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18/11/2022 | FRANCE | N°20/01068

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 18 novembre 2022, 20/01068


18/11/2022



ARRÊT N°2022/489



N° RG 20/01068 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NQ73

CP/PG



Décision déférée du 13 Février 2020 -

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/00504)



A. GITTON

Section Encadrement

















[X] [C]





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INFIRMATION PARTIELLE







Grosses délivrées



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à

Me Gilles SOREL

Me Florence VAYSSE-AXISA



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à

Me Gilles SOREL

Me Florence VAYSSE-AXISA



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1...

18/11/2022

ARRÊT N°2022/489

N° RG 20/01068 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NQ73

CP/PG

Décision déférée du 13 Février 2020 -

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/00504)

A. GITTON

Section Encadrement

[X] [C]

C/

SAS NESTLE HEALTH SCIENCE FRANCE

INFIRMATION PARTIELLE

Grosses délivrées

le18/11/2022

à

Me Gilles SOREL

Me Florence VAYSSE-AXISA

ccc

le18/11/2022

à

Me Gilles SOREL

Me Florence VAYSSE-AXISA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [X] [C]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Florence VAYSSE-AXISA de la SCP VAYSSE-LACOSTE-AXISA, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SAS NESTLE HEALTH SCIENCE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Thomas AMARAL de la SCP CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant , M. DARIES, conseillère, et C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de  :

S. BLUMÉ, présidente

M. DARIES, conseillère

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

lors du prononcé : A.RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par S. BLUME, présidente, et par A.RAVEANE, greffière de chambre

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] [C] a été embauchée le 23 janvier 2012 par la société Nestlé Clinical Nutrition, devenue SAS Nestlé Health Science France, en qualité de déléguée médicale suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique.

La société Nestlé Health Science France qui appartient au groupe Nestlé élabore des solutions nutritionnelles pour renforcer le processus de guérison et améliorer la santé et la qualité de vie.

Par avenant applicable à compter du 1er mai 2013, Mme [C] a exercé les fonctions de 'déléguée hôpital' sur les départements 09,11,12,19,31,32,46,65,81et 82.

Le 14 février 2017, la société Nestlé Health Science France a conclu avec les organisations syndicales représentatives du personnel un accord de mobilité interne.

Le 1er avril 2017, Mme [C] a été convoquée à un entretien collectif de concertation 'dans le cadre de la mise en oeuvre du projet d'accompagnement de la croissance de NHS France'.

Le 2 mai 2017, la société Nestlé Health Science France a reçu Mme [C] en entretien individuel de concertation sur les mesures de mobilité envisagées et les mesures d'accompagnement à ces mesures de mobilité.

Par lettre du 4 mai 2017, la société Nestlé Health Science France a proposé à Mme [C] à compter du 1er juillet 2017 une modification de son contrat de travail avec mobilité professionnelle et géographique sur un poste de 'déléguée pédiatrie' à exercer dans les départements suivants : 09,11, 24, 31,32,33, 40, 46,47,64,65,81et 82.

Après échanges de courriers, Mme [C] a refusé, par lettre du 6 juin 2017 cette proposition.

A la suite de ce refus, le 10 juillet 2017, la société Nestlé Health Science France a proposé à Mme [C] deux offres de reclassement interne sur son poste de 'déléguée hôpital' sur deux secteurs géographiques distincts situés dans le nord et l'est de la France, offres refusées par Mme [C].

Mme [C] a été convoquée par courrier du 25 août 2017 à un entretien préalable au licenciement et licenciée par courrier du 3 octobre 2017 pour motif économique consistant dans le refus de proposition de mobilité, puis de reclassement interne, opposé par Mme [C], cette proposition ayant été formulée par la société Nestlé Health Science France dans le cadre de la mise en oeuvre du projet d'accompagnement et de l'accord de mobilité du 14 février 2017.

Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse le 3 avril 2018 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Par jugement du 13 février 2020, le conseil de prud'hommes de Toulouse a :

-dit que l'accord de mobilité signé le 14 février 2017 est valide,

-dit que le licenciement individuel pour motif économique de Madame [C] est justifié,

-débouté Madame [C] de toutes ses demandes,

-dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Madame [C] aux dépens.

Par déclaration du 27 mars 2020, Mme [C] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 27 février 2020, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 26 juin 2020, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [X] [C] demande à la cour de :

-réformer le jugement,

-condamner la société Nestlé Health Science France à lui payer :

*80 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 15 septembre 2020, auxquelles il est expressément fait référence, la SAS Nestlé Health Science France demande à la cour de :

-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

-en conséquence, débouter Mme [C] de l'intégralité de ses demandes,

-condamner Mme [C] à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-à défaut, débouter Mme [C] du montant de ses demandes.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 30 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la validité de l'accord de mobilité du 14 février 2017 et sur son opposabilité à Mme [C]

Mme [C] soutient que l'accord de mobilité du 14 février 2017 n'est pas valide car il ne remplit pas la condition de majorité, d'effectif, la société ne comprendrait que 175 salariés à défaut de preuve d'appartenance à un groupe, et de contenu (zone

géographique imprécise, pas de garantie de maintien du niveau de rémunération et de

la qualification professionnelle). Cet accord est inopposable à la salariée faute d'avoir été porté à sa connaissance, l'information collective réalisée n'étant pas suffisante.

La société Nestlé Health Science France demande à la cour de déclarer valide cet accord de mobilité parfaitement conforme aux conditions posées par l'article L. 2242-13 du code du travail : la société appartient à un groupe de plus de 300 salariés, ce dernier dispose d'un comité de groupe, ledit accord est majoritaire et sa mise en place s'inscrit dans le cadre de la négociation triennale indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise.

S'agissant de son contenu, la zone de mobilité a été précisée, la classification de la salariée ainsi que son salaire de base ont été maintenus. La société n'était pas tenue de contractualiser le montant de sa rémunération variable avant la mobilité de la salariée au risque de le rendre sans lien avec l'accomplissement de ses objectifs. Cet accord a été porté à la connaissance de Mme [C] qui ne justifie pas de la prétendue inopposabilité de l'accord.

Il appartient à la cour saisie de demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de statuer sur les contestations formées par Mme [C] sur la validité et l'opposabilité à la salariée de l'accord de mobilité du 14 février 2017 sur le fondement duquel la société Nestlé Health Science France a proposé à Mme [C] la modification de son contrat de travail, modification refusée par la salariée dans des conditions rappelées dans l'exposé du litige, ce qui a entraîné, après son refus des offres de reclassement de la société Nestlé Health Science France , son licenciement.

L'accord de mobilité du 14 février 2017 versé aux débats par la société intimée a été conclu entre la société Nestlé Health Science France et quatre organisations syndicales, le syndicat CFDT, le syndicat CFE-CGC, le syndicat CGT et le syndicat UNSA par application de l'article L. 2242-17 du code du travail ; il a pour objet d'organiser la mobilité géographique et professionnelle de certains salariés visés par l'accord.

Il est rappelé les dispositions des articles L. 2242-13 et 17 du code du travail qui constituent le cadre légal dans lequel certaines sociétés étaient autorisées à conclure avec les organisations syndicales représentatives des accords de mobilité :

L'article 2242-13 disposait, dans sa version en vigueur du 01 janvier 2016 au 24 septembre 2017, :

'Dans les entreprises et les groupes d'entreprises au sens de l'article L. 2331-1 d'au moins trois cents salariés, ainsi que dans les entreprises et groupes d'entreprises de dimension communautaire au sens des articles L. 2341-1 et L. 2341-2 comportant au moins un établissement ou une entreprise de cent cinquante salariés en France, l'employeur engage tous les trois ans, notamment sur le fondement des orientations stratégiques de l'entreprise et de leurs conséquences mentionnées à l'article L. 2323-10, une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers portant sur :

...

2° Le cas échéant, les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise prévue à l'article L. 2242-21, qui doivent, en cas d'accord, faire l'objet d'un chapitre spécifique ;

Les articles L. 2242-17, 18 et 19 poursuivaient ainsi, dans leur version en vigueur du 01 janvier 2016 au 24 septembre 2017, :

article L. 2242-17 : 'L'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs.

Dans les entreprises et les groupes d'entreprises mentionnés à l'article L. 2242-13, les modalités de cette mobilité interne à l'entreprise s'inscrivent dans le cadre de la négociation prévue au même article... '

article L. 2242-18 : ' L'accord issu de la négociation prévue à l'article L. 2242-17 comporte notamment :

1° Les limites imposées à cette mobilité au-delà de la zone géographique d'emploi du salarié, elle-même précisée par l'accord, dans le respect de la vie personnelle et familiale du salarié conformément à l'article L. 1121-1 ;

2° Les mesures visant à concilier la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale et à prendre en compte les situations liées aux contraintes de handicap et de santé ;

3° Les mesures d'accompagnement à la mobilité, en particulier les actions de formation ainsi que les aides à la mobilité géographique, qui comprennent notamment la participation de l'employeur à la compensation d'une éventuelle perte de pouvoir d'achat et aux frais de transport.

Les stipulations de l'accord collectif conclu au titre de l'article L. 2242-17 et du présent article ne peuvent avoir pour effet d'entraîner une diminution du niveau de la rémunération ou de la classification personnelle du salarié et doivent garantir le maintien ou l'amélioration de sa qualification professionnelle.'

article L. 2242-19 : ' L'accord collectif issu de la négociation prévue à l'article L. 2242-17 est porté à la connaissance de chacun des salariés concernés.

Les stipulations de l'accord conclu au titre des articles L. 2242-17 et L. 2242-18 sont applicables au contrat de travail. Les clauses du contrat de travail contraires à l'accord sont suspendues.

Lorsque, après une phase de concertation permettant à l'employeur de prendre en compte les contraintes personnelles et familiales de chacun des salariés potentiellement concernés, l'employeur souhaite mettre en 'uvre une mesure individuelle de mobilité prévue par l'accord conclu au titre du présent article, il recueille l'accord du salarié selon la procédure prévue à l'article L. 1222-6.

Lorsqu'un ou plusieurs salariés refusent l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne mentionnées au premier alinéa de l'article L. 2242-17, leur licenciement repose sur un motif économique, est prononcé selon les modalités d'un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ et les modalités de mise en 'uvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1.'

Il résulte des pièces versées aux débats, et notamment de l'attestation sur l'honneur du président de la société Nestlé Health Science France et de l'accord de renouvellement du comité de groupe Nestlé Entreprises, que la société Nestlé Health Science France appartient à un groupe d'entreprises comportant au moins un établissement ou une entreprise de 150 salariés en France, la société Nestlé Health Science France employant 175 salariés, comme le précise Mme [C] dans ses écritures, de sorte que la condition d'effectif posée par l'article L. 2242-13 est remplie.

L'est également la condition de l'article L. 2232-12 du code du travail relative au caractère majoritaire de cet accord d'entreprise signé par 4 organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés au premier tour des élections du 25 novembre 2015, comme en atteste le procès-verbal des résultats des élections au comité d'entreprise versé aux débats.

S'agissant du contenu de l'accord du 14 février 2017, tel que réglementé par l'article L. 2242-18, la cour estime que l'accord comporte bien :

- les limites imposées à cette mobilité au-delà de la zone géographique d'emploi du salarié, elle-même précisée par l'accord, dans le respect de la vie personnelle et familiale du salarié conformément à l'article L. 1121-1 : les articles 3.1, 3.2 et 3.3 de l'accord définissent en effet la zone géographique de mobilité interne, renvoient à la définition conventionnelle de ladite zone géographique et prévoient sa non application sur la zone hors France métropolitaine ;

- les mesures visant à concilier la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale et à prendre en compte les situations liées aux contraintes de handicap et de santé : l'article 4 prévoit les mesures d'accompagnement de la mobilité géographique avec ou sans changement de domicile et l'article 11 définit les conditions dans lesquelles le redécoupage des secteurs a été opéré, la mise en place d'un entretien de concertation à la mobilité, le passage d'une visite médicale et l'attention particulière portée aux salariés présentant une situation de handicap ;

- les mesures d'accompagnement à la mobilité, en particulier les actions de formation ainsi que les aides à la mobilité géographique, qui comprennent notamment la participation de l'employeur à la compensation d'une éventuelle perte de pouvoir d'achat et aux frais de transport ; elles sont prévues aux articles 4 et 6 de l'accord.

La cour estime, comme le conseil de prud'hommes, que l'accord du 14 février 2017 respecte les conditions légales de validité prévues aux articles précités.

S'agissant des conditions de sa mise en oeuvre, Mme [C] prétend, d'une part, que cet accord lui est inopposable comme n'ayant pas été porté à sa connaissance conformément à la loi, et, d'autre part, que la société Nestlé Health Science France n'a pas respecté la disposition de l'article L. 2242-18 dernier alinéa selon laquelle les stipulations de l'accord collectif conclu au titre de l'article L. 2242-17 et du présent article ne peuvent avoir pour effet d'entraîner une diminution du niveau de la rémunération ou de la classification personnelle du salarié et doivent garantir le maintien ou l'amélioration de sa qualification professionnelle.

La cour constate, comme le fait justement valoir la salariée appelante, que cet accord de mobilité n'a jamais été porté à la connaissance de cette dernière dans les conditions du premier alinéa de l'article L 2242-19 qui dispose : 'L'accord collectif issu de la négociation prévue à l'article L. 2242-17 est porté à la connaissance de chacun des salariés concernés'.

En effet, la société Nestlé Health Science France ne produit aucune pièce justifiant qu'elle aurait porté cet accord à la connaissance de Mme [C] : aucun courrier ou courriel ne lui a été adressé à cette fin et la société intimée est mal fondée à se prévaloir du fait qu'elle aurait affiché l'accord sur les panneaux réservés à cet effet, mis à la disposition des salariés un exemplaire de l'accord auprès du département des ressources humaines, diffusé l'accord sur l'intranet de l'entreprise, adressé un exemplaire de l'accord au greffe du conseil de prud'hommes et à la DIRECCTE, organisé une réunion d'information collective, reçu Mme [C] pour un entretien individuel, annexé à sa proposition de mobilité le livret de présentation de l'accord et avoir informé Mme [C] du contenu de l'accord lors de ses entretiens et par téléphone.

En effet, les dispositions légales sont claires en ce que l'accord collectif doit être porté à la connaissance de chacun des salariés concernés et force est de constater que la société Nestlé Health Science France ne justifie pas avoir effectivement porté cet accord à la connaissance de Mme [C], l'envoi d'extraits de l'accord et la réalisation d'entretiens avec la salariée ne constituant pas la formalité expressément prévue par la loi, laquelle était de nature à permettre à chaque salarié concerné d'avoir une parfaite connaissance des dispositions d'un accord permettant à l'employeur d'opérer des modifications d'éléments essentiels du contrat de travail, étant précisé, au demeurant, qu'elle ne justifie pas plus des conditions de l'affichage effectif de l'accord que de sa diffusion sur l'intranet de l'entreprise.

Le manquement de l'employeur à son obligation légale de porter cet accord à la connaissance de Mme [C] a pour conséquence de rendre cet accord inopposable à cette dernière, comme le soutient justement l'appelante. Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

La lettre de licenciement de Mme [C] qui fixe les limites du litige est libellée comme suit :

.'.., nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement individuel pour motif économique pour les raisons que nous rappelons ci-après :

Cette mesure s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre du projet d'accompagnement de la croissance de NHS et de l'accord de mobilité du 14 février 2017 portant sur les conditions de la mobilité interne géographique ou professionnelle dans le cadre d'une mesure collective d'organisation courante sans réduction des effectifs au sens des articles L 2242-17 et suivants du code du travail.

Le licenciement fait suite à votre refus de la proposition de mobilité, puis de reclassement interne, présentées dans ce contexte.

En effet, vous occupez le poste de délégué hôpital qui est concerné par le projet d'accompagnement de la croissance de NHS.

Dans ce cadre, vous avez été reçue lors d'un entretien de concertation qui s'est tenu le 2 mai 2017 au cours duquel vous ont été exposées les mesures de mobilité envisagées et les mesures d'accompagnement à ces mobilités.

Suite à cet entretien, vous a été proposée par courrier recommandé du 4 mai 2017, une proposition de mobilité professionnelle et/ou géographique consistant en un poste de délégué(e) pédiatrie et correspondant à une modification de votre contrat de travail.

Vous disposiez d'un délai de réflexion d'un mois pour nous faire part de votre décision.

Par courrier du 6 juin 2017, vous avez refusé cette proposition de mobilité.

Nous avons dès lors recherché toutes les possibilités de reclassement interne conformes aux dispositions de l'accord de mobilité du 14 février 2014 et vous avons proposé par courrier du 10 juillet 2017 les postes suivants ... Vous avez refusé ces postes.

Cette situation nous a donc conduit à engager la procédure de licenciement ....'

Il résulte de la lecture de cette lettre de licenciement que le licenciement a été prononcé en raison du refus de Mme [C] d'accepter la proposition de mobilité à elle faite par application de l'accord de mobilité du 14 février 2017.

Il vient d'être indiqué que cet accord était inopposable à Mme [C] de sorte que la société Nestlé Health Science France ne pouvait fonder son licenciement sur l'application de cet accord.

Il en résulte que le licenciement de Mme [C] ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse ; le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Mme [C], âgée de 50 ans au moment du licenciement, qui comptait 5 ans d'ancienneté dans une entreprise occupant plus de 10 salariés et qui percevait un salaire moyen de 6 065 €, y compris le 13ème mois, est bien fondée à solliciter des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant compris entre 3 et 6 mois de salaire en application de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 22 septembre 2017, laquelle est applicable aux licenciements prononcés postérieurement à la date de publication de l'ordonnance ; tel est le cas du licenciement de Mme [C] notifié par lettre du 3 octobre 2017.

Elle justifie avoir traversé une période de chômage jusqu'au 4 juin 2018, date à laquelle elle a été embauchée par la société Elivie en qualité de conseiller médico-technique, embauche non concluante, suivie d'une embauche par lettre du 11 juillet 2018 par la société Sandoz en qualité de déléguée médicale hospitalière moyennant une rémunération annuelle de 57 000 € sur 13 mois, outre une rémunération variable.

La cour allouera à Mme [C] la somme de 25 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fera d'office application de l'article L. 1235-4 du code du travail à hauteur de 6 mois d'indemnités de chômage.

Sur le surplus des demandes

La société Nestlé Health Science France qui perd le procès sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel et à payer à Mme [C] la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré étant infirmé sur les dépens et confirmé sur les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré valide l'accord de mobilité signé le 14 février 2017 et en sa disposition sur les frais irrépétibles et l'infirme sur le surplus,

statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que le licenciement de Mme [P] [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Nestlé Health Science France à payer à Mme [C] la somme de 25 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne le remboursement par la société Nestlé Health Science France des allocations de chômage versées à Mme [C] du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de 6 mois d'indemnités,

Condamne la société Nestlé Health Science France aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par A.RAVEANE, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

A.RAVEANE S.BLUMÉ

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01068
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;20.01068 ?
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