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24/10/2022 | FRANCE | N°20/03819

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 24 octobre 2022, 20/03819


24/10/2022





ARRÊT N°



N° RG 20/03819

N° Portalis DBVI-V-B7E-N4OD

JCG / RC



Décision déférée du 04 Novembre 2020

Tribunal de Grande Instance de Toulouse 17/02897

Mme TAVERNIER

















[I] [K]

[W] [E] épouse [K]





C/



S.A.R.L. CELIA CREATION

S.A. QBE EUROPE





























































CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTS



Monsieur [I] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicolas...

24/10/2022

ARRÊT N°

N° RG 20/03819

N° Portalis DBVI-V-B7E-N4OD

JCG / RC

Décision déférée du 04 Novembre 2020

Tribunal de Grande Instance de Toulouse 17/02897

Mme TAVERNIER

[I] [K]

[W] [E] épouse [K]

C/

S.A.R.L. CELIA CREATION

S.A. QBE EUROPE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTS

Monsieur [I] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicolas RAMONDENC de la SELEURL NICOLAS RAMONDENC, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [W] [E] épouse [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicolas RAMONDENC de la SELEURL NICOLAS RAMONDENC, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A.R.L. CELIA CREATION

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Bruno MERLE, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. QBE EUROPE

Commercialement dénommée QBE EUROPE SA/NV et qui vient aux droits et obligations de QBE INSURANCE (Europe) Limited, prise en la personne de ses représentants légaux

Coeur Défense

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie SAINT GENIEST de la SCP SCP FLINT - SAINT GENIEST - GINESTA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 04 Juillet 2022, en audience publique, devant M. DEFIX et J.C. GARRIGUES, magistrats chargés de rapporter l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

-:-:-:-:-

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS

Suivant contrat de construction de maison individuelle en date du 7 février 2014, M. [I] [K] et Mme [W] [E], épouse [K], ont confié à la Sarl Celia Création la construction d'une maison d'habitation sur un terrain leur appartenant à [Localité 2] (31), sis [Adresse 6].

Ils ont souscrit une assurance dommages ouvrage auprès de la société Qbe, également assureur de responsabilité civile décennale du constructeur.

Le maître de l'ouvrage s'est réservé certains travaux, dont le revêtement définitif de la rampe d'accès au garage en sous-sol.

La réception des travaux a été prononcée le 31 juillet 2015, sans réserve.

Sans avoir jamais emménagé dans cet immeuble, M. et Mme [K] l'ont mis en vente à la fin de l'année 2015.

Par courrier en date du 1er février 2016, M. et Mme [K] ont reproché à la Sarl Célia Création la mauvaise conception, tant de l'accès au garage en sous-sol que de celui extérieur, malgré l'intervention d'un architecte dans l'élaboration de ce projet.

Le 16 février 2016, les époux [K] ont régularisé une déclaration de sinistre auprès de l'assureur dommages-ouvrage, mentionnant l'inaccessibilité des deux garages, intérieur et extérieur. Par courrier en date du 22 février 2016, leur a été notifiée la position de non-garantie de l'assureur dommages ouvrage en raison de l'absence de réserve relative à ces désordres apparents au jour de la réception.

M. et Mme [K] ont alors obtenu la désignation de Mme [G], en qualité d'expert judiciaire, par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Toulouse en date du 27 mai 2016, et ce, au contradictoire des sociétés Célia Création et Qbe.

Par ordonnance en date du 30 août 2016, les opérations d'expertise ont été rendues communes aux constructeurs intervenus sur ce chantier et à leurs assureurs, au titre des lots terrassement-VRD, gros-oeuvre et enduiseur.

L'expert a déposé son rapport définitif le 16 janvier 2017.

M. et Mme [K] ont cédé ce bien le 4 avril 2018.

-:-:-:-:-

Par actes d'huissier de justice en date du 28 juillet 2017, M. et Mme [K] ont fait assigner la Sarl Célia Création et la société Qbe, son assureur, devant le tribunal judiciaire de Toulouse, afin d'entendre juger que les désordres litigieux relevaient de la responsabilité civile décennale des constructeurs et qu'ils avaient pour origine une erreur de conception imputable exclusivement à la société Celia Création. En conséquence, les époux [K] demandaient la condamnation de la Sarl Celia Création et de la société Qbe Insurance à leur payer la somme de 133.936 € en indemnisation du préjudice lié à la perte de valeur vénale de leur immeuble et la somme de 20.000 € au titre de leur préjudice moral.

Par jugement contradictoire du 4 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- reçu en son intervention volontaire suivant conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2019, la Sa Qbe Europe commercialement dénommée Qbe Europe Sa/Nv ;

- mis hors de cause de la Sa Qbe Insurance (Europe) Limited ;

- débouté [I] et [W] [K] de l'ensemble de leurs prétentions ;

- condamné [I] et [W] [K] aux dépens, comprenant les frais d'expertise et autorisé la Scp Flint - Saint-Geniest à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision ;

- dit que chacune des parties conserve la charge des frais engagés par elle sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que les désordres dénoncés étaient apparents au jour de la réception et n'avaient fait l'objet d'aucune réserve. De ce fait, M et Mme [K] ont été déboutés de l'ensemble de leurs prétentions.

-:-:-:-:-

Par déclaration du 24 décembre 2020, M. et Mme [K] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il les a déboutés de l'ensemble de leurs prétentions et condamnés aux entiers dépens.

-:-:-:-:-

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 17 juin 2021, M. [I] [K] et Mme [W] [E] épouse [K], appelants, demandent à la cour, au visa de l'article 1792 du code civil, de :

- réformer en totalité la décision entreprise et notamment en ce qu'elle a retenu le caractère apparent lors des opérations de réception des désordres litigieux ;

- dire que les désordres litigieux relèvent de la responsabilité civile décennale des constructeurs;

- dire que les désordres litigieux ont pour origine une erreur de conception imputable exclusivement à la société Célia Création ;

- condamner, en conséquence, in solidum avec son assureur de responsabilité civile décennale, la société Qbe, à leur verser les sommes de :

# 133 936 euros en indemnisation du préjudice lié à la perte de valeur vénale de leur immeuble,

# 20 000 euros, à titre de dommages et intérêts (préjudice moral) ;

- condamner les parties intimées, dans les mêmes conditions, à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

M et Mme [K] exposent qu'ils n'ont jamais emménagé dans la maison qu'ils ont décidé de revendre une fois achevée et qu'ils ont découvert à cette occasion que le garage en sous-sol était inaccessible, demeurant la pente trop importante de la rampe d'accès, et que par ailleurs le garage situé à l'arrière de l'immeuble était d'un accès quasi-impossible.

Sur le caractère apparent ou non des désordres lors de la réception, point essentiel des débats, ils font valoir :

* s'agissant de la rampe d'accès au garage

- que la rampe d'accès a été livrée à l'état brut par le constructeur, de sorte qu'ils n'ont pu la tester pour vérifier qu'elle permettait un accès normal au garage, et que ce n'est qu'après avoir réalisé les finitions qu'ils ont découvert la difficulté ;

- que peu importe que la forte déclivité ait été apparente dans la mesure où elle n'est que la cause du désordre qui esut l'inaccessibilité du garage ;

- que l'impossibilité d'accéder aux places de stationnement dans des conditions normales ne pouvait être décelée par simple constat visuel par un maître de l'ouvrage profane, sans faire d'essai avec un véhicule ;

* s'agissant de l'accès au garage extérieur arrière

- que lors de la réception, le mur séparant leur propriété de celle du voisin, rendant encore plus difficile l'appréciation de l'espace disponible pour manoeuvrer les véhicules, n'avait pas encore été édifié.

Par ailleurs, M et Mme [K] fournissent des explications complètes concernant les responsabilités encourues et les dommages dont ils sollicitent la réparation.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 21 juin 2022, la Sarl Célia Création, intimée, demande à la cour de :

rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées et confirmant le jugement déféré,

- débouter purement et simplement les époux [K] de leurs demandes injustifiées ;

- subsidiairement, 'dire et juger' que Qbe Assurances devra la relever et garantir de toutes condamnations ;

- condamner les époux [K] au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La Sarl Celia Création rappelle qu'elle n'avait pas à sa charge la réalisation de la rampe d'accès au sous-sol, ni dans sa forme définitive, ni dans son profil, ni dans son bétonnage, ces trois éléments étant restés à la charge de M et Mme [K], et qu'elle a uniquement réalisé l'excavation destinée à l'implantation et un accès provisoire qui n'était qu'un accès de chantier pour la bonne réalisation des travaux. Elle estime que M et Mme [K] ne peuvent pas soutenir qu'ils n'ont eu connaissance de l'importance de la rampe d'accès au sous-sol que six mois après la réception des travaux alors que postérieurement à la réalisation du simple accès de chantier, ils ont fait réaliser la rampe d'accès par la Sarl F.T.S sous sa forme actuelle et définitive, et que s'il y a incontestablement une erreur dans la conception de la rampe et le degré de sa pente, elle est imputable à M et Mme [K] ou à l'entreprise missionnée par eux.

S'agissant du garage arrière, elle fait valoir qu'il n'existait pour M et Mme [K] aucun problème d'accès lors de la réception des travaux, qu'un mois après la réception ils ont fait réaliser par la Sarl F.T.S deux gros poteaux d'entrée et des murs maçonnés le long de l'accès sans tenir compte de la configuration des lieux, et que par l'implantation d'une murette qui n'était pas prévue dans les plans, ils ont implicitement accepté la configuration des lieux et un accès difficile.

Elle ajoute que l'accès aux deux garages n'avait pas d'importance pour M et Mme [K] puisque ceux-ci ont refusé la proposition de Celia Création adressée à l'expert le 7 novembre 2017 (annexe 16 du rapport).

A titre subsidiaire, elle conteste le principe et le montant des dommages dont M et Mme [K] réclament la réparation.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 17 mai 2021, la Sa Qbe Europe, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, de :

- juger que les désordres invoqués par M. et Mme [K] étaient apparents à la réception et qu'en tout état de cause, ils ne sont pas de nature décennale ;

- juger que les conditions de la responsabilité civile décennale de la Sarl Celia Création ne sont pas réunies ;

- juger que la garantie dommages ouvrage souscrite auprès d'elle n'est pas mobilisable ;

- juger inapplicables les garanties souscrites par la Sarl Celia Création auprès d'elle, tant au titre des dommages matériels qu'au titre des dommages immatériels ;

- juger que M. et Mme [K] sont infondés en leurs prétentions, injustifiées dans leur principe et leur quantum ;

- juger que la garantie souscrite n'a pas vocation à trouver application s'agissant de la moins-value et du préjudice moral invoqués ;

par voie de conséquence, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- reçu en son intervention volontaire, suivant conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2019, la Sa Qbe Europe commercialement dénommée Qbe Europe SA/NV,

- mis hors de cause la Sa Qbe Insurance (Europe) Limited,

- débouté M. et Mme [K] de l'ensemble de leurs prétentions,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

- condamné M. et Mme [K] aux dépens comprenant les frais d'expertise et autorisé la Scp Flint Saint Geniest à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.

- débouter par conséquent M. et Mme [K] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- rejeter de facto l'appel en garantie formé à titre subsidiaire par la Sarl Celia Création ;

- réformer néanmoins le jugement dont appel en ce qu'il a dit que chacune des parties conserve la charge des frais engagés par elle sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et, statuant à nouveau sur ce point,

- condamner solidairement M. et Mme [K] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en indemnisation des frais irrépétibles exposés en première instance ;

A titre subsidiaire et si par impossible elle était condamnée au paiement d'une quelconque somme,

- faire application des franchises contractuelles telles que prévues dans les conditions particulières de la police souscrite par la Sarl Celia Création auprès d'elle, à savoir :

# garantie obligatoire : 2 000 euros,

# garantie de bon fonctionnement et garantie des dommages immatériels consécutifs : 2 000 euros ;

- juger que les franchises sont opposables à l'assuré (garantie obligatoire) et aux tiers (autres

garanties) ;

- condamner la société Célia Création à lui rembourser le montant de la franchise de 2 000 euros si la garantie RCD était mise en oeuvre ;

- déduire des sommes mises à sa charge la franchise de 2 000 euros sur le volet des dommages immatériels, si par impossible la garantie est jugée applicable ;

En toute hypothèse et y ajoutant,

- condamner solidairement M. et Mme [K] à lui payer une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, au visa de l'article 700 du code de procédure civile;

- les condamner solidairement aux entiers dépens de l'instance d'appel, dont distraction au profit de la Scp Flint Sanson Saint Geniest, avocat, sur ses affirmations de droit.

La Sa Qbe Europe fait observer que l'expert judiciaire a indiqué de manière lapidaire que les désordres existaient à la réception mais n'étaient pas décelables par un non-professionnel sans faire un essai avec un véhicule (page 18), tout en précisant que l'accès impossible au sous-sol garage était visible après construction et que l'accès difficile au garage arrière n'était vraiment apparent qu'en faisant un essai avec une voiture (page 12 du rapport), précisant ainsi que les désordres étaient existants et apparents à la réception.

Elle invoque l'inapplicabilité de la garantie responsabilité civile décennale en raison du caractère apparent des dommages. Elle fait valoir à cet effet que les désordres allégués par M et Mme [K] étaient parfaitement apparents au moment de la réception des travaux, que toute personne normalement diligente qui procède à la réception des travaux de sa maison est en mesure de faire le constat d'une trop importante pente de la rampe d'accès et de l'impossibilité d'accès à un garage, que M et Mme [K] s'étant réservé les travaux de réalisation de la rampe d'accès au sous-sol, ils ont nécessairement apporté une attention toute particulière à l'ouvrage réalisé par le constructeur, qu'en outre la configuration des lieux était telle que le maître de l'ouvrage devait de plus fort redoubler de vigilance.

Elle invoque également l'inapplicabilité de la garantie responsabilité civile décennale en raison de la nature non décennale des ouvrages, faute de répondre au critère de gravité imposé par les textes.

A titre surabondant, elle estime que les demandes indemnitaires de M et Mme [K] sont injustifiées dans leur principe et dans leur quantum.

MOTIFS

M et Mme [K] fondent leurs demandes sur les dispositions de l'article 1792 du code civil aux termes desquelles tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

La garantie décennale n'est pas applicable aux vices apparents n'ayant pas fait l'objet de réserves lors de la réception et aux vices ayant fait l'objet de réserves lors de la réception.

En l'espèce, la réception de l'ouvrage ayant été prononcée sans réserve avec effet à la date du 31 juillet 2015, le point essentiel du litige porte sur le caractère apparent ou non des désordres dénoncés en ces termes par M et Mme [K] suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 1er février 2016 :

' Après de nombreuses visites de ma villa que vous m'avez construite [Adresse 4], et les remarques des futurs acheteurs, les points rédhibitoires qui ne me permettent pas de parfaire cette vente proviennent de la conception du garage en sous-sol et du garage à l'arrière de la maison. En effet, l'inaccessibilité de ces deux parties de la villa fait que dans l'état actuel tous les acheteurs potentiels n'étaient plus acheteurs après leurs visites. Je vous demanderai de venir avec une voiture faire vous-même l'expérience et de trouver la solution à ces deux problèmes (...)'.

Le rapport d'expertise de Mme [G] fournit les éléments d'appréciation suivants :

'Concernant la rampe d'accès au sous-sol, elle a été construite conformément aux plans avec une hauteur entre le niveau du sol et le bas de rampe de 2,50 m et une longueur de 9 m.

Le 1er mètre devant la porte du garage est plat car un regard de reprise des eaux y a été installé, la longueur à considérer est donc de 8m.

La pente effective est de 31 %, ce qui rend ce garage inaccessible avec une voiture. De plus, par rapport à l'entrée sur le terrain le positionnement droit d'une voiture devant la rampe est également impossible' (page 11 du rapport).

'Concernant l'accès au garage arrière, un essai a été réalisé avec une petite voiture (Twingo), cet accès est très difficile et le retour vers la sortie du terrain (portail coulissant), ne peut se faire qu'en marche arrière. Cet accès n'est pas conforme à son usage' (page 11 du rapport).

' L'accès impossible au sous-sol garage est visible après construction.

L'accès difficile au garage arrière n'est vraiment apparent qu'en faisant un essai avec une voiture' (page 12 du rapport).

' Les deux garages sont impropres à leur usage.

C'est une erreur de conception. L'implantation de la maison sur le terrain n'est pas correcte.

Les désordres résultent d'une erreur de conception. Ils existaient à la réception mais n'étaient pas décelables par un non-professionnel sans faire un essai avec un véhicule.

La société Celia Conception est responsable de cette faute de conception' (Page 18 du rapport d'expertise).

Nonobstant les considérations de l'expert sur la caractère apparent des désordres - au demeurant quelque peu contradictoires - qui ne lient pas le premier juge et la cour, il apparaît que les désordres dénoncés par M et Mme [K] étaient apparents au jour de la réception pour un maître de l'ouvrage normalement avisé.

Il ressort en effet de l'examen des pièces versées au débat, notamment du rapport d'expertise, des plans des lieux, du bilan effectué par la société Century 21 pour expliquer l'absence de vente de la maison après 261 jours de mise sur le marché (pièce n° 14 de M et Mme [K]) et du courrier de M et Mme [K] du 1er février 2016 dont le contenu a été rappelé ci-dessus, que si lors de la réception, la rampe d'accès au garage n'était pas achevée, en l'absence de tout revêtement dont la réalisation était demeurée à la charge du maître de l'ouvrage, elle présentait déjà une déclivité très importante ( 31 % à apprécier au regard d'une pente autorisée de 18 %), de nature à attirer l'attention des personnes présentes, même non-professionnelles, et ce sans l'usage d'un véhicule, tout piéton pouvant prendre conscience du caractère abrupt de la pente d'accès au sous-sol. Si l'expert judiciaire a relevé que l'absence de dallage avait rendu plus difficile la visibilité de la pente de la rampe, il apparaît que cette pente, loin de s'analyser comme un simple accès de chantier, prédéterminait la pente finale d'accès au garage en sous-sol et présentait déjà un pourcentage anormalement élevé, les murs de soutènement latéraux ayant déjà été réalisés par la Sarl Celia Creation lors de la réception.

De plus, au-delà de la pente de 31 % retenue par l'expert, la configuration des lieux telle que mise en évidence par les plans du permis de construire (cf. notamment plan reproduit en page 10 des conclusions de M et Mme [K]), justifiait avant que ne soient achevés les travaux de clôture de la propriété, notamment par la pose d'un muret et d'un portail, une particulière vigilance au regard de l'étroitesse du terrain qui ne permettait pas le positionnement droit d'un véhicule devant la rampe. Enfin, dans leur courrier en date du 1er février 2016, M et Mme [K] indiquent que la conception des deux garages avait constitué un point rédhibitoire pour tous les acheteurs potentiels, ce qui confirme le caractère apparent des difficultés d'accès, même sans effectuer un essai avec un véhicule.

S'agissant de l'accès au garage extérieur arrière, il ressort notamment de l'expertise que la difficulté d'accessibilité, dès lors qu'elle impose un retour en marche arrière, résulte de la configuration des lieux et existait en l'état au jour de la réception, l'expert judiciaire soulignant que l'édification ultérieure de la clôture avait eu pour conséquence de réduire de 20 cm la largeur de l'accès et de l'aire de stationnement, mais n'en était pas la cause originelle. Les motifs relatifs à la particulière vigilance qui s'imposait à M et Mme [K] au regard de la configuration des lieux et au caractère apparent de la difficulté d'accès pour tous les acquéreurs potentiels de la maison sont à plus forte raison applicables à ce second désordre. Enfin, le fait que l'accès soit très difficile, même avec un véhicule de petite taille de type Twingo, confirme le caractère apparent du désordre.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a estimé que les désordres dénoncés étaient apparents au jour de la réception et a débouté en conséquence M et Mme [K] de l'ensemble de leurs prétentions.

Le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point.

-:-:-:-:-

M et Mme [K], parties principalement perdantes, doivent supporter les dépens de première instance, ainsi que décidé par le premier juge, et les dépens d'appel, avec application au profit de la Scp Flint Saint-Geniest, avocat qui le demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ils se trouvent redevables d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions définies par le dispositif du présent arrêt au titre de la procédure d'appel, le jugement dont appel devant en revanche être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à ce titre pour des considérations d'équité.

Ils ne peuvent eux-même prétendre à une indemnité sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 4 novembre 2020 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne M et Mme [K] aux dépens d'appel.

Condamne M et Mme [K] à payer à la Sarl Celia Creation la somme de 1500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M et Mme [K] à payer à la Sa Qbe Europe la somme de 1500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute M et Mme [K] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Accorde à la Scp Flint Saint-Geniest, avocat, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/03819
Date de la décision : 24/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-24;20.03819 ?
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