [B] demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel de M. [B],
- recevoir M. [B] en ses conclusions et l'y déclarer bien-fondé.
Sur le licenciement pour faute grave de M. [B],
à titre principal, sur la nullité du licenciement :
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de ses demandes au titre de la nullité de son licenciement,
- juger que le licenciement de M. [B] est nul.
En conséquence, et statuant à nouveau :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] la somme de 75 600,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
A titre subsidiaire, sur l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement :
- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. [B] comme dénué de cause réelle et sérieuse,
- infirmer le jugement en ce qu'il a octroyé la somme de 43 799 euros au lieu de 44 100 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence, et statuant à nouveau :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] la somme de 44 100,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A titre infiniment subsidiaire, sur la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [B] aux torts exclusifs de la société Pros :
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société Pros si le licenciement nul et à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ne serait pas retenu,
- prononcer la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [B] aux torts exclusifs de la société Pros,
- juger que la rupture du contrat de travail de M. [B] produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence et statuant à nouveau :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] la somme de 44 100,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause :
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Pros France aux sommes suivantes :
- 13 300,00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 18 900,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 890,00 euros au titre des congés payés y afférents,
- 6 797,88 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 679,78 euros au titre des congés payés y afférents.
En conséquence :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] les sommes de :
- 13 300,00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 18 900,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 890,00 euros au titre des congés payés y afférents,
- 6 797,88 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 679,78 euros au titre des congés payés y afférents.
Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de ses autres demandes.
En conséquence, et statuant à nouveau :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 300 093,98 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires impayées et repos compensateur, outre 30 009,40 euros au titre des congés payés y afférents,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 96 892,38 euros à titre d'indemnité compensatrice en repos obligatoire, outre 9 689,23 euros au titre des congés payés y afférents,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 37 544,64 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 2 473,00 euros à titre de dommages et intérêts compensant huit journées de congés payés manquantes en 2015,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 7 215,00 euros à titre de complément salaire pour les jours fériés et les jours de RTT,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 7 200,00 euros à titre d'indemnité d'occupation de télétravail (200 euros / mois),
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 50 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales de travail,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 100 000,00 euros à titre de dommages intérêts pour violation de l'obligation de sécurité et d'exécution de bonne foi du contrat de travail,
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 142 000,00 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice moral.
En tout état de cause:
- confirmer le débouté des demandes reconventionnelles de la société Pros de première instance.
A titre principal :
- infirmer le jugement querellé en ce qu'il a limité le quantum sollicité au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la première instance.
En conséquence et statuant à nouveau :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.
A titre subsidiaire :
- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société Pros au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la première instance.
En cause d'appel :
- condamner la société Pros France à verser à M. [B] 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Pros France aux entiers dépens de l'instance,
- ordonner la remise d'un bulletin de salaire et des documents sociaux rectifiés sous astreinte de 50,00 euros par document et par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir et se réserver le droit de liquider l'astreinte,
- ordonner le versement des intérêts de droit à compter de l'introduction de la demande et l'anatocisme,
- ordonner la transmission du jugement à intervenir et du plumitif au procureur de la République, M. Dominique Alzeari.
Il soutient que le licenciement est nul dès lors qu'il a été prononcé à raison de son action en justice et donc en violation d'une liberté fondamentale. Subsidiairement, il considère que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. À titre infiniment subsidiaire, il invoque une résiliation du contrat aux torts de l'employeur. Il se prévaut de manquements au titre de l'exécution du contrat et tout d'abord de la nullité de la convention de forfait exprimée en jours. Il en déduit des rappels de salaires au titre d'heures supplémentaires, de jours fériés et RTT, des indemnités au titre de contrepartie obligatoire en repos, une indemnité pour travail dissimulé ainsi que des dommages et intérêts pour non respect des durées de travail, pour manquement à l'obligation de sécurité et de loyauté et pour préjudice moral. Il sollicite enfin une indemnité compensatrice de télétravail.
Dans ses dernières écritures en date du 3 octobre 2022 auxquelles il est fait expressément référence, la société Pros France demande à la cour de :
A titre principal :
- juger recevable et bien fondé l'appel incident de la SAS Pros France.
En conséquence :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a :
- jugé que le licenciement de M. [B] est sans cause réelle et sérieuse,
- jugé la convention de forfait annuel en jours non-valide,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement entrepris dans la limite de 61 020 euros,
- condamné la société Pros France à verser à M. [B] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société Pros France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a :
- jugé que la résiliation judiciaire et la nullité du licenciement sont injustifiées,
- débouté M. [B] du surplus de ses demandes,
- jugé qu'il n'y a pas lieu de transmettre le jugement entrepris au procureur de la République.
Et statuant à nouveau :
- juger que Ie licenciement de M. [B] repose sur une faute grave,
- ordonner le remboursement de la somme totale de 61 020 euros versée à titre provisoire en exécution du jugement ainsi infirmé,
- juger que la convention de forfait en jours conclue entre la société et M. [B] est valide,
- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [B] à verser à la société la somme de 3 500 euros sur fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [B] aux entiers dépens.
A titre subsidiaire :
- juger recevable et bien-fondé l'appel incident de la société Pros France.
En conséquence :
- infirmer ie jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a :
- jugé que le licenciement de M. [B] est sans cause réelle et sérieuse,
- condamné Ia société Pros France à verser à M. [B] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société Pros France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- jugé que Ia résiliation judiciaire et la nullité du licenciement sont injustifiées,
- débouté M. [B] du surplus de ses demandes,
- jugé qu'il n'y a pas lieu de transmettre Ie jugement entrepris au procureur de la République.
En conséquence, et statuant à nouveau :
- juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,
- ordonner le remboursement de la somme de 43 799 euros versée à titre provisoire en exécution du jugement ainsi infirmé,
- juger que toutes les pièces, prétentions et/ou demandes relatives à un rappel de salaire antérieur au 17 septembre 2015 sont irrecevables en raison de la prescription,
- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes formulées au titre de l'exécution du contrat de travail,
- ordonner le remboursement des jours de repos ou jours de réduction du temps de travail dont M. [B] a bénéficié au titre de sa convention de forfait annuel en jours privée d'effet, soit la somme de 11 781,34 euros,
- condamner M. [B] à verser à la société la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [B] aux entiers dépens.
A titre infiniment subsidiaire :
- débouter M. [B] de sa demande de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,
- débouter M. [B] de sa demande de résiliation judiciaire.
A titre encore plus subsidiaire :
- réduire l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 18 772 euros.
Elle estime que la faute grave est justifiée ou que subsidiairement le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. À titre plus subsidiaire, elle s'oppose à la demande de nullité et de résiliation du contrat. Quant à l'exécution du contrat, elle soulève l'irrecevabilité des demandes de rappels de salaire pour la période antérieure au 17 septembre 2015. Sur le fond, elle considère que la convention de forfait exprimée en jours était valable et subsidiairement conteste l'existence d'heures supplémentaires mais sollicite la répétition des sommes dues au titre des jours de RTT découlant de la convention de forfait. Elle s'oppose à toutes les autres demandes indemnitaires.
La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 4 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur le 15 octobre 2018, soit antérieurement au prononcé du licenciement le 16 novembre 2018. Ainsi, en principe et contrairement aux énonciations erronées du jugement, il convenait de statuer en premier lieu sur la demande de résiliation judiciaire. Toutefois, la cour est saisie dans les termes du dispositif des écritures des parties. Or, l'appelant discute à titre principal le licenciement et n'expose ses griefs au soutien de la demande de résiliation qu'à titre subsidiaire de sorte qu'il convient d'envisager d'abord la question du licenciement.
Il en est en premier lieu soutenu la nullité, M. [B] considérant que l'employeur a prononcé cette mesure à raison de sa saisine en résiliation et donc en violation de la liberté fondamentale d'agir en justice.
Toutefois, la lettre de licenciement ne fait aucune référence à cette procédure étant rappelé qu'à la date de la saisine, M. [B] était déjà convoqué à un entretien préalable et mis à pied à titre conservatoire. Certes, le licenciement n'était pas prononcé mais l'employeur considérait déjà avoir des griefs et aucun élément ne permet, à partir d'une telle chronologie, de retenir que le licenciement constituerait une mesure de rétorsion. Il n'est donc pas justifié de la violation d'une liberté fondamentale de sorte que la nullité n'est pas encourue.
Le licenciement a été prononcé pour faute grave. Celle-ci se définit comme un fait ou un ensemble de faits, personnellement imputables au salarié, constituant une violation d'une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline de l'entreprise, d'une gravité telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise.
Lorsque l'employeur retient la qualification de faute grave, il lui incombe d'en rapporter la preuve et ce dans les termes de la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, la lettre de licenciement est ainsi motivée :
Nous avons découvert le 5 octobre 2018. que vous aviez supprimé l'intégralité des e-mails (entrants et sortants) de votre messagerie professionnelle jusqu'au 7 septembre 2018 (à l'exception d'un unique email en date du 31 août 2018, et d'un dossier client), ainsi que l'ensemble de vos correspondances sur Ie chat de la société jusqu'à cette même date.
Après enquête, il ressort des informations recueillies par le département IT que vous avez procédé à la suppression de ces e-mails les 7 et 8 septembre 2018.
Ainsi, ont été supprimés tous vos échanges d'e-mails avec vos collègues et vos supérieurs hiérarchiques, ainsi que tous les fichiers correspondants, mais aussi et surtout tous vos échanges d'e-mails avec les clients de Ia société.
Nous vous rappelons que votre messagerie professionnelle contient un grand nombre
d'informations confidentielles et stratégiques concernant les clients et les prospects de la société, ainsi que la politique commerciale de la société et du Groupe dont elle fait partie.
Cette suppression est d'autant plus grave compte tenu de votre qualité d'ingénieur d'affaires au sein de notre société - en effet, vous êtes en contact direct et quotidien avec les clients et Ies prospects de la société, et vous avez largement accès aux savoir-faire, aux techniques, aux pratiques commerciales et aux secrets commerciaux de la société.
Nous vous rappelons que votre messagerie professionnelle appartient à Pros, et que la suppression de vos e-mails professionnels est susceptible de nuire gravement à nos intérêts.
En particulier, la société doit pouvoir accéder à tout moment aux informations et échanges d'e-mails concernant ses clients.
Lors de votre entretien préalable qui s'est tenu le 23 octobre 2018, vous nous avez indiqué avoir procédé à l'archivage de vos emails professionnels. Nous vous rappelons que cet archivage en dehors des systèmes d'information de l'entreprise est non seulement interdit par les règles internes de la société, mais ne permet pas d'expliquer ni de justifier pourquoi vous ne nous avez pas informés immédiatement de la suppression de la quasi-intégralité de vos emails.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, nous n'avons d'autre choix que de procéder à votre licenciement pour faute grave, les faits qui vous sont reprochés rendant impossible votre maintien dans l'entreprise.
Les parties s'opposent sur la notion de courriers professionnels ou personnels. Cette notion n'est pas en l'espèce pertinente. Il est fait état à la fois de la messagerie professionnelle et de la messagerie instantanée, étant toutefois observé qu'aucun élément n'est donné d'où il résulterait que ce dernier outil, mis à disposition comme le premier à titre professionnel, ait pu être utilisé à des fins personnelles. Le débat tient à la destruction de courriers et messages, dont aucun n'est donc produit, et rien ne permet de les identifier comme personnels. La question est en revanche de déterminer si les différents échanges ont fait l'objet d'une destruction par le salarié et, dans l'affirmative, si cette destruction était fautive dans des conditions justifiant la rupture.
Il est exact que la position de M. [B] a pu être quelque peu confuse puisqu'il a fait état d'un archivage puis du fait que la suppression n'était pas établie de sorte qu'il n'avait pas à s'émouvoir de l'absence de messages.
Des échanges entre le responsable des ressources humaines et le service informatique produits par l'employeur, il résulte que M. [B] a effectivement supprimé ses courriers sans qu'on dispose cependant de précision sur la part des courriers électroniques et la part des échanges instantanés. Il apparaît ainsi que la boîte était vide, ainsi que la corbeille et il n'apparaît aucun archivage dont M. [B] ne précise d'ailleurs pas le chemin d'accès. La suppression est intervenue les 7 et 8 septembre 2018 et à supposer l'intervention d'un tiers, qui ne pourrait être qu'un administrateur informatique compte tenu des accès, M. [B] qui travaillait de manière effective à cette date se serait nécessairement à tout le moins étonné d'une telle configuration.
Mais le problème tient aux conséquences de la suppression. En effet, aucun élément n'est donné par l'employeur sur la nature des fichiers supprimés. Il est certain que cette nature peut n'être qu'imparfaitement connue puisqu'il est question de fichiers détruits. Mais certains, ceux supprimés depuis moins de 30 jours, ont pu être récupérés (Pièce 17). Or aucun élément n'est donné sur leur caractère important ou même utile pour la société. La messagerie est certes un outil de travail mais il n'est pas précisé quels fichiers auraient ensuite manqué à la société. La cour observe que la messagerie, à la différence des fichiers professionnels de travail, n'est pas nécessairement transférée à un autre salarié quand son titulaire quitte la société. Cela pose d'autant plus un problème en termes d'appréciation disciplinaire qu'il existait un dispositif de destruction automatique après un certain délai et que les pièces produites par l'employeur sur la politique de conservation des données ne peuvent être retenues comme produites en anglais et non traduites. Un tel dispositif suppose que les données de travail soient stockées à un autre endroit, la messagerie ne pouvant être destinée à un tel usage, et il n'est pas invoqué d'autre destruction que celle des messages. En d'autres termes à défaut de tout élément, ne serait-ce que sous forme d'exemple, sur les conséquences concrètes pour l'employeur de la destruction des messages (courrier de relance de clients ou fournisseurs, retard, temps passé...), cette suppression, même intempestive, ne pouvait constituer un motif de rupture que ce soit sur le terrain de la faute grave ou de la cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences, M. [B] qui ne réintègre pas sa demande au titre d'heures supplémentaires dans sa base de calcul invoque un salaire de 6 300 euros. Au regard des énonciations de l'attestation Pôle emploi et alors que les indemnités de rupture ont été calculées par les premiers juges sur la base d'un salaire de 6 257 euros sans être remises en cause devant la cour c'est ce montant qui sera retenu.
Il en résulte que M. [B] peut prétendre aux indemnités de rupture (indemnité de préavis, congés payés afférents, rappel de salaire pendant la mise à pied, congés payés afférents et indemnité de licenciement) pour les sommes retenues par les premiers juges et dont le quantum n'est pas spécialement discuté. Le jugement sera confirmé sur ce point.
M. [B] peut également prétendre à des dommages et intérêts. Il sollicite sur la base de 7 mois de salaire correspondant au plafond d'indemnisation la somme de 44 100 euros alors qu'à titre subsidiaire l'employeur considère que la somme devrait être réduite au plancher soit 18 772 euros. Il convient de tenir compte de l'ancienneté qui était la sienne (6 ans), des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail mais également du fait que M. [B] ne donne aucun élément sur sa situation postérieure au licenciement et que l'employeur justifie qu'il a retrouvé très rapidement un emploi. Compte tenu de ces éléments, il y a lieu à réformation du jugement sur le montant des dommages et intérêts qui sera fixé à 30 000 euros.
Il y aura lieu à remboursement des indemnités Pôle Emploi dans les conditions précisées au dispositif.
La question de la résiliation du contrat devient sans objet.
Sur l'exécution du contrat, il convient de reprendre chacune des demandes.
La convention de forfait,
M. [B] était cadre autonome et l'employeur se prévaut des dispositions de la convention collective, postérieures au contrat, mettant le dispositif en conformité avec les exigences légales et jurisprudentielles. Il ajoute exactement que l'avenant du 1er avril 2014 s'applique aux contrats en cours. Mais si l'employeur se prévaut des énonciations de l'annexe sur les obligations de M. [B] quant à la déclaration des jours travaillés et quant au respect des jours de repos, il ne justifie pas avoir satisfait aux garanties prévues par l'avenant en son article 4.8 et satisfaisant aux dispositions de l'article L. 3121-64 du code du travail. En particulier, il ne justifie d'aucun entretien sur la charge et l'organisation du travail ainsi que sur l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie privée.
La convention de forfait est donc inopposable au salarié.
Le débat est ainsi celui des heures supplémentaires, le salarié relevant dès lors du régime général du temps de travail. Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Ainsi, si la charge de la preuve est partagée en cette matière, il appartient néanmoins au salarié de présenter à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
L'employeur oppose tout d'abord une fin de non-recevoir tirée de la prescription pour la période antérieure au 16 octobre 2015 (dans les motifs) ou au 17 septembre 2015 dans le dispositif. La saisine du conseil de prud'hommes est intervenue le 15 octobre 2018,étant rappelé que le salaire est exigible en fin de mois de sorte que la prescription apparaît acquise pour la période antérieure au 1er octobre 2015.
Au fond, l'employeur considère que les éléments versés aux débats par le salarié seraient insuffisamment précis.
Les documents produits par le salarié sont certes pour partie imparfaits. Il n'en demeure pas moins qu'il présente un tableau récapitulatif faisant figurer le nombre d'heures supplémentaires qu'il prétend avoir accompli chaque année. Il y ajoute des tableaux semaine par semaine pour les années 2012, 2013 et 2014, lesquelles ne peuvent ouvrir droit à rappel de salaire puisque prescrites mais également pour le premier semestre 2018 ainsi que pour l'année 2017.
Il produit également des liasses de mails comprenant leur horaire d'envoi pour justifier de la réalité de son temps de travail.
Il est exact qu'il ne produit pas de tableau semaine par semaine pour l'année 2016 et la partie non prescrite de l'année 2015. Mais il n'en demeure pas moins que les documents, dans leur globalité, sont suffisamment précis pour permettre un débat contradictoire.
Il est exact au regard de ces éléments que M. [B], qui présente un temps de travail finalement assez uniforme sur la période, raisonne davantage en amplitude qu'en temps effectif. L'analyse des courriers électroniques qu'il produit telle que faite par l'employeur est certes éclairante de ce chef. Cependant, la cour ne saurait considérer comme l'employeur qu'un courrier électronique dès lors qu'il ne comprend que quelques mots ou ne correspond qu'à l'acceptation d'un rendez-vous est inopérant. Il constitue bien un travail effectif.
En revanche, il apparaît que M. [B] qui invoque des journées de travail d'environ 11 heures ou 12,4 heures pour l'année 2018 ne tient pas compte d'une pause méridienne et ne tient pas davantage compte de l'autonomie qui était la sienne. Or, l'employeur justifie qu'il faisait état de contraintes personnelles certains mercredis (garde d'enfants) ou à certaines occasions pour ne pas travailler au delà de 18 heures. Il est également justifié de temps personnel pour des visites immobilières alors que ce temps est considéré par le salarié comme du temps de travail. Enfin, le décompte général de M. [B] présente des arrondis, toujours en sa faveur.
Compte tenu de la confrontation de ces éléments la cour retient des heures supplémentaires, sur la partie non prescrite, soit à compter du mois d'octobre 2015 réalisées à raison d'un travail effectif de 8 heures par jour travaillé en admettant le nombre de jours mentionnés par M. [B] dans son décompte faute de plus ample élément.
Le volume d'heures supplémentaires s'établit donc ainsi :
- 2018 : 32 heures supplémentaires,
- 2017 : 340 heures supplémentaires,
- 2016 : 340 heures supplémentaires,
- 2015 (partie non prescrite) : 85 heures supplémentaires.
Il y a lieu à majoration de ces heures à hauteur de 25% au regard du volume retenu par la cour. Cette majoration doit se faire sur la base du taux horaire de 38,84 euros puisque compte tenu de l'inopposabilité de la convention de forfait le salaire fixe devait correspondre au temps de travail de151h67 par mois. En effet, M. [B] ne saurait modifier ce taux en y incluant la part variable de sa rémunération laquelle dépendait de la réalisation d'objectifs. Chaque heure supplémentaire doit ainsi être rémunérée à hauteur de 48,55 euros. Il est donc dû la somme de 38 694,35 euros outre celle de 3 869,43 euros au titre des congés payés afférents.
La contrepartie obligatoire en repos pour les heures excédant le contingent,
Il n'existe des dispositions conventionnelles à ce titre que pour les ETAM alors que M. [B] était cadre de sorte que c'est le contingent réglementaire de 220 heures qui s'applique.
Contrairement aux affirmations de l'employeur, ce contingent a bien été dépassé au regard des heures retenues par la cour. Il ouvre droit à une contrepartie à 100%, n'étant pas contesté que la société emploie plus de 20 salariés. Le salarié n'ayant pu faire valoir son droit au repos compensateur la contrepartie ne peut qu'être financière et calculée en application des dispositions de l'article D. 3121-23 du code du travail. Cette indemnité doit comprendre la somme qu'aurait perçue le salarié s'il avait pris son repos et le montant des congés payés afférents. Elle doit donc être calculée, compte tenu du taux horaire de 38,84 euros majoré de 10% sur la base de 42,72 euros. Il est ainsi dû pour les 240 heures excédant le contingent la somme de 10 252,80 euros sans qu'il y ait lieu d'ajouter une seconde fois une indemnité de congés payés.
Les dommages et intérêts pour non-respect des durées quotidiennes et hebdomadaires de travail,
La cour admet des heures supplémentaires pour un nombre moins important que revendiqué par le salarié. Elle les admet cependant dans des conditions excédant très largement le contingent et avec des amplitudes journalières qui n'ont pas dépassé la durée de l'article L.3121-18 du code du travail mais des amplitudes hebdomadaires qui ont elles excédé la durée de l'article L.3121-20. Cela est en particulier le cas dès lors que le salarié a travaillé à certaines occasions plus de 5 jours sur une même semaine. Il existe donc bien de ce chef un manquement de l'employeur qui est défaillant sur le terrain probatoire. Ce manquement a causé un préjudice au salarié ne serait-ce qu'en le privant des durées minima de repos et donc en lui occasionnant une fatigue accrue. M. [B] est cependant fort peu démonstratif dans sa demande indemnitaire qu'il chiffre à 50 000 euros ce qui est manifestement très excessif. Au regard du volume d'heures retenu la cour fixera à 3 000 euros le montant des dommages et intérêts dus à ce titre.
Le travail dissimulé,
Si la convention de forfait est certes inopposable au salarié et si la cour en a tiré les conséquences en termes de rappels d'heures supplémentaires, ce seul fait est insuffisant pour caractériser une dissimulation intentionnelle d'emploi salarié par dissimulation des heures de travail, étant rappelé la grande autonomie qui était celle du salarié et son absence de toute alerte auprès de l'employeur.
La demande indemnitaire sur ce fondement ne peut qu'être rejetée.
Les dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de loyauté,
Les premiers juges n'ont pas spécialement statué sur cette prétention.
M. [B] sollicite à ce titre une somme de 100 000 euros en réparation d'un préjudice distinct de celui né de la rupture. Il invoque de manière globale un surinvestissement dans le travail mais également une mise à l'écart. Il ne vise toutefois aucune pièce à l'appui de ses allégations qui serait de nature à les étayer étant rappelé qu'il n'avait jamais alerté sur une surcharge de travail. Aucun élément n'est donné sur la réunion à laquelle il n'a pas été convié permettant de retenir que sa présence aurait été utile. Quant à son divorce, rien ne permet de rattacher au travail cette circonstance relevant de sa vie privée. Les seules pièces qu'il invoque tiennent à la rupture conventionnelle. Or le seul fait de la proposer ne saurait être fautif de la part de l'employeur alors que M. [B] a refusé de la signer en considérant l'indemnité proposée comme insuffisante, ce qui relève de la simple liberté contractuelle. Il n'apporte pas davantage d'élément pour justifier du préjudice invoqué. Cette demande ne peut qu'être rejetée.
La non prise des congés payés,
M. [B] sollicite à titre de dommages et intérêts, une somme de 2 473 euros pour la non prise de congés payés. Il invoque des congés auxquels il pouvait prétendre en 2015. Mais en réalité l'employeur fait exactement observer qu'il s'agissait de congés acquis sur la période 2014-2015 de sorte qu'ils auraient dû être pris avant le 31 mai 2015. Alors que la prescription est triennale en la matière et même en tenant compte d'une tolérance dans l'entreprise jusqu'à l'été suivant la période, il n'en demeure pas moins que compte tenu de la date de saisine, c'est à juste titre que l'employeur oppose la prescription. La demande, sur laquelle les premiers juges n'ont pas spécialement statué, est donc irrecevable.
Le rappel de salaire au titre des jours fériés et des RTT,
Les premiers juges n'ont pas spécialement statué sur cette prétention.
Il est sollicité de ce chef par le salarié une somme de 7 215 euros à titre de complément de salaire alors que l'employeur prétend à la répétition des sommes versées en exécution de la convention de forfait. De ce chef, l'appelant fait valoir qu'il n'aurait été indemnisé que par référence à son salaire fixe sans prise en compte de la part variable de la rémunération. Il apparaît cependant en premier lieu que les primes n'étaient pas affectées par l'absence du salarié pour jour férié de sorte qu'il n'y a pas à les prendre en compte. S'agissant des RTT, il convient de tirer les conséquences de ce que la convention de forfait exprimée en jour est privée d'effet. Ainsi, l'employeur est bien fondé à obtenir la répétition de la somme de 11 781,34 euros, dont le quantum n'est pas spécialement discuté, versée en exécution des jours découlant de cette convention. M. [B] sera ainsi débouté de sa demande et condamné à la répétition de cette somme.
L'indemnité pour télé travail,
Les premiers juges n'ont pas spécialement statué sur cette prétention.
Il est certain que le salarié a travaillé depuis son domicile. Sans donner à la cour une quelconque explication sur le quantum sollicité, M. [B] demande paiement d'une somme de 7 200 euros, soit 200 euros par mois dans les limites de la prescription.
Il soutient qu'il a été contraint de travailler à son domicile à la fois à raison d'une carence de locaux professionnels et pour pouvoir se consacrer à son activité dans de bonnes conditions. S'il n'est pas contesté qu'il a systématiquement travaillé depuis son domicile, aucun élément ne vient étayer l'affirmation selon laquelle ceci aurait découlé d'une volonté de l'employeur ou même d'une nécessité contrainte à raison d'une absence de mise à disposition d'un local professionnel de manière permanente. Il résulte toutefois des écritures de l'intimée que pendant la période de novembre 2015 à juin 2016, soit 8 mois, les locaux professionnels étaient indisponibles. Pendant cette période, le télétravail s'imposait donc à M. [B] et il convient de lui allouer, à défaut de plus ample élément, une somme mensuelle de 100 euros que l'employeur admet avoir réglée à une autre salariée. La société Pros sera donc condamnée au paiement de la somme de 800 euros à ce titre.
Les dommages et intérêts pour préjudice moral,
Sans donner aucun élément de nature à quantifier le préjudice moral qu'il invoque, M. [B] sollicite la somme de 142 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral distinct de celui né de la rupture. Il ne produit aucune pièce de nature à établir des circonstances brutales ou vexatoires à son éviction et un préjudice en découlant. Il invoque une conversation téléphonique avec son conseil, qui ne saurait constituer une preuve et son éviction d'une réunion sans l'étayer.
Cette demande, sur laquelle les premiers juges n'ont pas spécialement statué, ne peut qu'être rejetée.
Sur les autres demandes,
M. [B], sans s'expliquer aucunement, sollicite la transmission du 'jugement' au procureur de la République de Toulouse, nommément désigné dans les conclusions. Aucun élément ne justifie une telle transmission alors qu'à aucun moment M. [B] n'a entendu déposer une plainte pénale. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Les sommes en nature de salaire porteront intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2018, date de réception de la convocation en bureau de conciliation. Les sommes en nature de dommages et intérêts porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Il y aura lieu à capitalisation de ces intérêts par année entière à compter du 19 octobre 2018.
Il y aura enfin lieu à remise des documents sociaux rectifiés dans les termes du présent jugement sans qu'il convienne à ce stade d'ordonner une astreinte.
L'action de M. [B] était pour partie bien fondée il y a lieu à confirmation du jugement sur le sort des frais et dépens de première instance. L'appel étant pour partie bien fondé la société Pros sera condamnée au paiement d'une indemnité complémentaire de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens et aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse du 4 février 2021 en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [B] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la SAS Pros France à lui payer les sommes de :
- 13 300 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 18 771 euros au titre du préavis,
- 1 877 euros au titre des congés payés sur préavis,
- 6 797,88 euros au titre de la mise à pied
- 679,78 euros au titre des congés payés y afférents,
- 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
rejeté la demande de transmission du jugement au procureur de la République et statué sur les dépens,
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,
Déclare irrecevables les demandes en nature de salaire pour la période antérieure au mois d'octobre 2015 et la demande au titre des congés payés non pris,
Condamne la SAS Pros France à payer à M. [B] les sommes de :
- 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 38 694,35 euros à titre de rappels de salaire pour heures supplémentaires,
- 3 869,43 euros au titre des congés payés afférents,
- 10 252,80 euros comprenant les congés au titre de la contrepartie en repos,
- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées hebdomadaires maximum de travail,
- 800 euros à titre d'indemnité pour télétravail,
Condamne M. [B] à restituer à la SAS Pros France la somme de 11 781,34 euros au titre des jours de RTT octroyés en exécution de la convention de forfait privée d'effet,
Ordonne le remboursement par l'employeur des indemnités Pôle Emploi dans la limite de quatre mois,
Dit que les sommes en nature de salaire porteront intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2018 et les sommes en nature de dommages et intérêts à compter du présent arrêt,
Ordonne la capitalisation de ces intérêts par année entière à compter du 19 octobre 2018,
Déboute M. [B] du surplus de ses demandes,
Condamne la SAS Pros France à payer à M. [B] la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Pros France aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.
La greffière La présidente
A. Raveane C. Brisset.