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12/09/2022 | FRANCE | N°21/03747

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 12 septembre 2022, 21/03747


12/09/2022





ARRÊT N°



N° RG 21/03747

N° Portalis DBVI-V-B7F-OLF4

MD / RC



Décision déférée du 28 Juillet 2021

Juge de la mise en état d'ALBI

20/01056

Mme [P]

















S.A. ACTE IARD





C/



[O] [U]

S.A.S. FRANCOIS MATERIAUX

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

S.A.R.L. MARIO BOTTAREL ET FILS





























































INFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



S.A. ACTE IARD

Agissant poursuites et di...

12/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 21/03747

N° Portalis DBVI-V-B7F-OLF4

MD / RC

Décision déférée du 28 Juillet 2021

Juge de la mise en état d'ALBI

20/01056

Mme [P]

S.A. ACTE IARD

C/

[O] [U]

S.A.S. FRANCOIS MATERIAUX

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

S.A.R.L. MARIO BOTTAREL ET FILS

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

S.A. ACTE IARD

Agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général en exercice domicilié audit siège

Espace Européen de l'Entreprise

[Adresse 3],

[Localité 9]

Représentée par Me Sylvie FONTANIER de la SCP R.F. RASTOUL-S.FONTANIER-A.COMBAREL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [V] [U]

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. FRANCOIS MATERIAUX

Venant aux droits de la société Rey Matériaux elle-même venue aux droits de la société Nouvelle des établissements Cunnac, représentée par son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Emilie DELHEURE de la SCP MAIGNIAL GROS DELHEURE, avocat au barreau D'ALBI

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Catherine HOULL de la SELARL CATHERINE HOULL & ASSOCIES, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

S.A.R.L. MARIO BOTTAREL ET FILS (SCIERIE DES TROIS VALLEES), Commissaire à l'exécution du plan SELAS EGIDE prise en la personne de Me Yann BRANCO - FERNANDES

CD 117

[Localité 8]

Représentée par Me Anne-caroline VIVEQUAIN de la SELAS JEAN-CLAUDE MARTY, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Mai 2022, en audience publique, devant M. DEFIX et S.. LECLERCQ, magistrats chargés de rapporter l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par , greffier de chambre.

-:-:-:-:-

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [V] [U] est propriétaire d'une maison d'habitation située lieu-dit [Adresse 11] à [Localité 10] (81).

Dans le cadre de la création d'une extension sur cette maison existante, la société Nouvelle des établissements Cunnac, aux droits de laquelle vient la société Rey Matériaux devenue la société François Matériaux, a livré à M. [U], selon facture du 31 janvier 2011, différents matériaux de construction, dont des éléments de la charpente qui supporte la couverture de cet immeuble rénové et étendu.

Par contrat en date du 22 mai 2016, M. [U] a donné à bail à M. et Mme [J] ladite maison d'habitation à compter du 15 juillet 2016, pour un loyer mensuel de 900 euros, charges comprises.

Alerté par ses locataires de nuisances sonores provenant de la mezzanine située dans

l'extension de cette habitation, M. [U] a fait appel à un expert en la personne de M. [E] par ailleurs inscrit sur la liste des expert judiciaires.

Ce dernier a constaté la présence d'insectes xylophages, en l'occurrence des capricornes, dans les pannes de cette extension, qu'il a qualifiées de 'très dégradées" et a considéré que la charpente était infestée à la livraison précisant que les bois de structure n'avaient pas été traités contre les insectes à larve.

Le 24 novembre 2016, par courrier recommandé, M. [U] a alerté son vendeur la société Rey Matériaux de l'infestation de son immeuble.

Par courrier du 23 mai 2017, le conseil de M. [U] a mis en demeure la société Rey Matériaux, d'avoir à régler à ce dernier la somme de 21 326,80 euros correspondant au coût de dépose et repose de l'intégralité de la charpente.

La société Rey Matériaux a procédé à une déclaration de sinistre entre les mains de la compagnie Mma qui a considéré que le volet RC décennale ne pouvait être mobilisé.

La société Rey Matériaux a également procédé à une déclaration de sinistre auprès de la compagnie Acte iard. Cette dernière a mandaté le Cabinet Equad aux fins d'organiser une expertise amiable qui s'est tenue le 8 septembre 2017.

Dans un courrier du 29 septembre 2017, le Cabinet Equad précise qu'il a été constaté

contradictoirement lors de la réunion du 8 septembre 2017 'une infestation des pannes de l'extension de l'habitation (surface d'environ 30 m2) par des capricornes'.

Le Cabinet Equad considère que cette infestation est liée à l'absence de traitement du bois par la société Scierie des Trois vallées laquelle a fourni à la société société Nouvelle des établissements Cunnac devenue la société Rey Matériaux les éléments de la charpente.

Par acte du 15 mai 2018, M. [U] a saisi le président du tribunal de grande instance d'Albi statuant en référé aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire à l'encontre de la société Rey Matériaux et de son assureur la société Acte iard.

Par ordonnance de référé en date du 22 juin 2018, M. [Z] a été désigné en qualité d'expert judiciaire.

Par acte du 5 juin 2018, la compagnie Acte iard a appelé en cause la société Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées), laquelle a fourni à la société Nouvelle des établissements Cunnac devenue Rey Matériaux, le bois de charpente acheté par M. [U], ainsi que son assureur la société Groupama d'Oc.

Par ordonnance de référé du 6 juillet 2018, le Président du tribunal de grande instance d'Albi a rendu communes et opposables aux sociétés mises en cause les opérations d'expertise.

La société Rey Matériaux a fait l'objet d'une radiation du RCS d'Albi, publiée au BODACC le 15 mai 2019.

Par procès-verbal déposé au greffe du tribunal de commerce d'Albi le 21 décembre 2018, les éléments de l'actif et du passif de la société Rey Matériaux ont fait l'objet d'une reprise par son associé unique, la société François Matériaux dans le cadre d'une procédure de transmission universelle de patrimoine.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 27 décembre 2019, par lequel il a confirmé la réalité et la matérialité des désordres dénoncés par M. [U].

En l'absence d'accord amiable M. [U] a saisi, par actes d'huissier des 23, 24, 27 et 28 juillet 2020, le tribunal judiciaire d'Albi pour voir condamner in solidum la société François Matériaux ainsi que les sociétés Acte iard, Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) et Groupama d'Oc à réparer les préjudices subis.

La Sas François Matériaux venant aux droits de la société Rey Matériaux et la Sarl Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) n'ont pas constitué avocat.

M. [U] a sollicité le Juge de la Mise en état pour obtenir la condamnation des défenderesses à verser une provision au titre des travaux de reprise.

La société Acte iard et la Sa Groupama d'Oc ont soulevé une fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'action engagée aux motifs que celle-ci serait forclose ou prescrite.

Par ordonnance réputée contradictoire du 28 juillet 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Albi a :

- dit que l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés est recevable comme non prescrite,

- condamné in solidum la Sas François Matériaux venant aux droits de la société Rey Matériaux venant aux droits de la société Cunnac et de la Sarl Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) à payer M. [U] la somme de 57 830,20 euros à titre de provision pour le remplacement des ouvrages infestés tels que évalués par l'expert judiciaire,

- dit qu'il existe une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de la Sa Acte iard et la Sa Groupama d'Oc à l'égard de leurs assurés,

- débouté M. [U] de sa demande de condamnation in solidum des assureurs à titre provisionnel,

- rejeté le surplus des demandes.

- réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Acte iard et Groupama d'Oc aux dépens de l'incident,

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du 29 septembre 2021 avec injonction de conclure sur le fond pour les défendeurs.

Par déclaration en date du 26 août 2021, la Sa Acte iard a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- jugé l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés recevable comme non prescrite, avec toutes les conséquences s'y attachant,

- écarté l'application de l'article 110-4 du code de commerce au motif qu'il ne s'appliquerait pas « au particulier ou consommateur », et considéré que la prescription quinquennale commence à courir le jour de la découverte de l'ampleur du vice,

- appliqué l'article 2239 du code civil relatif à la suspension du délai de prescription alors que, de jurisprudence constante, ce texte ne s'applique pas aux délais de forclusion.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 novembre 2021, la Sa Acte iard, appelant, demande à la cour, au visa des articles 1641 et 1648 du code civil, de l'article L. 110-4 du code de commerce, des articles 122 et 789 du code de procédure civile et de l'article L. 124-5 du code des assurances, de :

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a dit que l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés est recevable comme non prescrite,

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a condamné in solidum la Sas François Matériaux venant aux droits de la société Rey Matériaux venant aux droits de la société Cunnac et de la Sarl Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) à payer M. [U] la somme de 57 830,20 euros à titre de provision pour le remplacement des ouvrages infestés tels que évalués par l'expert judiciaire,

- confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a :

* dit qu'il existe une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de la Sa Acte iard et la Sa Groupama d'Oc à l'égard de leurs assurés,

* débouté M. [U] de sa demande de condamnation in solidum des assureurs à titre provisionnel,

* rejeté rejeté le surplus des demandes,

Et la cour, statuant à nouveau,

À titre principal,

- prononcer l'irrecevabilité de l'action engagée par M. [U] au motif que celle-ci est frapée de forclusion et prescrite,

- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris ceux supportés lors de la procédure de référé, avec le droit pour la Scp Rastoul Fontanier Combarel de les recouvrer directement par application de l'article 696 dudit code,

À titre subsidiaire,

- débouter M. [U] de sa demande de provision, celle-ci se heurtant à l'existence de contestations sérieuses,

- débouter M. [U] de l'intégralité de ses demandes à son encontre, la garantie de cette dernière n'étant pas mobilisable au vu des dispositions de l'article L. 124-5 du code des assurances et des exclusions de garantie contractuellement prévues,

À titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire elle devrait être condamnée,

- condamner la société Groupama d'Oc à la relever indemne intégralement de toute condamnation, en application des articles 1641 du code civil,

À défaut,

- réduire sa condamnation à des proportions minimes au vu de l'imputabilité des désordres de la société Mario Bottarel et fils,

- réduire les demandes de M. [U] à de plus justes proportions.

Considérant que le vice a été clairement identifié par M. [E] dès le 11 novembre 2016, la société Acte iard a soutenu que c'est à compter de cette date et non à la date de la première réclamation auprès de la société Rey matériaux, retenue par le premier juge, que doit courir le délai de forclusion de deux ans, interrompu par la saisine du juge des référés jusqu'à sa décision du 22 juin 2018, date faisant courir un nouveau délai de deux ans ininterrompu et écoulé avant la saisine du juge du fond, le 24 juillet 2020, l'article 2239 étant inapplicable au délai de forclusion.

La société Acte iard a également soutenu que l'action est également prescrite au regard délai quinquennal édicté par l'article 110-4 du code de commerce ayant couru depuis la livraison du bois à M. [U] en janvie 2011. Elle a estimé que le premier juge a écarté à tort cet article alors qu'il s'applique dans les rapports entre commerçants et non commerçants et a fait partir le délai à compter de la réclamation auprès de la société Rey matériaux alors que par nature ce délai ne peut partir qu'à compter du jour où la prestation commandée a été exécutée.

Subsidiairement, la société Acte iard a opposé la cessation de la garantie à compter du 1er janvier 2016 soit antérieurement à la réclamaton du 24 novembre 2016. Elle a aussi considéré que la responsabilité du fournisseur était engagée dans la mesure où le vice provient originellement de sa prestation de sorte que cette responsabilité de la société Mario Bottarel et Fils doit être fixée à 95 %.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 octobre 2021, M. [V] [U], intimé, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1231-1, 1641 et suivants et 2224 du code civil, l'article 789 du code de procédure civile, l'article L. 124-3 du code des assurances, de :

- confirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a dit que l'action qu'il a engagé sur le fondement des vices cachés est recevable comme non prescrite ;

- infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a condamné in solidum la société François Matériaux venant aux droits de la société Rey Matériaux venant aux droits de la société Cunnac et de la Sarl Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) à lui payer la somme de 57.830,20 euros à titre de provision pour le remplacement des ouvrages infestés tels qu'évalués par l'expert judiciaire ;

- infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a dit qu'il existe une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de Sa Acte iard et Groupama d'Oc à l'égard de leurs assurés et en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de condamnation in solidum des assureurs à titre provisionnel ;

- infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes ;

Par conséquent,

- condamner in solidum les sociétés François Matériaux, Acte iard et Groupama d'Oc à lui verser la somme provisionnelle de '55 830,20 euros TTC indexée à l'indice BT01 au titre de travaux de reprise' ;

- condamner in solidum les sociétés François Matériaux, Acte iard et Groupama d'Oc à lui verser la somme de '2 592 euros TTC au titre du coût de démontage, stockage et remontage des meubles' ;

- condamner in solidum les sociétés François Matériaux, Acte iard et Groupama d'Oc à lui verser la somme de '5 583,02 euros au titre des frais de maîtrise d''uvre évalués à 10 % des travaux de reprise' ;

- condamner in solidum les sociétés François Matériaux, Acte iard et Groupama d'Oc à lui verser la somme de '1 395,75 euros au titre des frais d'une assurance Dommages ouvrage évalués à 2,5 % du coût des travaux de reprise' ;

- débouter les sociétés François Matériaux, Acte iard ,Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées) et Groupama d'Oc de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner in solidum les sociétés François Matériaux, Acte iard et Groupama d'Oc à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sorel.

M. [U] a d'abord considéré que le point de départ de l'action fondée sur la garantie des vices cachés doit être fixé à la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire, seul document lui ayant permis de prendre pleinement conscience de la réalité des désordres, de leurs conséquences et des fautes des intervenants et a ajouté qu'en tout état de cause, la saisine du juge des référés comme le dépôt du rapport d'expertise judiciaire avaient interrompu la prescription biennale, un nouveau délai ayant commencé à courir à compter de cette dernière date. Il a par alleurs soutenu que l'article L. 110-4 du code de commerce ne concerne exclusivement que les recours entre commerçants et non l'action engagée par un consommateur.

Se fondant sur les conclusions de l'expert judiciaire, M. [U] a considéré qu'il incombait à la société Cunnac devenue Rey Matériaux de vérifier que les bois qu'elle vendait étaient durables vis à vis des insectes xylophages et à la scierie des trois vallées de le traiter conformément à la classe d'emploi du bois vendu, et qu'il est dès lors bien fondé à agir en garantie in solidum contre ces deux entreprises et leurs assureurs.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2021, la Sas François Matériaux venant aux droits de la société Rey Matériaux elle-même venue aux droits de la société Nouvelle des établissements Cunnac, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1648, 1641 et suivants du code civil, de l'article L. 110-4 du code de commerce d'infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a dit que l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés est recevable comme non prescrite et en ce qu'elle l'a condamnée in solidum avec la société Mario Bottarel et fils à payer à M. [U] la somme provisionnelle de 57 830,20 euros,

Et statuant à nouveau,

- déclarer irrecevable l'action de M. [U] comme étant forclose et prescrite,

Subsidiairement,

- déclarer malfondée la demande provisionnelle de M. [U] comme se heurtant à une contestation sérieuse,

- débouter M. [U] de toutes demandes contraires ou plus amples,

- condamner M. [U] à lui payer la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Considérant comme la société Acte iard que le vice a été clairement identifié par M. [E] dès le 11 novembre 2016, la société François matériaux a soutenu que c'est à compter de cette date et non à la date de la première réclamation auprès de la société Rey matériaux, retenue par le premier juge, que doit courir le délai de forclusion de deux ans, interrompu par la saisine du juge des référés jusqu'à sa décision du 22 juin 2018, date faisant courir un nouveau délai de deux ans ininterrompu et écoulé avant la saisine du juge du fond à son égard, le 27 juillet 2020, l'article 2239 étant inapplicable au délai de forclusion.

Se fondant par ailleurs sur les dispositions de l'article L. 110-4 du code de commerce qu'elle estime applicable dans les actions opposant les commerçants aux non-commerçants et évoquant le point de départ du délai à la date de la facturation intervenue le 31 janvier 2011, la société François matériaux a considéré que l'action engagée à son endroit par M. [U] était prescrite depuis le 21 janvier 2016.

Elle a enfin opposé l'existence d'une contestation sérieuse tenant au fait que la société Cunnac avait commandé à la Scierie des trois vallées des éléments de charpente Douglas que cette scierie se devait de traiter.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 octobre 2021, la Sarl Mario Bottarel et fils (la Scierie des Trois vallées), intimée, demande à la cour, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, des articles L. 110-4 et L. 622-26 du code de commerce et de l'article 771 du code de procédure civile, d'infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a :

* dit que l'action de M. [U] intentée sur le fondement des vices cachés était non prescrite,

* condamné in solidum les défendeurs à payer la somme de 57 830,20 euros à titre de provision,

Statuant à nouveau, à titre principal, de :

- déclarer irrecevable l'action de M. [U] intentée sur le fondement des vices cachés comme étant forclose et prescrite,

À titre subsidiaire,

- déclarer irrecevable et mal fondée l'action de M. [U] à son encontre en l'absence de déclaration de la créance dont il se prévaut au passif de cette dernière,

- déclarer mal fondée la demande de provision de M. [U] comme se heurtant à une contestation sérieuse,

En tout état de cause,

- condamner tout succombant aux entiers dépens, outre la somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Mario Bottarel et Fils a d'abord opposé la forclusion de l'action acquise dès le 22 juin 2020 en application de l'article 1648 du code civil et la prescription de l'action acquise à compter du 14 janvier 2016, cinq ans après la livraison du bois commandé, et ce sur le fondement de l'article L. 110-4 du code de commerce.

Elle a subsidiairement soulevé l'inopposabilité de l'action à son égard en raison du défaut de déclaration de créance au passif de la procédure ayant abouti au redressement judiciaire par voie de continuation.

Elle a enfin opposé l'existence d'une contestation sérieuse fondée sur la qualité du bois commandé et la traçabilité du bois livré.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 septembre 2021, la compagnie d'assurance Groupama d'Oc, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, des articles 122 et 789 alinéa 6 du code de procédure civile et de l'article L. 110-4 du code de commerce, d'infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré recevable comme non prescrite l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés,

Statuant à nouveau, de :

- déclarer irrecevable l'action engagée par M. [U] sur le fondement des vices cachés comme étant forclose et prescrite,

- condamner tout succombant au règlement au profit de la compagnie Groupama d'Oc de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris ceux du référé et de la procédure de première instance et dire qu'ils pourront être recouvrés directement par Maître Houll de la Selas Atcm conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

La société Groupama d'Oc a également développé les moyens tirés de la forclusion invoquée au visa de l'article 1648 du code civil et de la prescription édictée par l'article L. 110-4 du code de commerce dont le point de départ doit être fixé à la date du 14 janvier 2011 qui est celle de la livraison du bois litigieux par la scierie des trois vallées.

-:-:-:-:-

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 avril 2022. L'affaire a été examinée à l'audience du 9 mai 2022.

MOTIVATION

- sur les fins de non-recevoir soulevées :

1. Selon l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Les sous-acquéreurs sont par ailleurs en droit d'exercer directement à l'encontre du vendeur initial les droits et actions de son vendeur immédiat.

1.1 La connaissance certaine du vice par l'acheteur, marquant le point de départ de ce délai, peut se situer au jour de la notification du rapport d'expertise qu'elle soit judiciaire, amiable ou unilatérale dès lors qu'il est établi à la lecture de ce rapport que l'acquéreur a eu une connaissance complète de l'étendue du vice.

En l'espèce, le rapport établi le 11 novembre 2016 par M. [E] présenté par les fournisseurs et leurs assureurs comme le point de départ du délai pour agir sur le fondement des vices cachés indique : 'Il s'avère que les pannes intermédiaires dans la chambre au rdc et dans celle de la mezzanine sont infestées par des capricornes (Hyoptrupes bajulus). Les sondages dans le garage n'ont rien mis en évidence. Les pannes sont très dégradées (larves prélevées). Ces pannes ont été livrées il y a moins de 2 ans et compte tenu du cycle larvaire de ces insectes, je peux affirmer que les larves étaient présentes à la livraison et ne sont pas le fruit d'une infestation qui serait survenue une fois le bois en oeuvre. Quoi qu'il en soit les bois de structure conformément à la réglementation en vigueur depuis le 1er novembre 2006 doivent être traités contre les insectes à larve xylophage et contre les termites. La présence de ces capricornes suffit à démontrer la responsabilité de votre fournisseur de bois. Je vous invite à le contacter rapidement afin qu'il prenne à ses fait le coût du traitement de la charpente [...]'. L'expert a conseillé à M. [U] de faire établir un devis de remise en état des bois, a évoqué le coût de relogement du locataire pendant la durée des travaux et de ventilation rendue nécessaire par ceux-ci avant la réintégration des lieux et a invité l'acquéreur à produire cet avis à l'appui d'une réclamation contre le vendeur.

Si ce rapport a pris la forme d'un courriel d'une page, celui-ci a été établi par un technicien ayant par ailleurs la qualité d'expert judiciaire, s'étant rendu sur les lieux, ayant effectué des sondages et prélèvements et ayant formulé des conclusions dépouvues d'ambiguïté sur la cause et l'étendue du dommages en joignant des photographies significatives. Des indications ont également été données sur la nature des préjudices en lien de causalité directe avec le vice (traitement, préjudice de jouissance).

La connaissance du vice, dans de telles conditions, n'est pas liée à une vérification contradictoire dans le cadre d'une expertise judiciaire qui n'est que le préalable nécessaire, en référé ou au fond, pour agir en réparation contre la chaîne des fournisseurs du bois mis en cause.

Ce point de départ ne saurait donc être fixé à la date de la réclamation faite par M. [U] à la société Rey matériaux qui lui a vendu le bois litigieux.

1.2 Le délai de deux ans dans lequel doit être intentée l'action résultant de vices rédhibitoires, prévu par l'article 1648 précité, est un délai de forclusion qui n'est pas susceptible de suspension, mais qui, en application de l'article 2242 du code civil, peut être interrompu par une demande en justice jusqu'à l'extinction de l'instance. L'article 2239 du code civil prévoyant que la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à la demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès et ne recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où ladite mesure a été exécuté, est donc inapplicable au délai de forclusion.

En l'espèce, il est constant que M. [U] a interrompu le délai de forclusion par l'assignation en référé-expertise le 5 juin 2018 et que l'ordonnance mettant fin à l'instance de référé date du 6 juillet 2018, faisant courir un nouveau délai de deux ans expirant le 6 juillet 2020. L'expiration de ce délai n'étant pas intervenue entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, durée de l'état d'urgence sanitaire plus un mois, aucune prorogation légale n'étant ainsi possible, il convient de constater que l'action engagée au fond par actes d'huissier les 23, 24, 27 et 28 juillet 2020 par M. [U] à l'endroit de l'ensemble des autres parties à l'instance se trouve prescrite.

Il convient donc d'infirmer intégralement l'ordonnance entreprise qui a déclaré recevable et condamné certaines des parties au paiement d'une provision et de déclarer irrecevable l'action engagée par M. [U] sur le fondement de la garantie des vices cachés.

- sur les dépens et frais irrépétibles :

2. M. [U], partie perdante, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel, la présente décision mettant fin à la procédure.

3. Il n'est nullement inéquitable de laisser à la charge de l'ensemble des autres parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont pu exposer pour la présente procédure tant en première instance qu'en appel. Elles seront déboutées de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Tenu aux dépens, M. [U] ne peut pas, pour sa part, solliciter le paiement à son profit d'une indemnité au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Albi le 28 juillet 2021 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevable l'action engagée par M. [V] [U] en garantie des vices cachés.

Condamne M. [V] [U] aux dépens de première instance et d'appel.

Autorise la Scp Rastoul Fontanier Combarel et Maître Houll de la Selas Atcm , avocats, à recouvrer directement contre M. [V] [U] ceux des dépens dont elles ont eu à faire l'avance sans avoir reçu provision.

Déboute les parties de leurs demandes respectives formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 21/03747
Date de la décision : 12/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-12;21.03747 ?
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