La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2022 | FRANCE | N°20/01353

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 26 septembre 2022, 20/01353


26/09/2022



ARRÊT N°



N° RG 20/01353

N° Portalis DBVI-V-B7E-NSOG

MD/RC



Décision déférée du 13 Mai 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE (18/01793)

Mme TAVERNIER

















[G] [B]

[I] [V]





C/



[Y] [T]

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

SARL JP CHARPENTE

S.A. AVIVA ASSURANCES


























r>

































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTS



Monsieur [G] [B]

[Adresse...

26/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 20/01353

N° Portalis DBVI-V-B7E-NSOG

MD/RC

Décision déférée du 13 Mai 2020 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE (18/01793)

Mme TAVERNIER

[G] [B]

[I] [V]

C/

[Y] [T]

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

SARL JP CHARPENTE

S.A. AVIVA ASSURANCES

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTS

Monsieur [G] [B]

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représenté par Me Dominique JEAY de la SCP JEAY - MARTIN DE LA MOUTTE - JAMES-FOUCHER, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [I] [V]

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représentée par Me Dominique JEAY de la SCP JEAY - MARTIN DE LA MOUTTE - JAMES-FOUCHER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [Y] [T]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Laurent DEPUY de la SELARL SELARL DEPUY AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me Laurent DEPUY de la SELARL SELARL DEPUY AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

SARL JP CHARPENTE

Prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe GOURBAL de la SELARL ACTU AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. AVIVA ASSURANCES

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

******

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

En 2014, M.[G] [B] et Mme [I] [V] ont fait procéder à des travaux de réhabilitation de leur maison d'habitation sise à [Adresse 11], travaux consistant notamment en la réfection de la toiture.

La maîtrise d''uvre de ces travaux a été confiée à M. [Y] [T], architecte, assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (Maf), suivant contrat du 20 septembre 2013.

La société JP Charpente, assurée auprès de la société Aviva assurances, est intervenue pour réaliser la réfection de la toiture, suivant devis du 27 mars 2014 et marché de travaux du 07 avril 2014 pour un montant de 8 500 euros HT.

Les travaux ont été réalisés en 2014, M. [B] et Mme [V] se sont installés dans leur maison courant août 2014.

Aucun procès-verbal de réception n'a été dressé entre les parties.

Dans le courant de l'année 2015, divers désordres sont apparus, s'agissant d'infiltrations au niveau du plafond et des murs de la salle d'eau dépendant du premier étage de l'immeuble.

Ces désordres ont fait l'objet d'investigations particulières par le conseil technique de l'assureur des demandeurs, M. [N] [Y] (Société Sateb). Ces investigations ont été conduites contradictoirement avec M. [T] et la Sa Aviva, selon rapport des 17 mai et 16 juin 2016.

En l'absence de solution amiable, M. [T] et son assureur ayant refusé de supporter partie des travaux de réparation de la toiture, en suite de ces rapports, les consorts [B] - [V] ont saisi le juge des référés du tribunal de Toulouse, lequel a, par ordonnance en date du 29 juin 2017, désigné M. [D], en qualité d'expert judiciaire.

L'expert a déposé son rapport définitif le 19 mars 2018.

Par actes d'huissier de justice en date des 29 et 30 mai 2018, M. [B] et Mme [V] ont fait assigner M. [T], son assureur de la Maf, la Sarl JP Charpente et la Sa Aviva, son assureur, devant la tribunal judiciaire de Toulouse aux fins d'obtenir une indemnisation au titre de travaux de remise en état, le paiement de dommages et intérêts, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par un jugement contradictoire du 13 mai 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- débouté M.[G] [B] et Mme [I] [V] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné M.[G] [B] et Mme [I] [V] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré, à l'analyse du rapport d'expertise, que les travaux réalisés par la Sarl JP Charpente sont entachés de malfaçons dues à une « absence suffisante de pente compte tenu du type de couverture et rendront alors l'ouvrage impropre à sa destination » et ne sont pas en conformité avec la réglementation technique.

En l'absence de procès-verbal de réception des travaux, le juge a considéré qu'une réception tacite de l'ouvrage sans réserve devait être fixée au 31 août 2014. Pour débouter M. [B] et Mme [V] de leur demande, il a retenu que le désordre démontré ne présentait pas le degré de gravité exigé par l'article 1792 du code civil.

******

Par déclaration en date du 11 juin 2020, M. [B] et Mme [V] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- débouté M. [B] et Mme [V] de l'ensemble de leurs demandes,

- les a condamnés aux dépens.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 juillet 2020, M. [G] [B] et Mme [I] [V], appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1231-1 et 1792 et suivants du code civil, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou mal fondées,

- infirmer le jugement dont appel,

Statuant à nouveau,

- condamner in solidum M. [T], la Maf, la société JP Charpente et la société Aviva à leur payer la somme de 11 149, 53 euros avec actualisation pour tenir compte de l'évolution de l'index BT01 depuis le mois de mars 2018 jusqu'au complet paiement au titre des travaux de remise en état, majorée de celles de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel qui incluront les frais du référé du 29 juin 2017 et les honoraires de M. [D], distraction en étant prononcée au profit de Me Jeay, avocat associé, sur son affirmation de droit.

Au soutien de leurs prétentions, M. [B] et Mme [V] exposent que la garantie est due sur le fondement de l'article 1792 du code civil, les désordres relevant de la garantie décennale ayant été constatés au cours d'une expertise amiable au terme de laquelle la société Aviva avait accepté de prendre en charge 40% des dommages, mais la société Maf avait refusé la prise en charge des désordres.

Ils avancent, à titre subsidiaire, que la responsabilité de droit commun de la société JP Chapente et de M. [T] est engagée pour les fautes commises dans la construction.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 octobre 2020, M. [Y] [T] et son assureur la Maf, intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1240, 1241, 1792 et suivants du code civil, des articles L241-1, L 112-6 et L 121-1 du code des assurances, de :

- prononcer leur mise hors de cause,

Subsidiairement,

- condamner la compagnie Aviva et la société JP Charpente à les relever et garantir des condamnations à leur encontre,

Sur les dommages et intérêts,

- rejeter les demandes formées par M. [B] et Mme [V],

En tout état de cause,

- condamner les parties perdantes à leur verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de leurs prétentions, M. [T] et la Maf exposent qu'aucun désordre certain en lien avec le défaut de pente n'est établi. De plus, M. [T], en qualité de maître d''uvre, allègue avoir bien informé les appelants de la pente insuffisante de la toiture.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 4 septembre 2020, la Sarl Jp Charpente, intimée et appelant incident, demande à la cour, au visa de l'article 1792 du code civil, de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a considéré que M. [B] et Mme [V] n'avait pas eu connaissance du défaut de la toiture lors de la réception des travaux ;

- constater que M. [B] et Mme [V] étaient parfaitement informés du défaut de pente touchant la toiture ;

- rejeter les demandes de condamnations formulées à son encontre,

A titre subsidiaire,

Si par extraordinaire, la cour infirmait la décision rendue en première instance,

- condamner la compagnie Aviva à la relever et garantir de toutes les condamnations mises à sa charge ;

En tout état de cause,

- condamner M. [B] et Mme [V] à payer la somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société JP Charpente prétend que la construction n'est pas affectée d'un désordre de nature décennale dans la mesure où, six ans après la réalisation des travaux, aucun désordre rendant l'ouvrage impropre à sa destination n'est apparu.Elle expose également que le défaut de pente de la toiture était connu des maitres de l'ouvrage et constituait un défaut visible. Enfin, elle soutient que sa responsabilité ne peut être engagée sur le fondement de droit commun en l'absence de préjudice, les travaux n'ayant pas occasionné de désordre.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 1 octobre 2020, la Sa Aviva assurances, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1240, 1241, 1792 et suivants du code civil, des articles L.241-1, L.112-6 et L.121-1 du code des assurances, de :

A titre principal,

- retenir que la responsabilité de la société JP Charpente n'est pas engagée,

En conséquence,

- prononcer sa mise hors de cause en tant qu'assureur,

- condamner tout succombant à lui verser la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- limiter la garantie d'Aviva à l'indemnisation des dommages de nature décennale, à l'exclusion du préjudice de jouissance invoqué par les consorts [V] [B],

- autoriser Aviva à opposer sa franchise contractuelle correspondant à 20% du montant des dommages avec un minimum de 1.500 € et un maximum de 7.500 € à :

* l'assurée en cas de condamnation à l'indemnisation de dommages de nature décennale,

* l'assurée et aux tiers, cas de condamnation à l'indemnisation de dommages immatériels.

En cas de condamnation d'Aviva à indemniser les préjudices des consorts [V] [B],

- condamner M. [T] et son assureur, la Maf, tenus in solidum, à la relever et garantir dans la proportion de 60 % des sommes dues,

En toute hypothèse,

- condamner tout succombant au paiement des dépens dont distraction sera faite au profit de la Selas Clamens Conseil, avocats qui est en droit de les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société Aviva soutient que le dommage ne présente pas une gravité suffisante pour mettre en cause la responsabilité de son assuré.

À titre subsidiaire, elle explique ne pas garantir le préjudice de jouissance et que la franchise contractuelle doit être opposable aux autres parties. Enfin, elle souhaite que le partage de responsabilité résultant de l'instruction amiable, à savoir, 60% pour le maître d''uvre et 40% pour la société JP Charpente, soit appliqué.

******

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 avril 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 14 juin 2022.

MOTIVATION :

Sur la demande en paiement des travaux de remise en état de M. [B] et Mme [V]

1. M. [B] et Mme [V] se prévalent à titre principal de la garantie décennale des constructeurs. Ils exposent que les intervenants à la construction ont reconnu leur responsabilité au cours d'une expertise amiable et que de ce fait la garantie décennale leur est acquise pour la mauvaise exécution des travaux de toiture par la société JP Charpente.

La Sarl JP Charpente, la Sa Aviva assurances, M. [T] et la Maf dénient leur garantie en l'absence de tout désordre de nature décennale.

2. Aux termes de l'article 1792 du code civil, « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère. »

Le désordre futur ne peut relever de la garantie décennale que s'il existe au stade actuel, s'il a été dénoncé par un acte interruptif dans le délai de garantie décennale et s'il présente dans le délai de dix ans qui suit la réception le degré de gravité exigé par l'article 1792 précité.

En l'absence de désordre, les défauts de conformité affectant un immeuble n'entrent pas dans le champ d'application de ce texte. Il en va de même des désordres qui ne compromettent pas actuellement la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination.

3. En l'espèce, les désordres initialement constatés par M. [B] et Mme [V] dans leur habitation consistaient en des infiltrations au niveau du plafond de la salle d'eau. Tant l'expertise amiable que l'expertise judiciaire imputent ces désordres à un défaut d'entretien de la toiture par les maîtres de l'ouvrage. Les travaux réalisés par la société JP Charpente sous la maîtrise d''uvre de M. [T] ne présentent pas de lien avec ce dommage. Ces faits ne sont pas contestés par les parties.

4. Pour statuer sur les demandes de M. [B] et Mme [V], le premier juge a, préalablement et en l'absence de réception expresse des travaux, justement décidé de prononcer leur réception sans réserve au 31 août 2014 ; ce point ne fait l'objet d'aucune discussion par les parties en cause d'appel.

5. S'agissant de la non-conformité des travaux de toiture, l'expertise judiciaire a pu relever d'une part, la pose non-conforme d'un isolant mince, mis en 'uvre sans contre-liteaunage et, d'autre part, une pente insuffisante du toit en tuiles romanes. Il est à noter que ces malfaçons n'ont été mises à jour que lors de l'expertise amiable et ne sont pas la cause des infiltrations initialement dénoncées. Ces non-conformités ne sont la cause d'aucun dommage dénoncé par les appelants. De plus, aucun autre désordre de nature décennale n'est par ailleurs invoqué.

À défaut de tels désordres, la demande de M. [B] et Mme [V] fondée sur la garantie décennale ne peut prospérer. La demande de la société JP Charpente qui poursuit l'infirmation du jugement dont appel « en ce qu'il a considéré que M. [B] et Mme [V] n'avait pas eu connaissance du défaut de la toiture lors de la réception des travaux » est sans objet.

6. M. [B] et Mme [V], à titre subsidiaire, fondent leur demande sur la responsabilité de droit commun des intervenants à la construction. Ils soutiennent que la société JP Charpente et M. [T] ont commis des fautes dans l'exécution de leurs missions. S'agissant de la société JP Charpente, elle a sciemment réalisé des travaux non-conformes.

La société JP Charpente poursuit l'infirmation du jugement dont appel « en ce qu'il a considéré que M. [B] et Mme [V] n'avait pas eu connaissance du défaut de la toiture lors de la réception des travaux ».La société JP Charpente poursuit l'infirmation du jugement dont appel « en ce qu'il a considéré que M. [B] et Mme [V] n'avait pas eu connaissance du défaut de la toiture lors de la réception des travaux ». S'agissant de M. [T], en qualité de maître d''uvre, il lui est reproché un mauvais suivi des travaux et une absence d'assistance à la réception des travaux.

La Sarl JP Charpente soutient avoir exécuté des travaux efficaces et qu'en l'absence de dommage, sa responsabilité ne peut être engagée.

La Sa Aviva, assureur de la précédente, expose qu'en application du contrat d'assurance, sa garantie n'est pas due pour les dommages affectant les ouvrages réalisés par l'assurée, ceux-ci faisant l'objet d'une exclusion stipulée à l'article 2 (points 8 et 32) des conditions générales.

M. [T] et la Maf ne présentent spécialement aucun moyen de défense contre cette demande, ne sollicitant que la garantie des condamnations prononcées à leur encontre par la société JP Charpente et son assureur.

7. Aux termes des articles 1134, alinéa 1er et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable à la cause, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » et « le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »

Il résulte de la combinaison de ces textes qu'en l'absence de désordre, le non-respect des normes qui ne sont rendues obligatoires ni par la loi ni par le contrat ne peut donner lieu à une mise en conformité à la charge du constructeur.

8. En l'espèce, il est établi tant par l'expertise amiable que par l'expertise judiciaire que la pente de la toiture en tuile est insuffisante au regard des règles techniques. Cette non-conformité n'est à l'origine d'aucun dommage.

Le respect des règles techniques n'est pas imposé par la loi. Il n'est pas non plus soutenu que ces règles aient été contractualisées par les parties. En conséquence, la non-conformité de la pente du toit ne constitue pas une non-conformité contractuelle ; en l'absence de tout désordre, M. [B] et Mme [V] ne peuvent obtenir la réparation de cette non-conformité.

9. S'agissant de la pose de l'isolant mince, il ressort des rapports d'expertises, tant amiable que judiciaire, que le contre-liteaunage prévu par les règles techniques de pose de ce type d'isolant n'a pas été mis en 'uvre. Le représentant de la société JP Charpente l'a de plus reconnu lors des réunions d'expertise.

Or, il résulte du devis établi par la société JP Charpente qu'il était contractuellement prévu la pose de tasseaux. Le devis indique en ce sens « film sous toiture + contre liteaux ».

Les malfaçons dans la pose de l'isolant mince révèlent une non-conformité contractuelle qui engage la responsabilité de la société JP Charpente.

10. Concernant les fautes imputées à M. [T], il lui est reproché une absence d'assistance à la réception des travaux. Toutefois aucun préjudice en lien avec cette faute n'est allégué.

Il lui est encore reproché un mauvais suivi des travaux. Il ressort du contrat d'architecte que M. [T] était chargé de la maîtrise d''uvre des travaux de rénovation de la maison de M. [B] et Mme [V]. À ce titre, il lui incombait notamment d'assurer la « direction de l'exécution des travaux ». En ne veillant pas à la bonne exécution des travaux décrits au devis de la société JP Charpente, et notamment à la pose des contre-liteaux, M. [T] a commis une faute qui a contribué à la pose non-conforme de l'isolant mince caractérisée par l'absence de mise en oeuvre du contre-liteaux prévus au devis. Sa responsabilité se trouve en conséquence engagée.

11. Il vient d'être jugé que la société Jp Charpente et M. [T] sont responsables des conséquences dommageables résultant de la non-conformité contractuelle lors de la pose de l'isolant mince.

M. [B] et Mme [V] sollicitent la remise en état conforme de la toiture. Ils produisent un devis de la société Tabotta qui a été annexé au rapport de l'expert. Conformément à ce devis, ils sollicitent la somme de 11 149,53 euros. Ce devis, régulièrement communiqué aux débats, a été soumis à la discussion contradictoire des parties et n'a, dans ce cadre, donné lieu à aucune contestation, de sorte qu'il sera fait droit à la demande indemnitaire des appelants.

De même, en l'absence de discussion sur ce point par les intimés, il sera fait droit à la demande d'actualisation du montant du devis sur l'index BT01 depuis le mois de mars 2018 jusqu'au complet paiement au titre des travaux de remise en état.

12. La société JP Charpente demande à être garantie des condamnations prononcées à son encontre par la société Aviva assurances, cette dernière disant n'y être tenue.

Contrairement à la garantie décennale, il ressort de l'article 2 (points 8 et 32) des conditions générales que la police d'assurance ne couvre pas la non-conformité contractuelle de l'ouvrage. La société Aviva assurances ne peut donc être tenue des condamnations mises à la charge de la société JP Charpente.

13. S'agissant de la garantie de M. [T] par la Maf, aucune contestation de cette dernière n'est formulée.

La demande de condamnation in solidum de la société JP Charpente, de M. [T] et de la Maf n'est pas discutée alors que la responsabilité des deux premiers est établie et que la garantie de la dernière à l'égard de son assurée n'est pas contestée.

14. Par infirmation du jugement entrepris, il y a lieu de condamner in solidum la société JP Charpente, M. [T] et la Maf à payer à M. [B] et Mme [V] la somme de 11 149,53 euros avec actualisation sur l'indice BT01 depuis le mois de mars 2018 jusqu'au complet paiement au titre des travaux de remise en état.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. [B] et Mme [V] :

15. M. [B] et Mme [V] sollicitent des dommages et intérêts « en réparation des peines et tracas supportés et troubles de jouissance à venir durant les travaux réparatoires ».

16. Il ne résulte d'aucune pièce du dossier, des éléments concrets de nature à étayer cette demande indemnitaire, étant spécialement relevé que l'expertise judiciaire n'évoque aucun trouble de jouissance en son principe comme en sa durée et ses manifestations pratiques. Cette demande sera rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

17. La société JP Charpente, M. [T] et la Maf, parties perdantes, seront condamnées in solidum au paiement, de première instance et d'appel des dépens en ce compris les dépens de la procédure de référé en faisant droit aux demandes présentées par Maître Jeay et par la Selas Clamens Conseil en leur accordant le bénéfice du droit de recouvrement direct des dépens.

18. Le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 13 mai 2020 sera infirmé en ce qu'il a condamné M. [B] et Mme [V] aux dépens de première instance.

19. M. [B] et Mme [V] sont en droit de réclamer l'indemnisation des frais irrépétibles exposés en appel. La société JP Charpente, M. [T] et la Maf seront condamnés in solidum à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la société Aviva assurances la charge des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

- Sur la demande de la Maf et de M. [T] aux fins de condamnation de M. [T] et de la compagnie Aviva à les relever des condamnations prononcées à leur encontre :

20. Au regard de la mission de l'architecte, de la part causale de sa négligence dans la réalisation non conforme aux prévisions contractuelles et de la part prépondérante de la non confirmité volontairement et unilatéralement décidée par le charpentier, il convient de condamner ce dernier à relever l'architecte et son assureur indemnes à concurrence de 70 % de l'ensemble des condamnations prononcées par le présent arrêt.

Il n'est pas inéquitable de laisser à leur charge définitive les frais non compris dans les dépens qu'elles ont pu exposer à l'occasion de cette procédure. La société JP Charpente, M. [T] et la Maf seront déboutés de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 13 mai 2020 en ce qu'il a débouté M. [G] [B] et Mme [I] [V] de leur demande en réparation fondée sur la responsabilité décennale relativement à la pente de la toiture.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne in solidum la société JP Charpente, M. [Y] [T] et la Maf à payer à M. [G] [B] et Mme [I] [V] la somme de 11 149,53 euros avec actualisation sur l'indice BT01 depuis le mois de mars 2018 jusqu'au complet paiement au titre des travaux de remise en état.

Déboute M. [G] [B] et Mme [I] [V] de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour trouble de jouissance.

Condamne in solidum la société JP Charpente, M. [Y] [T] et la Maf aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les dépens de référé-expertise.

Autorise Maître Jeay et la Selas Clamens Conseil à recouvrer directement contre la Sarl JP Charpente et M. [Y] [T] les frais dont ils ont eu respectivement à faire l'avance sans avoir reçu provision.

Condamne in solidum la société JP Charpente, M. [Y] [T] et la Maf à payer à M. [G] [B] et Mme [I] [V] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Condamne la société JP Charpente à relever M. [Y] [T] et la Maf indemne de l'ensemble des condamnations prononcées à concurrence de 70 %.

Déboute la Sarl JP Charpente, la Sa Aviva, M. [Y] [T] et la Maf de leurs propres demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01353
Date de la décision : 26/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-26;20.01353 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award