La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2022 | FRANCE | N°19/05394

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 25 octobre 2022, 19/05394


25/10/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/05394

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLOM

MD/ND



Décision déférée du 26 Novembre 2019

Tribunal de Grande Instance de montauban

19/00149)



M. [R]

















[G] [S]





C/



SA LA MEDICALE DE FRANCE















































>


CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



Madame [G] [S]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Charlotte LEVI de la SELARL LEVI - EGEA - LEVI, avocat au barrea...

25/10/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/05394

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLOM

MD/ND

Décision déférée du 26 Novembre 2019

Tribunal de Grande Instance de montauban

19/00149)

M. [R]

[G] [S]

C/

SA LA MEDICALE DE FRANCE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [G] [S]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Charlotte LEVI de la SELARL LEVI - EGEA - LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

INTIMEE

S.A LA MEDICALE DE FRANCE

Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Axelle VINAS, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [G] [S] est propriétaire d'une maison située [Adresse 3] à [Localité 5] (82).

La toiture de sa maison a été partiellement détruite par une tempête survenue le 31 août 2015 et l'eau de pluie a causé d'importantes dégradations intérieures.

Mme [S] a déclaré le sinistre auprès de son assureur, la société anonyme (Sa) la Médicale de France.

Par courrier du 1er septembre 2015, la Sa La Médicale de France a accusé réception de sa déclaration de sinistre et l'a informé de la désignation d'un expert pour établir la matérialité des dommages.

Le 2 septembre 2015, l'expert amiable M. [O] a rédigé un rapport de reconnaissance de tempête et chiffré à 256 000 euros le coût des mesures conservatoires, du bâtiment, du mobilier ainsi que de la privation de jouissance et a sollicité de la part de Mme [S] l'envoi de documents.

Par courrier du 18 septembre 2015, la Sa La Médicale de France a indiqué à Mme [S] que les circonstances de l'accident faisaient apparaître que sa responsabilité n'était pas engagée et qu'elle disposait de la faculté de choisir en cas de dommage garanti, le réparateur professionnel de son choix avec obligation de demander qu'un expert soit missionné avant d'entreprendre les travaux.

Le 11 janvier 2016, un épisode de vent violent et de pluies a causé de nouveaux dégâts.

Un procès-verbal a été dressé par huissier le 12 janvier 2016 à la demande de Mme [S] pour constater les dégâts.

Mme [S] a déclaré le sinistre auprès de son assureur.

Par courrier du 14 janvier 2016, la Sa La Médicale de France a accusé réception de sa déclaration de sinistre et l'a informé de la désignation d'un expert pour établir la matérialité des dommages.

Par courrier du 27 janvier 2016, la Sa La Médicale de France a informé l'avocat de Mme [S] qu'elle n'avait pas contesté la nécessité de l'indemniser, reconnu le droit à indemnisation de l'assurée indiquant que « il doit toutefois être procédé à un règlement sur la base d'une remise en état à l'identique du bien, à des prix cohérents avec ceux habituellement pratiqués sur le marché de la construction. Jusqu'ici les éléments transmis par le cabinet Tr expertises ne semblaient pas répondre à ces critères. (') Dans l'attente de la nomination de l'expert judiciaire et des opérations d'expertise, nous ne verserons pas l'avance de 100 000 euros demandée par Tr expertises pour commencer les travaux. La procédure en cours suspens pour le moment toute prise d'accord sur les montants en jeu, et aucune réparation ne doit être démarrée avant que l'expert judiciaire ne puisse réaliser ses constats ».

Mme [S] a saisi le juge des référés pour demander la désignation d'un expert judiciaire.

Par une ordonnance de référé du 17 mars 2016, une expertise judiciaire a été confiée à M. [H].

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 20 février 2017.

Un procès-verbal de constat a été établi par huissier le 21 mars 2017 à la demande de Mme [S],

Par acte d'huissier du 13 avril 2017, Mme [S] a saisi le juge des référés d'une demande de condamnation de la Sa La Médicale de France à lui verser une provision.

Par ordonnance du 13 juillet 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Montauban a condamné la Sa La Médicale de France à :

- payer à Mme [S] à titre de provision la somme de 299 133,37 euros toutes taxes comprises à raison des désordres directement consécutifs aux sinistres des 31 août 2015 et 11 janvier 2016,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- aux dépens.

La Sa La Médicale de France s'est acquittée de cette somme le 24 juillet 2017.

Par acte d'huissier du 11 septembre 2017, Mme [S] a fait assigner son assureur devant le tribunal de grande instance de Montauban aux fins de le voir condamner à garantir les sinistres subis.

Par un jugement assorti de l'exécution provisoire du 5 décembre 2017, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Montauban a :

- fixé aux sommes de 1 113 967,05 euros hors taxes et de 72 307,55 euros toutes taxes comprises les dommages indemnisables de Mme [S],

- condamné en conséquence la compagnie la Médicale de France à payer à Mme [S] les sommes de 1 113 967,05 euros hors taxes outre la tva au taux en vigueur au jour du paiement et de 72 307,55 euros toutes taxes comprises, dont à déduire les provisions versées de 40 000 euros et de 299 113,37 euros,

- débouté Mme [S] de ses autres demandes indemnitaires,

- condamné la compagnie la Médicale de France à payer à Mme [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article « 700, 1° » du code de procédure civile,

- condamné la compagnie la Médicale de France aux dépens, y compris les frais de référé et d'expertise judiciaire.

Cette décision a été exécutée le 18 janvier 2018.

Par courrier du 2 février 2018, Mme [S] a demandé à la Sa La Médicale de France de s'acquitter du montant de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des condamnations prononcées par le jugement du 5 décembre 2017.

Par acte du 25 février 2019, Mme [S] a fait pratiquer une saisie-attribution à l'encontre de la société médicale de France entre les mains de la Banque postale pour obtenir paiement de la somme de 245 745, 40 euros en vertu du jugement du 5 décembre 2017.

La saisie a été dénoncée le 28 février 2019.

Par acte du 25 mars 2019, la Sa La Médicale de France a fait assigner Mme [S] devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en contestation de la saisie-attribution pratiquée à son égard, les parties s'opposant sur le taux de tva applicable.

Par jugement du 22 juillet 2019, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a :

- rejeté l'incident de communication,

- déclaré la société Médicale de France recevable en sa contestation de la saisie-attribution pratiquée à son encontre le 25 février 2019 entre les mains de la Banque postale, à la demande de Mme [S],

- rejeté la demande de mainlevée de ladite saisie-attribution,

- limité les effets de la saisie-attribution pratiquée le 25 février 2019 à la demande de Mme [G] [S] entre les mains de la Banque postale au montant de la tva recalculée à 10% des intérêts et frais recalculés à proportion.

-:-:-:-:-:-

Par acte d'huissier de justice du 7 février 2019, Mme [G] [S] a fait assigner la Sa La Médicale de France devant le tribunal de grande instance de Montauban aux fins d'indemnisation complémentaire en raison d'une aggravation du sinistre, d'un préjudice de jouissance et de dommages mobiliers.

Par jugement contradictoire du 26 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Montauban a :

- dit Mme [G] [S] irrecevable en ses demandes relatives à l'indemnisation de la perte de jouissance et des dommages mobiliers,

- débouté Mme [G] [S] de toutes ses autres demandes,

- condamné Mme [G] [S] à payer à la compagnie la Médicale de France la somme de 4 000 euros en application de l'article « 700, 1° » du code de procédure civile,

- condamné Mme [G] [S] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré que l'aggravation de l'état du bâtiment alléguée par Mme [S] n'était pas établie et qu'alors qu'elle était en possession d'une somme suffisante pour entreprendre les travaux nécessaires, Mme [S] n'ayant rien entrepris et devant être considérée comme seule responsable de l'aggravation de l'état du bâtiment qu'elle allègue.

Il a également retenu que la demande d'indemnisation du préjudice jouissance était identique à celle sur laquelle le tribunal avait statué par jugement du 5 décembre 2017, de sorte que la demande se heurte à l'autorité de la chose jugée que sa demande soit fondée sur la faute de la compagnie d'assurances ou l'application des conditions de la police, de même que la demande relative aux dommages au mobilier.

-:-:-:-:-:-

Par déclaration du 17 décembre 2019, Mme [G] [S] a interjeté appel de cette décision en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 septembre 2020, Mme [G] [S], appelante, demande à la cour, au visa de l'article L.215-2 du code des assurances et l'article 480 du code de procédure civile, de :

- réformer la décision entreprise.

- dire qu'elle rapporte la preuve de l'aggravation de l'état de l'immeuble,

- dire que sa demande tendant à la réparation de son trouble de jouissance ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée,

- dire que sa demande tendant à l'indemnisation de la perte de son mobilier ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée,

- condamner, en conséquence, la Médicale de France à lui payer les sommes suivantes :

* Travaux de démolition et de reconstruction dans les termes du jugement du 5 décembre 2017 : 435 952,10 euros hors taxes,

* Augmentés d'une TVA à 20 % : 87 190,42 euros

* Honoraires de maitrise d''uvre : 43 595 euros hors taxes soit 52 314 euros toutes taxes comprises,

* Assurance dommage ouvrage : 37 035 euros hors taxes soit 44 442 euros toutes taxes comprises,

* Au titre de la privation de jouissance (12 x 1 800 euros): 21 600 euros,

* Au titre du mobilier: 20 000 euros,

- débouter la Médicale de France de son appel incident tendant à la voir lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil,

- condamner la Médicale de France à lui payer la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

À l'appui de ses prétentions, l'appelante soutient que :

- en vertu de l'article L.125-2 du code des assurances et de l'article 34 des conditions générales du contrat multirisque habitation conclu avec la Sa La Médicale de France, celle-ci était tenue de verser à Mme [S] l'indemnité définitive dans le délai de trois mois à compter du 20 février 2017, date de dépôt de son rapport par l'expert judiciaire, or l'assureur n'a payé la somme de 849 161,05 euros que le 18 janvier 2018,

- l'état de l'immeuble s'est aggravé en raison du refus de la société La Médicale de France d'exécuter spontanément ses obligations, comme le démontre les photographies produites aux débats, et M. [J] dans son attestation,

- Mme [S] est en droit d'obtenir une indemnisation complémentaire au titre de la perte de loyer pour le second sinistre,

- le jugement a débouté Mme [S] « en l'état » de sa demande d'indemnisation des dommages au mobilier ce qui permet d'introduire une nouvelle instance,

- la Sa La Médicale de France ne démontre pas que l'appel de Mme [S] a dégénéré en abus de droit.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 juin 2020, la Sa la Médicale de France, intimée, demande à la cour, au visa des articles 480 du code de procédure civile et 1240 du code civil, de :

- confirmer le jugement dont appel,

- débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [S] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner Mme [S] à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- Mme [S] a perçu des provisions sans réaliser aucun travaux,

- le litige sur le taux de tva applicable portait sur des sommes dérisoires,

- la Sa Médicale de France n'a commis aucune faute de diligence dans le versement des indemnités ni de faute de gestion dans le versement à titre amiable de l'indemnisation compte tenu de la complexité du sinistre, de l'expertise judiciaire et des désaccords entre les parties,

- Mme [S] ne démontre pas avoir fait réaliser des travaux sur l'immeuble, et l'état de ce dernier ne procède que de la faute de Mme [S],

- l'attestation de M. [J] qui estime qu'une démolition est nécessaire n'a pas de caractère contradictoire,

- les demandes de Mme [S] relatives au préjudice de jouissance et aux dommages au mobilier ont déjà fait l'objet d'une décision,

- s'agissant des dommages au mobilier, il ne s'agit ni d'une action prématurée ni d'une situation évolutive et Mme [S] détenait dès l'origine les pièces non produites,

- l'appel de Mme [S] est abusif dès lors qu'elle ne fournit aucun élément supplémentaire et a relevé appel de manière hasardeuse.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 mars 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 12 avril 2022.

MOTIVATION :

1. Sur la responsabilité de la Sa La Médicale de France au titre de l'aggravation de l'état de l'immeuble :

Mme [S] soutient que son assureur la Sa La Médicale a commis une faute à son égard qui aurait provoqué une aggravation de l'état de son immeuble, dont elle demande réparation.

C'est à celui qui se prétend victime d'établir les conditions d'engagement de la responsabilité civile : une faute, un préjudice et un lien de causalité.

1.1. Mme [S] soutient que la Sa La Médicale a mal géré le sinistre et payé tardivement les indemnités d'assurance.

En application de l'article L. 125-2 du code des assurances, les indemnisations résultant de la garantie catastrophes naturelles doivent être attribuées aux assurés dans un délai de trois mois à compter de la date de remise de l'état estimatif des biens endommagés ou des pertes subies, sans préjudice de dispositions contractuelles plus favorables, ou de la date de publication, lorsque celle-ci est postérieure, de la décision administrative constatant l'état de catastrophe naturelle, et qu'en tout état de cause, une provision sur les indemnités dues au titre de cette garantie doit être versée à l'assuré dans les deux mois qui suivent la date de remise de l'état estimatif des biens endommagés ou des pertes subies, ou la date de publication, lorsque celle-ci est postérieure, de la décision administrative constatant l'état de catastrophe naturelle.

En vertu des conditions générales du contrat d'assurance multirisques habitation, la Sa La Médicale garantit « les dommages matériels directs, ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises. La garantie ne peut être mise en jeu qu'après publication au journal officiel d'un arrêté interministériel ayant constaté l'état de catastrophe naturelle ».

Les conditions générales d'assurance stipulent encore que « nous nous engageons à verser à l'assuré l'indemnité définitive ou le complément d'indemnité en cas de versement d'une avance, diminué du montant des franchises éventuellement applicables :

- dans les 10 jours, sauf pour les garanties catastrophes naturelles et catastrophes technologiques, qui suivent la constitution complète de son dossier ou de la décision judiciaire devenue exécutoire,

- dans les 3 mois pour les garanties catastrophes naturelles et catastrophes technologiques à compter de la date à laquelle a été remis l'état estimatif des dommages ou à la date de publication de l'arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle ou de catastrophe technologique lorsque celle-ci est postérieure ».

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 20 février 2017.

Dans son rapport d'expertise judiciaire déposé le 20 février 2017, l'expert judiciaire a chiffré le montant des travaux imputables aux sinistres du 31 août 2015 et 11 janvier 2016 et à l'absence de réalisation des mesures conservatoires rendues nécessaires à 958 219,97 euros hors taxes en excluant de ce montant les travaux d'amélioration.

Le rapport d'expertise judiciaire correspond à l'état estimatif des dommages, point de départ du délai de trois mois au cours duquel l'assureur est tenu de verser l'indemnité d'assurance.

La Sa La Médicale aurait donc dû verser l'indemnité d'assurance avant le 20 mai 2017 et à tout le moins faire une proposition d'indemnisation à son assuré, ce qu'elle ne démontre pas avoir fait, et lui verser une provision.

Elle n'a procédé au paiement d'une provision de 299 133,37 euros que le 24 juillet 2017, en exécution de l'ordonnance du 13 juillet 2017 rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Montauban et à la somme de 849 161,23 euros complémentaires le 18 janvier 2018 en exécution du jugement rendu le 5 décembre 2017 par le tribunal de grande instance de Montauban. Elle a payé le montant de la taxe sur la valeur ajoutée le 25 février 2019, par saisie-attribution réalisée sur demande de Mme [S]. Or, malgré le désaccord des parties sur le montant de la taxe sur la valeur ajoutée applicable, l'assureur aurait dû verser une somme représentant 10% de sa condamnation prononcée par le jugement rendu le 5 décembre 2017 par le tribunal de grande instance de Montauban, dès lors qu'il s'agissait du montant minimum qu'elle devait payer.

La Sa La Médicale a donc largement dépassé le délai de trois mois prévu à l'article L.125-2 du code des assurances et n'a pas versé l'indemnité d'assurance à laquelle elle était tenue en temps utile.

Sa faute est établie.

1.2. Si la faute de l'assureur est caractérisée en l'espèce, pour engager sa responsabilité, encore faut-il que l'assuré, qui demande des dommages et intérêts à raison du non-respect de ces délais d'indemnisation, démontre avoir subi un préjudice du fait de la carence de l'assureur.

Pour établir l'aggravation de l'état de son bien immobilier, Mme [S] produit des photographies et invite la cour à les comparer avec celles annexées au rapport de M. [H] et de M. [T] ainsi qu'une attestation de M. [J] et un devis de l'entreprise Montoux chiffrant le coût d'une opération de démolition et reconstruction à l'identique.

Cependant, les photographies, non datées, ne permettent pas de prouver l'aggravation de l'état de l'immeuble.

Le document produit par Mme [S] attribué à M. [J] et datée du 3 décembre 2018, ne permet pas de prouver l'aggravation du préjudice dès lors que la carte d'identité de l'architecte n'est pas jointe comme le prescrit l'article 202 du code de procédure civile, et qu'il se contente de simples affirmations non corroborées par des photographies ou une analyse technique.

Le devis de la Sarl Montoux chiffre le coût de la démolition et de la reconstruction à l'identique du bien immobilier de Mme [S] sans établir la nécessité de tels travaux, ni leur imputabilité au retard de paiement des indemnités d'assurance.

En outre, Mme [S] qui a perçu la somme de 299 133,37 euros le 24 juillet 2017 ne démontre pas avoir réalisé de mesures conservatoires sur son bien, alors qu'une telle somme, au regard des devis produits dans le cadre de l'expertise judiciaire, aurait permis de préserver l'immeuble d'une éventuelle aggravation de son état, de sorte que le lien de causalité entre la faute de l'assureur et le préjudice dont Mme [S] se prétend victime n'est pas caractérisé.

Faute de l'établir ainsi que le préjudice dont elle demande réparation, Mme [S] ne peut qu'être déboutée de sa demande en paiement d'une indemnisation complémentaire au titre des travaux de démolition et reconstruction de son bien immobilier et des frais y afférents.

Dès lors, le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montauban sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [S] de sa demande.

2. Sur la demande de réparation du trouble de jouissance :

Aux termes de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Aux termes de l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

Mme [S] soutient que le préjudice de jouissance était contractuellement prévu en cas de sinistre par événement naturel sous la rubrique « Perte d'usage » avec une limitation à l'équivalent d'une année de loyer, ce qu'elle a obtenu, mais qu'elle serait en droit d'obtenir une seconde indemnisation annuelle de perte d'usage au titre du second sinistre puisqu'elle aurait demandé l'indemnisation de sa perte d'usage pour le sinistre du 31 août 2015 bien que son action se fondait sur les deux déclarations de sinistre.

Par le jugement du 5 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Montauban indique, au titre des prétentions et moyens des parties que Mme [S] « fait état de son préjudice de jouissance depuis le 31 août 2015, garanti pour l'équivalent d'une année de loyer et qu'elle entend faire fixer sur la base d'une valeur locative de 1 800 euros par mois, en tenant compte de la durée prévisibles des travaux d'un an, à 45 000 euros à parfaire, compte tenu des fautes de la compagnie d'assurances ».

Ledit jugement a pris en compte tant le sinistre du 31 août 2015 que le sinistre du 11 janvier 2016, dont il a considéré qu'il avait aggravé les désordres antérieurs et provoqué de nouveaux dégâts, pour déterminer l'indemnisation due par l'assureur au titre des différents préjudices.

Il a considéré que « le préjudice de jouissance est contractuellement prévu en cas de sinistre par évènement naturel, sous la rubrique perte d'usage, avec une limitation à l'équivalent d'une année de loyer. Que sur la base d'une valeur locative non discutée de 1800 euros par mois, il est donc dû à Mme [S] (1 800 x 12) 21 600 euros. Que le surplus réclamé ne pourrait être fondé que sur la responsabilité contractuelle de la compagnie d'assurance en raison de sa faute dans la gestion du sinistre qui aurait conduit à prolonger la perte d'usage. Que toutefois, la faute de la compagnie d'assurances n'est pas suffisamment établie ».

En l'espèce, le litige concerne donc les mêmes parties et porte sur le même préjudice de jouissance généré par les sinistres déclarés auprès de la société La Médicale de France.

Le jugement du 5 décembre 2017 ayant alloué une indemnité pour préjudice de jouissance en tenant compte des deux sinistres a donc autorité de la chose jugée.

Le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montauban sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de Mme [S] au titre du préjudice de jouissance.

3. Sur la demande d'indemnisation de la perte du mobilier :

Mme [S] soutient que le jugement l'a débouté « en l'état » de sa demande d'indemnisation des dommages au mobilier, ce qui permettrait d'introduire une nouvelle instance.

Par le jugement du 5 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Montauban indique, au titre des prétentions et moyens des parties, que Mme [S] « fait aussi état des dommages au mobilier garantis pour 75 000 euros ».

Dans la présente procédure d'appel, Mme [S] reconnaît que sa demande est identique à celle présentée devant le tribunal de grande instance de Montauban dans le cadre de la procédure susvisée bien que le montant réclamé soit de 20 000 euros seulement.

Par le jugement du 5 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Montauban a considéré qu' « en cas de sinistre dû à un évènement naturel, le mobilier fait partie des biens garantis, mais avec un plafond limité à 75 000 euros aux conditions particulières de la police. Que cela veut dire que sous réserve de justifier des dégâts, ceux-ci sont garantis jusqu'à ce plafond maximum et non que ce montant serait de droit alloué à l'assuré sans avoir à fournir de justificatifs des dommages. Que Mme [S] ne produit aucun élément objectif et contradictoire relatif aux dégâts au mobilier, le seul inventaire établi par le cabinet TR expertises étant manifestement insuffisant à démontrer la réalité des dommages. Que ce poste d'indemnisation sera donc rejeté ».

En l'espèce le litige concerne donc les mêmes parties et porte sur le même préjudice de perte du mobilier généré par les sinistres déclarés auprès de la société La Médicale de France.

Le jugement du 5 décembre 2017 ayant rejeté la demande d'indemnisation au motif de l'insuffisance de la preuve des dégâts au mobilier a donc autorité de la chose jugée.

Le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montauban sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de Mme [S] au titre des dommages mobiliers.

4. Sur le caractère abusif de la procédure :

L'exercice d'une action en justice est susceptible d'engager la responsabilité des plaideurs en présence d'une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir en justice.

Cependant, ne sont pas caractérisées en l'espèce les circonstances propres à retenir l'existence d'une faute de Mme [S] dans l'exercice de son droit de former appel, la chronologie des faits et procédures engagées ne suffisant pas à rendre l'action abusive, de sorte que la demande doit être rejetée.

5. Sur les dépens et frais irrépétibles :

Succombant, Mme [S] supportera les dépens de première instance ainsi que retenu par le premier juge, et les dépens d'appel.

Elle se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance, telle qu'appréciée justement par le premier juge, ainsi qu'au titre de la procédure d'appel qui sera fixée à hauteur de 1000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans les limites de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montauban.

Et y ajoutant,

Rejette la demande présentée par la Sa La Médicale de France pour procédure abusive.

Condamne Mme [G] [S] aux dépens d'appel.

Condamne Mme [G] [S] à payer à la Sa La Médicale de France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/05394
Date de la décision : 25/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-25;19.05394 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award