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16/09/2022 | FRANCE | N°21/00333

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 16 septembre 2022, 21/00333


16/09/2022



ARRÊT N°2022/372



N° RG 21/00333 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N5XO

FCC/AR



Décision déférée du 07 Décembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Toulouse ( 19/00227)

[U]

















[Z] [X]





C/



S.A.R.L. NOMATTITUDE





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le 16 9 22



à Me Flavie DE MEERLEER

Me Laurent

SOUCAZE-SUBERBIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU SEIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



Madame [Z] [X]

[Adresse 4...

16/09/2022

ARRÊT N°2022/372

N° RG 21/00333 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N5XO

FCC/AR

Décision déférée du 07 Décembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Toulouse ( 19/00227)

[U]

[Z] [X]

C/

S.A.R.L. NOMATTITUDE

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 16 9 22

à Me Flavie DE MEERLEER

Me Laurent

SOUCAZE-SUBERBIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU SEIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [Z] [X]

[Adresse 4] [Localité 2]

Représentée par Me Flavie DE MEERLEER, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant) et par Me Nathalie GARBISON DE MORTILLET, avocat au barreau de MONTPELLIER (plaidant)

INTIMEE

S.A.R.L. NOMATTITUDE

Prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège [Adresse 1] [Localité 3]

Représentée par Me Laurent SOUCAZE-SUBERBIELLE de la SELARL LOYVE AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C.BRISSET, présidente et F. CROISILLE-CABROL,conseillère, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [Z] [X] a été embauchée en qualité de responsable commerciale, statut cadre, par la SARL Nomattitude suivant contrat à durée indéterminée en date du 31 mars 2014 à effet du 1er avril 2014. Il était stipulé une convention de forfait horaire hebdomadaire de 35h à 38h30, soit une variation de 10 % de l'horaire conventionnel.

La relation de travail était soumise à la convention collective nationale dite Syntec.

La SARL Nomattitude a soumis à Mme [X] des avenants à son contrat de travail à effet des 1er avril 2016 et 1er mars 2017, que la salariée a refusé de signer.

Par LRAR du 16 janvier 2017, la SARL Nomattitude a reproché à Mme [X] son comportement dans l'entreprise, ses relations avec sa direction (M. [A]) et ses collègues étant tendues, et lui a demandé d'adopter un comportement constructif.

Par LRAR du 25 janvier 2017, la SARL Nomattitude a notifié à Mme [X] un avertissement, que la salariée a contesté par LRAR du 28 janvier 2017.

Mme [X] a été placée en arrêt maladie à compter du 6 mars 2017.

Le 20 mars 2018, le médecin du travail a déclaré Mme [X] inapte à tous les postes, tout maintien de la salariée dans un emploi étant gravement préjudiciable à sa santé.

Par LRAR du 23 mars 2018, la SARL Nomattitude a notifié à Mme [X] l'impossibilité de la reclasser.

Par LRAR du 28 mars 2018, la SARL Nomattitude a convoqué Mme [X] à un entretien préalable à un éventuel licenciement du 10 avril 2018, puis l'a licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par LRAR du 13 avril 2018. La relation de travail a pris fin au 13 avril 2018. La SARL Nomattitude a versé à Mme [X] une indemnité de licenciement de 7.565€.

Le 12 février 2019, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse en demandant l'annulation de l'avertissement et que le licenciement soit jugé nul ou à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse. Elle a sollicité notamment le paiement de dommages et intérêts pour avertissement nul, d'heures supplémentaires, de l'indemnité pour travail dissimulé, de dommages et intérêts pour déplacements non rémunérés, de l'indemnité compensatrice de préavis, de dommages et intérêts pour perte injustifiée de l'emploi, de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité, ainsi que la délivrance sous astreinte de documents sociaux.

Par jugement du 7 décembre 2020, le conseil de prud'hommes de Toulouse a :

- annulé l'avertissement du 25 janvier 2017,

- condamné la SARL Nomattitude à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

* 2.500 € de dommages et intérêts pour l'avertissement annulé,

* 6.011,32 € bruts d'heures supplémentaires, outre congés payés de 601,13 € bruts,

* 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la délivrance d'un bulletin de paie et de l'attestation Pôle Emploi rectifiés quant aux sommes dues, sans astreinte,

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire autre que de droit,

- rappelé que les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné la SARL Nomattitude aux dépens.

Mme [X] a relevé appel de ce jugement le 18 janvier 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d'appel les chefs critiqués.

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par voie électronique le 20 mai 2022, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [X] demande à la cour de :

- déclarer l'appel régulier en la forme et fondé,

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [X] de ses demandes de dommages et intérêts au titre des trajets excessifs, du travail dissimulé, du licenciement à titre principal nul et à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse et des indemnisations y afférentes (indemnité de préavis outre les congés payés y afférents, dommages et intérêts venant réparer la perte injustifiée de l'emploi, préjudice moral pour harcèlement moral, dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité),

- confirmer le jugement rendu sur les heures supplémentaires, les documents de fin de contrat rectifiés, l'annulation de l'avertissement, les dommages et intérêts afférents, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- annuler l'avertissement,

- juger le licenciement nul, à titre principal, et sans cause réelle et sérieuse, à titre subsidiaire,

- condamner la SARL Nomattitude au paiement des sommes suivantes :

* 2.500 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts au titre de l'annulation de l'avertissement injustifié,

* 6.011,32 € à titre de rappel d'heures supplémentaires outre les congés payés y afférents de 601,13 €,

* 31.693 € nets à titre d'indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire pour travail dissimulé,

* 5.735,66 € à titre de dommages intérêts au titre des déplacements anormaux jamais rémunérés par l'employeur en tant que tels,

* 10.500 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés y afférents de 1.050 €,

* 65.000 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour perte injustifiée de l'emploi,

* 20.000 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral du harcèlement moral,

* 15.000 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité,

* 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la délivrance d'un bulletin de paie et de l'attestation Pôle Emploi rectifiés quant aux sommes dues,

- condamner la SARL Nomattitude aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 mai 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la SARL Nomattitude demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [X] de ses demandes au titre du travail dissimulé, des déplacements, de l'indemnité compensatrice de préavis, de la perte d'emploi, du harcèlement moral et de l'obligation de sécurité,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'intimée au titre de l'avertissement, des heures supplémentaires et de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

- débouter Mme [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner Mme [X] à payer à la SARL Nomattitude la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

1 - Sur l'avertissement :

La lettre d'avertissement était ainsi motivée :

'...chargée de la vente de nos produits auprès d'une clientèle d'entreprises, vous avez falsifié la signature du représentant légal d'une entreprise pour laquelle vous avez vendu une de nos prestations. Suite à nos demandes, vous ne nous avez donné aucune réponse satisfaisante à ce jour.

De plus, il convient de rappeler vos nombreux comportements irrespectueux vis-à-vis du personnel de l'entreprise mais aussi à l'égard de la direction, votre hiérarchie directe. C'est pourquoi nous vous avons envoyé le 16/01/2017 un courrier tentant l'apaisement des relations et permettant une relation contractuelle plus constructive et bénéfique pour l'entreprise.

Mais lors de la réunion commerciale du 23/01/2017, vous réitérez vos comportements irrespectueux dans votre attitude agressive et votre insubordination à l'égard de la direction rendant intolérable aujourd'hui la relation contractuelle.

La persistance de votre comportement montre que vous n'avez pas tenu compte des observations qui vous avaient été faites de vive voix par Monsieur [O] [A] à de multiples reprises mais aussi par courrier.

Ces faits ainsi que la faute constituée par la falsification de documents au sein de l'entreprise nous amènent donc à vous notifier ici un avertissement...'

Mme [X] conteste cet avertissement en estimant que l'employeur a déjà purgé son pouvoir disciplinaire en adressant une lettre de remontrance du 16 janvier 2017, et que les griefs sont imprécis et non établis.

Dans la lettre d'avertissement, la SARL Nomattitude reproche en premier lieu à Mme [X] d'avoir falsifié la signature du représentant légal d'une entreprise cliente. Elle produit des pièces datées du 10 janvier 2017, notamment un bon de commande ; les copies de ces pièces sont peu lisibles mais les parties précisent que la société cliente était la société Nodis 95. Mme [X] nie avoir imité la signature du client sur le bon de commande et le contrat, affirmant que c'est bien l'assistante de la société cliente, Mme [S], qui a signé. Or, dans ses conclusions d'appel, la SARL Nomattitude ne prétend pas que Mme [X] aurait imité cette signature, mais qu'elle a écrit sur le contrat le nom du gérant de la société, M. [Y], alors que c'est Mme [S] qui a signé, de sorte qu'elle a fait signer les documents à une assistante sans pouvoir d'engager la société et qu'elle n'a pas respecté les procédures relatives aux commandes. Néanmoins, les reproches que fait aujourd'hui la SARL Nomattitude ne figuraient pas dans la lettre d'avertissement, de sorte que ce grief ne peut être retenu, sans même qu'il soit besoin de s'interroger sur le caractère disciplinaire ou non du courrier du 16 janvier 2017.

Dans la lettre d'avertissement, la SARL Nomattitude reproche également à Mme [X] son attitude agressive et son insubordination lors de la réunion du 23 janvier 2017. La lettre ne donne aucune précision sur les propos qu'aurait tenus Mme [X], et la SARL Nomattitude ne l'indique pas dans ses conclusions, renvoyant la cour à examiner les attestations qu'elle produit (MM. [G], [D], [L] et [B], Mme [C], [V] et [K]). Or, certains ont été embauchés après le licenciement de Mme [X] et par définition ils ne disent rien sur elle ; quant aux autres, soit ils ne parlent pas non plus d'elle, soit ils restent très vagues, évoquant seulement 'une attitude défiante et peu coopérative' voire 'd'opposition', sans plus de détails, et aucun n'évoque les faits du 23 janvier 2017. Ainsi, ce grief n'est pas non plus fondé.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a annulé l'avertissement ; en revanche, les dommages et intérêts de 2.500 € alloués étant excessifs, ils seront réduits à 500 €.

2 - Sur les heures supplémentaires, les trajets et le travail dissimulé :

Sur les heures supplémentaires et les dommages et intérêts au titre des trajets :

Le contrat de travail stipulait que Mme [X] gérait son temps de travail dans le cadre d'une convention de forfait horaire hebdomadaire assortie d'une limitation annuelle du nombre de jours travaillés, cette convention étant de 35h à 38h30 soit une variation de 10 % de l'horaire conventionnel.

Dans les motifs de ses conclusions, Mme [X] soutient que cette convention lui est inopposable - sans l'indiquer dans son dispositif - faute de respect 'des mentions obligatoires telles que rappelées dans la convention collective Syntec'. Toutefois, Mme [X] était simplement soumise à la modalité 2 de la convention collective avec un forfait horaire hebdomadaires pouvant aller jusqu'à 38h30 dans la limite d'un nombre de jours de travail par an - ce qui explique la mention de 218 jours sur les bulletins de paie. Il ne s'agissait pas d'un forfait jours annuel qui lui est soumis à certaines conditions prévues par la convention collective (entretien annuel sur la charge de travail notamment) ; le forfait horaire hebdomadaire n'était pas soumis à telles conditions, de sorte qu'il était parfaitement valable.

Par suite, Mme [X] peut effectivement se prévaloir d'heures supplémentaires à partir de 38h30 par semaine, sous réserve des règles probatoires prévues par l'article L 3171-4 du code du travail, prévoyant que :

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Par ailleurs, aux termes de l'article L 3121-4, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif ; toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos soit sous forme financière.

Dans ses conclusions, Mme [X] réclame :

- des rappels de salaires pour heures supplémentaires de 6.011,32 € outre congés payés de 601,13 € ;

- des dommages et intérêts de 5.735,66 € pour 'déplacements anormaux'.

Elle verse aux débats :

- des agendas électroniques de mars 2014 à février 2017, mentionnant les rendez-vous ; pour chaque jour, elle y a ajouté de manière manuscrite les horaires de début et de fin de travail et le temps de travail en déduisant la pause méridienne, et elle a mentionné le récapitulatif hebdomadaire du temps de travail ;

- un premier récapitulatif détaillé et chiffré (pièce n° 3), pour la période du 13 avril 2015 au 16 janvier 2017, établi à partir des agendas électroniques, tenant ainsi compte de la prescription de 3 ans compte tenu de la fin du contrat de travail au 13 avril 2018 ; elle réclame un rappel de salaire pour les heures supplémentaires au-delà de 38h30 hebdomadaires et applique les majorations de salaires de 25 % ou 50 % sur une base horaire de 20,99 €, aboutissant à un total de 11.746,98 € ;

- un second récapitulatif détaillé et chiffré (pièce n° 3 bis), pour la même période du 13 avril 2015 au 16 janvier 2017 ; elle prend en compte toutes les heures accomplies au-delà de 35h, déduit de ces heures les temps de trajet entre son domicile et le premier client dépassant le temps normal, et réclame un rappel de salaire pour les heures supplémentaires compte tenu d'une base horaire de 23,07 € soit 6.011,32 €, et des dommages et intérêts au titre des déplacements de 5.735,66 € (11.746,98 € - 6.011,32 €).

Ainsi, Mme [X] fournit des éléments suffisamment précis sur ses horaires de travail pour que la SARL Nomattitude puisse répondre, ce que d'ailleurs fait cette dernière.

La SARL Nomattitude réplique que :

- rien ne permet d'affirmer que les rendez-vous sont seulement ceux de Mme [X] car figurent aussi des éléments concernant M. [H], et donc que les agendas sont les siens ;

- Mme [X] comptabilise des heures supplémentaires même lorsqu'elle n'a que peu de rendez-vous à son agenda ;

- elle compte 8 heures de travail le lundi de Pentêcote 25 mai 2015 qui était chômé ;

- elle note un rendez-vous le 27 mai 2015 à 11h à [Localité 5] alors que son premier passage d'autoroute à [Localité 6] Nord est à 13h59 ;

- elle considère comme du temps de travail effectif ses temps de déplacements ;

- elle organisait librement ses déplacements, or elle l'a fait de manière irrationnelle, sans optimiser ses tournées ;

- Mme [X] qui réclame des dommages et intérêts ne justifie pas de son préjudice.

Or :

- les agendas et les rendez-vous sont bien ceux de Mme [X] car les rendez-vous de M. [H] qui sont d'une autre couleur n'y figurent pas ;

- les heures de travail ne se résument pas aux rendez-vous fixés sur l'agenda ;

- même si le lundi de Pentecôte est chômé, les heures de travail théoriques du lundi doivent être prises en compte pour apprécier l'existence d'heures supplémentaires sur la semaine ;

- la SARL Nomattitude ne justifie pas de l'heure de passage au péage pour le 27 mai 2015 ;

- elle ne verse aux débats aucun contre-décompte horaire sur la période d'avril 2015 à janvier 2017 ;

- Mme [X] justifie qu'elle ne maîtrisait pas l'organisation de ses rendez-vous, qui étaient pris, comme pour ses collègues, par des téléopérateurs, et n'étaient pas modifiables (cf. attestations de Mmes [E] et [T] et de M. [H]), de sorte que l'employeur ne saurait lui reprocher de ne pas avoir mieux optimisé ses temps de trajet ;

- si M. [R] atteste que, lors des réunions commerciales, M. [A] rappelait à tous les salariés l'importance d'optimiser les tournées, pour autant la SARL Nomattitude ne justifie pas avoir, au cours de la relation contractuelle, reproché à Mme [X] une mauvaise organisation ;

- les temps de trajet entre deux clients sont bien du temps de travail ;

- les temps de trajet entre le domicile et le premier client qui excèdent les temps de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail ne sont pas des temps de travail mais ils doivent bien donner lieu à contrepartie, indépendamment de tout débat sur le préjudice ; les parties ne concluent pas sur l'existence d'accords d'entreprise déterminant la contrepartie financière aux temps de trajet anormaux en application de l'article L 3121-8 3e du code du travail ;

- dans son récapitulatif en pièce n° 3 bis, Mme [X] tient bien des compte des déplacements excédant le temps normal ; toutefois, ses calculs sont faux puisqu'elle réclame les heures au-delà de 35h au lieu de 38h30 et déduit, à partir de son récapitulatif en pièce n° 3 sur 38h30 avec un taux horaire de 20,99 € pour 11.746,98 €, des heures de déplacements anormaux sur 35h avec un taux horaire de 23,07 €.

La cour retiendra donc l'existence des heures supplémentaires mais seulement au-delà de 38h30, et sous déduction des temps de trajet anormaux ; les heures supplémentaires accomplies entre 38h30 et 42h seront rémunérées sur la base de 20,99 € plus une majoration de 25 %, et les heures supplémentaires accomplies au-delà de 42h seront rémunérées sur la base de 20,99 € plus une majoration de 50 % ; les heures de trajet anormales donneront lieu à une compensation financière.

Par suite, infirmant le jugement, la cour allouera à Mme [X] les sommes suivantes :

- au titre des heures supplémentaires (66,50 heures supplémentaires majorées à 25 % + 10,50 heures supplémentaires majorées à 50 %) : 2.075,38 € bruts, outre congés payés de 207,54 € bruts ;

- au titre des temps de trajet anormaux (318,50 heures) : compte tenu d'un taux horaire de 20,99 €, la somme de 5.735,66 € demandée n'est pas excessive.

La SARL Nomattitude devra délivrer à Mme [X] un bulletin de paie et une attestation Pôle Emploi conformes à cette condamnation.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

En vertu de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement des formalités de déclaration préalable à l'embauche, ou de délivrance des bulletins de paie, ou de mentionner sur les bulletins de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, ou de se soustraire intentionnellement aux déclarations de salaires et cotisations sociales auprès des organismes de recouvrement des cotisations sociales.

En application de l'article L 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire.

Mme [X] invoque la réalisation des heures supplémentaires qui viennent d'être examinées mais aussi le fait qu'elle aurait commencé à travailler avant le début officiel du contrat de travail au 1er avril 2014, et ce, dès le 12 mars 2014.

S'agissant du début de la relation de travail, Mme [X] verse aux débats :

- des mails dont il ressort que Mme [X] a obtenu son code utilisateur d'accès aux plateformes et son mot de passe le 13 janvier 2014, et que son adresse mail professionnelle était opérationnelle au moins au 19 mars 2014 ;

- son agenda électronique mentionnant des rendez-vous les 12, 13, 17, 18, 19, 20, 21, 24, 25, 26, 27, 28 et 31 mars 2014 ;

- un mail adressé par Mme [P] [J], téléprospectrice, à Mme [X] le 11 mars 2014, lui fixant des rendez-vous chez des clients pour les 12 et 18 mars 2014 ;

- une attestation de Mme [P] [J] affirmant avoir travaillé avec Mme [X] dès le mois de mars 2014.

Mme [X] ajoute qu'en avril 2014, elle a perçu une prime qui était en réalité un salaire déguisé pour mars 2014, qu'elle a égaré son bulletin de paie d'avril 2014 mentionnant cette prime, et que la SARL Nomattitude refuse de le produire.

La SARL Nomattitude nie que Mme [X] ait réalisé une prestation de travail sous sa subordination dès le mois de mars 2014, affirmant qu'il ne s'agissait que d'une 'imprégnation' au sein de l'entreprise, Mme [X] accompagnant M. [A], et que Mme [X] était encore à l'époque salariée d'une autre société, la société Sedimap.

Or, la SARL Nomattitude ne produit aucun élément sur cette 'imprégnation', pas même une attestation de M. [A] ou des pièces sur les rendez-vous prétendus de M. [A], alors que les rendez-vous figuraient bien sur l'agenda de Mme [X] ; de plus, la SARL Nomattitude est muette sur la question de la prime. De son côté, Mme [X] produit son bulletin de paie de la société Sedimap d'avril 2014 dont il ressort qu'elle a quitté cette société au 30 avril 2014 après paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de 3 mois, et que par conséquent en mars 2014, elle était en préavis non exécuté.

La cour estime donc, contrairement au conseil de prud'hommes, que Mme [X] apporte la preuve qu'elle a travaillé pour la SARL Nomattitude sans être déclarée, dès le mois de mars 2014, ce qui suffit à établir l'élément intentionnel de la société.

Mme [X] réclame une indemnité pour travail dissimulé de 31.693 € ce qui correspond à un salaire moyen mensuel de 5.282,17 €. La SARL Nomattitude ne discute pas ce chiffre. L'examen des bulletins de paie des mois de septembre 2016 à février 2017 permet de retenir cette somme.

Infirmant le jugement, la cour condamnera donc l'employeur à une indemnité pour travail dissimulé de 31.693 €.

4 - Sur le licenciement :

Mme [X] conclut :

- à titre principal, à la nullité du licenciement pour harcèlement moral ayant causé l'inaptitude ;

- à titre subsidiaire, à l'absence de cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ayant causé l'inaptitude.

Sur la nullité du licenciement :

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L 1152-2, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L 1152-3 dispose que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces textes est nulle.

En application de l'article L 1154-1, il appartient au salarié qui se prétend victime d'agissements répétés de harcèlement moral d'établir des faits permettant de présumer l'existence d'un tel harcèlement (version antérieure à la loi du 8 août 2016) ou de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un tel harcèlement (version issue de la loi du 8 août 2016). Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [X] fait état des éléments suivants :

* l'accomplissement d'un nombre important d'heures supplémentaires sans repos compensateurs ni respect de l'amplitude horaire :

La cour vient de retenir quelques heures supplémentaires (77 heures sur un peu moins de 2 ans, ce qui reste limité) ; toutefois, les parties ne concluent pas sur un accord d'entreprise définissant le contingent annuel d'heures

supplémentaires, de sorte que le contingent conventionnel de 130 heures par an sera retenu, et, vu le volume limité des heures supplémentaires, ce contingent n'a pas été dépassé ; de plus, Mme [X] n'explicite pas les non-respects d'amplitude horaire, et la cour ne constate aucun non-respect à cet égard.

* la lettre de remontrance du 16 janvier 2017 et la lettre d'avertissement du 25 janvier 2017 :

L'existence de ces deux lettres est avérée.

- le retrait des tâches de responsable commerciale au profit de M. [G], présenté comme un salarié supérieur hiérarchique de Mme [X], l'employeur refusant de rassurer Mme [X] sur son sort puis exerçant des pressions sur elle pour lui faire signer un avenant la déclassant à un poste de commerciale avec baisse de ses commissions :

M. [G] n'était pas salarié de la SARL Nomattitude, mais consultant extérieur à l'entreprise.

Mme [X] verse aux débats les attestations de M. [H] qui affirme que M. [G] leur a été présenté comme 'un directeur à part entière et non comme un simple intervenant', que la direction 'a mis la pression sur l'ensemble du personnel pour qu'il signe un avenant', et que lui-même a été menacé par M. [A] ('sinon c'était la porte'), ainsi que l'attestation de Mme [U] qui affirme que M. [G] était 'directeur commercial externe à l'entreprise' et qu'il lui avait confié qu'il avait pour mission de modifier drastiquement la manière de travailler et les commissionnements et de pousser vers la sortie ceux qui n'étaient pas contents. Il demeure que M. [H] et Mme [U] ne donnent guère de détails sur les pressions subies par les salariés en général et Mme [X] en particulier. Par ailleurs, ils ne disent nullement que M. [G] ou la direction auraient dépouillé Mme [X] de ses attributions ou l'auraient rétrogradée, ni qu'il serait devenu son supérieur hiérarchique alors qu'aux termes du contrat de travail, M. [A] était le supérieur hiérarchique de Mme [X].

Les avenants à effet des 1er avril 2016 et 1er mars 2017 modifiaient le mode de calcul de sa rémunération mais non l'intitulé de son poste. Si l'avenant à effet du 1er mars 2017 n'évoquait plus la mission de recruter, former et animer la force de vente, il demeure que Mme [X] n'a signé aucun de ces avenants, comme c'était son droit, et qu'elle n'établit pas que la SARL Nomattitude aurait mis en oeuvre le contenu de ces avenants malgré son opposition.

Ainsi, ces faits ne sont pas établis.

- les difficultés pour obtenir le règlement de son salaire et des indemnités prévoyance pendant l'arrêt maladie :

Dans ses conclusions, Mme [X] ne détaille pas en quoi aurait consisté le manquement de la SARL Nomattitude à ses obligations de maintien du salaire ou de mise en oeuvre de la prévoyance, et les pièces ne permettent pas de caractériser un tel manquement, la société indiquant au contraire qu'elle reversait sans délai les indemnités prévoyance au titre de la subrogation et qu'il appartenait à la salariée d'adresser à Klesia ses relevés d'indemnités journalières.

- la demande de l'employeur de récupérer le véhicule utilisé par Mme [X], pendant l'arrêt maladie :

Par courrier du 7 avril 2017, alors que l'arrêt maladie ayant débuté le 6 mars 2017 se prolongeait, la SARL Nomattitude a demandé à Mme [X] de restituer le véhicule qu'elle détenait sous 48h, étant noté qu'il ne s'agissait pas d'un véhicule de fonction mais d'un véhicule de service que Mme [X] ne pouvait pas conserver pendant son arrêt maladie.

- la dégradation de son état de santé :

Mme [X] justifie d'un suivi psychologique suite à un syndrome dépressif.

Néanmoins, la psychologue Mme [M] qui n'a rien constaté personnellement sur les conditions de travail de Mme [X] au sein de l'entreprise ne fait que rapporter ses dires.

De plus, le médecin du travail n'a pas été alerté de difficultés liées aux conditions de travail.

Enfin, ce n'est que par courrier du 28 janvier 2017 en réponse à l'avertissement du 25 janvier 2017 que, pour la première fois, Mme [X] a allégué une dégradation de son état de santé imputable à ses conditions de travail.

Ainsi, au titre des faits établis, les courriers des 16 janvier 2017 (recadrage non contesté par la salariée), 25 janvier 2017 (avertissement annulé par la cour) et 7 avril 2017 (restitution du véhicule de service), pris dans leur ensemble et qui ne relèvent que du pouvoir de direction de l'employeur, ne sont pas de nature à laisser supposer un harcèlement moral.

En l'absence de harcèlement moral, le licenciement n'est pas nul, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur le caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement :

En application de l'article L 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il lui incombe d'établir que, dès qu'il a eu connaissance du risque subi par le salarié, il a pris les mesures suffisantes pour y remédier.

Mme [X] se réfère aux faits déjà invoqués à l'appui du harcèlement moral, se plaignant de l'absence de mesure prise par la SARL Nomattitude pour y remédier. Néanmoins, ces faits ne peuvent pas davantage caractériser un non-respect de l'obligation de sécurité, de sorte que le licenciement pour inaptitude est fondé.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a débouté la salariée de ses demandes au titre de la rupture (indemnité compensatrice de préavis, dommages et intérêts pour perte injustifiée de l'emploi, dommages et intérêts pour harcèlement moral et dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité).

5 - Sur le surplus :

La cour n'a pas le pouvoir de déroger aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives au paiement de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et de dire que les indemnités allouées sont nettes comme le demande la salariée.

L'employeur qui perd sur une partie du principal supportera les dépens de première instance et d'appel, ses propres frais irrépétibles de première instance et ceux exposés par la salariée soit 1.200 € en première instance et 2.000 € en appel.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement, sauf sur le quantum des dommages et intérêts pour avertissement annulé et des heures supplémentaires et congés payés afférents, et sauf en ce qu'il a débouté Mme [X] de sa demande au titre des déplacements et de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,

Condamne la SARL Nomattitude à payer à Mme [Z] [X] les sommes suivantes :

- 500 € de dommages et intérêts pour avertissement annulé,

- 2.075,38 € bruts au titre des heures supplémentaires, outre congés payés de 207,54 € bruts,

- 5.735,66 € au titre de la compensation financière des trajets anormaux,

- 31.693 € d'indemnité pour travail dissimulé,

- 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés en appel,

Dit n'y avoir lieu à déroger aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives à la contribution sociale généralisée et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale, pour les indemnités,

Condamne la SARL Nomattitude aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Arielle RAVEANE Catherine BRISSET

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 2
Numéro d'arrêt : 21/00333
Date de la décision : 16/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-16;21.00333 ?
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